Support de cours de Theories des organisations 2011 CHAPITRE 3 : LES APPROCHES CONTINGENTES DES ORGANISATIONS : ORGANISATION ET STRUCTURE La structure definit l’architecture interne d’une organisation et les relations entre ses divers clients. C’est l’ensemble des dispositifs selon lesquels une entreprise (ou plus generalement une organisation) repartit, coordonne, controle ses activites et, au-dela, oriente ou tente d’orienter le comportement de ses membres. Le concept de structure donne lieu a diverses interpretations.
En effet, la structure peut concerner (A. Desreumaux, 1998) : les elements de superstructure : ce sont les elements les plus manifestes, ceux dont l’organigramme donne une description minimum (mode de division du travail, grands outils de coordination…) ; cela correspond a un decoupage du type departemental ; les elements d’infrastructure, moins decrits par un organigramme : planification, controle, systeme de recompense ; ils representent les aspects tangibles, relativement stables de l’organisation.
Il semble pertinent de reserver le terme de structure au premier groupe (elements de superstructure), et de systeme de gestion au second groupe (elements d’infrastructure). D’un point de vue organisationnel, la structure apparait donc comme la maniere dont sont agencees et articulees les differentes composantes d’un tout. Appliquee a l’entreprise, la notion de structure peut se definir comme l’ensemble
C’est la somme totale des moyens employes pour diviser le travail en taches distinctes et pour ensuite assurer la coordination necessaire entre ses taches : repartition des taches, des responsabilites, mecanismes de coordination, regles et procedures (Mintzberg, 1982 ; p. 18). La premiere section de ce chapitre se rapporte a la maniere dont les dirigeants concoivent les structures des organisations. La deuxieme section expose quelques typologies des structures organisationnelles. Les determinants des structures organisationnelles font l’objet de la troisieme section.
Section 1 : Conceptions des structures organisationnelles De la conception de la structure organisationnelle depend pour une large part l’efficacite de l’entreprise. L’approche contingente est encore largement utilisee afin d’eclairer le lien entre la structure d’une organisation et son fonctionnement interne. Cette approche a mis fin au 1 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 paradigme classique des organisations et a enrichie les enseignements de l’ecole des relations humaines. 1. 1 Division du travail entre operateurs
On parlera de division et de coordination des individus au niveau des operateurs ; de differenciation et d’integration au niveau des unites. Division du travail et coordination sont indissociables. Sans la coordination, la division ne pourrait atteindre ses objectifs d’une amelioration de la productivite. Mintzberg reprend la distinction classique entre division du travail verticale et horizontale. La division horizontale se refere au nombre de taches effectuees par chaque operateur. Plus ce nombre est eleve (plus on peut affecter le travailleur a des taches differentes), plus on parlera d’une division horizontale faible.
La division verticale du travail fait reference a la distinction entre taches de conception et taches d’execution. Ce que Marx appelle la division technique du travail qui mene a l’alienation des individus est une division horizontale et verticale poussee : on specialise le travailleur a outrance et on lui ote la maitrise de sa production. Tableau 1 : Combinaisons des differents modes de division du travail Division verticale forte Division horizontale forte Division horizontale faible 1 2 Division verticale faible 3 4 1.
Figure traditionnelle du taylorisme ou de la bureaucratie weberienne. L’operateur a un registre de taches limite et une faible autonomie : exemple : travailleur a la chaine de l’industrie automobile, caissiere d’une grande surface, serveur de fast-food. 2. Le travailleur n’a pas la maitrise officielle de son travail mais il effectue des taches tres diversifiees : on parle d’elargissement du travail (par exemple, par une rotation des taches). Exemple : dans la banque, un agent va etre capable d’ouvrir un compte, d’encaisser des cheques, d’effectuer des consultations de comptes … 3.
Situation ou les operateurs sont qualifies et fortement specialises : chirurgiens dans un hopital, ingenieur, professeur dans une universite … Ils ? uvrent dans des creneaux etroits (leurs specialites) mais disposent d’une grande liberte dans l’organisation de leur travail. 2 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 4. La division du travail est faible sur les deux dimensions. La polyvalence ne se limite pas a la simple juxtaposition de taches repetitives, mais implique le travailleur dans la conception de son travail (enrichissement des taches).
Le taylorisme peut se definir comme une combinaison d’une forte division horizontale et verticale du travail et comme un recours systematique a la standardisation des procedes. Fayol s’oppose a Taylor en preconisant la specialisation fonctionnelle des activites administratives. De plus, Taylor soumet l’execution de chaque tache parcellisee a l’autorite d’un chef particulier tandis que Fayol preconise plutot un commandement unique pour chaque travailleur. Dans le taylorisme, la division horizontale du travail est donc plus forte.
De plus, Fayol recommande la stimulation de l’initiative du personnel et l’implication de celui-ci dans la realisation des objectifs de production. La division verticale est donc plus faible chez Fayol et la standardisation des procedes n’est pas le seul mode de coordination. 1. 2 Coordination du travail entre operateurs Selon Mintzberg, les taches executees par les operateurs peuvent etre coordonnees par six mecanismes : l’ajustement mutuel, la supervision directe, la standardisation des procedes, la standardisation des resultats, la standardisation des qualifications et celle des valeurs.
L’ajustement mutuel : la coordination se fait par communication informelle (X rencontre Y, son collegue, et lui dit de faire ceci ou cela ; Y acquiesce ou avance d’autres arguments pour faire la tache plutot comme ceci ou cela … ). Il peut meme n’y avoir aucune communication orale (modes d’ajustement en fonction du comportement de l’autre). La supervision directe : mecanisme par lequel une personne se trouve investie de la responsabilite du travail d’une autre ou de plusieurs autres, leur donne des instructions et des ordres, puis controle directement le travail qu’elles ont effectue. X est le superieur hierarchique de Y et lui dit de faire ceci ou cela). Mise en ? uvre selon differentes modalites : ordres, delimitation du cadre dans lequel doit se prendre une decision. Lorsqu’il y a supervision directe, le travail des operateurs est habituellement defini et controle par quelqu’un situe plus haut que lui, et ainsi de suite jusqu’a la direction. La standardisation du processus de travail : le contenu d’une tache est specifie et programme (la tache de Y sera de faire ceci ou cela selon certaines normes (pas besoin 3 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 011 de recevoir de directives ou de discuter avec un collegue). Des personnes ont ete chargees de definir precisement le travail des autres : Mintzberg designe par le terme d’analyste les membres de l’organisation qui concoivent et realisent la programmation ou des procedes de travail. Exemple : manuels de confection des pizzas chez Pizza Hut ou Domino’s ; La standardisation des resultats : seuls les resultats auxquels le travail doit aboutir a la suite de la fixation d’objectifs par des experts ou d’une negociation entre superieurs et subordonnes sont specifies ; on demande d’atteindre tel resultat (l’equipe X doit faire tel CA).
Les objectifs sont negocies ou imposes. Exemple : Management By Objectives. La standardisation des qualifications : seul est specifie le type de qualification ou de formation necessaire pour faire le travail (exemple dans un hopital, dans une universite). La standardisation est en general operee en dehors de l’organisation (ordre de medecin, Etat, ordre des experts comptables, etablissements d’enseignement). Toutefois, l’organisation peut elle-meme prendre en charge une partie de cette standardisation via des actions de formation a l’egard de son propre personnel.
La standardisation des valeurs : ce sont des valeurs qui sont programmees et diffusees intentionnellement par le biais d’enquetes aupres du personnel, d’affiches, de journaux d’entreprise. 1. 3 Differenciation et integration entre departements Un departement ou un service constitue une unite organisationnelle regroupant un ensemble d’operateurs, disposant d’un ensemble de ressources et d’outils et places sous une meme autorite. On distingue la departementalisation selon la nature des conditions de production (input) et selon la nature des produits et marches caracterisant l’organisation (output).
La departementalisation par input implique habituellement une structure hierarchique dans laquelle toutes les informations convergent vers les echelons superieurs en vue de la prise de decision adequate. Elle repose ainsi sur la centralisation de la prise de decision. En revanche, la departementalisation par output donne lieu generalement a une structure dont le nombre d’echelons hierarchiques est peu eleve. Elle suppose donc une large decentralisation dans la prise de decision. La tendance actuelle du management est de passer progressivement de la 4 Pascal H.
DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 departementalisation par input a la departementalisation par output, dans la mesure ou cette derniere favorise la decentralisation de la prise de decision et une grande flexibilite de la structure. Lawrence et Lorsch (1989 ; pp. 44-63) font intervenir deux variables (la differenciation et l’integration) pour montrer que selon le type de marches ou se trouve l’entreprise (marche stable/certain a incertain et instable), celle-ci adoptera des structures differentes.
La differenciation est la mesure dans laquelle les differents departements (production, marketing et R&D) different les uns des autres quant a leur structure (mecaniste ou organique), quant a leurs perspectives temporelles (ex : administration des ventes : horizon du mois / recherche : horizon de plusieurs annees), la maniere dont les managers se comportent dans leur relations interpersonnelles (orientes taches ou collegues), et l’orientation vers des buts et des objectifs differents (concurrence et clients, couts de production et amelioration du processus de production, objectifs scientifiques).
Le regroupement en departements peut etre caracterise par une differenciation plus ou moins forte, a la fois sur le plan vertical et sur le plan horizontal, au meme titre que le travail des operateurs qui se trouve lui aussi divise sur ces deux dimensions. La differenciation verticale s’apprecie en fonction du nombre d’echelons hierarchiques entre les operateurs et le sommet de la structure pyramidale. La differenciation horizontale se mesure a partir du nombre de departements crees a l’interieur de l’organisation.
L’integration est le degre de collaboration et de comprehension mutuelle qui sont necessaires entre les departements pour qu’ils atteignent leurs objectifs. La division du travail et les interdependances entre fonctions necessitent une integration. Plus il y a interdependances et differenciation, plus il y a necessite d’integration. Si l’integration est insuffisante cela peut se traduire par une baisse dans la qualite des decisions et un gaspillage de ressources. Mais l’integration a un cout (temps de reunion, personne integratrice (ex : chef de projet)).
L’integration peut s’obtenir par la hierarchie, les contacts manageriaux, l’etablissement de roles de liaison, la mise en place de groupe de travail et l’attribution de roles d’integration ou la designation de groupes d’integration interfonctionnels. Si l’entreprise est faiblement differenciee, il y a peu de besoins d’integration : la hierarchie, les contacts ou encore la voie « papier » suffisent. En fait, on distingue un niveau d’integration reposant sur les relations interpersonnelles (postes de liaison, groupes ou comites permanents, task force (projet), structure matricielle (rupture avec le principe d’un commandement unique)), sur la Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 formalisation (budgets, planification, systeme de controle des performances), sur des representations mentales (socialisation (par la formation par exemple), culture ou mobilisation ideologique). Les environnements instables entrainent une grande differenciation, ce qui necessite par la suite une grande integration si l’on veut que l’entreprise soit performante (cas du secteur plastique).
A l’inverse, un secteur particulierement stable (secteur des containers) entraine une moins grande differenciation (toutes les fonctions vont a peu pres dans le meme sens, de la meme maniere) et necessite donc une faible integration. L’entreprise a haute performance est celle qui colle au plus pres des demandes (ce qui entraine une grande differenciation dans les environnements instables). En plus, Lawrence et Lorsch (1989) ont montre que les sous-unites, au sein de chaque entreprise, faisaient face a des environnements differents. Un service de production par exemple sera caracterise par des objectifs stables et certains, a court terme.
On observera donc des modes d’interaction plus formels et bureaucratiques que dans les services commerciaux. Il faudra donc coordonner ces differents services entre eux. Meme dans un environnement turbulent, certains services conserveront donc des modes d’interaction bureaucratiques comme un service financier ou de production. On peut noter que les recherches contingentes ont debouche sur des facons d’analyser les organisations pour determiner leurs problemes. Une serie de questions sur l’organisation et son rapport a l’environnement permettront de reperer les eventuels problemes : 1.
Quelle est la nature de l’environnement de l’organisation ? Est-il simple, stable ou complexe et instable ? Quels changements peut-on noter sur les plans economiques et techniques, sur le marche, sur les relations de travail et enfin du point de vue sociopolitique ? 2. A quel type de strategie a-t-on recours ? L’entreprise ne se contente-t-elle que de reagir aux changements a mesure qu’ils apparaissent ? L’organisation defend-elle une niche ? L’organisation se livre-t-elle a une analyse systematique de son environnement ? Adopte-telle une attitude innovatrice, proactive ?
Cherche-t-elle constamment de nouvelles possibilites de developpement ? 3. A quelle sorte de technique a-t-elle recours ? Les processus de transformation des intrants et des extrants sont-ils normalises et routinises ? Les emplois qui accompagnent les techniques retenues font-ils beaucoup de place aux responsabilites et a l’autonomie ? 6 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 4. Quel genre de personnel emploie l’organisation ? Quelle en est la culture ? Quelles sont les orientations des gens qui y travaillent ? Recherchent-ils le defi et l’engagement ?
Quelles sont les valeurs et croyances mises en avant ? 5. Comment l’organisation est-elle structuree ? L’organisation est-elle bureaucratique ou au contraire matricielle-organique (Cf. ci-dessous) ? 6. Le management est de type autoritaire ou encourage-t-il l’initiative et l’esprit d’entreprise dans toute l’organisation ? Section 2 : Quelques typologies des structures organisationnelles Selon leur strategie, leurs marches, leurs objectifs et leurs modes de management les entreprises sont susceptibles d’adopter divers types d’organisation, dont les principaux sont rappeles dans cette section (Giard, 1991). . 1 Les modeles classiques Les modeles classiques d’organisation, toujours tres presents, sont fondes sur la place eminente de la hierarchie qui valorise le role des cadres dirigeantes selon des specialites bien definies. La clarification des roles est normalement facile mais peut ne pas eviter des risques de cloisonnement prejudiciables a l’efficacite. Ces types de modele, s’appliquent bien, en general, dans un contexte de marche stabilise ou de marche de demande ou dans les secteurs a haute intensite capitalistique.
La structure fonctionnelle : structure traditionnelle qui organise la repartition des taches selon la nature de l’activite a partir de la distinction entre les fonctions operationnelles du cycle d’exploitation et celles s’y rattachant d’une part, (achats, productions, ventes, logistique) et les autres fonctions d’autre part (fonction d’assistance : finance, RH, fonctions administratives). DIRECTION FONCTION PRODUCTION FONCTION COMMERCIALE FONCTION PERSONNEL …. 7 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 Avantages
Mise en evidence des responsabilites par fonction. Specialisation des responsabilites. Definition des zones de pouvoir. Clarification des competences requises. Controle facile par la direction Inconvenients Fort privilege de la fonction de Direction. Sur-specialisation de certains cadres. Faiblesse du role des « generalistes ». Faiblesse de la coordination entre fonctions. Entrave a la croissance economique. La structure territoriale DIRECTION REGION A (Vente, production, comptabilite…) REGION B (Vente, production, comptabilite…) REGION C (Vente, production, comptabilite…) …. Avantages
Delegation importante des responsabilites. Privilege donne aux marches et problemes locaux. Bonne coordination au sein des regions. Bonne communication avec les interets locaux. Importance du role managerial des dirigeants. Inconvenients Forte demande en competence manageriales. Mauvaise repartition des roles fonctionnels entre les services centraux et regionaux. Difficulte du controle par la Direction La structure divisionnelle Une division est une unite operationnelle qui repond a des considerations economiques et organisationnelles independamment de la structure juridique.
Alors que la structure fonctionnelle s’adapte assez bien aux entreprises qui ne fabriquent qu’un seul type de produits ou tout au moins des produits differents mais pouvant etre fabriques a partir des memes matieres premieres, la structure divisionnelle s’adapte mieux aux entreprises de grande taille dont la production est tres diversifiee. Les activites de chaque fonction apparaissent en effet beaucoup trop disparates pour adopter une structure fonctionnelle, on prefere alors une structure par produits ou structure divisionnelle. On rencontre frequemment ce type de structure dans les entreprises conglomerales.
Par exemple le groupe Bouygues est divise en autant de branches d’activites que les marches sur lesquels il se situe. Il en va de meme du groupe Matra ou encore de la Compagnie Generale des Eaux, etc…. On constate que chaque branche est totalement autonome et que les branches correspondent souvent a une veritable entreprise a part entiere y compris sur le plan juridique (societes filiales, etc… ). 8 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 Une societe peut etre organisee en plusieurs divisions, mais une division peut recouvrir plusieurs societes.
On distingue : a) La structure divisionnelle par produit Direction Division PRODUIT A Division PRODUIT B …. Fonction Production Fonction Commerc. Fonction … Fonction Production Fonction Commerc. Fonction … Avantages Attire l’attention sur les produits. Responsabilisation des niveaux Produits. Bonne coordination des activites fonctionnelles. Accent donne a la formation au management. Favorise la croissance et la diversite des produits. Inconvenients Forte demande de personnes formees au management. Risque de faiblesse du role des services financiers. Faiblesse des possibilites de controle de la direction. ) La structure divisionnelle par marche : ce type de structure tend a se substituer a la structure par produit Direction Generale Division MARCHE A Division MARCHE B …. Production Commerc. … Production Commerc. … Dans certains cas particuliers, par exemple lorsque quelques grands distributeurs absorbent 80% de la production, ou dans le cas du « B to B » (Business to business, commerce d’entreprise a entreprise), on voit des structures par clients (chaque client est gere specifiquement). 2. 2 Les tendances actuelles 9 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 011 Les principaux facteurs influencant les organisations actuelles sont : Les necessites de la conduite de projet. Les implications de la demarche Qualite, et de la maitrise des processus en tant que philosophie de l’organisation (avec notamment la reapparition du compagnonnage). La recherche du deplacement de la valeur ajoutee le long de la chaine de production, incluant parfois un recours plus ou moins important a la sous–traitance (externalisation d’activites). La recherche de la « differenciation retardee » avec ses influences en matiere de marque et de systeme de distribution.
La diminution du nombre de niveaux hierarchiques debouchant sur de nouvelles definitions du role des cadres. Ces tendances generent de nouveaux modeles d’organisation dont les plus frequents s’inspirent des structures matricielles decrites ci-dessous. Les matrices sont les seules organisations connues qui peuvent regulierement creer des produits complexes techniquement comme des avions et leurs moteurs. Le probleme est que passer par les canaux decisionnels prend trop de temps. Obtenir l’approbation pour faire quoi que ce soit souvent requiert l’accord de chaque type d’expert et de leurs responsables.
L’organisation matricielle peut s’etendre a plusieurs entreprises fonctionnant en symbiose (sous-traitants, gestion de grands projets). L’organisation matricielle Produit/Fonction (orientee produit) Direction Fonction Production Produit A Produit B Produit C Fonction Commerc. Fonction Personnel Fonction … L’organisation matricielle Projet/Fonction (orientee projet) Ce type d’organisation de rencontre dans le BTP et les SSII. Il s’agit d’une structure flexible, permettant la realisation de projets complexes faisant appel a plusieurs specialistes de l’entreprise.
Cette organisation appelle trois remarques. Cette structure est par nature 10 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 evolutive. Ainsi, lorsque la campagne de publicite d’un projet est realisee, l’equipe reunie en vue de ce projet disparaitra, et sera repartie sur d’autres projets. La structure par projets implique une double ligne d’autorite (une autorite hierarchique verticale et permanente ; une autorite pour chaque projet horizontale et temporaire). Le chef de projet joue un role essentiel dans la reussite de ce type de structure.
Il doit choisir ses collaborateurs dans chaque direction, et coordonner leur activite jusqu’a l’aboutissement du projet. Direction Fonction Production Projet 1 Projet 2 Projet 3 Fonction Commerc. Fonction Personnel Fonction … L’organisation matricielle Marche/Produit Ce type d’organisation est tres repandu, et se rencontre frequemment dans le secteur Agroalimentaire. La societe L’Oreal est egalement organisee sur ce modele. Les Directions fonctionnelles sont placees en position de staff. Direction Marche A Produit 1 Produit 2 Produit 3 Marche B Marche C Marche …
L’organisation matricielle mixte (orientee produit et projet) Cette organisation correspond partiellement a celle qui a ete mise en place a EDF. 11 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 Direction Fonction Production Marche A Marche B Marche C Fonction Commerc. Fonction Personnel Fonction … Projet 1 Projet 2 Projet 3 La pyramide inversee Il ne s’agit pas, bien entendu, de renverser les roles. « Pyramide inversee » ne signifie pas que les chefs vont obeir et les subordonnes commander. Cela va de soi !!
Il s’agit plutot d’une nouvelle maniere de penser les relations de travail dans l’entreprise pour ameliorer l’efficacite, la productivite et la flexibilite. L’adoption de ce type de structure correspond souvent a la necessite d’organiser l’entreprise dans un souci d’orientation des actions en fonction des imperatifs du marche. L’idee de depart est la suivante : la pyramide classique de management cree, comme nous l’avons dit plus haut, des cloisonnements et des territoires totalement contre-productifs. Il s’agit en bref de rendre les « chefs » plus accessibles.
Ceux-ci doivent en effet, selon l’expression de Jan Carlzon, PDG de la compagnie d’aviation SAS « se comporter en meneurs et doivent pouvoir compter sur la cooperation et l’engagement de tous les individus concernes, et pour cela leur communiquer leurs propres convictions ». Il s’agit donc pour la direction generale de se borner a definir une strategie tout en laissant libre les cadres de definir les besoins de l’entreprise et les moyens pour realiser cette strategie. Aucune directive n’est donnee sur les actions individuelles a mener.
On cherche donc a stimuler la creativite et l’esprit de collaboration de l’ensemble du personnel. La pyramide inversee est donc une organisation fondamentalement anti-taylorienne. On trouvera donc beaucoup moins de niveaux hierarchiques, le travail se fera en equipe et on cherchera a responsabiliser les individus et a mieux reconnaitre leur travail. La pyramide 12 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 inversee apparait donc tres efficace pour mobiliser la creativite dans la mesure ou elle se fonde sur une meilleure prise en compte du facteur humain dans l’entreprise.
La structure polycellulaire On retrouve ici le souci de flexibilite, le souci d’orienter les actions de l’entreprise en fonction des imperatifs du marche. C’est la raison pour laquelle la structure polycellulaire, tout comme la precedente, se caracterise (en principe) par le souci de reduire les niveaux hierarchiques et d’assurer une bonne mobilisation des ressources humaines. Sur le plan organisationnel, elle se presente toutefois d’une maniere un peu differente. En effet, l’entreprise est organisee en cellules qui sont federees par la cellule de direction.
Chaque cellule est autonome et apparait ou disparait au gre des activites de l’entreprise donc au gre du marche. En exagerant a peine, on cherche ici a calquer le fonctionnement de l’entreprise sur celui du corps humain. L’entreprise n’est plus concue comme une suite d’elements mis bout a bout mais comme un ensemble. Dans ce schema, chaque cellule vit de facon relativement autonome, tout en agissant interactivement avec les autres cellules et la proliferation s’opere naturellement en fonction des besoins de l’entreprise. L’animateur de cellules doit donc dynamiser les membres du groupe constituant la cellule.
Le role de la cellule de direction consiste alors a affirmer un projet federateur et a en controler l’efficacite. La structure polycellulaire correspond donc en principe a une structure censee assurer une progression horizontale et non verticale des carrieres. Soyons tout de meme realistes et admettons que le fonctionnement d’une entreprise en structure polycellulaire se caracterise tres souvent par un « turn over » de personnel tres important et par une stagnation totale des carrieres. La pyramide ronde. L’entreprise est ici organisee en poles (ex. ole machines, pole fabrication, pole recherchedeveloppement, etc… ). Chaque membre du personnel doit donc etre tres polyvalent pour pouvoir changer de pole. Par exemple, un directeur technique pourra intervenir au niveau des achats et de la reparation 13 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 des materiels, de la maintenance preventive et de la recherche-developpement ainsi que participer au comite strategique. Ce type d’organisation est beaucoup plus rare car il necessite un personnel tres polyvalent.
Section 3 : Determinants des structures organisationnelles Choisir un critere de classification, c’est identifier une caracteristique suffisamment universelle et suffisamment precise pour permettre d’ordonner l’ensemble des organisations economiques. De multiples facteurs agissent sur la structure de l’organisation. L’ecole de la contingence cherche a rendre compte de la maniere dont se structurent les organisations a travers l’influence des variables de contexte – telles que la technologie ou le type de marche sur lequel elles se trouvent – sur les caracteristiques de ces organisations.
Le poids des contraintes externes rend donc contingentes les structures de l’organisation. Ainsi, il n’existe plus une seule meilleure facon d’organiser mais plusieurs (principe d’equifinalite empruntee a la theorie des systemes). Une organisation ne peut etre efficace que si elle parvient a rendre compatibles la strategie, la structure, les techniques, les engagements et les besoins de ses membres, et l’environnement. 3. 1 Les facteurs contextuels internes : age, taille et technologie 3. 1. L’age et la taille Les travaux de l’ecole de contingence ont etabli que l’age croissant d’une organisation favorise la tendance a la formalisation, aussi bien au niveau des mecanismes de coordination du travail qu’a celui des mecanismes de liaison entre departements. Un premier argument avance dans la litterature est que l’age eleve conduit a la « routinisation » d’un certain nombre de pratiques, qui ont tendance a s’auto-perpetuer, ainsi qu’au cloisonnement des departements et, par consequent, a la rigidification de leurs relations.
Un autre argument permet d’expliquer la relation entre age de l’organisation et formalisation de ses structures : en effet, l’anciennete va generalement de paire avec une croissante de la taille de l’organisation, conduisant celle-ci a evoluer vers les formes de plus en plus bureaucratiques. De nombreux travaux ont montre que plus la taille d’une organisation augmente (en termes d’effectifs), plus les taches se specialisent, plus les unites et les niveaux hierarchiques se differencient et plus la formalisation gagne du terrain (Nizet et Pichault, 2005). 14 Pascal H.
DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 a) Les travaux de Northcote Parkinson Les travaux de Northcote Parkinson (1957) ont etabli une relation stricte entre taille et structure organisationnelle, se traduisant par une bureaucratie croissante. Il y aurait selon cet auteur, une liaison de nature logarithmique entre le ratio des activites de support (administratives) et des activites courantes d’une part, et le nombre de participants d’autre part. La composante bureaucratique augmenterait plus rapidement que la taille.
Il en resulte une diversification hierarchique, une formalisation croissante des regles et une complexite des mecanismes de gestion qui imposent une limite a l’expansion des organisations. b) Les travaux du Groupe d’ASTON Ces resultats ont ete confirmes par une etude menee par des chercheurs anglais du groupe D’ASTON (1969). Ceux-ci ont mis en evidence un lien entre taille et structure. Plus le nombre de salaries augmente, plus la structure devient complexe. En effet, le nombre de niveaux hierarchiques et le degre de specialisation augmentent, et impliquent la mise en ? vre de nouveaux moyens de coordination. Toutefois, les chercheurs du groupe d’ASTON n’expliquent pas pourquoi on trouve presque toutes les formes de structure dans les entreprises de taille comparable. 3. 1. 2 La technologie Une approche assez repandue consiste en effet a rechercher une correlation precise entre le degre de complexite d’une technologie, et la structure hierarchique qui l’accompagne. a) Les travaux de Joan Woodward (1916-1971) A partir d’une etude empirique sur 100 firmes manufacturieres du South Essex en Grande Bretagne, Joan Woodward montre qu’il existerait une relation entre la tructure de l’organisation et la technologie. Ainsi les entreprises disposant de techniques de production similaires tendraient a se doter des memes structures d’organisation. L’auteur montre egalement que le nombre de niveaux de la direction de la production et le nombre de collaborateurs de la direction generale augmentent avec la complexite du systeme de production. En s’appuyant sur le mode de controle d’une organisation, Woodward distingue quatre cles de repartition permettant de classer les differents modes de production.
Le mode personnel renvoie au role du superieur. Le mode impersonnel est lie soit a l’appareillage automatise ou au planning. Le controle integre traduit la responsabilite large d’une personne. Le controle fragmente considere qu’un meme agent peut recevoir des ordres de differentes personnes. 15 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 MODE PERSONNEL CONTROLE INTEGRE Technologie petites tailles unitaire MODE IMPERSONNEL de Process (continu) CONTROLE FRAGMENTE Technologie unitaire grandes tailles e Grande Serie Les entreprises caracterisees par un mode personnel et un controle fragmente travaillent de facon quasi-artisanale pour mener a bien une tache. La reunion des competences privilegie le travail d’equipe. Mintzberg propose de synthetiser les travaux de Woodward de la maniere suivante : plus le systeme technique est regule (technologie de production de masse), plus il y a tendance a la formalisation et a la bureaucratisation de la structure ; plus le systeme technique est sophistique (technologie de production n continue), plus les personnels qualifies se multiplient, plus on a recourt a des mecanismes bases sur des relations interpersonnelles ou des representations mentales, plus la structure a tendance a devenir plus flexible. b. Les travaux de Charles Perrow Charles Perrow (1979) a egalement cherche a apprehender la complexite technologique par le degre de variabilite des taches, c’est-a-dire leur caractere plus ou moins routinier. Il en deduit quatre formes typiques : – Les technologies routinieres Elles sont caracterisees par de tres faibles variations des taches, faciles a reperer et a analyser.
Il en resulte une forte capacite de prediction qui se traduit par une organisation tres formelle, ou les participants disposent de regles tres definies, et tres centralisees tant au niveau des procedures de controle que des mecanismes de coordination. – Les technologies dites « d’ingenieurs » Elles definissent une structure d’activite avec des variations nombreuses mais largement previsibles pour l’analyste des taches. L’organisation se caracterise donc par un faible degre de formalisation, afin de permettre l’adaptation rapide aux changements, et par une hierarchie 16 Pascal H.
DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 fortement structuree, ou les pouvoirs de decision sont centralises et le controle sur les flux d’inputs tres strict. – Les technologies de type artisanal Elles sont plus complexes car elles conjuguent un nombre limite de variations possibles (donc un caractere routinier des taches) et la quasi impossibilite d’analyser et de prevoir avec exactitude ces variations. L’organisation se caracterise par un faible degre de formalisation, couple a une large decentralisation des procedures de decision.
Son efficience depend de la culture technique de ses participants, d’ou l’importance de l’apprentissage interne (learning by doing) et de l’interiorisation des normes et des valeurs par les membres. – Les technologies non routinieres Les taches varient enormement ce qui ne laisse pas de place a l’analyse et a la prevision. La procedure autoritaire des taches se revele inefficace et les hierarchies trop fortes tres couteuses. Il existe un niveau minimal des regles et les procedures de decisions sont decentralisees.
On a ici une organisation fondee sur la participation des membres et sur des valeurs partagees plutot que sur des rapports hierarchiques. Cette approche presente l’avantage de permettre d’identifier des criteres bien definis (exemple du caractere routinier), et d’associer a ces criteres des formes de relations precises entre les participants, conduisant a specifier les modalites de coordination interne. 3. 2 Les facteurs contextuels externes : le marche Mintzberg a etabli des liens entre les caracteristiques du marche et les variables politiques et structurelles associees.
Il propose de mieux distinguer les caracteristiques du marche afin de pouvoir apprehender leur impact specifiques sur les structures de l’organisation. Il distingue a cet effet la stabilite (previsibilite), la complexite, l’hostilite et l’heterogeneite du marche. Le tableau suivant recapitule l’ensemble des liaisons en associant a chaque trait du marche des caracteristiques structurelles et en montrant leur incidence sur la distribution du pouvoir entre acteurs. 17 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion
Support de cours de Theories des organisations 2011 Tableau 2 : Caracteristiques du marche et variables politiques et structurelles (Nizet et Pichault, 2005, p. 112) Caracteristiques du marche Stabilite Variables intermediaires Possibilite de standardiser Caracteristiques structurelles associees Mecanismes de coordination et de liaison bases sur la formalisation et les representations mentales Mecanismes de coordination et de liaison bases sur les relations interpersonnelles Acteurs dominants Analystes Instabilite Difficulte a standardiser
Centre operationnel qualifie ou ligne hierarchique / sommet strategique Centre operationnel qualifie Complexite Decentralisation de la prise de decision Pas d’effet necessaire Ajustement mutuel ou standardisation des qualifications Systeme d’influence centripete Simplicite Sommet strategique ou analystes ou ligne hierarchique Sommet strategique Hostilite Centralisation legitime Centralisation illegitime Diversification interne Supervision directe Non-hostilite Pas d’effet necessaire Jeux politiques entre acteurs Heterogeneite
Mecanismes de liaison bases sur Jeux politiques entre les relations interpersonnelles ou acteurs les representations mentales Systeme d’influence centripete Ligne hierarchique Homogeneite Faible diversification interne Degre de stabilite du marche : se refere au caractere plus ou moins previsible du marche. Degre de complexite du marche : se refere a l’etendue des competences acquises pour operer sur un marche. Degre d’hostilite du marche : se refere au caractere plus ou moins menacant du marche, a la facon dont l’organisation en depend pour sa survie. 18 Pascal H.
DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 Degre d’heterogeneite du marche : cette dimension renvoie a la differenciation des demandes susceptibles d’etre adressees a l’organisation, en d’autres termes a la diversite des marches sur lesquels elle opere. Exemple : une societe de conseil en informatique dont chaque client apporte un probleme specifique a resoudre. 3. 3 La strategie La publication en 1962 de « Strategie et Structure » par Alfred Chandler (1918-2007) a ete une contribution decisive a la reflexion sur le fonctionnement des organisations.
A partir d’une etude historique et monographique de grandes entreprises americaines (comme General Motors, la Standard Oil, Dupont ou Sears) appartenant a des secteurs varies, sur une periode de temps allant de 1909 a 1948, A. Chandler elabore la these selon laquelle les changements de strategie determinent les modifications de structure. Pour Chandler et le courant des historiens des affaires, les structures sont inseparables des managers et ces derniers peuvent les modifier de par leur volonte. La formation des structures s’explique par reference a un principe de « discretion manageriale ».
Chandler a donc constate dans son etude que la diversification des activites produits/marches est suivie par des changements structurels sous forme de creation de structures divisionnelles. La dynamique structurelle de Chandler peut etre decrite comme suit Nouvelle strategie Nouveaux problemes administratifs Baisse de performance Invention de nouvelles structures Hausse de performance Cependant, la these de Chandler selon laquelle la structure suit la strategie n’est pas restee incontestee. Certains auteurs ont souligne les retroactions des donnees structurelles sur le processus de decision strategique et sur le contenu de la strategie.
Ainsi, differents arguments fondent l’hypothese selon laquelle la structure influence la strategie. Les strategies sont le resultat de decisions. Les processus de decisions strategiques se deroulent dans le cadre de structures existantes. Celles-ci ont une influence sur la perception des problemes, les informations et le developpement des alternatives. Elles limitent la liberte d’action et la mise en ? uvre des decisions. La structure influence la capacite d’adaptation et l’innovation. Aussi, dans la preface de la nouvelle edition de Strategie et Structure, Chandler nuance le lien qui ressort de son etude, en 9 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 precisant que « la structure a eu autant d’impact sur la strategie que la strategie sur la structure. Mais parce que les changements de strategie se sont produits chronologiquement avant ceux de la structure […] le livre donne l’impression de mettre l’accent sur la relation entre la strategie et la structure plutot que l’inverse ». 20 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion Support de cours de Theories des organisations 2011 21 Pascal H. DANNON, Docteur es Sciences de Gestion