LUMIERES SUR L’EVOLUTION DE LA FONCTION DU MINISTERE PUBLIC EN MATIERE PENALE Mohammed El Bakir To cite this version: Mohammed El Bakir. LUMIERES SUR L’ÉVOLUTION DE LA FONCTION DU MINISTERE PUBLIC EN MATIERE PENALE. 2008. HAL Id: hal-00399886 https://hal. archives-ouvertes_fr/hal-003gggg6 Submitted on 29 Jun Sni* to View HAL is a multi-discipli ry archive for the depos documents, whether may come from cientific research t. The documents teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.
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En ce qui nous concerne, l’expression « fonction du ministère public » exigera donc que l’on détermine le domaine de son action, c’ st-à-dire le cadre procédural de son intervention, et le contenu de cette intervention.
Ainsi s’explique la multiplicité des autorités judiciaires dans l’organisation du procès pénal : « la poursuite est confiée au ministère public, l’instruction des affaires au juge d’instructlon et e jugement aux juridictions répressives »5_ En dépit de l’évidence avec laquelle est présentée habituellement cette caractéristique de notre justice répressive, force est de reconnaitre, cependant, que le contenu de chacune des fonctions soulignées demeure difficile à déterminer avec précision.
Si l’on s’en tient à la seule fonction de poursuite, qui nous intéresse icl, le travail de définition se trouve particulièrement compliqué. Au cours du processus de développement du système judiciaire pénal mis en place en France avec le Code d’instruction criminelle, que le Maroc n’a adopté en 1959 qu’au PAGF 3 fonction du ministère public a subi des transformations fondamentales. Ce processus d’évolution n’a pas cessé depuis, et a franchi ces dernières années une étape inédite.
Le recours au Code de procédure pénale n’est pas d’un grand secours dans la définition de la fonction de poursuite. Il exprime toutefois ce que la doctrine est unanime ? CORNU Gérard, vocabulaire juridique, PUE 6e éd. , pans, 2004, Voir « Fonction’ , p. 409, no 1/1. 2 Ibid, no 1/3. Ibid. no 1/2. 4 VOUIN Robert, Préface de : BERGOIGNAN-ESPER Claudine, La séparation des fonctions de justice répressive, PUB, Paris, 1973, p. . BERGOIGNAN-ESPER, ibid. , p. 9. considérer comme contenu de celle-ci : mettre raction publique en mouvement et l’exercer.
C’est en effet la définition d’ori ine ui explique l’apparition de l’institution et en précise des caractéristiques qui faisaient la particularité de la fonction de poursuite par rapport à celles d’Instruction et de jugement. En effet, chacune de ces dernières s’assimilent, d’abord, à une phase de la procédure bien définie dont les rênes sont, ensuite, remises au commandement de l’autorité judiciaire compétente. Ce n’est donc pas l’action du juge d’instruction qui définit le adre du « service » de l’instruction préparatoire.
Sa fonction à lui, son rôle, est de conduire, de commander et de mener à bout le processus de l’instruction. D’allleurs, ce n’est même pas le magistrat instructeur qui décide de l’ouverture de l’instruction preparatoire_ Le même schéma peut également être soutenu au sujet de la fonction de jugement en ce qui concerne la distinction de l’action du juge et du domaine de cette action. Tout à l’opposé était la conception de la fonction de poursuite.
C’est ce qui explique que la définition de la poursuite s’est toujours présentée sous ‘angle de l’acte de poursuite. Toute la question était alors de déterminer de quels actes devait-il s’agir. Mme Michèle-Laure RASSAT 6 nota que l’identification des actes de poursuite oscillait entre une conception « abusivement restrictive » et une autre « abusivement extensive ». La première, émanant généralement de la doctrine, limite la qualité d’acte de poursuite à celui par lequel le ministère public met l’action publique en mouvement.
La deuxième est l’œuvre d’une jurisprudence qui devait se prononcer sur l’aptitude d’un acte de procédure à interrompre ou non la rescription de l’action ublique. Elle englobe don englobe donc « non seulement tous les réquisitoires du ministère public, mais aussi la plainte avec constitution de partie civile de la victime d’une infraction qui met l’action publique en mouvement ; toutes les ordonnances rendues par le juge dinstruction ; enfin, les différentes décisions de remise de cause rendues par les juridictions de jugement »7.
Pour le professeur RASSAT, ces deux définitions sont toutes deux inadmissibles. D’abord, « l’acte de poursuite est un acte fait en justice Ce qui justifie l’élimination de tous actes antérieurs au déclenchement de l’action ublique, ainsi que tous ceux postérieurs à son règlement définitif par une juridiction. Ensuite, l’acte de poursuite est un acte accompli « par les personnes que la loi autorise à constater un délit et à en faire punir l’auteur ». Cest-à-dire les officiers du ministère public.
Il est enfin de la nature des choses que « lorsque le ministère public exerce l’action publique, il poursuit au sens loglque du terme Ainsi, confortée par une déclsion de la Cour de cassation8, Mme RASSAT en arrive à la définition suivante : « constituent des actes de poursuite tous les actes ccomplis par le ministère public depuis la mise en mouvement de l’action publique jusqu’? 6 RASSAT Michèle-Laure, Le ministère public entre son passé et son avenir, L.
G. D. J. , paris, 1967, no 114 et 7 Ibid. PAGF s 3 1856, D. P. , 1856, l, 269. ce qu’une décision judiciaire définitive soit intervenue sur la question et ceux-là seulement »9. Devrions-nous adopter cette définition pour la fonction de poursuite ? Cette façon de présenter les choses équivaut à définir la fonction de poursuite comme étant l’ensemble des actions consistant au déclenchement de l’actlon publique et à son exercice.
Ce qui revient à dire que, du côté de son rôle, le ministère public n’intervient dans le procès pénal que pour mettre en mouvement l’action publique et pour l’exercer, et du côté du temps où il est appelé à intervenir, il s’agit justement de la phase juridictionnelle au sein de laquelle il joue le rôle de raccusation. Or, il va sans dire que cette présentation est très éloignée de la réalité de la procédure pénale telle que nous la connaissons aujourd’hui et, en tout cas, insuffisante vis-à-vis du nouveau cadre d’intervention du parquet.
Tel, n’était cependant pas toujours le cas. L’image que nous venons de présenter quant à la fonction du ministère public reproduit bel et bien l’essentiel de sa situation ? un moment donné de son histoire. Seulement l’évolution du système pénal, dont nous allons retracer les éléments les plus importants, poussait sans cesse la notion de poursuite ? s’épanouir dans des directions toutes différentes. La genèse de l’enquête de police ‘udiciaire II est impératif, à notre se r que cette notion de PAGF 6 3 procureur, notamment celui de mise en mouvement de l’action publique.
D’un autre côté, une dimension de la décision, dès lors qu’en agissant, n exécutant un acte de poursuite, le ministère public exprime par la même occasion une position sur l’affaire. Il convient d’observer que la poursuite ne nait que lorsqu’il y a décision positive du procureur. Par conséquent, un classement sans suite n’est pas un acte de poursuite. Celle-ci ne peut se concevoir qu’à partir du moment où, ayant pris parti sur l’affaire, le ministère public en saisit la juridiction compétente en tant que partie demanderesse dans le procès pénal.
A Vorigine, ces deux dimensions de l’acte et de la décision étaient confondues : la poursuite ne se concevait que lorsque, et seulement lorsque ‘action publique est exercée par l’action du parquet. L’entrée en scène de la police judiciaire et l’autonomie croissante de leurs enquêtes officieuses allait, cependant, changer les données du procès pénal, provoquant une première transformation (la plus Importante) du sens de la fonction du ministère public dont le champ va s’élargir. Sous le C. I. C. l’action de la police judiciaire n’était pas reconnue officiellement en dehors de la procédure de flagrant délit. L’observation du contexte légal et de pratique judiciaire permet de déceler une sorte de paradoxe concernant le statut des actes policiers : ‘une part, leur nécessité ne faisait aucun doute même aux yeux des auteurs les plus dévoués au principe de séparation de la poursuite et de l’instruction, d’autre part, le législateur ne ressentait pas, semblerait-il, la nécessité d’en poser une réglementation légale. PAGF 7 3 semblerait-il, la nécessité d’en poser une réglementation légale.
Il a en effet toujours été clair que l’autorité de poursuite ne pouvait décider d’engager l’actlon publique sans disposer dun minimum d’éléments susceptibles de laisser présumer l’existence d’une infraction, d’où la nécessité logique et pratique ‘un travail préalable de constatation et de collecte des éléments de fait concernant la réalité de l’acte et l’implication de l’acteur présumé. La difficulté naissait toutefois de la question de savoir quelle serait l’étendue des pouvoirs d’investigation des membres de la police judlciaire et comment définir les rapports de ces pouvoirs avec ceux du juge d’instruction.
Avec la pratique de l’opportunité 9 RASSAT, précité, no 115. des poursuites, l’intervention préalable de la police judiciaire s’est imposée avec encore plus de force, et ses actes ont été, d’une manière générale, favorablement admis par la urisprudence et, bien qu’illégaux, la Cour de cassation leur a reconnu une valeur juridique considérable. Les officiers de police judiciaire, dont l’activité était susceptible d’interrompre la prescription, pouvaient alors produire, presque à tout moment de la procédure, des éléments recevables devant les juridictions en tant que renseignements devant être soumis au débat contradictoire.
Ainsi donc, au début, le fait ue la olice judiciaire procède au recueil de PAGF 8 3 20 mai 1863 et du 8 décembre 1897 avaient un impact incontestable sur l’évolution des pouvoirs d’enquête de la police judiciaire. Celle de 1897 était d’un apport décisif. Au niveau de la pratique, d’abord, il faut dire que les garanties dont elle a entouré l’inculpé au cours de l’instruction ont eu pour effet de provoquer la lenteur de la procédure et donc l’encombrement des cabinets d’instruction.
Une situation qui a favorisé la prospérité des pratiques d’opportunité des parquets sous l’œil satisfait de la chancellerie et, par conséquent, le développement des enquêtes officieuses. Sur le plan théorique, force est d’observer qu’en renforçant la défense de l’inculpé, la loi de 1897 a remis dans l’ordre du jour la problématique e la distinction des actes de police judiciaire et des actes d’instruction.
En effet, « tant que l’instruction est menée dans le secret le plus absolu, et que l’inculpé n’est pas tenu informé des éléments réunis contre lui, l’inconvénient peut paraître mineur » 11 . Mals, à partir du moment où le législateur de 1897 introduit une certaine forme de contradiction dotant l’inculpé du droit de se faire assister d’un avocat devant le uge d’instruction, le problème devrait se poser avec des termes nouveaux.
C’est ainsi que Fon pourrait comprendre que l’action de la police judiciaire se définissait, pour ressentiel, dans e cadre d’une sorte de « concurrence » avec le rôle du juge d’instruction, dont elle n’a pu échapper jusqu’? aujourd’hui. Sur le plan juridique, cette relation concurrentielle s’est trouvé d’autant plus compliquée que l’admission de l’acte olicier a du passer par son attachement à la fonction de l’acte policier a du passer par son attachement à la fonction de poursuite sous l’autorité du ministère public.
La recevabilité des éclairages apportés par la police judiciaire ne pouvait être remise en cause. « N’étant pas des actes d’instruction mais de simples renseignements » 12 , la urisprudence de la Cour de cassation n’hésitait pas à valider ces actes. Il n’était cependant pas question que le juge puisse sy appuyer pour fonder sa conviction sans les avoir soumis au préalable aux feux croisés de l’accusation et de la défense.
L’on considérait que « le débat contradictoire purge, en quelque sorte, les légers vices de la procédure car, tout de même, l’apport de documents interessant l’accusé ou la mesure de sa condamnation est une question sérieuse »13. Cela étant, la jurisprudence pouvait, sans soulever de problème particulier, se montrer hostile à l’application des nouvelles dispositions de la 101 u 8 décembre 1897 aux enquêtes officieuses, tout en recevant en droit les documents qu’elles produisaient.
Dans cette situation, les acteurs du procès pénal ne manquèrent pas de s’apercevoir qu’il était plus simple de recourir aux actes d’investigation extra-légaux afin d’éluder le formalisme de l’instruction. Et l’on n’a pas tardé à constater des abus des membres de la police judiciaire dont le nombre d’interventions était en constante augmentation. La Cour de cassation ne pouvait pas fermer 10 BOULOC Bernard, L’acte d’instruction, LG. DJ. , et s. paris, 1965, ne 270