La conscience

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Fiche de cours : la conscience Conscience psychologique La conscience est etymologiquement un « savoir » accompagnant l’existence, la pensee et l’action d’un sujet. Comme presence a soi et aux choses, la conscience est dite psychologique. Conscience morale En se distanciant des objets sur lesquels elle porte, la conscience peut les juger : elle peut evaluer ce qui est (les faits) d’apres ce qui doit etre (les valeurs). En ce sens, la conscience est morale. 1. La conscience peut-elle nous tromper ? La conscience, illusion du sujet ?

La conscience est ambigue : si rien n’est connaissable sans elle (comment savoir quelque chose sans en avoir conscience ? ), elle n’en est pas moins sujette a l’erreur et a l’illusion. En effet, le sujet tend a prendre ce dont il a conscience (son point de vue particulier) pour la seule realite existante, et ainsi a s’illusionner sur le reel. Le sujet, illusion de la conscience ? Or, l’illusion fondamentale du sujet conscient ne porte-t-elle pas sur lui-meme ? La conscience d’etre un sujet veritable n’est-elle pas la plus grande illusion ?

Kant nous assure du contraire : « Le je prouve que j’agis par moi-meme, que je suis un principe et non un

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resultat ». Se dire libre c’est se poser comme le sujet de ses actions et de sa pensee (c’est moi qui agis et qui pense). C’est avoir conscience de soi comme d’un etre ayant une identite personnelle unifiee, stable, et capable de se determiner lui-meme. Mais cette conscience est-elle fiable ? La conscience d’exister comme sujet pensant prouve-t-elle vraiment l’existence d’un tel sujet, ou n’est-elle qu’une illusion ? Faut-il dire cogito (« je pense ») avec Descartes, ou cogitatur (« ca pense ») avec Nietzsche ?

Mais si le sujet n’existe pas comme principe, disparait-il alors moralement, c’est-a-dire comme valeur ? L’idee de sujet conscient perd-elle toute valeur ? La reponse de Descartes Le doute retourne contre le scepticisme C’est pour vaincre le scepticisme, donc pour fonder le dogmatisme (« etablir quelque chose de ferme et de constant dans les sciences »), que Descartes entreprend de douter de tout. En effet, il voit dans le doute le moyen d’atteindre l’indubitable : une pensee absolument certaine resistant absolument au doute. Ce doute methodique repose principalement sur les arguments du reve (ne produis-je pas moi-meme outes mes pensees ? ) et du malin genie (ne serais-je pas le jouet d’un etre trompeur ? ). Quelle garantie ai-je d’etre bien « regle » ou bien « calibre » (comme on le dit d’un instrument de mesure) ? Qu’est-ce qui me prouve que ce a quoi je pense existe vraiment et que mes idees correspondent a la realite ? Le cogito : je pense donc je suis Descartes decouvre qu’une pensee resiste au doute : c’est qu’il est vrai que j’existe, moi qui pense ( cogito), — si je n’existais pas, je ne pourrais ni penser ni douter de mon existence ! Je ne peux pas ne pas etre, quand je pense que je suis.

L’existence du sujet pensant (ou doutant) est une evidence indubitable. Mais que suis-je ? Je suis une « chose pensante », une substance pensante et consciente (un sujet absolu, un esprit, une ame). La conscience est l’evidence fondamentale, la connaissance constituant le fondement et le modele de toute verite . 2. Avoir conscience, est-ce juger ? Une relation de soi aux choses et de soi a soi Selon l’etymologie latine, la conscience est un savoir accompagnant quelque chose. Elle signifie donc que quelque chose est su par le sujet ; le sujet se sait en relation avec une realite, percue plus ou moins clairement.

Conscience psychologique et conscience morale La conscience peut porter sur des faits (ce qui est) ou sur des valeurs (ce qui doit etre). Dans le premier cas, la conscience est dite psychologique. Elle est spontanee et/ou reflechie. Son objet est exterieur (les choses) ou interieur (la vie subjective) ; present (attention… ), passe (souvenir, regret… ) ou futur (attente, projet… ) ; possible (hypothese… ) ou impossible (imagination, illusion… ). Elle emet des jugements de fait ou d’existence (il y a ceci, ceci est cela…). Dans le second cas, la conscience est dite morale : elle emet des jugements de valeur.

Elle est alors comme un juge interieur, evaluant ce qui est (faits, actes, pensees…) d’apres ce qui doit etre, c’est-a-dire d’apres des valeurs ou des normes (morales, religieuses, politiques, juridiques, esthetiques… ). Toute conscience est-elle morale ? Mais faut-il vraiment separer la conscience psychologique de la conscience morale ? Ne serait-ce pas, comme le dirait Descartes, prendre une distinction formelle (valable seulement en pensee) pour une distinction reelle (valable dans la realite) ? En effet, toute conscience est toujours un certain ecart par rapport a ce qui est.

Or, toute prise de distance n’implique-t-elle pas une certaine evaluation et un certain choix ? La conscience n’est-elle pas alors essentiellement morale ? La reponse de Alain La conscience fait face a ce qui est… Perdre conscience (s’evanouir), c’est cesser d’etre present a soi et au monde. Au contraire, « revenir a soi, c’est revenir au monde, c’est-a-dire precisement a autre chose que soi » (Paul Valery). La conscience psychologique fait qu’un etre n’est pas seulement dans le monde (une chose parmi les choses), mais est aussi devant le monde (un sujet face a un objet, ou face a d’autres sujets) . .. et le juge au nom des valeurs Or, parce qu’elle est «l’acte par lequel l’esprit se dedouble et s’eloigne a la fois de lui-meme et des choses », la conscience permet la reprise critique de ce qui est. Parce qu’elle oppose ce qui doit etre (la norme) a ce qui est (le fait), la conscience est toujours morale : elle juge et elle incite a rectifier ce qui n’est pas fidele a ses valeurs. « La morale consiste a se savoir esprit et, a ce titre, oblige absolument : car noblesse oblige », conclut Alain.