L’IRONIE DANS CANDIDE L’ironie est l’arme de Voltaire contre les diverses formes d’injustice qui affligent la societe de son temps. Elle se presente de cinq manieres : 1 Les formules cliches des romans a l’eau de rose. Voltaire emploie ce langage a la « roman Harlequin » par derision. L’ironie porte ici sur la nature de la formulation. Le monde sordide qu’il decrit et deplore se trouve bien a l’oppose de l’imaginaire ouate et feculeux des cliches de l’amour-carte postale. En voici quelques exemples. Ils sont tires du chapitre I. De meme, VII:30 sq. « Sa physionomie annoncait son ame. (chap. 1) « Elle [Cunegonde] rencontra Candide en revenant du chateau, et rougit; Candide rougit aussi; elle lui dit bonjour d’une voix entrecoupee, et Candide lui parla sans savoir ce qu’il disait[… ]Cunegonde laissa tomber son mouchoir, Candide le ramassa; elle lui prit innocemment la main; le jeune homme baisa innocemment la main de la jeune demoiselle avec une vivacite, une sensibilite, une grace toute particuliere[… ] » 2 Les exagerations. On pourrait distinguer entre trois types d’exagerations : 2. 1 les exagerations des faits : « [Candide] avait appris a tirer chez les
Bulgares, et il aurait abattu une noisette dans un buisson sans toucher aux feuilles.
La mort est aussi touchee par un optimisme ceremoniaire : Le monseigneur tue par Candide est enterre « dans une belle eglise »(IX:41) On note aussi (IV:84) que les malheurs particuliers font le bien general. Ou encore (V:21), le coquin nagea heureusement jusqu’au rivage. On assistera (VI:3) a un bel autodafe (19: une belle musique en faux-bourdon accompagnera le supplice ! 4 les invraisemblances. La plus frappante se trouve au dernier chapitre (XXX), lorsque, de nulle part, et en violation de toute vraisemblance, Cunegonde et la vieille retrouve Candide et Pangloss au fond de la Turquie. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un onte; Voltaire n’a pas a s’embarrasser de vraisemblance physique, voire chronologique. Le bateau (V:19) s’entrouvre tout a coup. 5 les fausse causalites. Puisque Voltaire denonce l’illogisme des gouvernants, nobles, religieux ou pretendus savants, le rappel de leur sophisme est approprie. Pangloss se revele un specialiste es fausses causalites : « Il est demontre, disait-il, que les choses ne peuvent etre autrement : car tout etant fait pour une fin, tout est necessairement pour la meilleur fin. Remarquez bien que les nez ont ete faits pour porter des lunettes; aussi avons-nous des lunettes. (chap. I). De meme les pieds pour les chausses, les pierres pour la construction des chateaux, les cochons pour etre manges, etc. La presence de la couleur rouge du mouton fera l’objet d’une demonstration d’un savant qui demontra la chose « par A plus B moins C divise par Z ». Il obtint le prix cette annee-la… On se souvient aussi que les genies de l’universite de Coimbre (VI:5) conclurent a la necessite d’un autodafe pour eliminer les sequelles du tremblement de terre de Lisbonne. Au debut du chapitre V, Pangloss prouve que la rade de Lisbonne etait faite pour que l’anabaptiste s’y noyat.