Le Langage | La psychologie s’interesse beaucoup a la maniere dont nous percevons les sons. Qu’est-ce qui nous permet de saisir jusqu’a 15 phonemes par seconde (le phoneme est la plus petite unite linguistique a partir de laquelle on forme des mots) ? Notre equipement physiologique bien sur, mais egalement des competences mentales particulieres qui nous aident a traiter les sons du langage. Des chercheurs ont ainsi mis en evidence une maniere particuliere de percevoir le langage appelee la theorie de la « cohorte ».
Selon cette theorie, nous segmentons le flot de paroles que nous entendons de maniere a y entendre des sons. Grace aux 40. 000 a 50. 000 mots que nous possedons dans notre vocabulaire (les experts peuvent en compter jusqu’a 100. 000), nous projetons sur le discours de notre interlocuteur un ensemble de ces mots supposes se rapprocher le plus possible de ce que nous entendons. Pour mieux traiter son discours, nous nous appuyons egalement sur notre connaissance de la langue (regles de grammaire, intonation, prosodie, autrement dit musique de la langue), etc. Par quels mecanismes parvenons-nous a comprendre le sens des mots ?
Il existe deux theories : la premiere fait appel a la theorie du reseau semantique associatif : chaque mot entendu evoque
Ainsi, chaque mot peut etre rattache a un concept, lui-meme rattache a d’autres concepts. Prenons l’exemple du mot « chat ». Les connaissances particulieres de l’individu a propos du chat lui permettent de le situer dans la categorie « animal » (et a ce titre, de savoir primairement qu’il mange, qu’il boit, qu’il respire, etc. ), « qui a des griffes », « qui a des moustaches », « qui miaule », etc. Ce reseau semantique conceptuel, plus dense et plus diffus que le reseau semantique associatif, nous aide tous les jours a percevoir le sens de ce que nous entendons.
Il nous aide egalement a fabriquer un discours qui corresponde a ce que nous souhaitons exprimer. Car le langage, ce n’est pas uniquement percevoir et comprendre des mots et des phrases, c’est egalement en produire. Les recherches actuelles disent : « il existe deux niveaux de traitement nous permettant de produire un langage ». Le premier (traitement semantico-syntaxique) concerne le sens des mots, le second (traitement phonologique) concerne la forme sonore du mot (sa carrosserie en quelque sorte).
Certains cas pathologiques du langage ont permis de montrer que le traitement semantico-syntaxique etait prioritaire : en d’autres termes, on recupere d’abord le sens du mot. Ainsi, certains patients atteints de troubles du langage sont incapables de se souvenir de la forme sonore d’un mot alors qu’ils parviennent tres bien a fournir un certain nombre d’informations a propos de ce mot : son sens, son genre, sa categorie grammaticale, etc.
Le passage de l’idee au mot se fait donc en deux temps : dans un premier temps, nous recuperons l’ensemble des connaissances que l’on possede sur un concept et nous les organisons en fonction de l’idee que l’on veut exprimer ; dans un deuxieme temps, nous accedons aux formes sonores (la carrosserie des mots) qui permettent de traduire les idees en mots. Parmi les diverses activites langagieres, la psychologie s’interesse egalement aux mecanismes qui permettent de lire un texte.
Contrairement a certaines idees recues, nos yeux ne bougent pas pendant la lecture. Nous fixons les mots pendant une duree qui varie entre 100 et 500 millisecondes. Puis nous nous deplacons vers un autre point de fixation (en moyenne 1,2 mot plus loin) pour y dechiffrer les signes graphiques suivants. Ce phenomene est connu sous le terme de saccades oculaires. Autour de chaque point de fixation, nous percevons environ 3-4 lettres a gauche et 6 a 10 lettres a droite. Au-dela nous sommes incapables d’identifier les lettres.
Deux theories s’affrontent pour tenter d’expliquer de quelle maniere nous reconnaissons les mots. La premiere defend l’idee que pour comprendre un mot, nous devons d’abord l’entendre mentalement (mediation phonologique) ; la seconde theorie pretend a l’inverse que nous n’avons pas besoin d’entendre un mot pour acceder a son sens : il nous suffit de dechiffrer ses composantes graphiques et d’aller chercher directement sa signification dans la memoire ou il est stocke sans passer par le son du mot (theorie de la voie directe appelee egalement voie lexicale).
Ces deux theories divergentes sont source de querelle a propos de la methode globale utilisee dans l’apprentissage de la lecture. En effet, les utilisateurs de la methode globale disent : pourquoi s’embarrasser d’une reference au code oral alors qu’il est possible d’etablir une correspondance directe entre le graphisme d’un mot et son sens (theorie de l’acces direct) Les recherches recentes ont montre en effet qu’une methode n’excluait pas l’autre.
Dans de nombreux cas, la methode visuelle pourrait suffire car elle est la plus rapide ; mais dans le cas de mots difficiles, rares ou inconnus, il parait indispensable d’avoir recours a la mediation phonologique. A partir de ce constat, on imagine facilement que la methode globale ne peut convenir a tous les eleves, en particulier aux enfants en difficulte qui auront tout avantage a utiliser la methode syllabique car elle s’appuie sur la mediation phonologique, la seule voie susceptible de renforcer l’apprentissage. |