La mise en scene theatrale

La mise en scene theatrale

Dissertation : En quoi la mise en scene contribue t-elle a la construction des personnages au theatre ? La mise en scene est selon la definition d’Andre Antoine, considere en France comme le premier metteur en scene, « l’art de dresser sur les planches l’action et les personnages imagines par l’auteur dramatique ». Cette tache delicate et ardue doit reunir tous les elements d’une production : le texte, les comediens, le decor, les costumes, l’eclairage, le son et la musique en un tout coherent.

Chaque « maitre de la scene » peut donc apporter sa vision personnelle, guide par sa propre comprehension de l’? uvre . Il est donc pertinent de penser que la mise en scene peut contribuer a la construction des personnages au theatre. Nous montrerons alors que la mise en scene permet d’identifier clairement les personnages mais aussi de donner chair au personnage pour le spectateur. La mise en scene permet d’identifier clairement les personnages. En effet, elle met en valeur la hierarchie des personnages par les costumes tout en les ancrant dans un milieu social, historique.

Les metteurs en scene se fondent sur le texte dramatique pour construire les personnages. Ils se servent souvent des costumes pour placer un

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certain personnage dans un rang social precis. Les costumes se revelent etre annonciateurs d’une hierarchie entre les personnages, notamment grace a la symbolique des couleurs. Chaque couleur est synonyme d’une idee, d’un sentiment, et meme d’une maniere de penser. On peut ainsi penser a la mise en scene de Phedre de Chereau, qui utilise les couleurs comme porte parole du statut social. Hyppolite en bleu n’est pas encore roi.

Le bleu couleur de l’evasion mais aussi Divine symbolise la richesse, un haut rang social mais pas le pouvoir. Au contraire, son pere en rouge est l’incarnation du pouvoir. Jean Pierre Vincent, metteur en scene de la comedie Les Acteurs de bonne foi de Marivaux a egalement choisi des costumes tres precis pour ses personnages. Ainsi nous y retrouvons de facon clairement etablie la noblesse, le clerge, le tiers etat. Cependant, Jean Pierre Vincent, quant a lui n’a pas voulu moderniser ses costumes comme d’autres peuvent le faire. Il a choisi de symboliser le siecle de la comedie elle-meme.

Les matieres des costumes y jouent egalement pour beaucoup dans la construction de la hierarchie des personnages. Les plus pauvres portent des matieres naturelles comme le lin et les plus riches de la soie, du satin. Les metteurs en scene peuvent choisir d’ancrer les personnages dans un milieu social ou historique, pour ainsi avoir une scene vraisemblable, reelle qui corresponde au siecle de la piece interpretee. A l’inverse, ils peuvent choisir de creer un decalage entre le decor et la piece jouee pour par exemple prouver que cette piece est toujours d’actualite.

Ainsi, Chereau dans son interpretation de Phedre melange l’antique et la modernisme. Nous y retrouvons alors les colonnes, typiques de l’architecture de la Grece antique et des chaises metalliques qui au contraire revelent la modernite. Cette cohabitation de decors varies cree quelque chose de tres original, favorisant l’identification des personnages. Le lieu ou evoluent les personnages sur scene est tout aussi important que leurs costumes. Le decor pose d’une certaine maniere le ton, le registre de la piece mais aussi la relation que le metteur en scene entend avoir avec les spectateurs.

Jean-Louis Martinelli, metteur en scene de Berenice de Racine, n’a pris aucun risque quant a son decor qui est le plus simple et epure possible : deux portes, un trone et un puits au milieu de la scene. Il nous rappelle grace a ce decor que ses personnages respecteront les regles du theatre classique sans ajout ni modification particuliere. Cependant il joue avec la lumiere. Au theatre , les jeux de lumieres sont souvent utilises pour decrire une scene tragique ou tout simplement laisser dans l’ombre certains personnages pour mieux eclairer celui qui parle. Le son aussi joue son role, d’ailleurs Jean-Louis Martinelli l’a tres bien compris.

Le puits au milieu de la scene est la pour symboliser les actes , ainsi a chaque acte des gouttes d’eau tombent, cela peut aussi etre un symbole de la fuite du temps. Les metteurs en scene choisissent alors, les costumes, les decors qui correspondent le mieux a leurs personnages et permettront de les situer des le debut dans une hierarchie, dans un lieu grace a de multiples procedes ( modernisation, symbolisme…) Cependant, la mise en scene a un autre but que d’identifier clairement les personnages, elle donne chair au personnage pour le spectateur. La mise en scene donne chair au personnage pour le spectateur.

En effet, il y a une humanisation des personnages mais aussi et peut-etre qui decoule de cette humanisation, une creation d’emotion . Pour que le spectateur ait devant lui un personnage bien vivant et non un acteur declamant vers par vers son texte, les metteurs en scene humanisent leurs personnages. Chereau dans Phedre fait asseoir Hyppolite et Theramene dans le public. Ce procede tres original permet au spectateur de se sentir plus concerne par les personnages en question. La parole theatrale elle-meme constitue une situation de communication originale , elle s’appelle aussi « double enonciation ».

Ainsi il y a deux emetteurs : les personnages qui emettent des messages et l’auteur de la piece qui au travers des didascalies oriente la mise en scene, et trois recepteurs : les personnages, a qui les messages s’adressent directement, le metteur en scene et les comediens et enfin le spectateur, qui est le destinataire essentiel des informations echangees sur scene. Cela forme donc un trio d’echanges. Une autre maniere d’humaniser les personnages est celle utilisee par Lambert Wilson. Metteur en scene de Berenice de Racine change la condition d’empereur de Titus, et de roi pour Antiochus pour en faire des « businessman » du XXI eme siecle.

En modernisant ainsi la condition des personnages, Wilson permet au spectateur de se rapprocher des personnages. En abolissant cette frontiere de siecles, les personnages deviennent plus reels, plus humains. Grace a cette humanisation des personnages une creation d’emotion se forme. Le theatre depuis sa creation a pour but de susciter une emotion particuliere,( la joie, la peur, la tristesse, la souffrance) pour que le spectateur prenne du recul et puisse analyser la situation et comprenne la visee morale de la piece.

C’est la « catharsis » Ainsi, Chereau choisi de laisser Phedre se denuder. Ceci cree forcement un emoi particulier, car le createur de cette piece n’est autre que Racine, maitre du theatre classique et de la tragedie. Au theatre classique il est interdit de montrer des evenements juges choquants sur scene, ils doivent etre contes sous forme de recits. Se denuder est dons considere comme un evenement choquant au XVII eme siecle. C’est pourquoi, meme aujourd’hui, nous ne nous attendons pas en allant voir une tragedie a voir de telles scenes.

Enfin, La cantatrice chauve de Eugene Ionesco interpretee par Francois Berreur suscite le rire chez le spectateur tant les situations sont absurdes. Les personnages naifs et haut en couleur y jouent pour beaucoup egalement. L’humanisation et la creation d’emotion chez le spectateur permettent de donner chair aux personnages. Chaque metteur en scene est different et aura donc une vision differente de l’humanisation et des procedes a utiliser pour susciter de l’emotion. Mais chaque metteur en scene a pour but de donner chair au personnage pour que le spectateur puisse s’y identifier, aimer la piece.

La mise en scene contribue a la construction des personnages au theatre grace aux costumes, decors, intonations et registres des pieces, jeux de lumieres, mouvements et places des personnages sur scene. Cependant, il importe que l’emotion soit declenchee par le texte, par le discours, par l’agencement des faits accomplis, donc par l’art du poete, et non par les moyens grossiers qui constituent « le spectaculaire ». Nous pourrions donc nous interroger sur la necessite de tous ces artifices et illusions que nous offre le « Maitre de la scene ». Marie Vaux 1L