La depression

La depression

EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR REPERER LES SYMPTOMES CONNAITRE LES TRAITEMENTS SAVOIR A QUI S’ADRESSER LA DEPRESSION CHEZ L’ADULTE Auteurs

DR Xavier BRIFFAULT, chercheur en sociologie de la sante mentale, Cesames, CNRS Aude CARIA, psychologue, responsable de la Maison des usagers, CHU Sainte-Anne, Paris Claude FINKELSTEIN, presidente de la Federation Nationale des Associations d’usagers en PSYchiatrie (FNAPPSY), Paris DR Alain HERIQUE, medecin conseil, CNAMTS, Service medical du Nord-Est DR Philippe NUSS, psychiatre, service de psychiatrie, CHU Saint-Antoine, Paris PR Jean-Louis TERRA, psychiatre – professeur d’Universite, Universite Claude Bernard – Lyon I Stephanie WOOLEY, presidente d’honneur de l’association France-Depression Ce guide a ete realise avec le concours de :

L’AFSSAPS ET LA HAUTE AUTORITE DE SANTE (HAS) Brigitte CADEAC D’ARBAUD, responsable Fil Sante jeunes, Ecole des Parents et des Educateurs d’Ile-de-France Philippe CARETTE, psychotherapeute, Centre therapeutique « Recherche et Rencontre », Paris DR Jeanne ETIEMBLE, chercheur – responsable de mission « Expertise collective », hopital Bichat – Inserm, Paris DR Nicole GARRET-CLOANEC, psychiatre, presidente de la Societe d’information psychiatrique, Paris DR Marc GROHENS, psychiatre, Centre hospitalier de Poissy / Saint-Germain, membre de la Federation francaise de psychiatrie DR Claudie HAXAIRE, Universite de Brest – Faculte de medecine Anne-Claire HOREL, chargee de projet europeen,

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programme EAAD, Centre hospitalier Rene Dubos, Accueil sychiatrique, Cergy-Pontoise Elisabeth KREMER, psychotherapeute, formatrice, IFRDP – FF2P, Dijon Jerome LUCAS, psychologue, membre de la Federation francaise des psychologues et de psychologie (FFPP) Anne PIERRE-NOEL, responsable de communication, Unafam, Paris DR Serge RAFAL, responsable de la consultation d’acupuncture, de phytotherapie et d’homeopathie, Hopital Tenon, Paris DR Claude ROSENZWEIG, medecin generaliste, Maison medicale « Le Clos Mace », Geveze (Ille-et-Vilaine) Michael VILLAMAUX, psychologue, Centre de sante et de readaptation de Paris, MGEN Action sanitaire et sociale e que je voudrais dire a celui ou celle qui est dans le trou, c’est qu’il y en a beaucoup qui sont ou qui ont ete dans le trou et qu’on peut en ressortir. Peut-etre pas dans quinze jours, peut-etre pas dans un mois, peut-etre dans six mois seulement et que ca ne va pas etre marrant entre-temps mais voila, ne jamais perdre de vue l’idee : on peut en ressortir. » Dominique, 42 ans «C Sommaire 25 5 6 8 12 15 20 21 DEPRIME OU DEPRESSION : NE PAS CONFONDRE Qu’est-ce que la depression ? Les symptomes • Le risque de suicide Quelles sont les differentes formes de depression ? • Les troubles associes Quelles sont les origines de la depression ? « Pourrait-il s’agir d’une depression ? » Quelques questions pour faire le point avant de consulter un medecin 29 30 32 32 38 44 LES SOLUTIONS THERAPEUTIQUES Pourquoi le recours au soin est-il indispensable ? Quelles sont les solutions efficaces ? • La psychotherapie • Les medicaments antidepresseurs Quand l’hospitalisation est-elle necessaire ? 47 OU ET QUI CONSULTER 48 ? 50 ? 52 ? 55 ? 58 ? Qui consulter pour un diagnostic de la depression ? Qui consulter pour des traitements ? Ou consulter ?

Quelles sont les possibilites de remboursement des soins ? Peut-on beneficier d’un arret de travail ? 61 62 68 ? LE ROLE DE L’ENTOURAGE Comment reagir face a la depression d’un proche ? Comment rester efficace dans son soutien ? 71 72 ? CE QU’ON PEUT FAIRE PAR SOI-MEME Exprimer sa souffrance et accepter d’etre aide Reperer les signes precurseurs ? de la depression Mettre en place des actions de soin complementaires 74 76 ? 84 87 Mots a connaitre Adresses et numeros utiles 4 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Deprime ou depression : PREMIERE PARTIE ne pas confondre « Pourrait-il s’agir d’une depression ? » Voila une question difficile a poser. A se poser ?

On est fatigue, on n’eprouve plus de plaisir, on est triste… mais pas triste comme d’habitude, non, ca n’a rien a voir avec un « coup de deprime »… On se sent coupe de tout et c’est tellement plus douloureux… Si vous vous posez la question (a propos de vous-meme ou d’un de vos proches) ou si simplement vous voulez en savoir plus sur cette maladie, lisez ce chapitre. Vous y apprendrez que la depression est une maladie qui peut prendre plusieurs formes et toucher chacun d’entre nous. Vous y apprendrez egalement quels sont les principaux symptomes de cette maladie. Parce qu’apprendre a reperer ces symptomes (chez soi ou chez un proche), c’est un premier pas pour agir contre la maladie. DEPRIME OU DEPRESSION 5 Qu’est-ce que la depression ? LA DEPRESSION, CE N’EST PAS UN « MAL-ETRE » EXISTENTIEL, NI UN « COUP DE DEPRIME » Le fait de se sentir triste, d’etre « deprime », d’avoir des « idees noires » ou des difficultes a dormir ne veut pas forcement dire que l’on souffre de depression.

Les moments de cafard, de « blues », de doute ou de questionnement font partie de la vie. Au fil du temps et des evenements, chacun de nous experimente toute une gamme de sentiments, du plus triste au plus optimiste. A l’interieur de cette large palette d’emotions, la tristesse, le decouragement et le desespoir representent des experiences humaines normales. Ces variations et ces baisses de l’humeur ne doivent pas etre confondues avec ce qu’eprouve une personne depressive. Pour pouvoir parler de depression, et donc de maladie, il faut : • que ces perturbations de l’humeur soient multiples et bien caracterisees ; 6 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR • u’elles se manifestent de facon (quasi) permanente pendant une periode superieure a deux semaines ; • qu’elles entrainent une gene importante dans un ou plusieurs domaines de la vie quotidienne (difficulte ou incapacite de se lever, d’aller a son travail, de sortir faire ses courses…). LA DEPRESSION, C’EST UNE MALADIE QUI ENTRAINE SOUFFRANCES ET GENES Nous pouvons avoir l’impression de connaitre cette maladie sans pour autant en avoir jamais ete atteint. L’explication est simple : parmi la large gamme d’emotions et de sensations que nous eprouvons au cours de notre vie, certaines sont tres douloureuses. Nous en concluons hativement qu’etre depressif consiste a ressentir plus fortement et plus longtemps de telles souffrances.

Et cela nous incite a croire que nous pouvons facilement comprendre ce que vit une personne souffrant de depression. Mais la realite est differente. En effet, avant leur entree dans cette maladie, les personnes souffrant de depression ressentaient elles La depression en chiffres La depression est l’une des maladies psychiques les plus repandues. Selon une enquete realisee en 2005* par l’Inpes : • 8 % des Francais de 15 a 75 ans (soit pres de 3 millions de personnes) ont vecu une depression au cours des douze mois precedant l’enquete ; • 19 % des Francais de 15 a 75 ans (soit pres de 8 millions de personnes) ont vecu ou vivront une depression au cours de leur vie.

La depression est une maladie qui semble toucher davantage les femmes : environ deux fois plus de femmes sont diagnostiquees comme souffrant de depression. *Enquete Barometre sante 2005 DEPRIME OU DEPRESSION 7 aussi un large eventail d’emotions, agreables ou douloureuses. Or toutes ces personnes disent que leur etat au cours de la depression est tres different de tout ce qu’elles pouvaient avoir connu auparavant. Les emotions qu’elles eprouvent, les idees qui les traversent sont impregnees d’une souffrance morale permanente, plus insupportable que toute autre souffrance deja enduree. Autre difference avec les emotions habituelles de la vie, les personnes ont l’impression d’etre coupees de leur entourage.

L’etat depressif se caracterise par un changement profond (une veritable rupture) par rapport au fonctionnement habituel. Trois elements principaux sont typiques de cet etat : • une tristesse inhabituelle, differente d’apres les personnes qui souffrent de depression de la tristesse normale (cette tristesse est particulierement intense, elle n’est pas « directement » reliee a une cause, rien ne l’apaise, elle se mele d’angoisse et d’un sentiment de « fatalite ») ; • une perte d’interet et de plaisir qui touche tous les domaines de la vie ; • une association de plusieurs symptomes durables qui entravent douloureusement la vie quotidienne. Les mots en couleur sont definis p. 84

La depression est une maladie qui peut toucher chacun d’entre nous (quels que soient son age, son sexe, son niveau social…). Contrairement a certaines idees recues, elle ne releve ni d’une « fatalite », ni d’une faiblesse de caractere. La volonte seule ne suffit pas pour en sortir, notamment parce que la maladie provoque un sentiment de devalorisation de soi et des pensees negatives. LES SYMPTOMES DE LA DEPRESSION La depression entraine un « ralentissement » dans tous les registres de la vie quotidienne : vie affective, fonctionnement intellectuel, forme physique, mecanismes vitaux et corporels. 8 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Ce « ralentissement » se decline en multiples symptomes qui persistent pendant une longue duree (au-dela de quinze jours).

La liste ci-dessous peut vous aider a reperer certains de ces symptomes, sachant qu’une meme personne peut ne pas les ressentir tous. Forme physique : se sentir a bout Fatigue : meme sans avoir fait d’efforts particuliers, la personne eprouve en permanence une sensation de manque d’energie. Cette sensation omnipresente vient s’ajouter au decouragement et a la douleur physique et morale. Une des caracteristiques de cette fatigue depressive est que ni le repos ni le sommeil ne l’attenuent. Ralentissement general : la depression ralentit tous les gestes ; il faut donc plus de temps pour accomplir les taches habituelles. On n’a pas la force. Les emotions, les pensees et les actions sont comme « engluees » par la maladie.

Les mouvements du visage sont diminues, il en ressort une impression d’inexpressivite qui peut laisser croire a de l’indifference. La parole est lente, trainante. La personne a le sentiment de ne plus etre capable de reagir. Certaines fonctions du corps, comme la digestion, sont egalement ralenties. Bertrand, informaticien, 32 ans « Quand je suis comme ca, je suis completement amorphe. Je peux rester immobile pendant des heures. En general, je suis scotche devant la tele sans meme suivre ce qui s’y passe. Je ne peux plus rien faire, j’ai des boules d’angoisse terribles. Et puis un sentiment de neant. Incapable de bouger. Incapable de faire quoi que ce soit. » DEPRIME OU DEPRESSION 9 Anxiete, troubles anxieux, depression : a bien distinguer L’anxiete est ne emotion proche de la peur, qui existe chez tout etre humain. Elle correspond a une necessite permanente de s’adapter aux problemes de la vie (anxiete dite « adaptative ») et aux interrogations que chaque individu porte sur le monde (anxiete dite « existentielle »). Ces deux formes d’anxiete sont humaines. L’anxiete peut cependant devenir une maladie qui associe differents symptomes (psychologiques, physiques, comportementaux) et entraine une souffrance et une gene importantes dans la vie quotidienne. On parle alors de troubles anxieux. Ce terme regroupe l’ensemble des troubles mentaux dans lesquels existent des peurs irrationnelles et invalidantes (c’est-a-dire sources de genes).

Ces peurs peuvent etre : • des phobies : peurs declenchees par des objets ou des situations inoffensifs et exterieurs a la personne (par exemple, la phobie de la foule ou de l’ascenseur) ; • des obsessions : peurs issues des idees de la personne, dont elle mesure pourtant elle-meme le caractere absurde (par exemple, l’obsession des microbes ou de la salete, du parfait alignement des tableaux sur un mur, de la verification incessante de la fermeture des robinets…) ; • la panique : peur extreme, qui « jaillit » brutalement, sans facteur exterieur declenchant, avec parfois l’impression que la mort est proche ; • l’anxiete generalisee : elle correspond a un souci permanent, excessif et invalidant. La depression et les troubles anxieux sont deux maladies psychiques differentes, meme si elles peuvent avoir des symptomes similaires (comme la difficulte a dormir, a s’alimenter et a reflechir) et si certains signes d’anxiete peuvent etre presents en cas de depression.

Cette distinction est particulierement importante a faire dans la mesure ou les traitements medicamenteux et psychologiques peuvent differer. 10 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Vie affective : etre a plat Tristesse intense : dans la depression, la tristesse est particulierement douloureuse, incomprehensible et envahissante, souvent accompagnee de pleurs sans motif et d’un sentiment de desespoir. Incapacite a eprouver du plaisir : chez les personnes souffrant de depression, les petits plaisirs de la vie (ecouter de la musique, voir ses amis, lire son journal…) disparaissent. Tout parait egal, terne, sans interet. La vie a perdu tout sens, tout gout, toute couleur.

Hypersensibilite emotionnelle : les personnes souffrant de depression reagissent avec une grande sensibilite aux situations de la vie quotidienne (comme s’il manquait un « espace d’amortissement » entre elles et leur environnement). En meme temps, elles peuvent avoir l’impression d’etre vides, de ne plus eprouver d’emotions. C’est comme si elles etaient a la fois « anesthesiees » et hypersensibles. Impressions d’abandon, d’inutilite, de solitude : ces impressions cohabitent avec le sentiment de ne pas etre aime des autres, de n’avoir rien a dire qui puisse les interesser. Anxiete : les troubles anxieux et la depression renvoient a deux maladies differentes (voir encadre ci-contre). Neanmoins, l’anxiete est un symptome frequent en cas de depression.

Cette peur sans cause evidente s’exprime aussi bien dans le corps (« boule » dans la gorge, gene pour respirer, douleurs diverses, notamment dans le ventre) que dans la tete (peur « flottante », ruminations, sentiment de catastrophe imminente). Stephanie, etudiante, 24 ans « J’etais perdue, je n’arrivais plus a reflechir. Quand je voulais me faire du the, je ne savais pas s’il fallait que je commence d’abord a sortir une casserole ou a faire couler l’eau. J’etais perdue, je n’avais plus de logique. » DEPRIME OU DEPRESSION 11 Depression et risque de suicide La depression est la premiere cause de suicide : pres de 70 % des personnes qui decedent par suicide souffraient d’une depression, le plus souvent non diagnostiquee ou non traitee.

Les idees de suicide sont frequentes dans la depression (elles font d’ailleurs partie des symptomes de la maladie), elles meritent dans tous les cas d’etre signalees a un professionnel de sante afin d’en parler et de les desamorcer. Il est important de savoir que : • les personnes suicidaires ne veulent pas necessairement mourir mais souhaitent plutot mettre fin a une souffrance devenue insupportable ; • l’immense majorite des personnes en proie a des idees de suicide ne feront pas de tentative ; La crise suicidaire est une periode critique, marquee par un envahissement des emotions, par de grandes difficultes pour se concentrer, par le sentiment profond d’avoir tout essaye et que rien ne marche pour etre soulage. Le vecu d’impuissance est majeur. Cette crise suit ouvent un processus qui comporte plusieurs « stades » ou « paliers » : la personne a d’abord des « flashs » (visions breves qui donnent l’impression de devenir fou), puis des idees de suicide plus ou moins frequentes et intenses contre lesquelles elle va lutter mais qui peuvent eventuellement l’envahir ; elle risque alors de passer aux stades de l’intention (prise de decision), de la planification (recherche du moyen, du lieu, des circonstances et du moment) et de la mise en ? uvre de son suicide. Ce processus n’est cependant jamais ineluctable, il peut etre arrete a tout moment. C’est pourquoi, repetons-le, il est primordial d’en parler a un professionnel de sante. Il est possible de se rendre a toute heure du jour ou de la nuit aux urgences de l’hopital le plus proche, dans un Centre d’accueil et de crise (voir p. 54) ou encore d’appeler un centre d’appel specialise (voir p. 87-88). 12 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR

Fonctionnement intellectuel : voir tout en noir Ralentissement intellectuel : en cas de depression, il devient difficile de reflechir, de trouver les mots, de parler avec fluidite. On a l’impression d’avoir la tete vide, que le monde est devenu trop complique, qu’on ne saura pas s’y adapter, y faire face. Il faut faire un effort tres important pour accomplir des taches qui, jusqu’alors, s’effectuaient naturellement, sans y penser. Diminution de l’attention, de la concentration et de la memoire : fixer son attention, ne pas se laisser distraire, retenir ce qu’on vient de lire… ces taches deviennent tres difficiles a accomplir lorsque l’on souffre de depression.

Devalorisation de soi et culpabilite : la personne qui souffre de depression ne se sent bonne a rien ; elle se pense sans valeur ; elle s’accuse d’etre responsable des evenements penibles qu’elle vit et des emotions desagreables qu’elle ressent. Cette impression lui parait tellement definitive qu’il lui est difficile de demander de l’aide et de croire qu’un traitement peut changer quelque chose. Pensees negatives : la personne analyse les evenements de sa vie et les opinions des autres sous un angle systematiquement negatif. Ce pessimisme permanent retentit sur les proches et peut les decourager. Pensees autour de la mort (la sienne, celle de ses proches ou la mort en general) : liees au sentiment d’inutilite et a la perte de plaisir deja decrits, ces idees noires sont en fait « fabriquees » par la depression et disparaissent a la guerison de la maladie.

Les idees de suicide meritent dans tous les cas d’etre signalees a un professionnel de sante (voir encadre ci-contre). Mecanismes du corps : tout se deregle Degradation du sommeil : le sommeil est souvent mauvais, moins profond, tres court et peu reparateur. Le petit matin est souvent marque par un reveil precoce, avec impossibilite de se rendormir et une grande souffrance morale. Dans d’autres cas, le sommeil est en exces ; on parle de « sommeil refuge », comme si DEPRIME OU DEPRESSION 13 celui-ci correspondait a un besoin de « fuir ». Mais ce trop-plein de sommeil est insatisfaisant et plutot abrutissant. Alteration de l’appetit : l’appetit est le plus souvent diminue (les aliments semblent sans gout, l’assiette parait trop remplie).

La preparation des repas devient une corvee, leurs horaires se font irreguliers, leur composition desequilibree. La perte de poids est souvent un signe important pour etablir le diagnostic de depression. A l’inverse, on observe parfois une augmentation de la prise d’aliments (surtout sucres) pouvant conduire a une prise de poids. Problemes sexuels : la sexualite est une fonction a la fois tres biologique et tres relationnelle. Ces deux dimensions etant tres perturbees dans la depression, il est logique que la vie sexuelle soit affectee. Le desir sexuel de la personne peut disparaitre, son plaisir s’estomper. La realisation de l’acte sexuel devient alors difficile.

En consequence, le conjoint a parfois l’impression d’etre delaisse, ce qui accentue la tension dans la vie de couple. Symptomes physiques : la depression peut s’accompagner de douleurs (maux de tete, souffrances dans les articulations, problemes digestifs…) et de dereglements de certains indicateurs ou fonctions du corps (tension arterielle, perturbation ou interruption des regles…). Les consequences de ces symptomes depressifs sur le fonctionnement quotidien de la personne sont considerables. Toutes les relations sont affectees : au sein du couple et de la famille, avec les amis, dans le milieu professionnel. Pourtant, meme si les symptomes sont bien presents, la personne qui souffre de depression a souvent du mal a les reperer.

Le principal obstacle a leur reperage reside dans la difficulte a juger par soi-meme de son etat psychologique. Une autre raison tient au fait de considerer ces symptomes comme normaux, en les attribuant a une difficulte momentanee de la vie. L’evaluation par un professionnel de sante est donc indispensable. Si vous vous posez des questions, si vous pensez avoir repere plusieurs de ces symptomes, chez vous ou chez un de vos proches, la liste de questions (p. 25-27) peut vous aider a faire plus precisement le point avant d’aller consulter un medecin. 14 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Quelles sont les differentes formes de depression ? L’EPISODE DEPRESSIF CARACTERISE : LA FORME LA PLUS FREQUENTE

La depression se manifeste le plus souvent sous forme d’episode(s) : on parle alors d’episode depressif caracterise (ou d’episode depressif majeur). Le diagnostic d’episode depressif caracterise est pose : quand l’episode depressif dure suffisamment longtemps (plus de quinze jours) ; • quand, durant cette periode, chaque jour ou presque, et pendant la plus grande partie de la journee, la personne depressive se sent triste, sans espoir ou a perdu ses centres d’interet ; • quand cet etat de souffrance profonde est associe a de nombreux autres symptomes decrits plus haut (au moins 4), qui ont des • DEPRIME OU DEPRESSION 15 repercussions au niveau affectif, social, professionnel ou dans d’autres domaines importants de la vie. L’episode depressif peut etre plus ou moins severe

En fonction du nombre et de l’intensite des symptomes, la depression sera plus ou moins severe, la vie quotidienne plus ou moins perturbee. Lors des episodes les plus graves, tous les types de symptomes sont presents et leurs effets dans la vie de tous les jours sont considerables. Les incapacites et les perturbations relationnelles, professionnelles et sociales sont nombreuses. Dans les cas extremes, la personne ne parvient plus a prendre soin d’elle-meme (se nourrir, s’habiller seule, conserver un minimum d’hygiene personnelle…) ou peut tenter de mettre fin a ses jours. L’episode depressif peut etre associe a certaines periodes de la vie ou de l’annee

Saisons : l’episode depressif peut survenir regulierement a des moments bien particuliers de l’annee, apparaitre par exemple chaque hiver pour disparaitre au printemps. On parle alors d’episodes de type saisonnier. Cette forme est cependant assez rare. Maternite : c’est une periode a risque. L’episode depressif apres l’accouchement (episode depressif du post-partum) ne doit pas etre confondu avec le baby blues. Ce dernier est un moment de doute passager, facilement surmontable, qui se caracterise par le sentiment d’etre debordee, de ne pas comprendre les demandes de son bebe. Il se manifeste chez de nombreuses femmes (pres de 50 % des accouchees) quelques jours apres l’accouchement.

L’episode depressif du post-partum est, lui, une veritable depression qui repond a tous les criteres de la maladie (duree, symptomes, consequences) et qui debute dans le mois qui suit l’accouchement. Deuil : au cours des semaines qui suivent la perte d’un etre cher, il est courant de ressentir des symptomes depressifs. Ceux-ci font partie du processus normal de deuil. On peut avoir recours a un 16 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR professionnel de sante ou a toute autre personne pour en parler et « attenuer » la douleur du deuil. Mais le recours au professionnel de sante pour une prise en charge specifique devient absolument necessaire si les symptomes persistent sur une longue periode (plus de deux mois) ou sont particulierement « envahissants ». Les caracteristiques de l’episode depressif peuvent varier en fonction de l’age

Enfants et adolescents : la plupart des caracteristiques de la depression de l’adulte se retrouvent chez l’enfant et chez l’adolescent. Neanmoins, certains symptomes depressifs peuvent etre specifiques a ces tranches d’age. • Chez l’enfant, la depression peut se manifester a travers des comportements de retrait, d’absence ou – au contraire – d’irritabilite, d’agitation. Seule une ecoute attentive et avertie de l’enfant par un professionnel pourra la mettre en evidence. • Chez l’adolescent, la depression peut se manifester au travers de comportements nuisibles pour leur sante : abus d’alcool, de drogues, de medicaments (anxiolytiques, hypnotiques), etats d’agitation, violence verbale ou indifference apparente.

Les traitements de la depression de l’enfant et de l’adolescent sont specifiques et ne sont pas abordes dans ce livret1. Personnes agees : la depression (et le risque suicidaire) n’epargnent pas les personnes agees, bien au contraire. Les symptomes de la maladie sont tres semblables chez elles a ceux qu’on peut trouver chez les adultes plus jeunes mais la reconnaissance de la maladie peut etre plus difficile a faire, en raison de la diminution de l’activite physique (et parfois intellectuelle). Pourtant, le fait d’etre triste ou pessimiste ne doit pas etre considere comme normal lorsque l’on est age. Le traitement est aussi necessaire et efficace a cette periode de la vie que plus tot. Il est donc necessaire de se faire soigner. La prevention de la sante mentale des enfants est abordee dans la brochure J’ai des soucis dans la tete – Et si on en parlait ensemble ? (brochure illustree a destination des 3-11 ans et de leurs familles, editee par l’association Sparadrap, 3 €, commande possible sur www. sparadrap. org). La depression chez les adolescents est abordee dans plusieurs ouvrages, dont celui de Philippe Jeammet, Reponses a 100 questions sur l’adolescence, Paris, Editions Solar, 2002, 272 pages, 18 €. Gratuit et anonyme, Fil Sante Jeunes (0800 235 236) permet aux jeunes comme aux adultes de poser les questions qu’ils souhaitent. Des medecins et des psychologues y repondront. DEPRIME OU DEPRESSION 17 La duree de l’episode depressif est variable

Elle peut aller de quelques semaines a plusieurs mois, voire plusieurs annees. La plupart des episodes depressifs durent moins de six mois. Une guerison est possible,mais le risque de reapparition des symptomes est important Une guerison totale (disparition de tous les symptomes) et durable est possible. Mais le risque de reapparition de la maladie apres guerison totale est tres important (dans plus de 50 % des cas). La reapparition des symptomes peut intervenir soit longtemps apres le premier episode, a l’issue d’une remission (interruption) totale de plusieurs annees, soit plus regulierement, avec une remission partielle entre les episodes.

Dans certains cas, les periodes de remission entre les episodes peuvent devenir de plus en plus courtes. Cependant, lorsque la personne beneficie de traitements et d’un suivi adequats, le risque de reapparition des symptomes et la souffrance sont largement diminues. D’ou l’interet d’une prise en charge precoce de la maladie. Nicole, mere au foyer, 44 ans « J’avais mal au ventre, a la tete, je ne pouvais plus manger. Je ne pouvais plus sortir dans la rue, je ne pouvais parler a personne, je haissais tout le monde, meme mes enfants. » 18 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR QUAND LA DEPRESSION S’INSTALLE DANS LE TEMPS Dans certains cas, la periode depressive s’etend sur plusieurs annees.

On parle alors de depression chronique ou, lorsque les symptomes sont un peu moins nombreux et un peu moins intenses, de dysthymie. Les personnes souffrant de dysthymie se decrivent comme tristes en permanence. Les symptomes les plus frequents sont : une diminution d’interet et de plaisir qui provoquent une gene ou un handicap dans la vie quotidienne ; des sentiments d’insuffisance, d’impuissance, de culpabilite ou des ruminations a propos du passe ; de l’irritation ou des coleres excessives. La personne souffrant de dysthymie peut avoir tendance a s’effacer, a se retirer des activites sociales ; au travail, elle peut presenter une diminution d’activite, d’efficacite et de productivite.

Avec les annees, ces troubles deviennent comme partie integrante de sa vie ou de sa personnalite. Elle dit : « J’ai toujours ete comme ca », « Je suis comme ca ». Les professionnels de sante et les proches de cette personne courent aussi le risque d’etre victimes de cette confusion entre fonctionnement habituel et dysthymie. Cette maladie commence souvent de facon discrete et precoce (enfance, adolescence ou debut de la vie adulte). Sa severite risque de s’accroitre avec les annees si elle n’est pas traitee. LES TROUBLES BIPOLAIRES : UNE FORME QUI ALTERNE DEPRESSION ET SUREXCITATION Des episodes depressifs peuvent aussi survenir dans le cadre d’un « trouble de l’humeur » appele trouble bipolaire (ou maladie maniacodepressive).

Dans ce cadre, l’episode depressif peut preceder ou suivre un « episode maniaque », periode de surexcitation et d’euphorie excessive qui est une forme « inversee » de la depression. Au cours d’un tel episode, le ralentissement depressif est remplace par de l’excitation et de l’agitation, le pessimisme et la tristesse font place a un optimisme irrealiste et une familiarite deplacee. La personne est envahie par un besoin excessif de parler, de bouger. DEPRIME OU DEPRESSION 19 Elle ne ressent plus le besoin de dormir et peut dans certains cas avoir des idees delirantes (par exemple, qu’elle est invincible, qu’elle a des pouvoirs extraordinaires…).

Cet etat provoque des conduites insouciantes ou irresponsables (par exemple des depenses delirantes), des attitudes deplacees susceptibles d’entrainer des degats considerables pouvant persister meme apres la guerison. L’episode maniaque n’est pas a prendre a la legere : c’est une « urgence psychiatrique », en raison des risques que la personne fait courir a elle-meme et parfois aux autres. La personne peut par exemple etre mise temporairement sous sauvegarde de justice, afin de la proteger des actes inconsideres qu’elle pourrait commettre. Le traitement de cette maladie chronique est tres specifique, et different de celui de la depression. Quels peuvent etre les troubles associes ? La depression peut avoir des liens avec d’autres maladies, psychologiques ou physiques.

Il peut notamment s’agir : • de troubles anxieux (voir encadre p. 10) : on considere generalement que l’existence d’un trouble anxieux precedant ou associe a la depression accroit la severite de la depression, ainsi que son risque de survenue ; • d’alcoolisme, de dependance a certains medicaments (anxiolytiques ou hypnotiques) ou d’abus de substances psychotropes (cannabis, ecstasy, cocaine…) : les personnes souffrant de depression peuvent etre tentees d’abuser de ces substances pour apaiser leur angoisse. Par ailleurs, l’association d’un trouble depressif a une maladie physique grave ou chronique (diabete, cancer, accident vasculaire cerebral…) peut endre l’identification et le traitement de la depression plus difficile (les symptomes de la depression pouvant etre sous-estimes et attribues a l’autre maladie). 20 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Quelles sont les origines de la depression ? Face a une depression, on recherche souvent des explications, et les premieres questions qu’on se pose sont : « Pourquoi moi ? Que s’est-il passe ? A quoi est-ce du ? Qu’ai-je fait ? » Notre besoin de comprendre et de donner un sens a ce qui nous arrive est un processus naturel, en particulier a l’occasion d’experiences douloureuses. Il est alors frequent d’avoir recours a des explications d’apparence vraisemblables.

On evoque alors des causes externes (« C’est parce que ca ne va pas dans mon travail », « Quand je n’aurai plus ces problemes financiers, ca ira mieux », « J’ai besoin de rencontrer quelqu’un pour ne plus etre seul(e) »…) ou bien des causes internes (« C’est de ma faute », « Je suis un(e) bon(ne) a rien », « Je n’ai jamais pu reussir comme les autres »…). Pourtant, ces interpretations sont le plus souvent tres eloignees des « origines reelles » de la depression. Elles constituent meme DEPRIME OU DEPRESSION 21 souvent un frein au processus de soin et de guerison, en nous retenant de consulter un medecin. La depression, comme la plupart des maladies psychiques, ne provient pas d’un facteur unique.

Elle resulte au contraire d’un ensemble de mecanismes de diverses natures, encore imparfaitement connus. On distingue habituellement les « facteurs » biologiques, psychologiques et environnementaux (lies a l’environnement social ou familial). Certains de ces facteurs interviennent tres en amont de la depression, ils « preparent le terrain », on parle alors de facteurs de risque (ou facteurs de vulnerabilite). Par exemple, le fait d’avoir des parents qui ont souffert de depression augmenterait le risque d’etre touche par la maladie. De meme, le fait de vivre des evenements traumatisants ou des conflits parentaux importants pendant la petite enfance serait associe a un risque accru de depression dans la suite de l’existence.

D’autres facteurs interviennent juste avant la depression, ils la « declenchent » : on parle alors de facteurs precipitants. LES FACTEURS BIOLOGIQUES La survenue des symptomes de la depression est liee a une perturbation du fonctionnement cerebral. C’est bien le fonctionnement du cerveau qui est atteint, non sa structure. Cette distinction est importante car elle permet de bien comprendre que cette maladie peut etre reversible. Ce dysfonctionnement du cerveau se traduit notamment par des anomalies dans la fabrication, la transmission et la regulation de certaines substances chimiques : les neuromediateurs (egalement appeles neurotransmetteurs).

Il est difficile de savoir a l’heure actuelle si ces anomalies sont la cause initiale ou bien la consequence de la depression. Quoi qu’il en soit, leur correction et la restauration du bon fonctionnement des neuromediateurs sont indispensables. C’est la principale fonction des medicaments antidepresseurs. On sait aujourd’hui que la psychotherapie entraine elle aussi ce type d’amelioration biologique si le dereglement initial est modere. 22 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Raymond, retraite, 63 ans « Si par malheur je me reveille la nuit, j’ai mon petit moteur qui se met en route, je n’arrete plus de penser et je n’arrive plus a me rendormir. »

LES FACTEURS PSYCHOLOGIQUES Des mecanismes psychologiques particuliers sont egalement impliques dans la depression : sentiments de perte, conflits moraux, croyances negatives, mauvaise estime de soi (« Je ne peux rien faire de bon », « Je ne vaux rien »…). Certains de ces mecanismes trouvent leur origine dans l’enfance (plus ou moins bonne qualite des premieres relations avec les parents, premieres experiences associees a un sentiment de perte, de solitude, d’impuissance, de culpabilite ou de honte…), d’autres peuvent etre lies a des elements plus actuels (traumatismes, deuils lies a la perte d’une personne, d’un ideal ou d’une image de soi).

Certains styles de comportements (sur les plans intellectuel, emotionnel, relationnel), ainsi que certains modes de defense psychologiques peuvent favoriser l’emergence et le maintien d’une depression. Ainsi, certaines personnes souffrant de depression expriment des croyances negatives (elles se croient par exemple « incapables » ou « indignes » de faire certaines choses…) ou n’envisagent que des perspectives pessimistes, a la fois pour le monde qui les entoure et pour elles-memes. Chez ces personnes, certains evenements de la vie quotidienne, analyses sous leur angle le plus negatif, peuvent declencher automatiquement des pensees depressives, sans qu’il leur soit possible de faire appel a d’autres experiences plus positives.

Comme nous le detaillerons plus loin (p. 33), c’est en agissant sur ces mecanismes psychologiques problematiques que la psychotherapie intervient sur la depression. DEPRIME OU DEPRESSION 23 LES FACTEURS LIES A L’ENVIRONNEMENT SOCIAL OU FAMILIAL Certains evenements de la vie tres perturbants ou un stress excessif et permanent peuvent favoriser l’apparition d’une depression. Par exemple, la mort d’un etre cher, la perte d’un travail, une rupture affective, des conflits familiaux ou sociaux, une maladie… En plus des facteurs precipitants et des facteurs de risque, la presence ou l’absence de facteurs de protection dans l’environnement de la personne peut aussi jouer un role.

Par exemple, la presence de personnes proches reconfortantes et valorisantes ou l’engagement dans des activites personnelles interessantes peuvent proteger de la depression ou favoriser la guerison. A l’inverse, l’absence de ces facteurs peut faciliter l’apparition (ou la reapparition) de la depression. 24 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR POURRAIT-IL S’AGIR D’UNE DEPRESSION ? Quelques questions pour faire le point avant de consulter un medecin Vous vous demandez s’il est possible que vous (ou un proche) viviez actuellement un episode depressif ? Les questions p. 26-27 peuvent vous aider a faire le point, vous indiquer si cela est probable ou non… mais elles ne vous apporteront pas de certitude absolue. Seul un professionnel de sante habilite a etablir un diagnostic de depression pourra vous eclairer de facon precise.

Le diagnostic de la depression est une procedure complexe qui necessite de prendre en compte l’ensemble des symptomes et de la situation de la personne, ses antecedents, sa personnalite… Comme nous l’avons vu, certains symptomes attribues dans un premier temps a la depression peuvent etre dus en realite a une autre maladie. A l’inverse, certains symptomes dus a la depression peuvent faire croire – a tort – a l’existence d’une autre maladie. Seul un professionnel de sante competent sera capable d’y voir clair. Sur la base du diagnostic, vous pourrez le cas echeant definir avec lui ou avec d’autres professionnels de sante le traitement le mieux adapte a votre situation. DEPRIME OU DEPRESSION 25 POURRAIT-IL S’AGIR D’UNE DEPRESSION ?

Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, eprouvez-vous une tristesse inhabituelle, tres douloureuse, qui perturbe votre vie quotidienne ? Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, avez-vous perdu votre interet pour la plupart des choses, comme les loisirs, le travail ou les activites qui vous plaisent habituellement ? • Si vous n’avez vecu aucun de ces deux etats, il est peu probable que vous traversiez une periode de depression. • Si vous vivez depuis au moins 15 jours l’un de ces etats ou les deux, poursuivez votre questionnement sur la page suivante. Ne confondons pas deprime et depression ! Le terme « depression » ne s’emploie pas a la legere.

Pour faire l’hypothese d’une depression, il faut une association de plusieurs symptomes specifiques (voir p. 10-16) generant une souffrance importante, inhabituelle et se manifestant : depuis au moins quinze jours ; presque chaque jour ; • presque toute la journee. • • Par ailleurs, si pres de 8 % de la population presente sur une periode de 12 mois un episode depressif, d’intensite variable, cela signifie que 92 % de la population n’en presente pas (80 % de la population ne presentera d’ailleurs aucun episode depressif au cours de sa vie). 26 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, vous etes vous senti(e) epuisee(e) ou sans energie ?

Depuis quinze jours, avez-vous pris ou perdu du poids – au moins 5 kg – sans le vouloir ? Depuis au moins quinze jours, presque chaque nuit, avez-vous eu des problemes de sommeil (difficultes a rester endormi(e), reveils tres tot le matin ou, au contraire, exces de sommeil, envie permanente de dormir) ? Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, vous etes-vous senti(e) plus lent(e) que d’habitude (par exemple pour parler ou pour vous deplacer) ou, au contraire, avez-vous ete beaucoup plus agite(e) ou nerveux(se) que d’habitude ? Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, avez-vous eu beaucoup plus de mal a vous concentrer ?

Depuis au moins quinze jours, presque chaque jour, presque toute la journee, vous etes-vous senti(e) sans valeur ou bon(ne) a rien ? Depuis au moins 15 jours, presque chaque jour, presque toute la journee, avez-vous beaucoup pense a la mort, que ce soit la votre, celle de quelqu’un d’autre ou la mort en general ? • Si vous avez observe chez vous plusieurs de ces symptomes, ceci constitue un signal d’alerte qui doit vous encourager a en parler avec un medecin. DEPRIME OU DEPRESSION 27 28 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR DEUXIEME PARTIE Les solutions therapeutiques Oui, la depression se soigne. A condition d’en faire la demarche, bien sur… Il est difficile de se battre seul dans son coin.

Psychotherapie, medicaments : il existe aujourd’hui des traitements efficaces, souvent complementaires, adaptes a chaque personne et a l’intensite de sa maladie. Dans cette deuxieme partie, vous trouverez des reponses aux questions que vous vous posez sur la psychotherapie (« Comment ca marche ? », « Qui en propose ? »,« Dans quels cas est-ce indique ? », « Combien de temps ca dure ? », « Comment choisir son praticien ? »…) et sur les medicaments (« A quoi servent-ils ? », « Comment agissent-ils ? », « Comment en faire bon usage ? »…). Quel que soit le traitement, sa mise en ? uvre s’appuie toujours sur une alliance, un dialogue, une collaboration etroite entre votre (vos) soignant(s) et vous.

Vous avez le droit d’etre informe, vous pouvez a tout moment poser des questions, exprimer vos attentes, vos craintes… Vous etes acteur de votre traitement. LES SOLUTIONS 29 Pourquoi le recours au soin est-il indispensable ? La depression est une maladie qui, pour des raisons diverses (voir p. 21), est associee a une perturbation du fonctionnement du cerveau : elle affecte l’ensemble de l’organisme ainsi que la personnalite. La volonte seule ne suffit pas pour agir sur une maladie aussi complexe. Un traitement est donc absolument necessaire quand on souffre de depression. La necessite d’un traitement est une idee parfois difficile a accepter.

Pour des raisons psychologiques, culturelles, mais aussi pour des raisons liees aux effets de la depression1, on a souvent tendance a penser qu’il serait preferable de « s’en sortir par soi-meme », que se faire soigner serait une « facilite », qu’il s’agirait d’une victoire de plus de la depression, dans la mesure ou accepter de l’aide reviendrait a renoncer a toute dignite ou lutte personnelle. 30 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Rien n’est plus faux. Contre la depression, il est trop difficile de se battre tout seul : la lutte est trop inegale. Au contraire, se faire soigner, suivre une psychotherapie, un traitement medicamenteux, c’est en realite redevenir acteur, retrouver le choix, reprendre en main son destin.

Tout traitement s’appuie sur une alliance, une collaboration etroite entre le patient et le(s) soignant(s). C’est dans le cadre de cette alliance que sera determine le projet de soin. Ce projet tient compte des souhaits du patient qui sera informe sur la nature de ses troubles, leur evolution, les possibilites de prise en charge, la frequence des consultations. Accepter un projet de soin ne veut bien sur pas dire qu’il faille se faire soigner passivement. La guerison d’un trouble psychique necessite une participation et un engagement importants de la part du malade (voir p. 71). Le role de l’entourage ne doit pas non plus etre sous-estime, dans la mesure ou il peut proteger un malade qui a perdu confiance en lui (voir p. 61). La depression peut generer une culpabilisation et une devalorisation de soi telles qu’il est alors difficile de demander de l’aide et de croire qu’un traitement peut etre utile (voir p. 8 « Les symptomes de la depression »). LES SOLUTIONS 31 Quelles sont les solutions efficaces ? Il existe de nombreux traitements de la depression, adaptes a chaque personne et a l’intensite de la maladie (episode leger, moyen ou severe) et souvent complementaires. LA PSYCHOTHERAPIE Qu’est-ce que c’est ? A quoi ca sert ? La psychotherapie est un traitement a part entiere de la depression. De nombreuses etudes ont permis d’en prouver l’efficacite et d’en preciser les indications.

Pendant un episode depressif, la psychotherapie permet de mieux gerer la maladie, de reduire ses symptomes et leurs consequences, de donner du sens a ce que l’on vit et de pouvoir envisager de nouveaux projets. Ses premiers effets (un soulagement lie a une ecoute adaptee) peuvent se faire sentir 32 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR immediatement, les changements durables interviennent au bout de quelques semaines. Apres la guerison d’un episode depressif, la psychotherapie sert aussi a prevenir la reapparition des symptomes. Martine, expert-comptable, 37 ans « J’ai vu qu’il etait neutre, que tout ce que je dirai resterait confidentiel, je me suis sentie en confiance. » Comment ca marche ?

Il existe differentes methodes de psychotherapie privilegiant des formes particulieres d’intervention. Mais quelle que soit la methode utilisee, la psychotherapie est avant tout fondee sur un echange de personne a personne qui s’instaure grace a l’ecoute, la bienveillance, l’absence de jugement et la comprehension du praticien. Celui-ci est par ailleurs tenu au secret professionnel. La qualite de la relation, le sentiment d’etre accueilli et compris dans ce que l’on vit et ressent sont des elements determinants de toute psychotherapie. La psychotherapie s’appuie dans la plupart des cas sur un echange verbal, mais pas n’importe lequel. Il ne s’agit pas d’une « discussion » du type de celles que l’on a dans la vie de tous les jours.

Il s’agit d’une relation particuliere ou un professionnel forme a l’ecoute et a la comprehension des problemes psychologiques propose, dans un cadre concu pour cela, d’aborder ces problemes d’une maniere specifique, differente de la notre et de celle que nos proches peuvent nous proposer. Une des regles essentielles de cette relation est de permettre l’expression de ce que nous vivons, ressentons et pensons en toute liberte, sans craindre d’etre juge ou critique. On pourra par exemple aborder des situations ou des emotions qui nous effraient, se pencher sur nos « zones d’ombre » et parler de choses tres difficile a aborder, meme avec nos proches. LES SOLUTIONS 33

Le praticien est la pour entendre la souffrance, les difficultes, les doutes ; il favorise l’expression de ce qui est reellement ressenti et nous aide a mettre des mots sur notre vecu en utilisant differentes techniques : questions ouvertes, reformulation des problemes, exercices de mise en situation, espaces de silence. Le praticien nous propose donc un face-a-face avec nous-memes en toute confiance, dans un cadre securisant. Tout est fait pour aller au-dela d’ou nous avons l’habitude d’aller ; nous pouvons alors nous regarder d’une autre facon, prendre conscience de nouvelles choses, aborder nos problemes d’une facon differente, trouver de nouvelles reponses et des solutions efficaces.

Pour favoriser ce changement, le praticien peut aussi intervenir de facon plus active ; il peut nous inviter a parler d’un sujet particulier, nous transmettre sa comprehension du probleme ou nous donner certaines explications, nous faire des recommandations, nous inviter a faire certains exercices (dans son cabinet, chez nous ou a l’exterieur)… Selon le praticien et la situation de la personne, differents modes d’intervention pourront etre mis en ? uvre. Ces modes d’intervention sont en effet adaptes a la personne qui consulte (a sa personnalite, a ses problemes, a son type de depression) et a la singularite de chaque situation de soin ; ils peuvent egalement evoluer en fonction des moments de la psychotherapie. Francis, plombier, 51 ans « C’est mon medecin generaliste qui m’a conseille d’aller la voir. Avec elle, je me suis senti a l’aise, j’ai dit des choses dont je n’avais parle avant. Parler a une personne etrangere a ma famille, a une professionnelle experimentee, ca m’a fait du bien. » 34 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Qui en propose ?

Les psychiatres : ce sont des medecins specialises qui ont recu, apres leurs etudes de medecine, un enseignement supplementaire de quatre ans sur les maladies mentales et leurs traitements. Les psychologues : ils ont effectue cinq annees de psychologie a l’universite et possedent un diplome de 3e cycle (DEA, DESS ou master). Contrairement aux psychiatres, les psychologues ne sont pas medecins. Les seances chez un psychologue ne sont remboursees par l’Assurance maladie que dans les etablissements publics (voir p. 53). Quel que soit le professionnel rencontre, n’hesitez pas a echanger avec lui sur la formation qu’il a suivie. Dans quels cas est-ce indique ? La psychotherapie est un traitement toujours pertinent en cas de depression, quel que soit le type de depression, son niveau de severite ou son anciennete.

Elle peut etre utilisee seule (dans le cas d’episodes depressifs d’intensite legere) ou conjointement aux medicaments antidepresseurs ou a d’autres traitements. En cas de depression severe en phase active, un soutien psychologique sera propose, mais le travail de psychotherapie ne pourra debuter qu’une fois l’intensite de la souffrance diminuee par le traitement medicamenteux. La psychotherapie n’est en aucun cas limitee a une categorie sociale, un age ou un sexe particulier. Il est recommande de consulter dans les meilleurs delais, afin d’eviter une persistance et une aggravation eventuelles de la maladie qui rendraient le traitement plus difficile, accroitraient inutilement la souffrance et risqueraient de « chroniciser » les troubles (de les installer dans la duree).

Cependant, le necessaire engagement du patient dans la psychotherapie fait qu’on ne « recoit » pas une psychotherapie comme on peut « recevoir » des medicaments. C’est la raison pour laquelle, LES SOLUTIONS 35 meme si celle-ci peut vous etre recommandee, un desir d’entreprendre ce travail psychologique est necessaire pour commencer une psychotherapie. Combien ca coute ? Les prix peuvent varier selon les praticiens. Renseignez-vous lors de la prise de rendez-vous. Combien de temps ca dure ? La duree d’une psychotherapie de la depression peut beaucoup varier en fonction du type de depression, de sa severite et de la situation de la personne qui consulte.

Si 15 a 20 seances suffisent dans les situations « simples », un suivi plus long peut etre necessaire si la depression est associee a d’autres difficultes, qu’elles soient corporelles, psychologiques, sociales, relationnelles… L’evaluation initiale (apres quelques seances) et une reevaluation reguliere, menee en concertation avec le patient, permettent au praticien d’informer ce dernier sur la duree envisageable. La frequence des seances est generalement d’une par semaine, mais elle peut etre plus ou moins elevee, selon les besoins et les phases de la psychotherapie. La duree de chaque seance se situe souvent entre 30 et 60 minutes, mais peut egalement varier en fonction des memes imperatifs.

En cas d’episodes depressifs recurrents (repetes), le suivi psychotherapique peut etre prolonge et les seances espacees ; cette psychotherapie au long cours permet de diminuer le risque de reapparition des symptomes ainsi que leur intensite. Comment choisir son praticien ? La qualite de la relation entre le patient et le praticien est un element essentiel a la reussite d’une psychotherapie. Il est donc primordial de choisir un praticien disposant de la formation et des competences requises pour soigner la depression et avec qui l’on se sent a l’aise. Le medecin traitant peut orienter vers un professionnel qu’il connait. 36 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR

A l’occasion des premieres seances, meme si l’on se sent anxieux, nerveux ou tres preoccupe par ses problemes, n’hesitez pas a prendre le temps de vous informer et d’aborder avec le praticien un certain nombre de questions portant notamment sur : • sa formation La psychotherapie est une activite qui requiert un haut niveau de competence et ne peut s’improviser. Quelle que soit sa formation initiale (voir p. 48-51), il est important que le praticien ait suivi une formation specifique reconnue. les modalites pratiques de la psychotherapie Quelles sont la duree, la frequence et le prix des seances ? Que se passe-t-il si on ne peut pas se presenter a un rendez-vous ? Que faire en cas d’urgence ?

Quelques seances peuvent etre necessaires au praticien pour etre en mesure de repondre aux questions concernant l’amelioration des troubles (« A partir de quand peut-on esperer une amelioration ? Une guerison ? »). • Est-ce que c’est difficile ? Le travail psychologique passe par un face-a-face avec soi-meme, ses problemes, ses emotions, sa souffrance ; on peut craindre que cette confrontation soit douloureuse et tenter de l’eviter. Les moments d’incertitude, les sentiments de plus grande vulnerabilite et le vecu d’emotions intenses sont en effet presents lors du processus de soin. Ils sont associes a de breves periodes de destabilisation. Le therapeute peut alors proposer un soutien plus rapproche pour valoriser les efforts mis en ? uvre, meme si ces derniers ont pu conduire a une rechute momentanee.

La psychotherapie vise a la mise en place de changements durables. Or tout changement suppose l’abandon d’habitudes et d’automatismes, ce qui n’est pas toujours evident a accepter. En realite, les progres de reconstruction, de reprise de confiance en soi et l’apaisement qui resultent du travail psychologique sont suffisamment importants et profonds pour percevoir que l’aventure de la psychotherapie en vaut la peine. LES SOLUTIONS 37 Est-ce que c’est efficace ? Oui. Des etudes ont prouve l’efficacite de differents types de psychotherapies sur differents types de patients souffrant de differents types de depressions. Dans de nombreux cas, la psychotherapie peut conduire a la guerison complete et durable.

Dans d’autres cas, elle procure une amelioration des symptomes depressifs et anxieux, ainsi qu’une diminution de la frequence des episodes dans les cas de depressions « recidivantes ». Dans tous les cas, la psychotherapie contribue de facon significative a l’amelioration de la condition et de la qualite de vie de la personne. Est-ce que c’est pris en charge ? Les conditions de remboursement par l’Assurance maladie ou les assurances complementaires varient selon le praticien (voir p. 55). LES MEDICAMENTS ANTIDEPRESSEURS Il existe differents degres d’intensite dans les depressions. Toutes les depressions ne necessitent pas de traitement par medicaments antidepresseurs. Aurelie, comedienne, 29 ans « Les medicaments, je dois dire que ca m’a aidee.

Ca n’a pas resolu tous mes problemes, mais ca m’a permis de dormir, de tenir le choc physiquement, d’ecarter un peu mes peurs, mes idees noires. » A quoi servent-ils ? L’objectif du traitement par medicaments antidepresseurs est la reduction significative des symptomes depressifs et de leurs conse- 38 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR quences dans la vie quotidienne. Les medicaments antidepresseurs ameliorent les symptomes de la depression a l’issue d’environ 3 a 4 semaines de traitement continu. Ils aident generalement a restaurer le fonctionnement normal du sommeil, de l’appetit, a retrouver l’initiative, une perception positive de la vie… Ce fonctionnement normal persiste apres l’arret du traitement. Comment agissent-ils ?

Les medicaments antidepresseurs sont des molecules qui agissent au niveau du cerveau, plus precisement sur les extremites des neurones (appelees synapses), a travers lesquelles les neurones communiquent les uns avec les autres. Cette communication entre neurones se fait sous forme de « messages » chimiques appeles neurotransmetteurs ou neuromediateurs (par exemple, la serotonine ou la noradrenaline). Les medicaments antidepresseurs agissent par divers mecanismes. Aucun medicament ne mobilise a lui seul tous ces mecanismes. En fonction des symptomes de la depression, de l’efficacite ou de l’echec de tel ou tel medicament antidepresseur prescrit dans le passe, le medecin peut proposer un traitement antidepresseur dont le mode d’action est le plus adapte a chaque situation.

Les medicaments antidepresseurs peuvent avoir un ou plusieurs mecanismes d’action en commun, tout en ayant des effets indesirables tres differents les uns des autres. Un medecin qui decide de changer de traitement parce que son patient presente des effets indesirables peut donc proposer un antidepresseur dont l’effet therapeutique est similaire mais dont les effets indesirables sont differents. Les mots en couleur sont definis p. 84 Comment en faire bon usage ? Quelle est la duree du traitement ? Quel est le delai d’action ? En raison de la complexite des mecanismes d’action des antidepresseurs, il faut souvent attendre quelques semaines (generalement 3 ou 4, parfois un peu plus) avant d’en ressentir les effets benefiques. LES SOLUTIONS 39

Le traitement d’un episode depressif comporte deux phases : • la phase aigue, dont l’objectif est la disparition des symptomes, dure de six a douze semaines ; • la phase de consolidation, dont l’objectif est de stabiliser l’amelioration des symptomes, dure entre quatre et six mois (en fonction des symptomes et du nombre d’episodes precedents). L’arret du traitement pendant cette periode critique fait courir un risque tres eleve de reapparition des symptomes. C’est pour cela qu’il est indispensable de poursuivre le traitement, meme apres la disparition des symptomes, conformement a l’avis du medecin. Comment arreter le traitement ? Les medicaments antidepresseurs ne creent pas de dependance physique.

Toutefois, il peut etre difficile d’envisager d’arreter le traitement. Dans tous les cas, l’arret doit etre progressif et « prepare » avec le medecin. Il se deroule habituellement sur quelques semaines. Si, pendant cette periode d’arret progressif, les symptomes reapparaissent, il est necessaire de consulter immediatement son medecin qui proposera habituellement de reprendre le traitement a la dose efficace. Francois, gerant de supermarche, 44 ans « Avec mes medicaments, ce n’est pas le « ciel bleu et les petits oiseaux », mais j’ai comme une espece de distance, d’indifference. Les choses qui me harcelaient avant ont davantage tendance a glisser. Ce qui fait que ca fait moins mal. Et ca, c’est important en soi. »

Quelles sont les consequences d’un arret trop brutal du traitement ? Quelques symptomes peuvent apparaitre en cas d’arret brutal d’un traitement antidepresseur : anxiete, irritabilite, syndrome pseudogrippal (frissons, fievre, fatigue, mal aux muscles…), cauchemars, insomnie, nausees, sensations de vertiges… Ces symptomes ne doivent pas etre confondus avec ceux de la depression. 40 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR Ils apparaissent generalement dans les quatre jours suivant l’arret et durent rarement au-dela d’une semaine. Pourquoi un suivi medical lors d’un traitement antidepresseur ? Un suivi regulier par un medecin est necessaire lorsque l’on prend un traitement antidepresseur.

Le suivi est particulierement utile : • quelques jours apres la mise en route du traitement et au cours des deux premieres semaines pour faire un point sur la tolerance du medicament et l’evolution des problemes ; • vers quatre semaines apres la mise en route du traitement pour faire un point sur son efficacite ; • regulierement durant les six-huit mois qui suivent la mise en route du traitement (periode pendant laquelle le risque de reapparition des symptomes est maximal). En cas d’idees de mort ou de suicide, d’accentuation de l’anxiete ou de l’angoisse, ou au contraire d’une excitation ou d’un trop-plein d’energie, il est important d’en parler a un professionnel. De facon generale, tout traitement antidepresseur doit etre accompagne d’informations sur la depression et le traitement et d’un soutien relationnel. La qualite de la relation etablie entre le medecin et la personne est determinante. Peut-on associer d’autres medicaments aux antidepresseurs ?

Pour soulager rapidement l’angoisse, le medecin peut prescrire en debut de traitement un medicament anxiolytique (« tranquillisant »). Mais cette prescription doit etre temporaire. Les anxiolytiques ne soignent pas la depression et ne doivent pas etre pris pendant plus de quelques semaines. Au-dela, leur action est diminuee et le risque de dependance physique est reel (ce qui n’est pas le cas, on l’a vu, avec les antidepresseurs). Parfois, en fonction du type de depression, d’autres medicaments pourront etre prescrits, notamment des stabilisateurs de l’humeur. LES SOLUTIONS 41 Que faire en cas d’effets indesirables des antidepresseurs ? Comme tout medicament, les medicaments antidepresseurs peuvent avoir des effets indesirables.

Selon les types de medicaments, ces effets indesirables peuvent par exemple etre : la somnolence (ou au contraire l’excitation), la constipation, la prise ou la perte de poids, la secheresse de la bouche, les baisses de tension, les difficultes sexuelles… Chez les personnes agees, il existe des risques importants de baisse de pression arterielle en position debout qui peut etre genante, particulierement si elles eprouvent des troubles de l’equilibre. Une surveillance medicale particuliere est necessaire chez ces patients. Il est indispensable de parler de ces possibles effets indesirables avec le medecin au moment de la prescription de l’antidepresseur et de lire attentivement la notice du medicament. Les effets indesirables evoques par le medecin ou la notice du medicament ne surviennent pas chez tous les patients et ne sont pas tous obligatoirement presents chez une meme personne.

Certains de ces effets indesirables sont lies au mecanisme d’action de l’antidepresseur. Un grand nombre de ces effets vont disparaitre avec la poursuite du traitement, il existe par ailleurs tres souvent des solutions pour corriger ces effets. Lorsqu’ils sont tres desagreables, il faut aborder avec son medecin l’eventualite d’un changement d’antidepresseur. 42 LA DEPRESSION – EN SAVOIR PLUS POUR EN SORTIR LES AUTRES THERAPIES D’autres therapies, plus specifiques, peuvent parfois etre proposees pour certaines formes de depression (depression moderee, depression severe, depression de type saisonnier…). Pour plus d’informations sur ces therapies : www. nfo-depression. fr Le millepertuis : une plante a utiliser avec precaution Le millepertuis est une plante parfois utilisee en cas de « manifestations depressives » legeres et provisoires, mais ce n’est pas un traitement pour les episodes depressifs caracterises, meme d’intensite legere. Bien qu’il soit actuellement en vente libre en France, le millepertuis ne doit en aucun cas etre pris a la legere, comme une sorte de « tisane antidepressive ». Il presente en effet le serieux inconvenient d’interagir avec de tres nombreux medicaments, dont certains antidepresseurs. Il est donc tres important d’informer le medecin de l’utilisation eventuelle de ce produit.

En complement des traitements evoques dans ce chapitre, il est bien sur aussi tres important pour la personne souffrant de depression de prendre soin d’elle : des actions de soin complementaires que l’on peut mettre en place soi-meme (pratique de certaines activites physiques, regime alimentaire equilibre, vigilance vis-a-vis de l’alcool et des substances addictives…) peuvent ameliorer la qualite de vie de la personne. Ces actions sont evoquees dans le chapitre « Ce qu’on peut faire par soi-meme » (voir p. 71). LES SOLUTIONS 43 Quand l’hospitalisation est-el