Science et foi

Science et foi

La religion, lorsqu’elle se presente sous la forme de dogmes, a ete et est l’objet de plusieurs types de critiques philosophiques et scientifiques. Les critiques rationalistes, estiment que toute religion repond en premier lieu a un sentiment de peur (peur de la nature, de la mort), qu’elle est favorisee par l’ignorance, et qu’elle se construit sur des valeurs qui conduisent a des pratiques cruelles et arbitraires qui entravent tout progres dans le bien-etre de l’humanite.

La plupart des grandes religions ont ete concues a des epoques qui ne disposaient pas des connaissances qui ont ete acquises depuis lors. Certaines connaissances que l’on trouve par exemple dans le Bible (le lapin rumine, le soleil tourne autour de la Terre, l’univers a ete cree en 6 jours et est age de quelques milliers d’annees) sont depuis devenues obsoletes ou fausses. Or, dans certains cas, ce sont des textes consideres comme sacres, donc vrais, qui sont ainsi remis en cause par les sciences : en consequence de quoi, la validite de ces textes devient sujette a caution.

Une autre difficulte, soulevee par les sceptiques, est que si les dogmes des differentes religions ne sont pas compatibles entre eux, il s’en suit que toutes les religions sont

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fausses, sauf peut-etre une. Dans tous les cas, la conclusion de ce raisonnement rationaliste est que des milliards d’etres humains sont ou ont ete dans l’erreur du fait de leurs croyances religieuses. En tant qu’ensemble de croyances, la religion est une source d’intolerance morale et scientifique : elle ne connait pas le doute et fonde parfois sur son caractere absolu son rejet des connaissances nouvelles.

Cette disposition d’esprit, qui s’oppose dans certains cas a la recherche (par exemple, le christianisme s’est oppose a un grand nombre de sciences des temps modernes : interdiction de l’anatomie, refus de l’heliocentrisme et de l’evolutionnisme) peut conduire a bruler ses adversaires, a les torturer ou a les contraindre a se retracter. Pour les rationalistes ou pour des critiques de la religion , si les religions contemporaines se presentent sous des formes plus tolerantes, ce n’est pas du fait de progres voulus, mais parce que les sciences les ont contraintes a reviser leurs dogmes.

Ceci etant, la religion n’a pas le monopole du politiquement correct, comme le montrent les nombreux exemples de luttes contre la dissidence et d’intolerances morale et scientifique dans les regimes ou des societes athees. Du point de vue de l’education et des societes, quand une religion repose sur des dogmes que l’on ne peut remettre en cause sous peine d’heresie, elle tend a maintenir des populations dans l’ignorance : le libre examen et l’instruction sont proscrits (par exemple l’etude de la medecine ou de la meteorologie est assimilee a de la sorcellerie) au profit du seul apprentissage de textes dits sacres (Bible,

Coran). Cet obscurantisme favorise les mouvements de foules hysteriques, comme les chasses aux sorcieres ou l’interpretation de faits naturels, aujourd’hui expliques par les sciences, comme des chatiments divins ou des interventions diaboliques (exemple de la comete de Halley). Du point de vue de la psychologie, dans certaines religions qui tendent a controler la sexualite des croyants, de fortes souffrances morales sont associees aux pulsions, ces souffrances etant appelees culpabilite. Quand des comportements dits deviants sont menaces de peines infernales et eternelles, la religion nourrit un climat de terreur psychologique.

C’est pourquoi, les religions qui favorisent la culpabilite sont accusees d’entretenir la misere terrestre et de refuser tout bonheur a l’etre humain. La science nous donne les moyens de parvenir jusqu’a un certain point a la connaissance du monde naturel. Descartes pretendait que l’on pouvait atteindre avec certitude la verite par les lumieres naturelles, « sans les lumieres de la foi ». Science et foi ont entretenu a toutes les epoques des relations complexes, dans lesquelles on a pu voir les limites de telle ou telle approche.

Ces limites ne sont pas les memes en theologie. En effet, dans ce domaine de connaissance, la foi nous permettrait de depasser le donne naturel . Au XIXe siecle, certains pensent que c’est la foi, plus que la raison, qui est essentielle. L’experience de la foi de Kierkegaard, vecue dans la souffrance, lui fait ressentir l’incertitude, alors que l’on pourrait croire que la raison apporte la certitude. Il n’est pourtant pas necessaire de faire cette experience de souffrance pour faire l’experience de la foi : nous avons reconnu plus haut les limites de la raison.

Parvenu a ces limites, nous n’avons plus de principe d’explication, et nous sommes confrontes a l’alterite radicale du monde. En recherchant l’origine de cette alterite, certains l’expliqueront par l’hypothese d’un Dieu createur, d’autres ne formuleront aucune hypothese, d’autres encore nieront l’existence de tout principe divin. Dans tous les cas, la croyance que l’on choisit n’est manifestement pas entierement rationnelle. La question du rapport entre la foi et la raison est developpee dans l’encyclique pontificale Fides et Ratio.

Cette encyclique constate l’ecart entre les deux termes, elle donne un eclairage sur les differents courants philosophiques de ces deux derniers siecles, et souligne les apports de la linguistique et de la semantique dans le monde contemporain. Sans opposer foi et raison, elle souligne la necessite d’un fondement : « Il n’est pas possible de s’arreter a la seule experience ; meme quand celle-ci exprime et manifeste l’interiorite de l’homme et sa spiritualite, il faut que la reflexion speculative atteigne la substance spirituelle et le fondement sur lesquels elle repose. »