Lobbying de la restauration pour la tva reduite

Lobbying de la restauration pour la tva reduite

{draw:g} {draw:g} {draw:g} En mars 2009, le secteur de la restauration et de l’hotellerie a enfin connu un denouement heureux a un combat mene de longue date. Ce debat rendue public et faisant meme parti des programmes electoraux de certains pays a passionne plus ou moins la France, et chacun avait son avis sur la question d’une TVA reduite dans le secteur de la restauration. Ce secteur, l’un des plus grands en France avec plus de 800 000 employes est un enjeu a la fois politique mais aussi public, aupres des consommateurs, et de la population en generale, car tout le monde va manger dans des restaurants.

Pour cela, nous allons nous interesser ala comprehension du processus decisionnel en Europe en matiere de directive fiscale qui peut permettre aux Etats d’appliquer des taux de TVA differents. De plus, pour comprendre tout le lobbying entrepris depuis des annees, il nous semble necessaire de voir quels sont les acteurs importants de ce dossier. Ensuite dans une deuxieme grande partie nous essayerons de voir quelles ont ete les arguments des lobbyistes en faveur de ce projet, mais aussi les blocages qui ont fait qu’une dizaine d’annees ont ete necessaires pour l’aboutissement de cette directive.

Le processus

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decisionnel europeen en matiere fiscale et les acteurs francais A) Le processus decisionnel La grande particularite de ce dossier par rapport a d’autres affaires en terme de lobbying reside dans le fait que le processus decisionnel en matiere de baisse de la TVA est plus difficile a mettre en ? uvre par rapport a d’autres projets ou les commissaires et surtout les parlementaires europeens sont les principaux decisionnaires. En effet, en matiere fiscale, les decisions se prennent grace aux ministres des finances de tous les pays membres.

Des sommets europeens tel que l’ECOFIN font partie de ce processus de decision, ou les ministres des finances de tous les Etats membres prennent rendez vous pour des questions portant sur la fiscalite en generale au sein de l’union. L’unanimite du conseil des ministres est requise en matiere de fiscalite. Par consequent, l’opposition de l’Allemagne a la reduction de la TVA dans la restauration empechait toute decision a ce sujet. Pour changer les taux de TVA, il faut donc commencer par convaincre le ministre francais des finances, donc aussi le president de la republique.

Pour que la demande de la France soit acceptee, il a fallu qu’une proposition soit deposee au Conseil Europeen et que l’ensemble des Etats membres decide a l’unanimite son acceptation et fixe les conditions de cette proposition. Les taux reduits de TVA au sein de l’union europeenne sont des sujets plus difficiles a mettre en ? uvre, cela ne doit pas jouer sur la libre concurrence entre etats. Une proposition de directive est longue a mettre en place, et comme nous l’avons vu, encore plus difficile quand il s’agit des taux de la TVA que l’Europe souhaite a terme harmoniser.

En effet les Etats membres de l’U. E. ont des systemes fiscaux heterogenes, fruits de l’histoire et des traditions nationales. La fiscalite est symbole de souverainete…. Les ecarts de repartition entre les prelevements obligatoires tiennent a des conceptions differentes de l’impot, souvent revelatrices de l’importance accordee a l’equite sociale et a la redistribution. On distingue trois types de prelevements obligatoires : les impots directs, supportes par le contribuable (impot sur le revenu, impot sur les societes, impot sur la fortune, taxes locales) ; es impots indirects, preleves sur les operations de production et de consommation (TVA, droits d’accises) ; les cotisations sociales, payees par les salaries et les employeurs pour garantir aux assures une protection en cas de difficulte (maladie, accident du travail, chomage, retraite, allocations familiales…. ) La repartition de ces types de prelevements varie selon les Etats membres, tout comme le taux de prelevement obligatoire de la richesse produite. Avec la Belgique, la Suede et le Danemark, la France fait partie des pays de l’U.

E. qui connaissent les taux de prelevements obligatoires les plus eleves (un peu plus de 44 % du PIB en 2006). Comme nous l’avons vu precedemment, en matiere de fiscalite, les decisions sont generalement prises a l’unanimite ce qui limite les possibilites d’harmonisation. Cependant, face a la concurrence fiscale entre les Etats membres, l’Union europeenne se dirige progressivement vers une convergence des systemes fiscaux. La fiscalite indirecte telle la TVA necessite une harmonisation liee au marche interieur.

L’un des objectifs du marche interieur est d’assurer la libre circulation des marchandises, des services et des capitaux au sein de l’Union. Le traite CE pose le principe de neutralite fiscale dans les echanges intracommunautaires. La fiscalite pourrait en effet fausser ces echanges, par exemple au benefice d’un pays qui appliquerait une TVA reduite pour attirer les consommateurs. Pour prevenir ce risque, les Etats membres ont decide d’harmoniser leur taxation indirecte. Comme aucun pays ne peut modifier ses taux de maniere unilaterale, la France a du obtenir l’aval de tous les autres pays de l’U.

E. En fevrier 2006 a Vienne, un accord a permis aux 9 Etats membres de l’Union Europeenne qui le demandaient, dont la France, de continuer d’appliquer jusqu’en 2010 des taux reduits sur des services dits a « haute intensite de main d’? uvre », pour lesquels ils beneficiaient de derogations depuis 1999. Pour la France, cela concerne notamment les travaux dans l’immobilier prive et les services d’aides a la personne. En outre, lors du Conseil des ministres Ecofin du 24 janvier 2006, la France s’est prononcee en faveur d’un rapport d’evaluation sur les effets des taux reduits de TVA.

Elle a obtenu que le secteur de la restauration soit explicitement inclus dans le champ couvert par le rapport qui a ete rendu en mai 2007. La Commission europeenne a alors annonce qu’elle proposerait en 2008 un projet de directive relatif a l’application des taux reduits de TVA. Ce Club TVA, voulu et preside par Jacques Borel s’est battu depuis de nombreuses annees au niveau national et europeen pour voir adopter le dernier combat de son president de plus de 80 ans, qui aura mis toute son energie au service de la restauration et de l’hotellerie.

L’autre grand personnage du combat pour les taux reduits de TVA est Andre Daguin president de l’UMIH (union des metiers et des industries de l’hotellerie). L’UMIH est un organisme syndical patronal qui represente le secteur de l’hotellerie, de la restauration, des cafes et des discotheques en France. Jacques Borel et Andre Daguin travaillent main dans la main en Europe pour presenter leur proposition de TVA reduite dans ce secteur a tous les ministres et leurs collaborateurs des Etats membres. A la difference de M.

Borel, M. Daguin s’est aussi occupe de dossiers sensibles en France ou il a reussi a trouver de nouveaux accords avec les principaux syndicats de la profession pour ameliorer les conditions de travail des employes dans l’hotellerie et la restauration. Mais le metier de lobbyiste n’est pas reserve essentiellement aux professionnels du metier, et grace a M. Borel et M. Daguin, les deux presidents francais que sont Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ont porte le combat des restaurateurs au niveau europeen.

Avant de convaincre les autres Etats membres, le Club TVA avait convaincu l’Etat francais de cette mesure necessaire selon eux a la survie de leur secteur qui connait de grandes difficultes. Nicolas Sarkozy a porte le projet au bout apres l’avoir promis dans son programme electoral. Il faut donc aussi comprendre que pour l’Etat francais, supporter ces propositions du Club TVA, leur permettait de toucher electoralement une grande cible de la population francaise (le secteur de l’hotellerie- restauration comportant plus de 800 000 employes en France). ) Le discours du Club TVA et les blocages au projet de TVA reduite Pour faire entendre leur voix en France, mais aussi en Europe, les restaurateurs et les hoteliers ont eu plusieurs arguments pour montrer la necessite d’une telle mesure, et les retombees positives qu’elle peut avoir si elle est mise en place. Premierement, depuis de nombreuses annees ce secteur connait de grandes difficultes: les taux d’occupation des hotels et la frequentation des restaurants sont en baisse depuis plusieurs annees.

De plus les conditions de travail sont difficiles dans ce secteur, et attirer du personnel devient de plus en plus dur. Les chiffres d’affaires des restaurants sont donc en baisse et de plus, la crise economique actuelle se fait ressentir encore plus durement dans ce secteur ou les clients vont moins au restaurant et depensent moins qu’auparavant quand ils y vont. Pour donner quelques chiffres, en 2008 la restauration rapide connait une baisse de 2% maximum de la frequentation de ces etablissements et cette baisse est comprise entre -2% et -10% pour la restauration a table.

Des grands groupes tels que Buffalo Grill, Leon de Bruxelles ont connu des baisses de leur frequentation de 5 a 7% mais aussi de leur chiffre d’affaires. Tout le secteur de la restauration et de l’hotellerie subit ces baisses qui provoquent donc des baisses d’emplois avec des licenciements, et de ces faits peu d’embauches sont ainsi realises par les restaurateurs. Tous ces points de crise du secteur connus et amplifies depuis plusieurs annees ont ete developpes par les lobbyistes tels que M. Borel et M. Daguin qui se sont aussi servis d’autres elements permettant de montrer les avantages du taux reduit dans la restauration et l’hotellerie.

En effet pour demander une telle directive a l’Europe, les restaurateurs francais savent qu’ils doivent faire des promesses en echange pour que leur cause soit entendue. Ils ont surtout dialogue avec l’Etat francais qui est le premier lobbyiste du secteur de la restauration, et donc avec le President de la Republique mais aussi avec des ministres tel que la ministre des finances qui est Mme Christine Lagarde actuellement, pour proposer des engagements qui vont etre benefiques pour les consommateurs, l’emploi, et l’investissement dans leur secteur.

Le club TVA, l’UMIH ontpris des engagements il y a peu avec l’Etat francais, mais ces engagements sont tres proches des arguments avances pendant leur periode de lobbying aupres des instances Europeennes et nationales. La profession s’est donc engagee sur un « contrat d’avenir » de trois ans qui comporte quatre volets. Les premiers arguments avances pendant leur « campagne » etaient la baisse des prix a la carte pour le consommateur. Avec une TVA a 5. 5%, les prix des consommations (hors alcool) devraient donc baisser de 11. 8%.

Leur premier argument, le plus comprehensible et le plus positif pour le consommateur etait donc tres souvent avance, mais comme nous le verrons plus tard, cet argument etait aussi tres critique. Dans le « contrat d’avenir » conclu avec le gouvernement francais, la profession s’engage a repercuter totalement la baisse de la TVA- soit moins 11,8 %-sur sept produits choisis dans une liste de dix : plat du jour, menu entree-plat, menu plat-dessert, menu enfant, dessert, eau minerale, soda, jus de fruit, cafe, the. Le deuxieme argument repris tres souvent par le Club TVA, est la creation d’emplois dans la profession.

Beaucoup de chiffres ont ete avances depuis le debut de ce combat par M. Borel. Une baisse de la TVA pouvait permettre la creation d’environ 80 000 emplois, mais ces dernieres annees avec la crise qu’a connu le secteur, ces chiffres ont ete revus a la baisse, allant jusqu’a seulement 40 000 creations d’emplois sur deux ans. C’est d’ailleurs ce qui a ete conclu pendant les etats generaux de la restauration. Les syndicats de restaurateurs promettent de creer 40000 postes sur deux ans dont 20 000 « perennes », en CDI ou CDD, et 20 000 en apprentissage ou en contrat de professionnalisation.

Troisieme argument avance par M. Borel etait l’augmentation des salaires dans la profession. Une hausse du Smic et des salaires dans la profession devrait avoir lieu. Le dernier point souvent avance aussi par M. Borel est l’investissement de la profession. Nous avons donc vu les arguments qu’avancaient le Club TVA et ses partenaires pour convaincre les decideurs d’adopter cette proposition de TVA reduite. De plus, maintenant que la TVA reduite arrive en France en Juillet 2009, les restaurateurs francais se sont engages avec l’Etat francais de suivre le « contrat d’avenir » conclu.

Par la suite nous allons nous interesser aux detracteurs de ce projet qui ont failli empecher cette proposition de voir le jour. B) Les blocages La France a eu du mal a imposer son idee de directive pour la TVA reduite dans le secteur de l’hotellerie -restauration. Des le debut, certains pays tel que l’Allemagne etaient contre ce projet. Avec l’elargissement de l’Europe d’autres pays se sont positionnes contre une TVA reduite dans le secteur de la restauration. Avec l’Allemagne, nous trouvons donc d’autres pays tel que le Danemark, la Slovaquie, l’Autriche, la Hongrie et les trois Etats Baltes.

L’Allemagne et le Danemark preferaient par rapport a la proposition francaise d’avoir un seul taux et ont meme reussi a convaincre d’autres pays tels que la Slovaquie, la Hongrie et les Etats Baltes. Le « flat tax » comme il est appele communement, est commun dans certains pays ou quelque soit le produit que nous achetons, la taxe sera toujours de 19%. Meme l’impot sur le revenu est au meme taux pour tout le monde quelque soit le revenu ; c’est donc une pratique a priori completement incompatible avec la France et sa tradition fiscale.

Le Club TVA n’etait pas completement oppose a un taux unique, mais par logique il est preferable d’avoir des taux reduits pour ceux qui le souhaitent. Deja de nombreux pays ont un taux reduit dans la restauration, d’autres n’en veulent pas, et d’autres comme la France veulent pouvoir l’appliquer chez eux puisque d’autres pays le font egalement. Cf graphique 1 Mais le principal argument de l’Allemagne qui etait oppose a ce taux reduit est l’equilibre budgetaire que les Etats doivent respecter pour 2012.

Il ne leur est pas concevable d’avoir un equilibre budgetaire excedent (avec les Pays-Bas, l’Espagne) et de payer pour les autres pays comme la France et l’Italie qui ne respecteraient pas cet engagement pris, d’avoir un retour a l’equilibre pour 2012. La France a donc tout fait pour convaincre son plus grand partenaire europeen pour le faire changer d’avis. Mais la grande force des lobbyistes et de l’Etat francais a ete d’isoler l’Allemagne et le Danemark. Ces deux pays etaient les plus farouchement opposes a la TVA reduite, et la pression s’est accentuee avec la presidence francaise de l’Europe.

Des deputes europeens, ycompris allemands, ont hausse le ton en declarant qu’il etait inadmissible que l’Allemagne bloque un projet que tous les autres pays soutiennent. L’Allemagne ne voulait pas de cette TVA reduite qu’elle devrait accepter un ou deux ans apres la France par necessite et pression du secteur. Pour les Etats, la baisse de la TVA est aussi un manque a gagner important, et l’Allemagne ne voulait pas perdre cette manne financiere supplementaire. Un argument qui peut egalement entrer en ligne de compte dans le blocage de cette proposition de directive, est la mefiance du grand public vis-a-vis de leur proposition.

Pour une grande majorite de la population, la baisse de la TVA se ressentira essentiellement dans les poches des restaurateurs et n’engendrera pas du tout une baisse des prix pour le consommateur. En realite, cette proposition avait l’image d’un cadeau fait aux restaurateurs par l’Etat (qui va perdre plus de 2 milliards d’euros par an) qui ne profitera pas aux consommateurs. Conclusion : Le dossier sur la TVA reduite dans le secteur de la restauration s’est revele tres long et tres indecis jusqu’au bout. Dans notre analyse nous avons essaye de comprendre pourquoi cette demarche a mis autant de temps pour etre adoptee.

Nous pouvons en tirer quelques conclusions. Tout d’abord, par l’initiative du president du Club TVA Jacques Borel, mais aussi grace a Monsieur Daguin, l’idee d’une TVA reduite en France et en Europe est apparue sur le debat public. En effet, contrairement a beaucoup d’actions de lobbying, celle-ci a ete creee et voulue par la France et par un regroupement de chaines de restaurants et d’hotels. De plus, nous avons vu qu’en matiere de fiscalite, comme pour les impots indirects (dont la TVA) le processus decisionnel est plus long a mettre en place en Europe.

Il exige l’accord de tous les Etats membres et de leur ministre des finances lors de l’ECOFIN. Mais par l’intermediaire du Club TVA et ses collaborateurs, un lobbying intense a ete realise en France et dans toute l’Europe. Malgre de nombreux blocages, tel le veto de l’Allemagne ou encore le Danemark, d’une mauvaise opinion du public en general sur ce combat juge comme faux et rempli de fausses promesses et en depit de ces blocages, un lobbying realise intelligemment par M. Borel mais aussi et surtout par deux Presidents francais .

Le President Sarkozy a reellement fait avancer ce projet et a profite de la presidence francaise de l’Europe pour faire un travail de lobbyiste. Les restaurateurs ont pris des engagements vis-a-vis de l’etat francais qui a mene ce combat lui aussi, et depuis la fixation du taux a 5. 5% en France pour la restauration commerciale a table, les syndicats et les professionnels de la restauration ont pris des engagements, pour a la fois baisser les prix pour le consommateur, augmenter les salaires et embaucher, mais ont aussi promis d’investir, et de respecter plus de normes ecologiques (tels que les recuperateurs d’eaux de pluie…).

Mauvais lobbying ou bon lobbying, la question n’est pas evidente, certes il aura fallu du temps pour la concretisation, mais la complexite du dossier et les interets de tous les Etats etant en jeu, il n’etait pas evident d’en arriver a terme. Dans tous les cas, pour Jacques Borel, qui a 80 ans, son dernier combat est certainement considere comme un succes pour lui et tout le secteur qu’il defend! Annexe 1 : {draw:frame} Sources : www. lhotellerie-restauration. fr www. ouest-france. com www. lefigaro. com www. lemonde. om www. lesechos. fr www. agoravox. fr www. dbfbruxelles. eu www. touteleurope. fr www. euractiv. fr www. ec. europa. eu www. lyon-entreprises. com www. umih. fr Bibliographie : Grossman E. , Saurugger S. (2006), Les groupes d’interet, edition Armand Colin ; Balme, Richard, Didier Chabanet et Vincent Wright (2002), L’action collective en Europe, Presse de Sciences Po ; Desselas S. (2007), Un lobbying professionnel a visage decouvert : Enquete sur l’influence des francais a Bruxelles, editions du Palio ;