La perdrix chantait à tue-tête chaque matin sur cette terre envahit par les hautes herbes : « Soubalé, Soubalé Souba ni mansaya Qui a jamais vu une chèvre mordre un chien au Manden. Souba ni mansaya. » La perdrix continuait son chant : « Manden, Manden, les Hommes du Manden sont finis. Je n’entends plus que des pas, je ne vois plus d’hommes. Soubalé, Soubalé. Souba ni mansaya. Souba tu portes à l’intérieur de toi des habits de lumièr Mais Souba tu ne le s p ç or29 Souba ce que les vie du • encore une vérité. Souba l’enfance est noire. » utrefois, reste onde que la nuit
Ce matin là Souba ne sait pas pourquoi il avait suivit le vieux Sangoye dans la brousse. Il avait beaucoup d’affection et d’admiration pour ce vieux qui portait une grosse bosse sur son dos. Malgré sa très grande curiosité, quelque chose avait toujours retenu Souba pour demander au vieux Sangoye pourquoi il portait cette énorme bosse sur le dos. Après que la perdrix eu finit de chanter sa chanson le vieux Sangoye se retourna et dit à Souba qui le suivait pas a pas dans les hautes herbes : « Souba tu as
Mais avant de lui donner la clef de la moto, son père lui dit : « Souba fait attention à la moto, généralement quand on tombe d’une moto Ça fait très très mal. » Comme le disent les gens du village, la parole du père et rentré par une oreille et est sortie aussitôt de l’autre. Souba était surtout heureux et fou de joie d’avoir eut enfin sa moto à laquelle il avait rêvé depuis des années Et puis un jour arriva ce qui devait arriver… LA CHUTE La chute Souba se réveilla à l’hôpital après son évanouissement. Papa et maman étaient l? Son père dit à Souba : « Pourquoi tu n’écoute jamais ce qu’on te it ? ? A Souba de répondre : « Je ne sais vraiment pas papa. » Après cet accident Souba avait changé. Il connut pour la première fois de sa vie la peur. renvie de remonter sur sa moto et la peur de chuter. Des années s’étaient OF de sa vie la peur. L’envie de remonter sur sa moto et la peur de chuter. Des années s’étaient écoulées depuis les dernières vacances au village. Il avait maintenant vingt et un ans. Chose bizarre la parole du vieux Sangoye avait poussé dans sa tête comme une haute herbe au milieu de ses innombrables pensées. ? Le jour où tu comprendras le chant des oiseaux, tu deviendras e que tu es lui avait dit le vieux Sangoye un matin. Souba méconnaissable Rien n’allait plus comme d’habitude pour Souba. Il n’aimait plus ce qu’il aimait auparavant. En classe comme avec sa bande, il était très souvent dissipé, comme absent. Il ne voyait pas ce qui se passait autour de lui ; n’entendait pas ce qui se disait autour de lui. Ses notes à récole devenaient catastrophiques. Sa bande ne lui procurait aucune joie. Souba restait des heures entières seul et tentait de comprendre le sens de la parole du vieux Sangoye.
Souba ne mangeait plus beaucoup et commençait à maigrir de façon inquiétante. Son comportement devenait bizarre. Enfin il était devenu méconnaissable pour son entourage. puis vint un beau jour, il décida de dire ceci à son père : « Papa je veux retourner au village pour revoir le vieux Sangoye. Son père ne parût pas surpris par cette demande de son fils. Il lui répondit tout simplement ‘ « Apprêtes tes bagages ; tu iras demain au village » Le matin, quand Souba 3 OF répondit tout simplement : Le matin, quand Souba et le vieux Sangoye se retrouvèrent ? pama Domirlla, ils avaient tous les deux changés de leurs cotés.
Quand Souba se présenta à l’entrée de la case avant même qu’il ‘eût prononcé un mot, le vieux Sangoye lui dit • « Approche mon petit, vient t’asseoir près de moi. » Souba avait remarqué que le vieux Sangoye avait encore plus vieillit. Il était devenu aveugle ; ses cheveux étaient tout blancs. Il ne sortait plus beaucoup de sa case. Ses jambes ne pouvaient plus le porter assez loin. Souba s’est installé sagement auprès du vieux Sangoye sur la natte posée à même le sol au milieu de la case.
Après les salutations d’usage le vieux Sangoye promena sa main droite sur la tête de Souba puis lui dit : « Je vois que tu as grandi » Après il fit appeler son petit-fils Toumani qui vint avec sa kora. Toumani commença à jouer avec sa kora sur le morceau « Banni ». Le vieux Sangoye resta pensif et silencieux pendant un moment puis dit « C’était la première fois de ma vie qu’un enfant me suivait jusqu’à cet endroit – ce fut la raison pour laquelle je t’aie dit ce matin là, la seule parole qul vaille pour le Manden. Je savais que tu allais revenir pour la suite. ? Toumani continuait à jouer de plus belle sur sa kora. Le vieux Sangoye poursuivait : « L’air que tu enten jouer de plus belle sur sa kora. Le vieux Sangoye poursuivait : ? L’air que tu entends là est le début de la parole des Manden. Banni veut dire refuse d’être ce que tu n’es pas. » Le vieux Sangoye ajouta ensuite « Nous sommes assis là sur une terre, la même terre sur laquelle deux amis avaient rhabitude de causer. L’un s’appelait Kaladjoula Sangoye et l’autre Manden Souba. Ily a de cela des centaines de pluies. Entre eux, il y avait toujours cette même kora.
Cet instrument, ce véhicule qui permettait à leurs pensées de voyager et de traverser les âges. Kaladjoula Sangoye et Manden Souba étaient de très grands chasseurs réputés… chasseurs réputés pour leur bravoure. Au cours d’une partie de chasse Manden Souba trouva un instrument qu’il n’avait jamais vu auparavant. Il le donna en cadeau à Kaladjoula Sangoye qui apprit très vite à dompter cet instrument sauvage, à le maîtriser et ? savoir s’en sewir. Cet instrument est fait de vingt et une cordes représentant chacune les 21 paroles que l’homme possède ? l’intérieur de lui.
Chaque parole constitue un âge et chaque âge correspond à un rythme. La kora ne peut être entendu que par les hommes mûrs. La maturité est le sommet de la connaissance de la douleur de la séparation. Il n’y a pas de changement possible sans maturité. La kora est cet instrument qui accom PAGF s OF séparation. Il n’y a pas de changement possible sans maturité. La kora est cet instrument qui accompagne le changement. Elle guide dans l’obscurité de la nuit. Cest la kora qui aide à sauter d’une case de la parole à une autre.
C’est ainsi que l’homme sort de sa nuit pour réaliser ses actes en plein jour. Chez nous au Manden on ne fait pas n’importe quoi ; On ne dit pas n’importe quoi. pas n’importe quoi. Ily a une manière de dire les choses, une manière de faire les choses ; Chaque chose ne peut se faire qu’en sont temps ; le temps lui-même n’est qu’un instant. Le rythme de la kora — Korassen – exprime cela par chaque note. La parole du Manden est quelque chose de très sérieuse, et il faut savoir la manier avec beaucoup de précautions, d’attention.
C’est avec la kora que Kaladjoula Sangoye fit de son ami un Simbo ; un chasseur achevé, un maitre chasseur et c’est ainsi que Kaladjoula Sangoye, grâce à l’exercice habille de son art est devenu un maître de la parole du Manden. Au Manden c’est la parole qui possède le pouvoir de faire et défaire les hommes. Elle constitue une vraie puissance pour les hommes qui savent la manier et pour ceux qui savent l’entendre. De l’amitié de Kaladjoula Sangoye et de Manden Souba est née de très grandes choses qui sont liées au nom du royaume qu’ils habitaient, le Ma habitaient, le Manden.
Avant les deux amis, il n’y avait pas d’empereur du Mandé, il n’y avait pas de griot. Dieu a fait le monde par palr. Sans le lien entre les pairs rien n’est possible sur cette terre. » Mandé kuma mange les ombres qui ne connaissent pas les secrets de la parole Le vieux Sangoye s’arrêta de parler un moment, bu une gorgée d’eau et se mit un morceau de kola dans la bouche puis continua « La parole du Manden ; Mandé kuma mange les ombres qui ne onnaissent pas les secrets de la parole ; c’est Kaladjoula Sangoye qui as apprit à son arm Manden tous les secrets de la parole.
C’est aussi que Simbon apprit à transformer les paroles en actes. » TOUMANI arrêta le jeu de sa kora avec le dernier mot du vieux Sangoye et commença un morceau : « SOUNDJATA FASSA » Le vieux Sangoye resta un moment silencieux, puis tout d’un coup fit éclater un chant de sa voix rauque, sourde, puissante : « Tounya Ièr ah tounyalè (c’est vrai, oui c’est vrai) Manden bangou soumayara (la terre du Mandé s’est assoupie) Il était annoncé le fils du lion et de la buffle. Il était attendu le fils du lion et de la buffle.
Il a été annoncé quarante ans avant par les devins de Dagadiala ; Il a été attendu quarante sept ans par les gens du Manden ? Niani ; (la misère noire) Soundjata fut le plus grand bienfaiteur 7 OF sept ans par les gens du Manden à Niani ; (la misère noire) Soundjata fut le plus grand bienfaiteur du Manden. Quel est donc le prince d’aujourd’hui qui va vouloir égaler et dépasser Soundjata pour faire encore le bonheur et la prospérité du Manden ? » Cette brutale et soudaine irruption du chant du vieux Sangoye s’abattit sur le jeune homme et le foudroya comme un arbre.
Souba eût un long frisson qui lui traversa tout le corps ; tandis que le vieux Sangoye continuait son chant : « Niàna, Niàana Simbo ani tawaleya. Ké mandi deliman ani deliman gnàna. Kéma Souba. Il descendait des trios Souba du Manden. DIARASSOUBA, MAGASSOUBA, DANSOUBA. L’ancêtre fondateur SOMA-DJOBI DAFFE MAGASSOUBA » Ce qui a été dit de tes ancêtres ; c’est ce que je te répète Souba- La vie n’est qu’une répétition éternelle. La vie est infinie ; tu ne peux faire que ton temps. « Tounyalé, ah tounyalé Souba. Tu descends de SOGOSSOGO SIMBO et de SIMBO TALABA.
Djacouma la kabala simbo De KANOU SIMBO, De KANOUGNOGON SIMBO. De KABALAN SIMBO, De LAWALY SIMBO. De BATABALY SIMBO, De MASSALOU SIKOMOU DANNA De KOUBA MAGANA, De KOUTOUBA MAGANA. De MABOURAMA KONATÉ, SIKOMOU DANNA Rien n’a changé depuis que la Terre est Terre ; ce sont les hommes qui ont changés Après cette déclamation du nom des ancêtres de Soundjata et de leurs devises ; le vieux Sangoye plia ses deux jambes I 8 OF nom des ancêtres de Soundjata et de leurs devises ; le vieux Sangoye plia ses deux jambes la droite sur la gauche et pris appui sur son coude.
Avec ses yeux d’aveugles qui irradiait la lumière, et semblait vouloir soulever le toit de la case pour le déposer sur erre, afin de capter une étoile perdu dans le ciel. C’était l’occasion pour Toumani de commencer le morceau « Kelèfaba » (ce qui éteint le feu) ou la deuxième parole du Manden- Le vieux Sangoye après quelques moments revint dans sa position initiale. Ses yeux étaient devenus rouges comme des braises incandescentes puis s’adressa de nouveau à Souba : « Rien n’a changé depuis que la Terre est Terre ; ce sont les hommes qui ont changés ; Alnsi le monde est devenu plus confus.
Personne ne sait plus ce qu’il dit ; personne ne sait plus ce qu’il Les chemins se sont égarés. Si Manden Souba est devenu Djata c’est parce que son ami imait à lui rappeler les hauts faits de ses ancêtres liés à son nom. Kêta. Kêta. (Soulève ton nom à la hauteur de celle de tes ancêtres ; prend ton héritage. ) Cest ainsi que SOUNDJATA s’est forgé ses propres ailes. Quand il est arrivé à réaliser les graines de paroles qui était en lui, à réaliser sa parole, les griots du Manden lui fient porter le nom Kêta.
Il s’est fait un nom propre dans le clan des Konaté. Porter et supporter un nom conduit à un savoir être On ne peut PAGF OF propre dans le clan des Konaté. On ne peut pas devenir ce que l’on est quand on ne sait pas que ‘on possède un nom et en même temps que l’on est possédé par un nom. (Dambé Tiguiya) Porter et supporter un nom conduit à un savoir être, c’est-à dire à adopter un comportement. On ne peut pas devenir ce que l’on est si on n’écoute pas ce qu est dans le nom.
On ne peut pas devenir ce que l’on est si on ne se maîtrise pas. On ne peut pas devenir ce que l’on est si on ne connait pas ses limites. Savoir être, c’est savolr porter et supporter un nom. Mais avant il faut savoir, connaitre les graines qui sont dans la calebasse que ron porte sur la tête. Cest ce savoir que nous les griots du Manden possédons. Cest pourquoi nous pouvons faire et défaire les réputations. Cest nous qui indiquons à chacun sa place et ses limites afin que la paix et la cohésion sociale puisse être maintenu.
Nous tenons cette fonction de Soundjata. La parole du Manden est comme un éléphant que l’on mange morceau par morceau. La parole du Manden est amère comme le jus du caicedrat. C’est le prix de la sagesse, celle qui transforme la parole en acte. La seule vraie sagesse. C’est nous autres griots du Manden qui pouvons alléger ou alourdir le fardeau du nom que chacun porte sur la tête. C’est le poids du fardeau qui bouche les o