VISON Jean MECANISMES ET MACROECONOMIE MONETAIRE Travaux diriges Quels sont les principaux arguments sur lesquels on peut s’appuyer pour dire que l’objectif de stabilite des prix est favorable a la croissance ? Selon l’article 105 du traite de Maastricht « l’objectif principal du Systeme Europeen de Banques Centrales (SEBC) est de maintenir la stabilite des prix ». La stabilite des prix se definit par opposition avec deux phenomenes : l’inflation et la deflation. L’inflation designe une hausse du niveau general des prix tandis que la deflation decrit une baisse du niveau global des prix.
Ces deux faits doivent etre envisages dans une vision d’ensemble non une vision microeconomique ou, par exemple, la baisse du prix d’un bien entraine une hausse de la demande pour ce bien. En fait, durant l’apres-guerre et jusqu’a la fin des Trente Glorieuses, les politiques economiques n’accordent qu’une importance mineure a la lutte contre la hausse des prix. Au contraire, une idee d’inspiration keynesienne et qui est largement partagee affirme qu’une « inflation rampante » est necessaire et plutot favorable a la croissance de la production nationale.
Cependant, au debut des annees 1970, les economies sont confrontees a un phenomene de stagflation : coexistence d’un fort taux d’inflation et
En somme, nous sommes amenes a justifier de quelle facon la lutte contre l’inflation et la deflation peut s’averer favorable a la croissance. Tout d’abord, il apparait que la stabilite des prix est favorable au bon fonctionnement de l’economie ; enfin, nous montrerons que ce type de politique ameliore la competitivite de l’economie. 1. La stabilite des prix est favorable au bon developpement de l’economie Il convient tout d’abord de noter que la stabilite des prix n’est en rien contraire aux mecanisme de marche. Puis, nous verrons comment elle permet de motiver la croissance et l’investissement. 1. 1.
Les effets sur le fonctionnement des mecanismes du marche Le systeme capitaliste se fonde presque entierement sur le marche. En effet, c’est grace a la confrontation de l’offre et de la demande que chaque bien et chaque service sont evalue a leur juste valeur. Or, cette valeur est exprimee par le prix d’equilibre. En somme, les prix doivent donc presenter la vision la plus juste possible de l’economie. Cependant, l’instabilite des prix fausse l’equilibre du marche. En effet, l’inflation ou la deflation n’interviennent pas de maniere uniforme sur l’ensemble des biens et services ce qui cree des distorsions de prix.
En consequence, cela fausse l’information qui est donne a l’utilisateur et ce dernier ne peut pas produire un raisonnement optimal. Par ailleurs, la stabilite des prix n’entrave pas une distribution equitable des richesse, au contraire. En effet, il faut comprendre que l’inflation et la deflation ne sont que des phenomenes monetaires. Ainsi, comme le rappelle Jean-Francois GOUX, « l’inflation ne cree pas de richesse, ceux qui gagnent le font au detriment de ceux qui perdent. Le jeu est a somme nulle » . En d’autre terme, s’il peut apparaitre que l’inflation est favorable a un agent economique, elle ne l’est pas pour l’ensemble de l’economie. . 2. Les effets sur la consommation Tout d’abord, la stabilite des prix entraine une stabilite du revenu. Cela est d’autant plus important concernant les agents qui percoivent un revenu non indexe sur la croissance, tel que les retraites. En effet, dans le cas de l’inflation par exemple, si le revenu reste stable, tandis que l’ensemble des prix augmente, il en resulte que les individus perdent du pouvoir d’achat. D’autre part, d’une maniere generale, les impots sur le revenu sont fixes par rapport a une somme nominale. Si bien que si le revenu nominal augmente mais pas le revenu reel, la art des prelevements obligatoires augmente ce qui reduit d’autant la part devolue a la consommation. En outre, la stabilite des prix permet aux menages d’anticiper de maniere plus juste les depenses de consommation future. Ainsi, ces derniers reduisent leur epargne de precaution ce qui limite les effets de « la trappe a monnaie » developpee par Keynes. De plus, une meilleure anticipation contribue a une meilleure gestion du rythme des depenses. En effet, la stabilite des prix ne conduit pas a repousser indefiniment un achat comme cela peut se produire dans le cadre d’une deflation. . 3 Les effets sur l’investissement Ici encore, la stabilite des prix concourt a reduire l’incertitude des investisseurs. Les prix etant stables, l’investisseur connait par avance les couts de production ainsi que le prix de revient, ce qui lui permet de savoir quelle sera la rentabilite de son investissement. Et, de meme que pour l’investisseur et le consommateur, la stabilite des prix apporte davantage de certitude a l’epargnant. Celui-ci est donc plus dispose a preter sur le long terme, d’autant plus s’il s’agit de taux fixe.
Par ailleurs, plus l’inflation est faible plus le taux d’interet nominal est proche du taux d’interet reel. Par consequent, les preteurs peuvent preter avec un taux d’interet plus faible, ce qui pour Keynes a pour effet de motiver l’investissement. D’autant plus que plus les taux d’interets sont bas, moins les placements sont rentables et plus il est avantageux d’investir. En somme, nous constatons qu’en optimisant le fonctionnement du marche et en reduisant l’incertitude des acteurs economiques, la stabilite des prix participe reellement au bon developpement de l’economie.
Toutefois, il faut egalement noter un second phenomene du a la stabilite des prix et qui permet d’accelerer la croissance : la stabilite des prix renforce la competitivite de l’economie. 2. L’amelioration de la competitivite des entreprises Il est necessaire de noter, que la stabilite des prix permet une certaine stabilite des couts de production, incite a la competitivite et permet de creer une situation plus favorable pour echanger avec l’exterieur. 2. 1. La stabilite des couts de productions Les prix a la consommation n’augmentant pas, le revenu reel des salaries est maintenu.
En consequence, ces derniers n’ont, a priori, aucune raison de demander une hausse de leur salaire. De meme, le cout des biens d’equipement n’augmentant pas, l’entreprise peut ainsi etre assuree de son chiffre d’affaire. Or, si cette derniere beneficie pour diverses raisons (rendement d’echelle…) de gain de productivite, il lui est possible de retranscrire les profits supplementaires par une baisse des couts et ainsi augmenter sa competitivite – prix. Par ailleurs, il faut noter que l’instabilite des prix genere de nombreux couts d’adaptation.
Prenons par exemple le re-etiquetage systematique (ou « valse des etiquettes ») mais nous pouvons egalement comptabiliser toute la reorganisation de la production induite par une modification du prix et donc des recettes de l’entreprise. Or, en reduisant l’instabilite, les couts sont reduits ce qui suppose une meilleure rentabilite. 2. 2. L’incitation a une meilleure competitivite Comme nous l’avons vu plus haut (1. 1) l’instabilite des prix peut etre source de distorsions concernant les prix. J. F.
GOUX note alors que les entreprises beneficiant de ces distorsions sont tentees de profiter davantage de ce phenomene, plutot que d’investir dans le progres technique. En consequence, cela a pour effet d’une part de « maintenir en vie des entreprises marginales » et anormalement peut productives ; et d’autre part, de freiner l’evolution technologique. De plus, les distorsions faussent l’information. Ainsi, certaines productions peuvent passer pour rentables alors qu’elles ne le sont pas. Par consequent le raisonnement de l’investisseur est trompe, d’ou un gaspillage du capital. . 3. Une situation plus favorable au commerce exterieur Dans un systeme de libre echange ou le taux change est flottant, l’incertitude tres importante, du simple fait que l’instabilite des prix est multipliee par le nombre de monnaies en circulations. Par consequent, si les prix sont stables, les entreprises peuvent connaitre les prix des produits dont elles ont besoins et ceux qu’elles veulent vendre avec beaucoup plus de certitude. S’etant ainsi assure de la stabilite de leurs couts et de leurs recettes, ces dernieres sont plus enclines a s’ouvrirent au commerce international.
Et, en se basant sur les theories du libre echange, cela serait tres avantageux. Il semble que les multiples initiatives visant a instaurer une certaine stabilite du systeme monetaire international aillent en ce sens. Ainsi, on peut noter l’exemple de la creation d’une union monetaire latine des 1865, la mise en place de l’etalon-or, des accords de Bretton Woods et de l’instauration de l’euro. Par ailleurs, si les prix evoluent de facon differente dans les divers pays, cela entrainent d’importantes distorsions dont les effets negatifs ont deja ete etudies plus haut.
En effet, plus le differentiel d’inflation, ecart relatif entre les variations de prix des differents pays, plus les echanges subissent le cout de ces distorsions. En consequence, s’il peut s’averer qu’une periode d’inflation ou de deflation soit favorable a une nation, ces phenomenes sont a priori nefastes pour l’economie mondiale dans son ensemble. Ce fait, est l’argument majeur qui a suscite la mise en place de politique de « desinflation competitive » au cours des annees 1980, 1990. En somme, il apparait tres clairement que la stabilite des prix peut etre favorable a la croissance.
D’une part, a court terme, elle optimise le fonctionnement du mecanisme de marche et encourage d’importants determinants de la croissance tels que la consommation et l’investissement. D’autre part, a plus long terme, elle developpe la competitivite des entreprises en maintenant des couts de production stable, en favorisant les entreprises les plus productives et en instaurant davantage de concurrence. Cependant, sans pour autant remettre en cause cet objectif de stabilite, il convient de noter qu’un debat demeure a propos de la mise en ? uvre d’une politique visant a la stabilite des prix.
D’un cote, plusieurs economistes dont Milton Friedman se prononcent en faveur d’une politique visant a la neutralite de la monnaie sur le court terme. D’un autre cote, von Hayek et l’ecole autrichienne considerent qu’il faudrait depolitiser la politique monetaire et la confier au secteur prive. Bibliographie : – Jean-Francois GOUX, Macroeconomie Monetaire et Financiere (4°edition), Economica, 2008 – Jean-Francois GOUX, Inflation, Desinflation, Deflation, Dunod, 1998 – Beatrice MAJNONI D’INTIGNANO, L’instabilite monetaire, Puf, col. Que sais-je ? , 2003 – Freidrich von HAYEK, Prix et Production, Calman-Levy, 1975
