La pertinence de la Pyramide Kelsenienne

La pertinence de la Pyramide Kelsenienne

Pyramide de kelsen

Cela signifie que le principe de hierarchie est present dans de nombreux domaines. Dans l’organisation juridique, la hierarchie des normes est une vision synthetique du droit mise au point par Hanz Kelsen. Pour ce theoricien du droit, un systeme juridique « n’est pas un complexe de normes en vigueur, les unes a cote des autres, mais une pyramide ou hierarchie de normes qui sont subordonnees les unes aux autres, superieures ou inferieures ».

Une norme de droit, du fait de son origine et de son caractere general et impersonnel, constitue une source de droit et d’obligations juridiques. Il est donc important de savoir la pertinence que peut avoir la pyramide kelsenienne des normes. Plus precisement, il s’agit de voir quelle est la valeur heuristique de la theorie viennoise de la hierarchie des normes pour comprendre les donnees du droit positif francais. La doctrine francaise s’est effectivement saisie de cette theorie, en particulier, sous la Cinquieme Republique, au vu des progres du constitutionnalisme.

La doctrine francaise utilise donc le concept de hierarchie des normes pour expliquer la structure de l’ordre juridique francais dans le cadre constitutionnel de 1958. La Cinquieme Republique a bouleverse les rapports normatifs tels qu’ils etaient traditionnellement definis dans le

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droit public francais depuis la Revolution. La theorie normative de Kelsen, initiateur de l’Ecole de Vienne, est sensiblement differente meme si elle lie etroitement la regle de droit a l’Etat, au point d’ailleurs de les confondre. Pour Kelsen, en effet, si la regle de droit doit etre obeit c’est parce qu’elle est imposee par l’Etat.

Selon lui, le droit est une science normative c’est a dire une science du comportement des hommes. Mais a la difference de la regle morale, la regle de droit est un imperatif hypothetique : la conduite dictee doit etre respectee si l’on ne veut pas subir la sanction dont elle est assortie. Ainsi caracterisee, la regle juridique se trouve dans une organisation hierarchisee; les normes juridiques s’etablissant en une sorte de pyramide. Mais comme le relevent de nombreux auteurs, tels F. OST et M. Van de KERCHOVE, on ne peut pas nier que d’autres concepts de hierarchisation des normes ont emerge, du fait de son imperfection.

En effet, face au modele pyramidal kelsenien s’est posee la question de la place de differentes normes telles que la coutume ou la jurisprudence ou encore celle des normes non ecrites. Cette question a une fois de plus souleve les faiblesses de la theorie kelsenienne. Nous pouvons alors nous poser la question suivante: La pyramide kelsenienne des normes est-elle assez pertinente pour regir a la fois le droit francais et le droit europeen ? C’est la raison pour laquelle, il convient d’envisager la pertinence de la pyramide kelsenienne en droit interne (I) avant d’en etudier son essoufflement en droit communautaire (II).

I. La pertinence de la pyramide kelsenienne en droit interne. L’organisation juridique francaise est basee sur la hierarchie des normes. Mais quelle en est sa classification?

(A). De plus, nous savons que la norme est legitime mais peut-elle etre qualifiee de superieure ou d’inferieure a un autre concept juridique (B)?

A. Le classement hierarchique des normes en droit interne. Les normes contractuelles se trouvent a la base de la pyramide de la hierarchie des normes. Elles representent tous les actes juridiques individuels tels que les contrats. Ces normes sont supplantees par les normes juridictionnelles qui orrespondent aux decisions de justice. Viens ensuite les lois et les reglements. Au sommet de cette pyramide, nous trouvons la Constitution qui est definie comme la norme supreme. D’apres Kelsen, chaque etage de cette pyramide est surplombe par un autre etage. En consequence, les normes contractuelles ne peuvent donc etre superieures a aucune autre norme de droit. Quant a la Constitution, etant la norme supreme, aucune norme ne lui est superieure. Les normes juridictionnelles dominent les normes contractuelles mais sont dominees par les lois et les reglements. Pour expliquer ce classement, nous allons prendre n exemple. L’article 2 de la Constitution Francaise dit «  La devise de la Republique est Liberte, Egalite, Fraternite ». C’est donc la loi supreme. L’article L2241-3 du Code du Travail stipule que « Les organisations liees par une convention de branche ou, a defaut, par des accords professionnels se reunissent pour negocier tous les trois ans sur les mesures tendant a assurer l’egalite professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant a remedier aux inegalites constatees ». Cette loi decoule donc de la Constitution. Elle lui est donc inferieure.

Nous pouvons prendre comme exemple de decision juridique (qui sera donc une norme juridictionnelle) celle d’une salariee d’IBM-Montpellier qui, au bout d’un an et demi, a obtenu gain de cause aupres des juges, a savoir 30 000 euros de dommages et interets ainsi qu’un passage immediat au statut de cadre pour discrimination sexiste. Cette decision est donc inferieure a la loi. Ainsi, nous avons reconstitue une partie de la pyramide kelsenienne des normes juridiques.

B. La legitimite de la norme. La legitimite definit ce qui doit etre et s’impose comme irreductible a ce qui est.

La legitimite suppose de la sorte une norme superieure en reference a laquelle il est possible de determiner si les lois instituees et si les exercices du pouvoir sont justes ou non. Elle fonde une hierarchie des normes : elle soumet le « droit positif » a la norme d’un droit considere comme heterogene et superieur aux inventions historiques. Une norme etablie par l’administration (decret, arrete) doit toujours etre conforme a la norme qui lui est superieure. C’est donc une obligation de conformite. Par exemple, meme si un decret est modifie, il devra toujours faire reference a la loi qui lui est superieure pour pouvoir etre applique.

La pyramide evoque le processus de validation des normes. Pour etre valide, une norme doit respecter toutes les normes superieures. Plus une norme se trouve a un rang hierarchique inferieur et plus les contraintes juridiques pesant sur elles sont fortes (principe de legalite). La relation hierarchique est, en effet, transitive : si la norme A est superieure a la norme B et si la norme B est superieure a la norme C, alors la norme A est superieure a la norme C. Du point de vue de la validite, Kelsen distingue les ordres normatifs statiques et ordres dynamiques.

Selon Kelsen, en effet, certains ordres sont statiques en ce sens que les normes superieures qui les composent edictent non seulement les conditions de creation des normes inferieures mais definissent egalement leur contenu. A l’inverse, un ordre normatif est dit dynamique quand il ne prescrit que les conditions formelles d’edition des normes et non leur contenu. Apres avoir etudie la pertinence de la pyramide kelsenienne des normes au niveau du droit interne, nous allons developper l’essoufflement de ce concept juridique a l’echelon du droit communautaire. II. L’essoufflement de la theorie kelsenienne dans le droit communautaire.

Il convient d’envisager la difficulte d’interpretation du droit communautaire vis a vis de la pyramide kelsenienne (A) avant d’en etudier le probleme du placement de certaines normes juridiques dans cette organisation. A. La difficulte d’interpretation du droit communautaire. Reprenons la description par etage de la formation juridique des normes. A la base de la pyramide se trouve les differents reglements composant le droit communautaire. Ils ont pour finalite de completer les lois par des decisions plus precises pour en permettre l’execution ou de definir des normes de maniere autonome.

Les reglements comportent notamment les decrets et les arretes. Ils sont l’apanage du pouvoir executif. Ces reglements sont supplantes par les lois internes d’un pays. Elles sont situees en dessous de la Constitution et des normes supranationales. Elles sont preparees par le Gouvernement et par le Parlement mais ne sont votees que par ce dernier. Contrairement a la pyramide kelsennienne en droit interne, nous pouvons remarquer que la Constitution ne se trouve pas au sommet direct de la pyramide. En consequence, nous pouvons en deduire qu’elle n’est plus consideree comme la norme supreme.

La norme communautaire serait-elle superieure a la Constitution? Les normes communautaires resultent des engagements pris par la France au niveau europeen (ex: conclusion d’un traite) et au niveau de l’Union Europeenne (ex: adoption d’une directive). Toutes ces normes doivent theoriquement etre conformes a la Constitution pour s’appliquer dans l’ordre juridique interne. Reprenons un exemple. L’arret Jacques Vabre du 24 Mai 1975 stipule « Mais attendu que le Traite du 25 mars 1957, qui en vertu de l’article susvise de la Constitution, a une autorite superieure a celle des lois, institue un ordre juridique propre integre a elui des Etats membres; qu’en raison de cette specificite, l’ordre juridique qu’il a cree est directement applicable aux ressortissants de ces Etats et s’impose a leurs juridictions; que, des lors, c’est a bon droit, et sans exceder ses pouvoirs, que la cour d’appel a decide que l’article 95 du traite devait etre applique en l’espece, a l’exclusion de l’article 265c des douanes, bien que ce dernier texte fut posterieur; d’ou il suit que le moyen est mal fonde ». Ainsi, la norme communautaire se place hierarchiquement au dessus de la Constitution d’un pays.

Cependant, si cette norme ne serait pas conforme a la Constitution, en aucun cas elle ne sera appliquee dans le pays concerne. B. Le probleme du placement de certaines normes juridiques dans la pyramide kelsenienne. Jusqu’en 1789, le droit francais a ete essentiellement un droit coutumier, en particulier dans le nord de la France. La coutume est la plus ancienne source du droit; des l’Antiquite, elle a joue un grand role dans l’organisation de la vie juridique de la Cite.

On definit la coutume comme une norme d’origine non etatique, fondee sur une tradition, qui correspond a une pratique reguliere et reconnue de tous, qui a un caractere juridique contraignant et qui est generalement non ecrite. Ainsi la coutume necessite deux elements cumulatifs: un element materiel et un element psychologique. On distingue trois grands types de coutume. La coutume en l’absence de la loi qui est obligatoire en cas de silence de la loi pour combler une lacune de celle-ci.

La coutume conformement a la loi est celle qui est reconnue et consacree par la loi, qui est obligatoire en vertu de la loi. Par exemple, l’article 593 du Code Civil stipule : «  Il peut prendre, dans les bois, des echalas pour les vignes ; il peut aussi prendre, sur les arbres, des produits annuels ou periodiques ; le tout suivant l’usage du pays ou la coutume des proprietaires ». Il existe aussi la coutume contraire a la loi qui entre donc en contradiction avec une loi existante.

Par exemple l’article 931 du Code Civil stipule que : « Tous actes portant donation entre vifs seront passes devant notaires dans la forme ordinaire des contrats ; et il en restera minute, sous peine de nullite. » Cela signifie que la loi exige un acte notarie en cas de donation alors que les dons manuels sont toleres dans la pratique. La coutume est bien une source de droit. Elle est donc consideree comme une norme. Cependant, on ne peut la classer dans la pyramide kelsenienne des normes juridiques. En effet, la coutume prend une tres grande place dans la vie quotidienne des hommes.

Cependant, on sait que dans certains cas elle peut etre superieure a certaines lois. Alors peut-on dire que la coutume peut surplomber la Constitution, la loi supreme? La pyramide kelsenienne est tres pertinente a l’echelon du droit interne. Cependant, nous pouvons voir que cette organisation ne fonctionne pas aussi bien pour le droit communautaire et pour le placement de certaines normes dans le fonctionnement de cette hierarchie. Certains auteurs comme Francois Ost, Michel Van de Kerchove ou encore H. de Vauplane et J.

P de Bornet proposent une evolution de ce systeme pyramidal du fait de l’evolution du droit. Le systeme circulaire « tend, non pas a opposer et exclure, mais plutot a concilier des regles d’origines differentes qui se nourrissent les unes des autres laissant la place a une interaction et combinaison des sources » (H. de Vauplane et J. P de Bornet). Alors devons nous penser que l’evolution du droit communautaire et supranationale est si important qu’une autre organisation de la hierarchie des normes serait previsible afin de preserver une structure a la fois statique et dynamique du droit?