L’ARCHITECTURE MÉDIÉVALE DANS LES DE MAINS LIBRES PAUL ELUARD ET MAN RAY NOIRCEUR ET ESPÉRANCE l. INTRODUCTION L’architecture, et l’espace urbain en général, est relativement absent des Mains libr rues, peu d’immeubl m PACE 1 or7 naturelles à perte de e. Snipe to View peut distinguer deux contemporaine, qui f s étendues e architecture modernité ; et une architecture medievale, dont font partie châteaux, tours et murailles.
On distingue six diptyques poèmes / dessins évoquant l’architecture médiévale : « Château abandonné » à la page 19 « Les Tours du silence » à la page 38 « Le Château d’IP’, à la page 96 onvoient : la noirceur, et l’espérance. 1. Le fantastique a. Définition du registre fantastique Le fantastique est un registre littéraire : c’est-à-dire que ce n’est pas un genre. Il peut aussi bien y avoir des romans, de la poésie, du théâtre, etc. Fantastique.
Le fantastique se définit par l’intrusion, dans un cadre réaliste, d’un détail surnaturel, mais qui peut ne pas nous apparaître d’emblée comme surnaturel. Cest-à-dire qu’il existe, selon la définition que Todorov en fait, un doute : est-ce que cet élément est réel ? Est-ce qu’il est surnaturel ? b. Le fantastique dans les diptyques évoquant des hâteaux Dans les parties des
Ces ombres entraînent un doute : effectivement, elles ne pourraient être que de simples ombres.. Mais d’autres détails (l’absence de cheveux malgré les courbes féminines, les mouvements endiablés qu’elles paraissent former sur les parois de « Les Tours du silence », leur disproportion également) nous font pencher vers l’hypothèse fantastique. Que seraient alors ces ombres ? c. Le lien entre fantastique et noirceur Evidemment, nous n’avons pas de réponse à apporter quant ? l’identité précise des ombres sur les murs – mais leur identité surnaturelle est plutôt plausible.
Par ailleurs, leurs déhanchés vi l’illustration « Les Tours du silence », donnent une aura inquiétante à ces personnages, à l’instar des créatures non-identifiées du dessin « Au Bal Tabarin’ Le fantastique évoqué, en lien avec les châteaux, est donc lié ? une certaine noirceur. 2. Le merveilleux Cependant, le registre merveilleux est également présent, et ses connotations sont plutôt positives. a. Définition du merveilleux. et différence avec le antastique Le merveilleux est un registre, comme le fantastique, qui introduit un détail surnaturel.
La différence d’avec le fantastique est que, d’une part, ce détail surnaturel peut ne pas apparaitre dans un cadre réaliste, d’autre part, que le « doute » évoqué par Todorov n’est pas présent, et enfin, qu’une aura de magie, de féérique, imprègne le merveilleux. b. Présence du merveilleux La présence du merveilleux dans les pages qui nous concernent se justifie par la représentation, en soi, du château : le château évoque, on l’a dit, la littérature médiévale, littérature imprégnée de merveilleux.
Par ailleurs, la femme-forteresse des Tours d’Eliane semble relever du registre merveilleux, plus que du registre fantastlque, SI l’on reprend la définition de Todorov : en effet, nul doute ne peut subsister quand à son caractère irréel. c. Connotation positive du merveilleux Ici, les éléments relevant d PAGF3CF7 semblent avoir une dangereuse. Aussi la coexistence des registres fantastique et merveilleux dans ces pages du recueil induit une coexistence de la nolrceur et de l’espérance, thème qul est repris à d’autres égards.
Ill. LA MORT ET L’ESPOIR : IMAGE Par ailleurs, les images évoquées dans les dessins et les poèmes, appelant le monde médiéval, se situent toujours entre une noirceur, connotant l’abandon, et une clarté, évoquant l’espoir. 1. Nolrceur et clarté a. Les Tours d’Eliane Ce thème de l' »espoir insensé », qu’on évoque alors même qu’on se trouve dans la noirceur, est évoqué à plusieurs reprises, mais jamais aussi clairement que dans les vers d’Éluard illustrant « Les Tours d’Eliane » : Un espoir insensé Fenêtre au fond d’une mine.
Ici, la fenêtre, symbole de clarté, semble être la métaphore de l' »espoir insensé » — ce qui est une métaphore habituelle pour la fenêtre. La fenêtre symbolise ffectivement, de manière recurrente, l’espoir et la liberté, y compris chez les surréalistes : pensez, par exemple, à une autre toile de celui que Man Ray appelait le « petit maitre » du surréalisme, Salvador Dali : « Muchacha a la ventana » ; pensez aussi – et surtout – à l’autoportrait de Man Ray qui clôt la section ‘Portraits » du recueil, et sur lequel Man Ray porte des lunettes-fenêtres.
Pour en revenir aux vers « Les Tours d’Eliane », la « fenêtre au fond d’une mine » est d’autant plus un symbole de clarté, que la » bole de noirceur, et mine, lieu profond, lieu noir, lieu des accidents (et ces accidents dans les ines, la littérature les évoque régulièrement, pensez bien évidemment à Zola), n’est pas un symbole d’espérance. ar ailleurs, vous l’aurez probablement remarqué : il est littéralement impossible d’ouvrir « une fenêtre au fond d’une mine » : cette formule constitue un oxymore (un oxymore est une figure de style qui réunit deux mots en apparence contradictoires). Et l’oxymore est, en soi, une figure de style « insensée ». Dans ce poème d’Eluard, l’espoir est littéralement insensé, mais il existe d’autant plus qu’il fait écho au dessin de Man Ray : l’espoir insensé pourrait aussi bien évoquer l’existence de cette emme géante, la possibilité d’une relation sexuelle qu’on refuse, b.
D’autres échos d’espérance dans les textes et dessins d’inspiration médiévale Par ailleurs, notons rapidement que cette notion d’espoir fou, qui côtoie la noirceur la plus totale, est évoquée dans d’autres dessins rappelant le médiéval : par exemple, dans « Château d’IP’, qu’ est un écho au roman de Dumas, le Comte de Monte Cristo. Le protagoniste du roman de Dumas, Edmond Dantès, est enfermé dans la noirceur d’un cachot du Château d’If : espace sombre et profond, qui fait directement écho à la « mme » des « Tours d’Eliane ».
Malgré tout, il retrouve l’espoir, s’évade, et rejoint la femme qu’il aime, Mercedes. Aussi la simple allusion au Château d’If constitue-t-elle un symbole, entre noirceur et es érance. noirceur et espérance. 2. Vétusté et jeunesse Les thèmes entrecrolsés, et pourtant antithétiques, de la vétusté et de la jeunesse, sont également présents dans les moments évoquant le médiéval, au cours des Mains libres.
En fait, chaque image de château évoque la vétusté, la vieillesse et l’image de corps jeunes, sensuels, contraste à chaque fois avec cette première image. Cela est d’autant plus évident dans le ouple poème/dessin « Château abandonné » : l’épithète « abandonné » suggère la vétusté, tandis que la silhouette allongée de manière lascive devant le château semble plutôt, par ses formes, une évocation de la jeunesse, voire… de l’amour. IV.
L’AMOUR ; LA MORT De même, l’amour, émotion positive, côtoie dans ces évocations la mort – cette proximité de sens rejoint alors le couple traditionnel, Eros et Thanatos, l’Amour et la Mort, tels que les évoqualt Sigmund Freud dans Au-delà du principe de plaisir, dès 1920. Amour et mort forment un couple qui peuvent sembler antithétique, mais qui est, en réalité, nextricablement lié. Le surréalisme exploite cette proximité entre Amour et Mort, notamment sur ses travaux avec la folie, et sur les liens qu’il exploite entre folie et amour : pensez, par exemple, ? Nadja d’André Breton. . Fantômes et sensualité Dans les Mains libres, la proximité entre Eros et Thanatos est d’abord présente dans les apparitions à proximité de le château, dans « Château abandonné », en est un bon exemple : c’est visiblement une silhouette féminine, ce qu’on remarque à ses formes. Elle semble même particulièrement érotlsée. En cela, elle évoque bien évidemment l’amour. Pourtant, le fait que ses traits restent dans l’obscurité, qu’on ne les devine pas alors que le château nous est rendu particulièrement visible, convoie un doute sur son identité : est-ce vraiment une femme ?
Ne serait-ce pas plutôt un esprit, un fantôme, de ces fantômes qui peuplent, justement, les… châteaux abandonnés ? On le voit, Ici, le thème médiéval du château rapproche les termes, antithétiques, d’amour et de mort. 2. Amour et sadisme Par ailleurs, la référence au marquis de Sade, dans les deux derniers dessins/poèmes évoquant des châteaux, est une autre façon de rapprocher l’amour de la mort.
Effectivement, le château représenté, on l’a dit, pourrait tout autant symboliser le château de la Bastille, où le divin marquis avait été emprisonné, ou le château dans lequel sont enfermées les victimes dans les Cent Vingt Journées de Sodome, roman classique du marquis de Sade, et dont Man Ray avait eu l’occasion de photographier le manuscrit. Or, dans les Cent Vingt Journées de Sodome, les victimes sont enfermées, torturées, la plupart sont tuées — mais dans un but sensuel, puisqu’il s’agit de victimes sexuelles. Il y a donc une certaine proximité entre Eros et Thanatos : pulsion d’amour, et pulsion de mort !