UNIVERSITE Paris 1 — Panthéon-Sorbonne Faculté des Sciences Juridiques et Politiques MEMOIRE DE RECHERCHE Discipline : DROIT DES AFFAIRES Mention . DROIT DES AFFAIRES ET DE ‘ECONOMIE 2008-2009 LES FUSIONS INTERNATIONALES DE SOCIETES DANS LES DROITS FRANÇAIS ET oral Sni* to View Présenté par : Ronan MESSAGER Sous la dlrection de Monsieur le Professeur Michel MENJUCQ Agrégé des Facultés de droit Professeur à l’Université de Paris Panthéon-Sorbonne Codirecteur du Centre de recherche Sorbonne-Affaires Remerciements particuliers À Monsieur le professeur Claude LUCAS DE LEYSSAC, directeur du Master 2 Recherche
Droit des affaires et de féconomie, pour m’avoir permis de bénéficier d’enseignements l’apport partiel d’actifs, la fusion de sociétés constitue un mécanisme fortement prisé pour arriver à ces fins. Elle peut se définir comme l’opération par laquelle deux sociétés au moins réunissent leur patrimoine pour ne former qu’une seule et même entité (préexistante ou nouvellement créée)l Ce type d’opération constitue un moyen idéal de « substituer une personne morale unique a deux ou plusieurs entités juridiques préexistantes »2. . Fusion internationale, transfrontalière ou transnationale ? La fusion est dite nternationale dès lors qu’elle dépasse la simple sphère nationale avec au moins deux des sociétés concernées par l’opération qui ont leur siège social dans des
La « fusion transfrontalière » désigne en revanche une fusion réalisée à Pintérieur d’une communauté d’Etats entre deux sociétés au mons relevant de la législation d’Etats membres différents3. Cette expression sera utilisée, dans le présent mémoire, uniquement dans le cadre Article L236-1 alinéa 1 du Code de commerce français : « une ou lusieurs sociétés peuvent, par voie de fusion, transmettre leur patrimoine à une société existante ou ? une nouvelle société qu’elles constituent 2 E.
Paqueriaud et M. -E. Pouzet Les fusions transfrontalières, Mémoire, Université Paris rbonne, PAGF OF d’un Etat membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l’intérieur de la Communauté, si deux d’entre elles au moins relèvent de la législation d’Etats membres différents Y. de fusions entre sociétés relevant de législations d’Etats membres de l’Union européenne différents. 3. Evolution communautaire en matière de fusions transfrontalieres4.
Après un projet de convention sur les fusions transfrontalières, élaboré en 1972, puis la proposition de dixième directive de 1985, tous deux restés lettre morte, les fusions transfrontalières n’ont pu trouver de cadre juridique adéquate qu’à partir de la directive fiscale 90/434 sur les fusions du 23 juillet 19905 et de la directive 2005/56/CE du parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux6.
Entre ces deux directives, seulement quelques fusions transfrontalières ont pu se réaliser en aison de l’existence d’obstacles juridiques tenant entre autre ? l’absence d’homogénéité des systèmes juridiques. Désormais, la directive 2005/56/CE a unifié les dispositions législatives des Etats membres en matière de fusion, levant ainsi les obstacles juridiques. 4. Les fusions internationales hors fusions transfrontalières.
Les obstacles juridiques rencontrés au sein de PIJnion euro éenne sont désormais réglés dans le cadre de fusions PAGF l’impossibilité de mettre en place des conventions internationales relatives aux fusions internationales, il est clair que ces opérations peuvent trouver eur salut dans un espace intégré d’Etats. Toutefois, il ne s’agit pas de leur seul domaine de prédilection. 4 Pour une étude plus précise du sujet, voir M. Menjucq, Droit international et européen des sociétés, Montchrestien, 2ème éd. , 2008, no 314 et s.
Directive 90/434 du 23 juillet 1990, « Directive Fusions JOCE 225/1, 20 août 1990. 6 Directive 2005/56/CE du 26 octobre 2005, JOCE 310/1, 25 novembre 2005. Il a ainsi été soutenu que de telles fusions pouvaient se réaliser en Afrique, dans l’espace OHADA7. Il va en être fait de même dans le cadre du présent mémoire, au sein du Maghreb et en relation vec la France. 5. e Maghreb : « Grand Maghreb » ou « Petit Maghreb b. Le Maghreb est la région d’Afrique du Nord comprise entre la mer Méditerranée, le Sahara et l’Océan Atlantique.
Au sens strict, il regroupait à l’ isie, VAIeérie et le Maroc8. revêt généralement la forme d’une prise de participation au capital d’une société en cours de formation ou existante, soit par voie de souscription à une augmentation de capital, soit par Pacquisition de titres déj? émisll. 7 M. N. Mbaye, Fusions, scissions et apports partiels d’actif transfrontaliers en Afrique, Thèse, Université Paris X Nanterre, 2006. 8 Voir par exemple B. Lewis, Les arabes dans l’histoire, Flammarion, 1993, p. 156 et s.
Voir notamment la création en 1989 de l’Union du Maghreb arabe, qui s’est vidée de sa substance en raison de tensions politiques (différend sur le Sahara Occidental entre le Maroc et FAIgérie, affaire de Lockerbie entre la Libye et les autres pays du Maghreb, affaire de la borne 231 entre la Tunisie et l’Algérie… )- 10 Organisation internationale à vocation régionale, fondée ? l’initiative du président de la République française, Nicolas Sarkozy, le 13 juillet 2008. Voir par exemple la prise de participation de Groupama SA au apital de la Société Tunisienne d’Assurances et de Réassurances en août 2008.
PAGF s OF sociétés relevant d’Etats occidentaux se sont réaliséesl 3. Malgré tout, la rareté des fusions internationales avec les pays du Maghreb ne devrait pas nous empêcher de réfléchir sur les solutions aux problèmes posés par leur réalisation. 8. Même si les fusions internationales ne souffrent pas des mêmes maux dans les trois pays du Maghreb, il faut reconnaître que ‘homogénéité de leur législation, issue de la reprise du droit français, permet d’aborder les principaux obstacles à la éalisation de ces opérations de manière commune.
Contrairement aux Etats membres de l’Union européenne qui possédaient des droits plus ou moins hétérogènes, nul n’est réellement besoin d’élaborer une convention entre les pays du Maghreb afin d’unifier leurs droits. Les obstacles rencontrés par les pays européens, surmontés par la directive 2005/56/CE, le sont également en pratique par les législations maghrébines, tant au regard des conditions préalables à la fusion qu’à celui de sa réalisation pratique.
Néanmoins, un bémol doit être apporté à cette affirmation, dans a mesure où les législations maghrébines demeurent relativement floues sur un certain nombre d’aspects de la fusion 12 Les relations politiques tendues entre ces pays influent sur les relations économiques. 13 6 OF fusions internationales. Dés lors, la question peut se poser de savolr dans quelle mesure les législations maghrébines permettent la réalisation de fusions internationales de sociétés au regard d’obstacles tant internationaux qu’internes, en comparaison avec le droit communautaire et avec leur source d’inspiration, le droit français.
Pour ce faire, il convient de s’intéresser dans un premier temps u dépassement des obstacles préalables aux fusions internationales, sous couvert de l’admission du principe de fusions internationales de sociétés (PARTIE l), avant de s’attacher dans un second temps à la réalisation pratique de ces fusions (PARTIE II). PARTIE : L’ADMISSION DU PRINCIPE DE FUSIONS INTERNATIONALES DE SOCIETES Pour parler d’admission du principe de fusions internationales de sociétés, encore faut-il que les législations des Etats dont elles sont ressortissantes en respectent les conditions préalables.
En effet, de la même manière qu’au sein de l’espace communautaire, antérieurement à la irective no 2005/56/CE, les systèmes juridiques concernés doivent permettent un dépassement d’obstacles tant juridiques (chapitre 1) que fiscaux (chapitre 2) à la réalisation de ces fusions internation 7 OF Nabasque, « Les fusions transfrontalières après la loi na 2008-649 du 3 juillet 2008 Revue des sociétés, 2008, p. 493 ; M. Menjucq, op. cit. , no 313 ; N. Morelli, « Les fusions transfrontalières », Les Petites Affiches, mai 2007, nb 95, p. . Section 1 : L’acceptation d’une fusion internationale Cette acceptation passe par la reconnaissance tant du principe même de la fusion internationale que de ses effets. SI : La reconnaissance du principe même de fusions internationales 1. Reconnaissance de la fusion internationale Condition préliminaire pouvant être considérée comme « la plus élémentaire de toutes »1 5, les Etats dont les sociétés concernées sont ressortissantes doivent accepter le principe même de la fusion internationale.
Dans les trois pays du Maghreb, seule la Tunisie reconnaît expressément le principe de la En effet, l’article 412 du Code des sociétés commerciales tunisien dispose en son alinéa 3 que « la fusion d’une ou plusieurs sociétés étrangères avec une ou plusieurs sociétés tunisiennes oit aboutir à la constitution d’une société dont la majorité du capital doit être détenue par des personnes physiques ou morales tunisiennes Cet article mentionne ains ue la possibilité pour une PAGF 8 OF la fusion dans le code des sociétés commerciales Revue Tunisienne de Droit, 2005, p. 2. [10] Il est à regretter que les législations algériennes et marocaines n’aient pas encore franchi ce cap. Néanmoins, certains auteurs n’en exigent pas autant et ne retiennent comme préalable que l’absence de dispositions ayant pour objet ou pour effet de s’opposer aux fusions transfrontalières dans les systèmes juridiques en causel 7.
A ce titre, et sous réserve des développements ci-après, les législations algériennes et marocaines semblent répondre à cette condition. 2. Reconnaissance des deux types de fusion traditionnels Le principe de fusions internationales de sociétés semble donc acceptable dans les législations des pays du Maghreb. Il convient cependant de s’entendre sur ce que recouvre la notion de « fusion » au sens de ces législations.
La fusion était représentée au début du siècle par une métaphore selon laquelle ce sont « deux sociétés comme deux rivières qui réunissent leurs eaux, l’une gardant sa dénomination et se rossissant de l’autre, ou bien toutes d’eux s’amalgamant pour former une rivière formée des deux eaux, rivière qui dorénavant aura dénominatlon nouvelle Cette représentation renfermait deux formes de fusions : la fusion absorption et la fusion par création de société nouvelle.
Dans le premier cas, la fus dissolution de la ou des des pays du Maghreb dans des termes semblables20. 17 V. notamment N. Morelli, op. cit. , p. 4. 18 J. Copper Royer, De la fusion des sociétés , pans, 1933, p. 101. 19 une nouvelle société qu’elles constituent ». Une différence d’appellation est néanmoins à noter en droit unisien, la doctrine distinguant la « fusion absorption » de la « fuslon réunion » 21. 2 : La reconnaissance des effets de la fusion Parmi les autres conditions préalables à remplir, les législations des sociétés concernées doivent reconnaître le principe de la transmission universelle de patrimoine comme effet de la fusion22. Il n’existe aucune difficulté sur ce point, dans la mesure où les législations des pays du Maghreb ont repris l’article L 236-3-1 du Code de commerce français, disposant : « la fusion entraîne la dissolution sans li uidation des sociétés qui disparaissent et la transm