La fable

La fable

Historique La fable etait deja pratiquee en Mesopotamie, pres de deux mille ans avant notre ere. Des tablettes provenant de bibliotheques scolaires de l’epoque racontent brievement des histoires du renard flatteur ou encore du chien maladroit, (« Le chien du forgeron, n’ayant pu renverser l’enclume, renversa le pot d’eau »), d’elephant presomptueux (« Un moustique s’etant pose sur le dos d’un elephant lui demanda si son poids lui etait supportable ou s’il devrait plutot s’envoler »).

Beaucoup de ces textes montrent une grande affinite avec les proverbes et ont une construction antithetique (« Ce que tu as trouve, tu n’en parles pas ; mais ce que tu as perdu, tu en parles »). Toutefois, ils ne possedent pas de morale explicite. La fable dans l’Antiquite grecque Traduction d’une fable d’Esope. Le plus grand fabuliste de toute l’antiquite est surement Esope, poete grec du VIIe siecle av. J. -C. – VIe siecle av. J. -C. C’est d’ailleurs de lui que s’est inspire Phedre. Ses ? uvres ont ete traduites en 1615 par Epernius.

Ses fables sont fondamentales dans l’histoire de la litterature: « le Corbeau et le Renard », « Le lievre et la Tortue », « le Bucheron et la Mort », « Le vent et le Soleil » ne consitituent

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qu’une infime partie de son ? uvre. Esope est l’une des pierres fondamentales de la litterature mondiale. La premiere fable connue est « Le Rossignol et l’Epervier », que raconte Hesiode, aux alentours du VIIIe siecle av. J. -C. , dans Les Travaux et les jours. On y voit un pauvre rossignol qui, pris dans les serres d’un epervier, lui fait la lecon.

Cette fable vise a faire reflechir sur la notion de justice, a l’aide d’un raisonnement antithetique ou le personnage principal exploite outrageusement sa position de force. A l’epoque classique, Socrate lui-meme aurait consacre ses moments de prison avant sa mort a mettre en vers des fables d’Esope. Il s’en serait explique de la facon suivante : « Un poete doit prendre pour matiere des mythes [… ] Aussi ai-je choisi des mythes a ma portee, ces fables d’Esope que je savais par c? ur, au hasard de la rencontre. » (61b) Demetrios de Phalere publie le premier recueil de fables historiquement atteste.

Ce recueil, perdu, a donne naissance a d’innombrables versions. Une de celles-ci a ete conservee sous la forme d’un ensemble de manuscrits datant probablement du Ier siecle de notre ere, appelee Augustana. C’est a cette collection que l’on se refere lorsqu’on parle aujourd’hui des « fables d’Esope ». De la Grece, la fable passe a Rome. Horace propose une remarquable adaptation du « Rat de ville et du Rat des champs » (Satires, II, 6) que certains critiques estiment superieure a la version de Jean de La Fontaine. Il sera suivi par Phedre qui va veritablement faire de la fable un genre poetique.

La vogue de la fable est grande dans le monde greco-romain. Au IVe siecle, le poete romain Avianus en laisse une quarantaine, pour la plupart des adaptations de Phedre mais dont plusieurs ne sont attestees nulle part ailleurs et sont fort bien construites. Au Moyen Age La fable continue a se transmettre a travers tout le Moyen Age sous des noms d’auteurs ou de collections qui ressemblent a des pseudonymes : Romulus, Syntipas, pseudo-Dosithee. Mais la qualite litteraire est alors delaissee au profit des moralites. Au Moyen Age, un recueil de fables s’appelait un Isopet.

La thematique de la fable prend une singuliere expansion avec le Roman de Renart, collection de recits dus a des clercs anonymes du XIIe siecle. Dans ces histoires inspirees d’Ysengrimus, ? uvre latine du poete flamand Nivard de Gand, la lutte du renard contre le loup sert de pretexte a une vigoureuse satire de la societe feodale et de ses injustices. La fable cede ici la place a une comedie animale ou tout se tient. Au XIIe siecle, Marie de France publie un recueil de 63 fables. A la Renaissance Illustration du Corbeau et du Renard de Gueroult.

A la Renaissance, le genre des emblemes fut tres a la mode pendant tout le XVIe siecle. Apres n’avoir designe que la seule gravure, le sens du mot « embleme » va s’etendre pour s’appliquer egalement a la poesie qui lui sert de legende ou de commentaire. On ecrit alors des livres d’emblemes, a l’imitation de ceux de l’Italien Alciato, comme ceux de Guillaume Gueroult qui semble s’etre specialise dans ce genre avec le Blason des Oyseaux (1551), les Hymnes du Temps et de ses parties (1560), les Figures de la Bible (1564) composes sur le meme modele d’une gravure accompagnee d’une courte piece de vers.

Au nombre des emblemes de Gueroult dont le sujet a ete repris par Jean de La Fontaine, on compte : * Le Corbeau et le Renard ; * Le Singe et le Chat ; * L’Araignee et l’Hirondelle ; * La Cour du Lion ; * L’Astrologue qui se laisse tomber dans un puits; * La Cigale et la Fourmi; * La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Boeuf D’autres ecrivains pratiquent la fable en Europe comme le portugais Sa de Miranda. Le XVIIe siecle ou le siecle de Jean de La Fontaine Jean de La Fontaine devient au XVIIe siecle le plus grand fabuliste de tous les temps.

S’inspirant beaucoup d’Esope, de Phedre ou de Gueroult, il imprime sa marque en critiquant la societe du siecle de Louis XIV. Ayant ecrit plus de 500 fables, c’est un auteur prolixe, qui a marque a jamais la litterature francaise. Apres Jean de La Fontaine Le Corbeau et le Renard. En France, le succes prodigieux des fables de Jean de La Fontaine inspire bien des vocations : du grand seigneur au commis, en passant par le magistrat, le cure ou le marchand, tout un chacun s’essaie alors au genre de la fable. Le jesuite Francois-Joseph Desbillons, professeur, en produit cinq cent soixante.

Boisard publie un recueil qui en contient mille et une. Jean-Pons-Guillaume Viennet publie en 1843 les fables qu’il a ecrites pendant toute sa vie. Meme Napoleon Bonaparte, avant d’etre sacre empereur, en compose une, jugee assez bonne a l’epoque. Tous ces auteurs sont retombes dans l’oubli. XVIIIe siecle Ignacy Krasicki. Ivan Krylov. L’eminent litterateur touche-a-tout Antoine Houdar de La Motte proposera de son cote les premieres fables non inspirees des auteurs antiques, relativement inspirees malgre une certaine aridite de la langue.

Un seul nom a survecu durablement au cote de celui de La Fontaine ; celui de Florian (1755-1794). Son recueil compte une centaine de fables. Celles-ci sont orientees soit vers une morale politique, soit vers une morale privee. Ce dernier auteur s’inspire parfois de l’Anglais John Gay ou de l’Espagnol Tomas de Iriarte y Oropesa. Gotthold Ephraim Lessing illustre le genre en Allemagne, Ignacy Krasicki en Pologne. XIXe siecle Ambrose Bierce. Au XIXe siecle, la fable ne sera guere plus pratiquee. En Russie, toutefois, Ivan Krylov en fera son genre de predilection.

Cristobal de Bena (Fabulas politicas) et Juan Eugenio Hartzenbusch en feront autant en Espagne. Si Ambrose Bierce utilise la fable pour la satire politique aux Etats-Unis , Beatrix Potter (1866-1943) reste plus conventionnelle en Grande-Bretagne. Schema narratif La fable classique repose souvent sur une double structure. Des le titre, on trouve une opposition entre deux personnages dont les positions subjectives sont dissemblables : l’un est place en position haute et l’autre en position basse. Grace a un evenement narratif imprevu, celui qui etait en position haute se retrouve en position basse et vice versa.

Ce schema est designe par Christian Vandendorpe comme « un double renversement. [1] » Ce schema, qui se retrouve dans des dizaines de fables (souvent les plus populaires), permet de « bloquer » la comprehension et de vehiculer une moralite claire. Comme le dit Hegel, « La fable est comme une enigme qui serait toujours accompagnee de sa solution[2]. » Meme si la fable n’a plus la popularite qu’elle a connue, le schema qui en fait la force se retrouve dans le fait divers[3] et dans la legende urbaine[4]. La fable theatrale

Pour Aristote, la fable est l’un des six elements de la tragedie, avec les caracteres, le chant, l’elocution, la pensee et le spectacle[5]. La fable tragique est l’enchainement des actions et des faits exposes, formant la narration. Autrement dit, dans le langage cinematographique, le scenario. Les fables aux XXe et XXIe siecles Apres la guerre, le poete et ecrivain Jean Anouilh publia en 1961 un recueil de 43 Fables qui se vendit a des milliers d’exemplaires et qui resta comme l’un des meilleurs recueils de fables du XXe siecle.

Actuellement, la fable reste vivace sous sa forme la plus traditionnelle dans l’? uvre de Jean Chollet, qui en a publie plus de deux cent cinquante dans le gout de La Fontaine et en s’inspirant souvent de l’actualite. Chambaron publie en 2004 un recueil, Petits Metiers… dans lequel il revendique cette ascendance : des personnages aux fonctions surprenantes y remplacent le monde animalier. En 2007, Pierre Coutant dans L’Homme affable brocarde dans des fables traditionnelles les grandes hypocrisies de son epoque.