l’homme a l’envers

l’homme a l’envers

Chemins Nocturnes F RED VARGAS LL »HOMME À ENVERS POLICIER Extrait de la publication Le livre Le mardi, il y eut qua Ventebrune, dans les pe Pierrefort. un loup solitaire ? Ro s sur ses pattes grises ? La B te du Mercantour. Mais au village de Saint-Victor-du-Mant, tous n’y croient pas, à la Bête. Ce n’est pas une Bête. C’est un homme. Un loup-garou. Elle était étendue dans la paille crottée, sur le dos, les bras écartés, la chemise de nuit remontée jusqu’aux genoux. ? la gorge, une blessure avait laissé échapper un flot de sang. À paris, devant son poste, Jean-Baptiste Adamsberg le rêveur et « sylvestre » commissaire de L’Homme aux cercles bleus – guette les nouvelles du Mercantour. Il ferme les yeux. Son enfance pyrénéenne, la voix des vieux… Comme des tisons, mon gars, comme des tisons ça fait, les yeux du loup, la nuit. ? Singularité du style et de l’univers littéraire, et s’intéresse premièrement à la Préhistoire puis choisit d’orienter son parcours sur le Moyen-Âge. Fred Vargas a quasiment créé un genre romanesque : le Rompol. Avec 13 romans à son actif, tous parus aux Éditions Viviane Hamy, elle a été primée ? plusieurs reprises

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notamment pour Pars vite et reviens ard qui se voit récompensé du Grand Prix des Lectrices de ELLE en 2002, du Prix des libraires et du Deutscher Krimipreis (Allemagne).

Le plus célèbre des commissaires vargassiens, Jean-Baptiste Adamsberg, et son acolyte, Adrien Danglard, constituent les personnages récurrents des ouvrages de l’auteur. Dans la même collection Karim misKé Arab jazz antonin Varenne Fakirs (PflX Michel Lebrun – ce Mans 2009) (Prix Sang d’encre -Vienne 2009) (Prix des lecteurs de la collection Points) Le Mur, le Kabyle et le marin Dominique sylvain Baka ! Techno bobo Travestis Strad PAG » 1 loin sur la droite Sans feu ni lieu

L’Homme à l’envers (Grand prix du roman noir de Cognac 2000) (Prix Mystère de la Critique 2000) Pars vite et reviens tard (Prix des libraires 2002) (PflX des Lectrices ELLE 2002) (Prix du meilleur polar francophone 2002) Sous les vents de Neptune Dans les bois éternels Un lieu incertain L’Armée furieuse FreD Vargas / BauD0in Les Quatre Fleuves (Prix ALPH-ART du meilleur scénario, Angoulême 2001) Coule la Seine estelle monBrun Meurtre chez Tante Léonie Meurtre à Petite-Plaisance Meurtre chez Colette (avec Analg Coste) Meurtre à Isla Negra mauD taBachniK Un été pourri La Mort quelque part Le Festin de l’araignée

Gémeaux L’étoile du Temple Philippe Bouin Les Croix de paille La Peste blonde PAGF30F11 publication FRED VARGAS L’HOMME À L’ENVERS VIVIANE HAMY Le mardi, il y eut quatre brebis égorgées à Ventebrune, dans les Alpes. Et le jeudi, neuf à Pierrefort. « Les loups, dit un vieux. Ils descendent sur nous. » L’autre vida son verre, leva la main. « Un loup, Pierrot, un loup. une bête comme t’en as jamais vu. Qui descend sur nous. » Il y avait deux types, allongés dans les broussailles. – Tu te figures pas que tu vas m’apprendre mon boulot ? huchota le premier type – Je me figure rien, répondit son compagnon, un grand ars aux cheveux longs et blonds, qui s’appelait Lawrence. Immobiles et jumelles au polng, les deux hommes observaient un couple de loups. Il était dix heures du matin, le soleil leur cuisait les reins. – Ce loup, c’est Marcus, reprit Lawrence. Il est revenu. L’autre secoua la tête. C’était un homme du pays, petit, brun, un peu buté. Il veillai du Mercantour 11 le souffle du vent. Ils étaient près, trop près, il vaudrait bien mieux reculer mais Lawrence voulait filmer à tout prix.

C’est pour ça qu’il était venu, pour filmer les loups, puis remballer son reportage au Canada. Mais depuis six ois, il différait son retour sous des prétextes obscurs. Pour dire la vérité, le Canadien s’incrustait. Jean Mercier savait pourquoi. Lawrence Donald Johnstone, spécialiste renommé des grizzlis canadiens, était tombé cinglé d’une poignée de loups d’Europe. Et il ne se décldait pas à le dire. De toute façon, le Canadien parlait aussi peu que possible. – Est revenu au printemps, murmura Lawrence. A fondé sa famille.

Elle, je ne la remets pas. – Cest Proserpine, chuchota Jean Mercier, la fille de Janus et Junon, troisieme génération. – Avec Marcus. – Avec Marcus, reconnut enfin Mercier. Et ce qu’il y a e sûr, c’est qu’il y a des louveteaux tout neufs. – Bien. – Très bien. – Combien ? Trop tôt pour dire. Jean Mercier prit quelques notes sur un calepin suspendu à sa ceinture, but à sa gourde, et reprit la position sans faire craquer une brindille. Lawrence posa ses jumelles, s’essuya le visage. Il attira à lui la caméra, cadra sur Marcus, enclencha en souriant.

Il avait passé quinze ans de sa vie parmi les grizzlis, les caribous et les loups du Canada, arpentant seul les immenses réserves, obsewant, notant, filmant, tendant la main, parfois, aux plus vieux de ses compagnons sauvages. Pas récisément des rigolos. Une i s 1 la main, parfois, aux plus vieux de ses compagnons sauvages. Pas précisément des rigolos. Une vieille femelle grizzli, Joan, qui venait vers lui, le front bas, se faire gratter la fourrure. Et Lawrence n’avalt pas imaginé que la pauvre Europe, étriquée, dévastée et domestiquée, ait quoi que ce soit de correct à lui offrir.

Il avait accepté cette mission-reportage dans le Massif du Mercantour avec beaucoup de réticence, histoire de. Et en fin de compte, il s’éternisait dans ce recoin de montagne, il repoussait son retour. En clair, il traînait. Il tra•nait pour les loups d’Europe et leur toison grise et 0 minable, parents pauvres et haletants des bêtes touffues et claires de l’Arctique et qui méritaient, à son idée, toute sa tendresse. II traînait pour les nuées d’insectes, les coulées de sueur, les broussailles carbonisées, la grésillante chaleur des terres méditerranéennes. ? Et attends, t’as pas tout vu lui disait Jean Mercier d’un ton un peu sentencieux, avec cette expression orgueilleuse des habitués, des surcuits, des rescapés de l’aventure solaire. « On n’est qu’en Jun. » Il traînait enfin pour Camille. Ici, ils disaient « s’incruster « C’est pas un reproche, lui avait dit Jean Mercier avec ne certaine gravite, mais mieux vaut que tu le saches : tu t’incrustes. » « Eh bien maintenant, je le sais », avait répondu Lawrence. Lawrence arrêta la caméra, la posa délicatement sur son sac, la couvrit d’une toile blanche.

Le jeune Marcus venait de 6 1 caméra, la posa délicatement sur venait de disparaître vers le nord. – parti chasser avant la grande chaleur, commenta Jean Lawrence s’aspergea le visage, mouilla sa casquette, but une dizaine de gorgées. Bon Dieu, ce soleil. Jamais connu un enfer pareil. Trois louveteaux au moins, murmura Jean – Je cuis, dit Lawrence avec une grimace, en passant la main sur son dos. Attends. Tas pas tout vu. Le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg versa les pâtes dans la passoire, égoutta distraitement, fit passer le tout dans son assiette, fromage, tomate, ça irait comme ça pour ce soir.

Il était rentré tard, suite à l’interrogatoire d’un jeune crétin qui s’était éternisé jusqu’à onze heures. Car Adamsberg était lent, il n’aimait pas brusquer les choses et les gens, tout crétins fussent-ils. Et avant toute chose, il n’aimait pas se brusquer lui-même. La télévision était allumée en sourdine, guerres, guerres et guerres. Il fouilla avec fracas dans le désordre du tiroir a couverts, trouva ne fourchette, et se planta debout devant le poste. loups du Mercantour passent une fais de plus ? l’attaque dans un canton des Alpes-Maritimes jusqu’ici épargné. On évoque cette fois une bête d’une taille exceptionnelle.

Réalité ou légende ? Sur place… Tout doucement, Adamsberg se rapprocha du poste, l’assiette à la main, sur la pointe des pieds, comme pour ne pas effaroucher le commentateur. Un geste de tr PAGF70F11 main, sur la pointe des pieds, comme pour ne pas effaroucher le commentateur. un geste de trop et ce type denfuirait de la télé, sans finir la formidable histoire de oups qu’il venait de commencer. Il monta le son, se recula. Adamsberg aimait les loups, comme on aime ses cauchemars. Toute son enfance pyrénéenne avait été enveloppée des voix des vieux qui racontaient l’épopée des derniers loups de France.

Et quand il parcourait la montagne à la 12 nuit, à neuf ans, quand son père l’envoyait dans les chemins ramasser de l’allume-feu, sans discussion, il croyait voir leurs yeux jaunes le suivre tout au long des sentiers. Comme des tisons, mon gars, comme des tisons ça fait, les yeux du loup, la nuit. Et aujourd’hui, quand il revenait là-bas, dans sa montagne, il eprenait les mêmes chemins, a la nuit. Comme quoi c’est désespérant, l’être humain, ça s’attache à ce qu’il a de pire. Il avait bien entendu dire que quelques loups des Abruzzes avaient repassé les Alpes, il y a de cela quelques années. ne bande d’irresponsables, en quelque sorte. Des ivrognes en goguette. Sympathique incursion, symbolique retour, bienvenue à vous, les trois bêtes pelées des Abruzzes. Salut, camarades. Depuis, il croyait bien que quelques types les maternaient comme un trésor, bien ? l’abri dans les caillasses du Mercantour. Et qu’un agneau leur passait sous la dent de temps à autre. Mais c’était la première fos qu’il en voyait les images. Alors quoi, cette soudaine sauvageri B1 autre. Mais c’était la première fois qu’il en voyait les images.

Alors quoi, cette soudaine sauvagerie, c’était eux, les braves gars des Abruzzes ? Adamsberg, tout en mangeant silencieusement, voyait passer sur l’écran une brebis déchiquetée, un sol ensanglanté, le visage convulsé d’un éleveur, la toison souillée d’une brebis, dépecée dans l’herbe d’un pâturage. La caméra fouillait les blessures avec complaisance et le journaliste aiguisait ses questions, chauffait les brandons de la colere rurale. Mêlées aux prises de vue, des gueules de loups surgissaient sur l’écran, babines relevées, droit sortis d’anciens documentaires, plus balkaniques qu’alpins.

On aurait pu croire que tout l’arrière-pays niçois courbait soudain l’échine sous le souffle de la meute sauvage, tandis que de vieux bergers relevaient de fiers visages pour défier la bête, droit dans les yeux. Comme des tisons, mon gars, comme des tisons. 13 Restaient les faits : une trentaine de loups recensés sur le Massif, sans compter les jeunes égarés, une dizaine peut être, et les chiens errants, à peine moins dangereux. Des centaines d’ovins égorgés au cours de la saison dernière, dans un rayon de dix kilomètres autour du Mercantour. ? Paris, on n’en parlait pas, parce qu’à Paris on se foutait pas mal des histoires de loups et de moutons, et Adamsberg découvrait ces chiffres avec stupeur. Aujourd’hui, deux nouvelles attaques dans le canton d’Auniers relançaient l’affrontement. Un vétérinaire ven nouvelles attaques dans le canton d’Auniers Un vétérinaire venait à l’écran, pondéré, professionnel, le doigt pointé sur une blessure. Non, il n’y avait pas de doute permis, ici l’impact de la carnassière supérieure, a quatrième prémolaire droite, voyez, et ici, devant, la canine droite, voyez là, et ici, et dessous, ici.

Et l’écart entre les deux, voyez C’est la mâchoire d’un grand canidé. – Diriez-vous d’un loup, docteur ? – Ou d’un très grand chien. – Ou d’un très grand loup ? Puis, à nouveau, le visage buté d’un éleveur. Depuis quatre années que ces saloperies de bêtes se remplissaient la panse avec la bénédiction des gens de la capitale, on n’avait jamais vu des blessures pareilles. Jamais. Des crocs comme ma main. Céleveur tendait le bras vers l’horizon, balayait les montagnes. Là-haut, qui rôde. Une bête comme n n’en a jamais vu. Qu’ils rigolent, à Paris, qu’ils rigolent.

Rigoleront moins quand ils la verront. Fasciné, Adamsberg achevait debout son assiette de pâtes froides. Le présentateur enchaîna. Les guerres. Lentement, le commissaire s’assit, posa son assiette par terre. Bon dieu, les loups du Mercantour. Elle avait drôlement grandi, l’innocente petite meute des débuts. Elle étendait son territoire de chasse, canton par canton. Elle débordait hors des Alpes-Maritimes. Et sur cette quaran14 taine de loups, combien attaquaient ? Des bandes ? Des couples ? un solltaire ? Oui, c’était comme ça, dans les his