La mondialisation

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LA MONDIALISATION

Introduction En decembre 1999, des milliers de manifestants « anti-mondialisation », dont le Francais Jose Bove, affrontaient violemment les forces de police a Seattle, aux Etats-Unis, a l’occasion de la reunion des representants des pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (l’OMC). Depuis lors, des manifestations du meme type se reproduisent tous les ans.

A chaque fois, ces manifestants denoncent une mondialisation accusee de favoriser, pele-mele, la « malbouffe », la destruction de l’environnement, la dictature des marches financiers, l’ecrasement des plus faibles et de conduire a une uniformisation destructrice des identites culturelles. La mondialisation provoque donc aujourd’hui des debats passionnes, en France comme a l’etranger. Il convient cependant, au-dela de toute polemique, de preciser ce qu’est exactement le phenomene de mondialisation.

La mondialisation se traduit par une interdependance croissante entre les differentes parties du monde. Cette interdependance est avant tout economique : les economies des pays du globe sont de plus en plus dependantes les unes des autres, notamment par leurs echanges commerciaux. Cette mondialisation est encouragee et encadree par un certain nombre d’acteurs institutionnels internationaux, dont le plus connu est l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). La mondialisation est aujourd’hui source de debats : pour les uns c’est une chance, pour les autres elle est nefaste.

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dans un premier temps les principales caracteristiques de la mondialisation avant d’en determiner les principaux acteurs institutionnels. Enfin, nous analyserons differents enjeux ou problemes lies au developpement de la mondialisation. 1. Comment la mondialisation se manifeste-t-elle ? La mondialisation se manifeste par une intensification sans precedent des echanges et des flux (marchandises, capitaux, personnes, informations…) entre les pays, creant ainsi une dependance accrue des differentes parties du monde entre elles.

Cette mondialisation est un phenomene historique qui a commence il y a plusieurs siecles mais qui s’est brusquement accelere apres 1945, et plus encore depuis 1989 et la chute des regimes communistes. 11. Une multiplication des echanges et des flux a l’echelle du monde La mondialisation se caracterise par la multiplication des echanges et des flux, a l’echelle planetaire, qu’ils soient commerciaux, financiers, migratoires ou informationnels. 111. L’accroissement des echanges commerciaux internationaux

La france au lendemain de la seconde guerre mondiale

Un des premiers aspects de la mondialisation consiste dans la croissance spectaculaire des echanges commerciaux internationaux depuis 1945. En effet, en valeur, les echanges commerciaux internationaux (c’est-a-dire les exportations et les importations) representaient 60 milliards de dollars courants en 1949, 700 milliards de dollars en 1973, et pres de 6700 milliards de dollars en 2000. En 1949, 7 % du volume de la production mondiale etaient exportes, 15 % en 1973, et plus de 25 % en 2000.

En 50 ans, entre 1949 et 2000, la production mondiale a ete multipliee par 6 alors que le volume des exportations de marchandises a ete multiplie par 17. Ces progressions spectaculaires des echanges commerciaux sont dues a l’abaissement progressif des barrieres douanieres, ce qui favorise le libre-echange. Ainsi, en 1949, les tarifs douaniers representaient 40 % de la valeur des produits exportes, c’est-a-dire qu’une entreprise qui voulait exporter une marchandise dans un pays etranger devait payer une taxe correspondant a 40 % de la valeur de cette marchandise.

Cependant en quelques annees, des negociations internationales ont fait baisser ces tarifs douaniers : ainsi en 1967, les tarifs douaniers ne representaient plus que 10 % en moyenne de la valeur de la marchandise. En 1973, ils ne representaient plus que 6,5 % et en 1986 plus que 3,9 % en moyenne. Cet abaissement spectaculaire des tarifs douaniers depuis 50 ans est donc le principal responsable du developpement croissant des echanges commerciaux internationaux. D’autre part, on constate des evolutions differentes selon les types d’echanges commerciaux.

En effet, les echanges commerciaux se divisent en deux grandes categories : les services et les marchandises. – En ce qui concerne les echanges internationaux de services (banques, assurances, tourisme, telecommunications, medias, transports etc. ), leur valeur a ete multipliee par plus de 100 entre 1975 et 2002, atteignant aujourd’hui 1500 milliards de dollars. Dans les echanges mondiaux de services, les trois principaux secteurs sont les telecommunications (650 milliards de dollars), le tourisme (450 milliards), les transports (300 milliards).

Pour le tourisme, il y avait 25 millions de visiteurs etrangers en 1950 dans le monde, il y en a eu 800 millions en 2004 et le chiffre va doubler d’ici 2015. – En ce qui concerne les echanges internationaux de marchandises (produits agricoles, produits mineraux et produits manufactures), leur valeur a ete multipliee par plus de 5 entre 1975 et 2002, atteignant pres de 6200 milliards de dollars. Mais on remarque aussi que la part, en valeur, des produits agricoles dans les echanges de marchandises a fortement baisse au profit des produits manufactures, comme le montre le tableau ci-dessous :

ECHANGES DE MARCHANDISES |1963 |2000 | |PRODUITS AGRICOLES | | | |(en pourcentage de la valeur totale)

|29 % |10 % | |PRODUITS MINERAUX | | | (en pourcentage de la valeur totale)

|16 % |12 % | |PRODUITS MANUFACTURES | | | |(en pourcentage de la valeur totale)

|52 % |75 % | Ainsi actuellement, les trois quarts de la valeur totale des echanges mondiaux de marchandises concernent des produits manufactures.

Cette mondialisation accrue et facilitee des echanges commerciaux s’est cependant accompagnee d’effets pervers. En effet, depuis les annees 80, se sont mis en place des reseaux internationaux d’echanges illicites, echappant aux regles du commerce international et diriges par des professionnels le plus souvent originaires des pays du Sud. Il s’agit du commerce international de produits contrefaits (faux sacs Vuitton, faux Jeans Levis, faux medicaments, copies pirates de disques et videos, etc. , fabriques dans les pays du Sud (la Chine est numero un mondial) et exportes vers les pays du Nord essentiellement. Les contrefacons representeraient a elles seules pres de 10 % du commerce mondial. L’explosion de la contrefacon est une des consequences de la mondialisation.

112. L’internationalisation des flux de capitaux Un second aspect de la mondialisation reside dans l’accroissement et l’internationalisation des flux de capitaux. Chaque jour, actuellement, des milliards de dollars passent d’un pays a l’autre, d’un continent a l’autre.

Ces flux de capitaux sont facilites par la liberalisation des economies et l’ouverture des frontieres. On peut desormais placer des capitaux de maniere immediate a l’une ou l’autre extremite de la planete. Ces flux de capitaux sont principalement de deux types :

1°) Il existe des flux de capitaux qui se deplacent de marches financiers en marches financiers, a la recherche de profits. On denomme « Investissements indirects » ces capitaux places sans volonte d’acheter un bien concret, mais avec comme simple objectif de trouver un placement financier rentable et sur.

Il s’agit donc de faire de la speculation : gagner le plus d’argent possible en un minimum de temps. Les principaux acteurs des investissements indirects sont les compagnies d’assurance, les fonds de pension, les fonds mutuels. Les Investissements indirects, dans le monde, se chiffraient a 75 milliards de dollars en 1980, a 300 milliards en 1990, a 1000 milliards en 2000. Les bourses comme New York, Londres ou Tokyo, restent les grandes plaques tournantes de la circulation mondiale de ces capitaux speculatifs.

Elles forment un reseau financier unifie fonctionnant 24 heures sur 24. On parle ainsi de « globalisation financiere ».

2°) Existent aussi les « Investissements directs a l’etranger » (ou IDE). Ils correspondent a l’achat d’un bien a l’etranger : concretement, il s’agit le plus souvent d’une firme multinationale qui investit dans un pays etranger en entreprenant la construction d’une nouvelle usine, ou qui rachete une entreprise etrangere, ou encore qui achete des immeubles ou des terres a l’etranger, etc.

Le montant des IDE se chiffrait a 40 milliards de dollars en 1980, a 170 milliards en 1990, a 1000 milliards en 2000. La progression spectaculaire des IDE est un des signes forts de la mondialisation. Cette internationalisation financiere a son revers de medaille : si une crise financiere grave eclate dans un pays, elle peut se repercuter immediatement sur l’ensemble d’un continent, voire sur la planete entiere, de maniere plus ou moins forte selon les Etats et les bourses. C’est « l’effet domino ».

Par exemple, en 1997, une crise financiere en Thailande s’est etendue en quelques semaines a la majeure partie de l’Asie, a l’Amerique latine et a la Russie, provoquant nombre de faillites d’entreprises et de banques. Puis, en 2000, s’est produit l’eclatement de la « bulle Internet » a la bourse de Wall Street : l’effondrement brutal de toutes les valeurs dites « technologiques » cotees en bourse (Internet, telephonie mobile, etc. ), a rapidement entraine dans son sillage l’effondrement de toutes les autres valeurs, et ceci dans les bourses du monde entier.

Un autre effet pervers provoque par cette internationalisation financiere reside dans le developpement des paradis fiscaux et le blanchiment d’argent sale. Les paradis fiscaux sont de petits Etats qui se sont specialises dans la fourniture de prestations financieres opaques. Ils offrent a la fois une fiscalite tres avantageuse, le secret bancaire et la possibilite de creer tres facilement une entreprise. Par exemple, les iles Caiman comptent autant d’entreprises etrangeres que d’habitants (35000 habitants) ! Ainsi les iles Caiman sont devenues la cinquieme place financiere mondiale.

Ces paradis fiscaux posent un grave probleme car ils permettent aux trafiquants de drogue de recycler leur argent sale (des centaines de milliards de dollars chaque annee) ou a des groupes terroristes de financer en toute discretion leurs actions criminelles.

113. Le developpement des flux migratoires Les flux internationaux de migrants se sont acceleres depuis les annees

80. Actuellement, 200 millions de personnes vivent en dehors de leur pays d’origine contre 75 millions en 1965. Ces flux participent au phenomene de la mondialisation economique mais aussi socioculturelle.

Les flux migratoires peuvent avoir deux causes principales : des causes politiques ou des causes economiques.

– Dans le premier cas, il s’agit de migrations de refugies, c’est-a-dire de personnes qui quittent un Etat dans lequel leur liberte et leur securite ne sont plus assurees, pour trouver refuge dans un pays etranger. Ils proviennent essentiellement de pays touches par des guerres, des persecutions ethniques ou religieuses… Ils representent environ 10 % de l’ensemble des immigres dans le monde, et ils viennent des Balkans, d’Afrique ou d’Asie.

En 2004, plus de 670 000 personnes ont demande l’asile politique dont 58 000 en France, 56 000 aux Etats-Unis, 40 000 en Grande-Bretagne, 35 000 en Allemagne.

– Dans le second cas, il s’agit de migrations du travail et de la pauvrete. On estime aujourd’hui que les migrants economiques representent environ 90 % des immigres dans le monde. Ces chiffres sont tres imprecis en raison du fait qu’une grande partie de ces migrations sont clandestines, de plus en plus fortes au fur et a mesure que se ferment les frontieres des pays riches.

Ces flux de population relient surtout les pays pauvres du Sud aux Etats riches du Nord. Mais depuis la disparition du « Rideau de fer » en 1989, l’immigration en provenance d’Europe de l’Est s’est egalement considerablement developpee. Ces migrants, en grande partie des travailleurs peu qualifies, quittent leur pays a cause de la pauvrete, du chomage et recherchent dans les pays riches un emploi, un niveau de vie plus eleve, des prestations sociales. Dans le monde, on distingue trois principaux foyers d’accueil des immigres (schema 1) :

1er foyer d’immigration : les Etats-Unis. Ils comptent au total 25 millions de travailleurs immigres provenant essentiellement du Mexique, d’Amerique du Sud mais aussi de Cuba, des Philippines, de Coree du Sud, etc. C’est le premier pays d’immigration. Chaque annee, ils accueillent environ un million d’immigres supplementaires.

– 2e foyer d’immigration : l’Europe occidentale. Elle compte approximativement 25 millions d’immigres provenant surtout d’Afrique du Nord, de Turquie et des pays de l’Europe de l’Est.

Quatre pays (Allemagne, France, Royaume-Uni et Suisse) recoivent le plus grand nombre de ces migrants. Ainsi l’Allemagne recoit des populations turques et slaves. La France compte des millions d’immigres du Maghreb et d’Afrique noire, provenant de ses anciennes colonies. Le Royaume-Uni accueille des immigres venant d’Afrique noire et d’Asie (Inde, Pakistan, Bangladesh, Afghanistan, etc. ). Chaque annee, l’Europe occidentale accueille environ un million d’immigres supplementaires.

– 3e foyer d’immigration : les pays petroliers.

L’Arabie Saoudite, la Libye, le Koweit ou les Emirats Arabes Unis accueillent beaucoup d’immigres d’Afrique et d’Asie, notamment d’Asie du Sud, d’Indonesie, des Philippines, etc. , car la main-d’? uvre dans les pays petroliers est insuffisante.

La france au lendemain de la seconde guerre mondiale

114. La mondialisation des flux de l’information Les flux d’informations sont sans cesse en augmentation et diffuses de plus en plus rapidement a travers le monde grace aux progres technologiques. Ils participent au phenomene de la mondialisation economique mais aussi culturelle. L’information est desormais un facteur de production au meme titre que la main-d’? vre et les capitaux. Elle commande la strategie des gouvernements, des etats-majors militaires, des firmes industrielles et financieres. Elle est aussi vecteur de culture. La diffusion de l’information a ete acceleree au cours de ces dernieres annees grace aux satellites de plus en plus performants, a la telephonie mobile, et surtout a Internet. Le « Web » est devenu aujourd’hui sans nul doute le symbole le plus connu de la mondialisation, de l’avenement d’une nouvelle forme de « communaute mondiale ». Il y avait 30 millions d’internautes en 1996 dans le monde.

Il y en a actuellement plus de 700 millions. Le nombre de 1 milliard sera prochainement atteint. La mondialisation de l’information se fait a l’initiative des Etats-Unis qui disposent d’une suprematie incontestee dans quasiment tous les domaines de l’information. Plusieurs elements attestent cette tres forte influence americaine. D’abord, l’anglais est desormais la langue quasi hegemonique, notamment sur le Web. Ensuite les logiciels de navigation sur Internet ont ete concus aux Etats-Unis et les principaux pourvoyeurs d’acces au « Net » sont americains.

Par ailleurs, les Americains sont tres influents dans le domaine de la circulation des informations grace a leurs grandes agences de presse, comme UPI ou Associated Press, et a des chaines de television, comme CNN ou CBS. Cette domination americaine dans l’information suscite des interrogations, comme l’a montre par exemple la guerre en Irak en 2003. En effet, la plupart des images de cette guerre provenait des chaines americaines et presentait l’action americaine sous un jour tres favorable, passant sous silence les informations genantes pour Washington.

Le seul grand contrepoids a cette information americaine etait celui de la chaine d’information Al Jezeera, au Qatar, qui diffusait dans tout le monde arabe ses propres informations sur le conflit. Consciente de son retard dans ce domaine, la France envisage elle-meme prochainement de creer sa propre chaine d’information continue (sur le modele de CNN ou CBS) de maniere a pouvoir diffuser la « voix de la France » dans les pays francophones et plus generalement dans le monde entier, une voix qui serait bien sur differente de celle des Americains… La bataille de l’information ne fait donc que commencer.

La diffusion de l’information au niveau mondial est devenue un enjeu strategique.

12. La mondialisation est un processus historique La mondialisation n’est pas un phenomene nouveau. Il s’agit d’un processus historique qui s’est developpe en trois temps : la premiere mondialisation au cours des XVIe et XVIIe siecles, la seconde mondialisation entre 1830 et 1914, et enfin la mondialisation contemporaine qui ne cesse de se renforcer depuis 1945.

121. La premiere mondialisation des XVIe et XVIIe siecles Une premiere mondialisation se met en place des le XVIe siecle avec les « Grandes decouvertes ».

En 1492 le navigateur genois Christophe Colomb decouvre l’Amerique. En 1497, le navigateur portugais Vasco de Gama atteint l’Inde apres avoir contourne toute l’Afrique. Entre 1519 et 1521, le navigateur portugais Fernand de Magellan accomplit le premier tour du monde. Ce sont la quelques unes des dates marquantes de la decouverte du monde par les Europeens. Ces grandes decouvertes debouchent, entre les XVIe et XVIIe siecles, sur l’edification des premiers grands empires coloniaux, principalement aux Ameriques.

Les Espagnols s’approprient l’Amerique centrale, une partie de l’Amerique du Nord et la majeure partie de l’Amerique du Sud, laissant le Bresil aux Portugais. Francais et Britanniques se partagent l’Amerique du Nord. L’etablissement de ces empires coloniaux entrainent le developpement des premiers echanges economiques mondiaux. Metaux precieux, epices, sucre, cafe, cacao, etc. , arrivent en Europe en quantite de plus en plus importante, au depart des Ameriques mais aussi de l’Afrique et de l’Asie. En echange, l’Europe fournit aux colonies d’Amerique armes, vetements, outils, meubles, etc. , dont elles ont besoin.

Le « commerce triangulaire » entre l’Europe, l’Afrique et les Ameriques se met en place : onze millions de Negres (terme non pejoratif a l’epoque) seront envoyes comme esclaves aux Ameriques entre les XVIe et XVIIIe siecles. Tous ces echanges economiques mondiaux favorisent le developpement des premieres formes de capitalisme.

122. La seconde mondialisation (1830-1914) La revolution industrielle introduit une nouvelle impulsion dans la mondialisation. Debutee en Angleterre, elle gagne le reste de l’Europe a partir de 1830 et s’etend aux Etats-Unis. Ce nouveau capitalisme industriel debouche sur une forte augmentation du commerce mondial.

Des flux de capitaux importants sont exportes, notamment par la Grande-Bretagne et la France, en direction de la Russie (emprunts russes), mais aussi de l’Afrique et de l’Asie qui sont a leur tour presque entierement colonisees par les europeens. Les annees 1870-1914 constituent l’age d’or de cette mondialisation. Deux facteurs essentiels facilitent cette nouvelle mondialisation :

– D’une part l’essor des moyens de transports et de communications : chemin de fer, bateaux a vapeur, construction du canal de Suez (qui reduit de 40 % la distance entre la Grande-Bretagne et les Indes), le telegraphe puis le telephone. D’autre part une premiere liberation des echanges, avec notamment le traite de libre-echange franco-britannique de 1860 qui stimule le commerce international (meme si les annees 1890 voient un net retour du protectionnisme). Cependant cette mondialisation va connaitre a partir de 1914 un tres net declin avec, successivement, la Premiere Guerre mondiale (1914-1918), la crise economique mondiale (1929-1932), la Seconde Guerre mondiale (1939-1945), qui perturbent largement les echanges.

Entre 1914 et 1945, le commerce mondial s’est donc restreint : en 1914 les pays europeens exportaient 15 % de leurs marchandises contre moins de 10 % en 1945. 123. La mondialisation contemporaine (depuis 1945) Apres 1945, on assiste de nouveau a une internationalisation croissante de l’economie. Le role des Etats-Unis est ici determinant. Ils sont en position de force : assurant alors environ la moitie de la production industrielle mondiale, detenant les deux tiers du stock d’or mondial, les Americains sont en mesure d’imposer leurs principes economiques au reste du monde.

Ils sont ainsi a l’initiative des quatre facteurs qui expliquent ce nouveau mouvement d’internationalisation de l’economie :

– La restauration d’un systeme monetaire international avec la signature des accords de Bretton-Woods (1944), qui donnera naissance notamment au FMI, le Fonds monetaire international (voir §212).

– La restauration des echanges internationaux et la fin du protectionnisme d’avant guerre avec la signature des accords du GATT en 1947 (voir paragraphe 212) : ces accords prevoient la diminution progressive des barrieres douanieres pour favoriser le libre-echange. Le renoncement des Etats-Unis a leur politique isolationniste et le lancement du plan Marshall en 1947, qui permet une reprise du commerce transatlantique.

– Une nouvelle revolution des transports avec l’invention du conteneur : celui-ci permet de reduire considerablement le temps de chargement et de dechargement. Le conteneur permet aussi d’augmenter le volume de marchandises embarque a bord des navires, des camions ou des trains, et donc un abaissement considerable du cout de transport.

Ces quatre facteurs ont donc permis la relance progressive de la mondialisation economique au cours des annees 50 et 60. A partir des annees 80, une nouvelle impulsion est encore une fois donnee : la Chine communiste (plus de 20 % de la population mondiale) entame progressivement sa conversion a l’economie capitaliste et s’ouvre au marche mondial. Puis en 1989-1991, la chute de presque tous les regimes communistes de la planete donne un coup d’accelerateur : le monde n’est plus bipolaire, les marches des pays de l’ex-bloc communiste s’ouvrent enfin a leur our a la mondialisation ; le capitalisme peut desormais triompher partout. Depuis plusieurs siecles, et plus encore depuis 1945, la tendance a l’internationalisation des economies est donc manifeste : elle est caracterisee par l’essor des echanges internationaux resultant d’une insertion accrue des pays dans l’economie mondiale. Ces echanges portent sur des marchandises, des services, des capitaux ; s’y ajoutent les migrations internationales des travailleurs et les flux d’informations.

Ce phenomene de mondialisation de l’economie ne serait cependant pas totalement comprehensible si on ne soulignait pas le role de certains acteurs institutionnels : les grandes instances internationales commerciales et financieres, les firmes multinationales et les Etats. 2. Qui sont les acteurs de la mondialisation ? Il est necessaire de s’interroger sur les acteurs qui ont renforce depuis 1945 l’integration croissante des systemes economiques mondiaux et qui sont a l’origine de ces flux croissants et de nature de plus en plus variee. Deux types d’acteurs jouent un role cle : les organisations internationales et les firmes multinationales.

La question du role joue par les Etats se pose aussi.

21. Le role des organisations internationales La mondialisation economique est stimulee et encadree par plusieurs organisations internationales telles que l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), le Fonds monetaire international (FMI) et la Banque internationale pour la reconstruction et le developpement (BIRD). Mais les associations economiques regionales telles que l’Union europeenne (l’UE) ou l’Accord de libre echange nord-americain (l’ALENA) jouent egalement un role fondamental dans l’accroissement des echanges.

11. Une instance commerciale majeure : l’OMC L’Organisation Mondiale du Commerce est nee en janvier 1995 et remplace le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) cree lors de la conference de Geneve en 1947. Mais les principes restent identiques. L’objectif de l’OMC est de reduire, voire de supprimer, l’ensemble des obstacles au libre-echange, notamment les barrieres douanieres, et de lutter contre le protectionnisme (lexique). C’est ce qu’a fait le GATT pendant 50 ans, et avec succes, puisque les tarifs douaniers ont ete divises par 10 sur la periode.

En 2005, l’OMC rassemble 148 Etats qui s’engagent a ne pas mener une politique qui aurait pour resultat de creer des entraves au commerce international. D’autres pays sont actuellement candidats pour participer a cette instance internationale, notamment la Russie. Plusieurs sujets font aujourd’hui l’objet de tres vives discussions au sein de l’OMC. Il s’agit notamment de l’agriculture. En effet, les Etats-Unis denoncent les subventions agricoles accordees par l’Union europeenne a ses agriculteurs dans le cadre de la PAC (Politique agricole commune).

Les Americains font ainsi pression pour que ces subventions soient fortement reduites, dans la mesure ou elles constitueraient une concurrence deloyale pour les agriculteurs americains. L’Europe denonce en retour les subventions accordees par les Etats-Unis a ses propres agriculteurs et les taxes douanieres importantes qui cachent un certain protectionnisme economique. Quant aux pays du Sud, avec a leur tete le Bresil, l’Inde et la Chine, ils denoncent egalement ces subventions mais aussi les tarifs douaniers americains ou europeens qui limitent encore trop a leurs yeux les exportations agricoles vers les Etats-Unis et l’Europe.

Les pays du Sud ont obtenu recemment des reductions des barrieres douanieres europeennes mais le debat est loin d’etre regle. Les negociations vont se poursuivre dans les annees a venir. Pour faire respecter les accords commerciaux signes par chaque Etat membre de l’OMC, cette derniere possede son propre tribunal : l’ORD ou Organe de reglement des differends. L’ORD a pour mission de juger les desaccords ou litiges commerciaux entre les Etats membres. Un Etat qui n’aurait pas respecte un accord commercial, peut etre condamne par l’ORD a payer de lourdes amendes financieres.

12. Deux instances financieres essentielles : le FMI et la BIRD Le Fonds monetaire international (FMI) et la Banque internationale pour la reconstruction et le developpement (BIRD) ont ete crees en 1945, a la suite de la conference de Bretton Woods de 1944. Ils jouent un role important dans la mondialisation economique. A l’origine l’objectif des deux institutions etait de relancer l’economie internationale sur des bases saines au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Tous les pays membres du FMI peuvent egalement etre membre de la BIRD : en 2003, le FMI comptait 184 pays membres, tout comme la BIRD. Le FMI et la BIRD jouent des roles complementaires mais cependant tres differents.

– Le FMI a pour mission essentielle d’assurer la stabilite du systeme financier mondial. Il ? uvre en faveur de la cooperation monetaire internationale, de la stabilite des changes des monnaies. Il accorde des prets financiers aux pays qui connaissent de graves crises financieres ou qui font face a d’importants deficits dans leur balance des paiements. La BIRD, que l’on appelle plus couramment « Banque mondiale », a quant a elle pour mission essentielle d’aider les pays pauvres a se developper economiquement en financant des projets de developpement. Pour prendre un exemple concret, un pays pauvre qui manque temporairement de devises pour pouvoir importer des produits de premiere necessite ou qui ne peut le faire parce que sa monnaie s’est effondree et ne vaut plus rien, ou encore qui serait victime d’une grave crise bancaire, pourra demander une aide financiere aupres du FMI et ainsi se reapprovisionner en devises.

Par contre, si ce pays pauvre a besoin d’argent pour financer un projet d’industrialisation d’une de ses regions sous-developpee, ou un projet de construction d’un barrage hydroelectrique, ou un projet de developpement de l’irrigation agricole, etc. il devra s’adresser a la BIRD pour pouvoir obtenir une aide financiere. Il existe egalement une autre difference importante entre le FMI et la BIRD. Le FMI accorde des prets financiers a tous les pays membres qui le demandent, qu’ils soient des pays riches ou des pays pauvres.

En revanche, la BIRD n’accorde des prets financiers qu’aux seuls pays pauvres. Naturellement, les prets financiers accordes par le FMI et la BIRD s’accompagnent de garanties a remplir et de regles a respecter. En particulier, le FMI veille a ce que les pays beneficiaires de prets reforment et assainissent leur economie dans un sens plus liberal (privatisation des entreprises et des banques, liberte des marches, etc. ) : ce sont les fameux « ajustements structurels ».

Cette incitation a la liberalisation des economies par le FMI a ete particulierement visible dans les anciens pays communistes, convertis au capitalisme durant les annees 90. Ainsi, en incitant les pays a liberaliser leur economie, le FMI contribue donc en meme temps a favoriser leur integration dans l’economie mondiale, et donc a accroitre la mondialisation economique. 213. Le developpement des associations economiques regionales La mondialisation economique a egalement pour acteurs les grandes associations economiques regionales.

La multiplication des alliances economiques regionales (carte 19) est une tendance majeure des annees 90. Plusieurs pays ont ainsi fait le choix d’integrer l’une de ces alliances, afin de ne pas rester a l’ecart des effets benefiques de la mondialisation et de faire face plus efficacement a la concurrence mondiale, de plus en plus exacerbee. C’est le phenomene de la « regionalisation ». Ces alliances sont plus ou moins poussees : certaines ne sont que des espaces de cooperation, d’autres sont des zones de libre-echange.

Au sein de ces zones de libre-echange, les pays membres s’efforcent d’harmoniser leurs legislations commerciales et financieres, de favoriser la circulation des marchandises, des services et des capitaux, en supprimant les barrieres douanieres. Cette « regionalisation » stimule donc tres largement la mondialisation des echanges. Les 4 principales zones de libre-echange actuellement dans le monde sont  (carte 19) :

– L’Union europeenne (l’UE). Creee en 1993, c’est l’association economique la plus ancienne et la plus poussee.

Elle est issue de la Communaute economique europeenne (CEE) creee en 1957.

– L’Accord de libre-echange nord-americain (l’ALENA). Il a ete signe en 1992 et est entre en vigueur en 1994 : il regroupe les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. – Le Marche commun du Cone Sud (le MERCOSUR). Il a ete cree en 1995 et regroupe le Bresil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay.

– L’Association des nations du Sud-Est asiatique (l’ASEAN). Elle a ete creee en 1967 et regroupe aujourd’hui la Thailande, l’Indonesie, les Philippines, la Malaisie, la Birmanie, le Brunei, le Vietnam, le Laos, le Cambodge et Singapour.

L’ASEAN a longtemps ete une simple organisation de cooperation regionale. Mais depuis le milieu des annees 90, elle s’efforce de creer une vaste zone de libre-echange avec l’abaissement des tarifs douaniers. Ces 4 associations regionales de libre-echange ont egalement entrepris de cooperer entre elles, de se regrouper pour former de futures zones de libre-echange encore plus vastes :

– La Cooperation economique en Asie-Pacifique  (l’APEC) : creee a partir du regroupement de l’ALENA et de l’ASEAN, auxquels s’ajoutent des pays tels que le Japon, l’Australie, la Russie et la Chine.

Elle a pour objectif la liberalisation totale des echanges entre les pays riverains du Pacifique pour 2010.

– La Zone de Libre-Echange des Ameriques (ZLEA). En anglais : Free Trade Area of the Americas (FTAA). Une autre appellation est egalement souvent utilisee pour qualifier la ZLEA : Accord de libre commerce americain (ALCA). Il s’agit pour l’ALENA et le MERCOSUR, rejoints par tous les autres pays d’Amerique latine, de creer d’ici a 2010 une vaste « zone de libre-echange des Ameriques », regroupant les 34 pays d’Amerique du Nord et du Sud a l’exception de Cuba.

Il existe d’autres associations regionales economiques dans le monde mais il ne s’agit pas de zones de libre-echange, seulement d’organisations de cooperation economique plus ou moins actives (carte 19). Citons, par exemple, le Conseil de cooperation du Golfe (le CCG) cree en 1981, la Communaute de developpement de l’Afrique australe (la SADC) creee en 1992, ou encore l’Union du Maghreb arabe (l’UMA) creee en 1989. 22. L’action des firmes multinationales (FMN) La mondialisation economique est egalement stimulee par les firmes internationales. Ces firmes sont plus precisement qualifiees de « multinationales ».

Les firmes multinationales (FMN) sont la cle de voute de l’economie mondialisee. L’ONU a defini dans les annees 70 ce que l’on entend par firme multinationale : une FMN est une firme realisant au moins 25 % de sa production par le biais de filiales implantees dans au moins six pays etrangers. On en compte aujourd’hui plus de 65 000, disposant de 850 000 filiales a travers le monde et assurant a elles seules 70 % du commerce mondial. Les 200 plus grandes FMN, basees essentiellement dans les pays riches, emploient plus de 20 millions de salaries repartis sur l’ensemble des 5 continents.

Les FMN sont de plus en plus « deterritorialisees », c’est-a-dire qu’elles implantent de plus en plus des filiales a l’etranger.

Les 10 plus grosses FMN sont repertoriees dans le tableau (ci-dessous) selon leur chiffre d’affaires : | | |SIEGE SOCIAL | |Nombre de salaries a|Nombre | |RANG |FIRMES | |ACTIVITE |l’etranger |total de salaries | |2 |General Motors |Etats-Unis |Automobiles |? 396 000 | |3 |Royal Dutch/ Shell |Pays-Bas et |Petrole |61 000 |102 000 | | | |Grande-Bretagne | | | | |4 |Ford |Etats-Unis |Automobiles |172 000 |345 000 | |5 |Exxon |Etats-Unis |Petrole |? |79 000 | 6 |Toyota |Japon |Automobiles |113 200 |184 000 | |7 |IBM |Etats-Unis |Informatique |150 000 |292 000 | |8 |BP Amoco |Grande-Bretagne |Petrole |79 000 |99 000 | |9 |Daimler Chrysler |Allemagne |Automobiles |209 000 |442 000 | 10 |Nestle |Suisse |Agro-alimentaire |225 000 |232 000 | Quatre facteurs permettent d’expliquer le developpement des FMN et leur deterritorialisation :

– La volonte d’acceder aux matieres premieres a ete l’un des premiers facteurs de developpement des FMN dans les pays etrangers. Ce fut les cas par exemple des FMN petrolieres (Shell, Exon, etc. ).

– La volonte de s’implanter directement dans un pays etranger afin de contourner les obstacles douaniers et tarifaires. Par exemple, dans les annees 80, les firmes automobiles japonaises (Toyota, etc. deciderent d’implanter des usines sur le sol americain pour produire directement sur place et ainsi echapper aux quotas d’importation d’automobiles etrangeres imposes par le gouvernement americain.

– La volonte d’etre au plus pres des marches de consommateurs etrangers afin de reduire les frais de transports des produits.

– La volonte de trouver dans d’autres pays une main-d’? uvre nombreuse et bon marche afin de reduire les couts de fabrication, et ainsi ameliorer la competitivite des firmes (par exemple dans l’Union europeenne, le cout horaire de la main-d’? vre dans l’habillement est de 14 dollars, contre 0,5 dollar en Inde ou en Chine).

Ces differences de couts de fabrication sont la premiere cause des delocalisations de firmes, generalement des pays du Nord vers les pays du Sud. Les FMN sont un outil essentiel d’unification de l’espace economique mondial. Voyons l’exemple de la firme Nike. Cette firme emploie aux Etats-Unis a peine une vingtaine de milliers de salaries, tres qualifies, charges de la conception, du design, de la recherche, du marketing, de la gestion, de la commercialisation.

Mais la fabrication proprement dite des produits (vetements et chaussures) est confiee a 350 usines, situees dans une cinquantaine de pays etrangers, principalement asiatiques, et qui emploient plusieurs centaines de milliers de salaries, notamment chinois. Autre exemple avec les FMN occidentales qui s’installent en Inde, ou l’on trouve une ressource humaine nombreuse et tres qualifiee, qui attire facilement les FMN etrangeres, et ce d’autant plus qu’un ingenieur indien, par exemple, coute 40 % moins cher qu’un ingenieur occidental.

Pres de 270 firmes francaises sont implantees en Inde par le biais de filiales ou de succursales, employant pas moins de 35 000 salaries indiens, dont plus de 10 000 sont employes dans des secteurs de pointe. Par exemple la firme francaise de services informatiques Capgemini, qui emploie deja sur place 2 300 Indiens, a annonce son intention de recruter 20 000 personnes d’ici 2007 ! La firme francaise Alcatel a annonce fin 2005 qu’elle recruterait 2 000 ingenieurs indiens en 2006.

Dans un autre domaine, la firme hoteliere francaise Accor a realise, en 2005, un Investissement direct a l’etranger (IDE) de pres de 150 millions d’euros (pres d’un milliard de francs) pour ouvrir une chaine d’hotels en Inde. Les firmes americaines sont bien entendu loin devant : Microsoft, numero un mondial des logiciels d’exploitation, a annonce, fin 2005, un IDE en Inde de 1,7 milliard de dollars ; Intel, numero un mondial des microprocesseurs, a annonce egalement un IDE en Inde de 1,07 milliard de dollars ; Cisco, numero un mondial des equipements de reseau pour Internet, a annonce, fin 2005, un IDE de 1 milliard de dollars.

Comme on peut donc le constater, les firmes s’internationalisent, se « multinationalisent ». Developper des activites a l’etranger, donc investir et construire des usines a l’etranger, sont pour elles des necessites vitales si elles ne veulent pas disparaitre sous les coups de la concurrence internationale.

23. Quelle place pour les Etats dans la mondialisation ? Nombre d’observateurs pensent que la mondialisation entraine l’affaiblissement des Etats, jusqu’a remettre en cause leur existence meme. D’autre observateurs nuancent ce point de vue en rappelant que les Etats conservent encore des marges d’action.

31. Les Etats apparaissent affaiblis par la mondialisation Plusieurs evolutions laissent penser, a premiere vue, que les Etats sont affaiblis par la mondialisation, qu’ils perdent peu a peu leurs pouvoirs d’action, leur autonomie. Citons quatre exemples parmi d’autres :

– L’essor des echanges a rendu les Etats de plus en plus dependants de l’exterieur. En France, par exemple, plus d’un actif sur quatre travaille pour l’exportation. Cela implique que la croissance economique des Etats depend de plus en plus de la conjoncture mondiale et non plus seulement nationale.

Cela implique aussi que la lutte contre le chomage et pour les creations d’emplois depend de plus en plus de la situation economique mondiale et non plus seulement de la seule politique des gouvernements nationaux, lesquels sont reduits de plus en plus a l’impuissance.

– Les FMN imposent de plus en plus leurs regles du jeu aux Etats. Elles sont en position de force par rapport aux Etats. Ce sont les FMN qui decident d’investir ou de ne pas investir dans tels ou tels pays, de creer des emplois sur tels ou tels territoires.

Elles ont l’entiere liberte de fermer telle filiale dans un pays pour la recreer dans un autre pays offrant des conditions plus avantageuses. Les gouvernements des Etats sont desormais en position de quemandeurs, donc d’inferiorite face a des FMN qui ont la capacite de creer des emplois et de la richesse comme bon leur semble : on se souvient par exemple que le president de Toyota venu en France annoncer la creation d’une usine a Valenciennes avait ete recu en grandes pompes a la fois par le President Chirac et par le Premier ministre Jospin… Les presidents des plus grandes FMN ont desormais plus de pouvoirs que bon nombre de chefs d’Etat. La mondialisation favorise la libre circulation des capitaux. De ce fait elle contribue, dans une certaine mesure, a l’extension de la criminalite : la globalisation financiere permet de plus en plus facilement de recycler l’argent issu de trafics et d’echapper frauduleusement aux impots grace a la creation de societes fictives au sein de paradis fiscaux. L’autorite des Etats est donc bafouee.

– La mondialisation favorise aussi la circulation des personnes, donc de l’immigration. Or la difficulte a surveiller les frontieres et la pression migratoire venant es pays pauvres soumettent les Etats europeens a de graves problemes d’immigration clandestine qui menace leur cohesion nationale (communautarisme, ghettoisation). 232. Les Etats conservent cependant certaines capacites d’action Plusieurs arguments sont avances par certains observateurs montrant que, malgre tout, les Etats demeurent des acteurs incontournables de l’espace mondialise.

– Tout d’abord les Etats se differencient encore nettement par leur politique economique, leur reglementation nationale, les caracteristiques de leur capitalisme, la nature de leurs relations sociales, le genie de leur peuple, etc.

Autrement dit, chaque Etat est different et possede donc une aptitude differente pour faire face a la mondialisation. Aujourd’hui, certains Etats s’adaptent mieux que d’autres a la mondialisation, savent mieux que d’autres tirer profit de la mondialisation. C’est la preuve que les Etats conservent donc encore des marges d’action face a la mondialisation.

– C’est a l’Etat qu’il revient d’assurer les besoins des entreprises (infrastructures de transports, fiscalite attractive, acces aux marches exterieurs, etc. ), a lui qu’il revient d’organiser l’amenagement du territoire, etc.

Bref, c’est a l’Etat d’organiser un environnement propice a l’accueil des IDE qui creeront emplois et richesses. Les Etats qui sauront le faire tireront avantage de la mondialisation face aux Etats qui resteront passifs.

– Il ne faut pas non plus surestimer la dependance exterieure des economies ; le cadre national demeure le socle des dynamiques economiques. Dire qu’un Francais sur quatre travaille pour l’exportation, c’est rappeler aussi que les trois quarts travaillent dans une base nationale.

– Ce sont les Etats et eux seuls aujourd’hui qui sont capables de creer de la regulation au niveau mondial.

Les politiques mises en ? uvre par les institutions internationales telles que l’OMC ou le FMI ne sont que l’emanation de la volonte des Etats et de leurs dirigeants. La mondialisation de l’economie, tres largement stimulee par des institutions internationales telles que l’OMC, le FMI, les grandes associations regionales de libre-echange et surtout les FMN, semble avoir remis en cause, selon certains, la souverainete meme des Etats. La remise en cause de la souverainete des Etats n’est cependant que l’un des nombreux enjeux que posent la mondialisation actuellement.

3. Quels sont les enjeux de la mondialisation ? Les enjeux poses par la mondialisation sont nombreux. On etudiera ici trois d’entre eux : l’eventuelle responsabilite de la mondialisation dans les retards economiques du Sud, la question de l’uniformisation des societes par la mondialisation, et enfin l’impact de la mondialisation sur la protection de l’environnement. 31. La mondialisation est-elle defavorable aux pays du Sud ? La mondialisation a profite jusqu’a present a une minorite de pays, situes au Nord. Une grande partie du globe, essentiellement le Sud, reste encore largement a l’ecart des echanges et des flux.

Cependant, il serait excessif de dire que la mondialisation est responsable des retards de developpement des pays du Sud. 311. La mondialisation ne profite effectivement pas a tous Toute la planete ne profite pas de maniere egale de l’internationalisation des echanges commerciaux, des flux financiers, de l’implantation des FMN. Cette internationalisation de l’economie mondiale s’effectue pour l’heure essentiellement au profit des pays riches de l’Amerique du Nord, de l’Europe occidentale et du Japon : c’est ce que l’on appelle la Triade.

Actuellement, 70 % des echanges commerciaux mondiaux sont realises entre les pays de la Triade. Ainsi, l’Amerique du Nord represente 15 % des echanges commerciaux, l’Europe occidentale 45 % et le Japon 10 % (schema 2). Un petit nombre de pays emergents, comme les « Dragons » d’Asie du Sud-Est arrivent a representer 12 % de ces echanges. Par contre, la Russie, le Moyen Orient, l’Afrique, l’Asie centrale et du Sud, la Chine ne representent encore qu’une part tres faible de ces echanges. En ce qui concerne les 500 premieres firmes multinationales, 44 % sont americaines, 32 % europeennes, 16 % japonaises.

Les 8 % restants sont partages entre l’Amerique latine, l’Afrique, le Moyen Orient. S’agissant des IDE, ce sont la encore les pays riches de la Triade qui les attirent le plus (65 % des IDE). Cependant l’Asie (les « Dragons », les « Tigres », la Chine) avec 17 % des IDE, et l’Amerique latine avec 12 % des IDE, sont eux aussi assez attractifs. En revanche, l’Europe orientale (pays ex-communistes) ne pesent que 5% des IDE et l’Afrique ne recoit que des miettes (moins de 2 % des IDE).

La mondialisation ne profite donc pas a tous les pays de la meme maniere. Les pays de la Triade sont privilegies. La mondialisation n’est pas encore totalement « mondiale ». 312. Mais elle ne saurait etre entierement responsable des retards du Sud On entend souvent dire, dans la bouche des altermondialistes tels que Jose Bove, que les retards de developpement des pays du Sud sont provoques par la mondialisation : « c’est la faute a la mondialisation, aux firmes multinationales et aux marches financiers qui exploitent les pays pauvres ».

Toujours selon les altermondialistes, la mondialisation ne prend pas assez en compte les interets commerciaux des pays du Sud (protectionnisme du Nord maintenu), provoque des crises financieres a repetition qui destabilisent en premier lieu les pays du Sud, et les plans d’ajustements structurels du FMI appauvrissent les populations sans que la croissance et les investissements soient au rendez-vous. Bref, pour les altermondialistes, l’insertion dans la mondialisation ne serait pas la cle du developpement des pays du Sud.

Il convient cependant de nuancer ce genre d’analyse. Tout d’abord, il faut remarquer que la mondialisation profite a beaucoup de pays du Sud. Par exemple, au cours de la decennie 90, 24 pays du Sud ont double leur « taux d’ouverture ». Le taux d’ouverture est calcule en faisant le rapport entre la richesse produite par les exportations et la richesse totale produite dans le pays (PIB). Lorsque le taux d’ouverture augmente chaque annee, cela signifie que l’economie du pays est de plus en plus ouverte sur l’exterieur, donc a la mondialisation.

Or parallelement a ce doublement du taux d’ouverture, on a constate, dans ces 24 pays, que le taux de croissance economique par habitant avait ete le double de celui des pays riches. Enfin, que la pauvrete avait egalement fortement recule. Une conclusion s’impose donc : ces pays du Sud, en ouvrant leur economie a la mondialisation, se sont enrichis et non pas appauvris. C’est en Asie que l’on peut constater les bienfaits les plus spectaculaires de l’ouverture des economies, donc de la mondialisation.

La Chine est devenue la 4e puissance economique mondiale en 2006 : cela a ete rendu possible depuis que ce pays a accepte de ne plus vivre replie sur lui-meme comme il l’a fait pendant la periode du communisme pur et dur (1950-1980), et qu’il a choisi d’ouvrir son economie au monde exterieur, donc a la mondialisation. A l’inverse de l’Asie, un continent comme l’Afrique s’enfonce globalement dans la pauvrete. Mais ce n’est pas la faute de la mondialisation.

C’est d’abord la faute de l’Afrique elle-meme. Les causes du sous-developpement en Afrique sont d’abord internes : guerres, gouvernements corrompus et incapables, explosion demographique, infrastructures de transports delabrees, etc. Tant que l’Afrique ne surmontera pas ces handicaps internes, la mondialisation ne pourra s’interesser a elle, l’Afrique restera en marge. Les firmes multinationales, pour s’implanter et investir en Afrique, ont besoin de stabilite.

Si ce continent demeure instable, victime de violences ou de guerres civiles, jamais les investisseurs ne viendront, jamais ce continent ne pourra s’ouvrir a la mondialisation. La mondialisation represente onc pour les pays du Sud l’occasion d’opportunites economiques et l’espoir d’un developpement. Mais c’est aux pays du Sud eux-memes de savoir saisir ces opportunites.

32. La mondialisation provoque-t-elle l’uniformisation du monde ? La mondialisation semblerait induire la convergence des pays vers un meme modele de societe en raison de l’uniformisation des cultures.

Le libre-echange, la libre circulation des capitaux, les migrations internationales, d’une part, le progres technique dans les domaines des telecommunications et des transports, d’autre part, favorisent les contacts entre les cultures. Ainsi la mondialisation de l’economie parait favoriser une mondialisation culturelle, c’est-a-dire l’emergence d’une culture mondiale uniformisant les cultures nationales. Cette culture mondiale (ou « World culture ») apparait d’abord comme l’extension d’un modele de civilisation dominant, c’est-a-dire le modele americain.

L’anglo-americain est deja la langue de communication mondiale et sert de vehicule a une culture de masse. Cette culture de masse se manifeste par exemple par les films de cinema (Titanic, Jurassic Park, Matrix …) et les series televisees exportees partout dans le monde. Cette culture de masse s’exprime egalement par le biais des multinationales qui diffusent des produits americains, lesquels sont des references de consommation dans le monde : Coca-Cola, Mc Donald’s, Levi’s, Marlboro, Walt Disney, Nike, etc. , sont universellement connus.

Progressivement, les modes de vie des peuples semblent donc avoir tendance a s’uniformiser, a se standardiser. Certains disent a « s’americaniser ». Il convient cependant de nuancer car les modeles culturels et leurs particularismes demeurent encore profonds. Les cultures africaines ou asiatiques notamment conservent de tres forts particularismes. Dans certains de ces pays, la mondialisation culturelle est vivement denoncee et rejetee car elle apparait comme etant une forme « d’imperialisme occidental », menacant les racines, les valeurs et les traditions locales.

Parfois, la resistance a la mondialisation culturelle peut prendre une forme violente : comme par exemple avec l’islamisme et l’organisation Al Qaida, qui rejettent la « modernite et la decadence occidentale » ou l’ideologie des Droits de l’Homme, accusees de pervertir la civilisation musulmane. En Occident meme, des particularismes culturels s’affirment egalement : quebecois, basque, corse, etc. Certains pays comme la France reclament le respect d’une « exception culturelle » pour proteger leur culture de « l’invasion americaine ».

Le respect de cette « exception culturelle » a ete obtenue par la France, au milieu des annees 90, lors de dures negociations avec les Americains. Concretement, les produits audiovisuels (films de cinema, series televisuelles, enregistrements audio, video, etc. ) ne sont pas soumis aux regles du libre-echange. Chaque pays peut donc, en vertu de cet accord, limiter comme il l’entend l’importation de ce type de produits, sans risquer d’etre condamne par l’OMC.

33. La mondialisation nuit-elle a l’environnement ? Les effets de la mondialisation sur l’environnement sont discutes.

Certains affirment que la mondialisation de l’economie aggrave les nuisances et les degats ecologiques. D’autres affirment au contraire que la mondialisation peut favoriser une meilleure protection de la nature.

33 1. La mondialisation peut nuire a l’environnement La mondialisation de l’economie pourrait conduire, selon certains, a la destruction de l’environnement. Ceux-ci avancent plusieurs arguments :

– La mondialisation accentue la concurrence entre les firmes multinationales, une concurrence qui entraine forcement la necessite de reduire les couts de production afin de rester competitif.

Or la reglementation protectrice du cadre de vie, comme par exemple le retraitement obligatoire de certains dechets, coute de l’argent, donc augmente les couts de production… Ainsi, les firmes multinationales risquent-elles d’etre tentees de sacrifier la preservation de l’environnement sur l’autel de la competitivite et de la rentabilite.

– En outre, pour inciter les firmes multinationales a investir sur leur territoire, certains pays pourraient etre tentes d’accroitre leur attractivite en reduisant ou supprimant les mesures et les contraintes destinees a preserver l’environnement. La mondialisation provoque l’expansion des transports qui peuvent mettre en peril l’environnement ; par exemple le developpement des echanges maritimes a deja provoque de nombreuses catastrophes maritimes.

– La mondialisation exige le libre-echange, lequel facilite l’exportation de produits dangereux (dechets nucleaires, produits chimiques, etc. ).

– La mondialisation tend a diffuser le mode de production et de consommation occidental, c’est-a-dire de masse.

Or une production et une consommation de masse implique une utilisation intensive des ressources naturelles (petrole, forets, etc. ) et donc leur puisement rapide. L’un des meilleurs exemples pouvant illustrer tout ce qui vient d’etre dit est la Chine. Celle-ci connait un taux de croissance economique record depuis plusieurs annees, c’est-a-dire depuis son ouverture a l’economie mondiale. Or cette croissance economique spectaculaire s’accompagne d’une degradation certaine de l’environnement : pollution de l’air par les usines degageant du CO2, pollution des sols et des eaux par des produits chimiques, utilisation intensive des matieres premieres, etc. Le gouvernement Chinois ne se preoccupe pas ou tres peu des normes de respect environnemental.

Pour l’heure seul compte la croissance economique du pays

33 2. La mondialisation peut aussi favoriser une meilleure protection de l’environnement La mondialisation de l’economie peut contribuer a la sauvegarde de l’environnement de plusieurs manieres :

– L’ouverture exterieure des pays facilite les echanges de technologies preservant l’environnement : par exemple, l’elargissement de l’UE aux ex-pays communistes d’Europe de l’Est contribue a l’extension du libre-echange et favorise la diffusion de technologies nucleaires permettant de remplacer ou de reparer les vieilles centrales dangereuses installees a l’Est. Par ailleurs le protectionnisme pourrait avoir des effets pervers : a l’abri de barrieres douanieres, les firmes ne sont pas suffisamment incitees a moderniser leurs equipements. Elles peuvent ainsi perpetuer des combinaisons productives necessitant une consommation energetique elevee, contribuant ainsi a l’epuisement des ressources naturelles et a l’accroissement du niveau de pollution. C’etait notamment le cas des pays ex-communistes d’Europe de l’Est dont les industries etaient extremement polluantes.

L’UE a impose a ces pays de nouvelles normes de respect environnemental.

– La mondialisation accentue la concurrence ; les entreprises sont alors incitees a accroitre leur competitivite par la differenciation de leurs produits, par exemple en promouvant leurs qualites ecologiques (emballages recyclable, composants non polluants, certification « bio », etc. ), donnant ainsi aux consommateurs une bonne image des produits, donc facilitant leur vente.

– L’ouverture exterieure est facteur de croissance.

Cette croissance genere de la richesse et l’Etat, les administrations publiques, enregistrent des recettes supplementaires pouvant financer des investissements propres a ameliorer le cadre de vie, notamment l’environnement. Plus un pays est economiquement riche (donc ouvert a l’economie mondiale), plus il a les moyens financiers de mettre en place des politiques de preservation de l’environnement. Plus un Etat est pauvre, moins il aura de moyens a consacrer a la protection de la nature.

Une chose est certaine : la preservation de l’environnement passe necessairement par une cooperation internationale. Le probleme du rechauffement de la planete par exemple, provoque par l’accumulation des gaz a effet de serre, eux-memes generes par les activites humaines (transports, industries, etc. ) ne peut se resoudre qu’au niveau mondial, en incitant tous les pays a faire des efforts pour ameliorer la protection de leur environnement. Dans cette perspective, l’OMC a decide de creer un omite du commerce et de l’environnement charge d’etudier les relations entre mesures environnementales et mesures commerciales, et de faire des recommandations dans le sens de la preservation de l’ecologie. Conclusion generale Notre planete est aujourd’hui parcourue par une multitude de flux aux proportions jamais atteintes : flux de marchandises, flux de capitaux, flux de personnes ou encore flux d’informations. Cette circulation va en s’intensifiant et en s’elargissant sans cesse a de nouveaux espaces.

Les pays du monde s’integrent progressivement dans de multiples organisations economiques. Les regions du globe, ainsi reliees par une infinite de liens, sont de plus en plus interdependantes. De sorte que des observateurs n’hesitent plus a comparer notre monde en voie d’unification a un « village planetaire » en devenir. C’est le phenomene de la mondialisation. Pour les uns, cette mondialisation conduit a un monde meilleur grace a plus de croissance, donc plus de richesses, contribuant ainsi a l’amelioration generale du niveau de vie des habitants de la planete.

Pour d’autres, la mondialisation est un danger, au moins dans sa forme actuelle : c’est pourquoi les militants altermondialistes proposent une autre mondialisation, plus soucieuse de lutter contre les inegalites entre pays riches et pays pauvres, plus soucieuse du respect des identites culturelles et des peuples, plus soucieuse de l’environnement. Que l’on s’en rejouisse ou que l’on s’en inquiete, ce phenomene historique qu’est la mondialisation sera appele a s’accroitre au cours du XXIe siecle.