Emile ZOLA “Germinal” Roman de 500 pages Resume Premiere partie Chapitre I : Un lundi de fevrier 1865, vers trois heures du matin, un homme arrivait a Montsou, l’une des mines du nord de la France et, dans la nuit, decouvrait une fosse. Il conversait avec un charretier de cinquante-huit ans a qui il confiait qu’il s’appelait Etienne Lantier et qu’il etait « un machineur » qui, parce qu’il avait gifle son chef, venait d’etre renvoye des ateliers de Lille, qu’il cherchait du travail.
Mais le vieux Bonnemort lui dit qu’il n’y en avait pas au Voreux, ou il avait passe sa vie entiere, etant maintenant envahi par le charbon. Il lui revela l’importance de la Compagnie qui etait «_le dieu repu et accroupi auquel ils donnaient tous leur chair, et qu’ils n’avaient jamais vu_. » (page 16). Chapitre II : Au coron des Deux-Cent-Quarante se reveillaient ceux qui allaient relever l’equipe de nuit. Dans la maison des Maheu vivaient entasses et manquant de nourriture les parents (Maheu et la Maheude) et leurs sept enfants (Zacharie, Catherine, Jeanlin, Alzire, Henri, Lenore et Estelle).
Maheu et les plus grands de ses enfants, Catherine, Zacharie et Jeanlin, se preparaient a aller travailler. Le grand-pere etait
Une vieille ouvriere de l’equipe de Maheu etant morte, on engagea Etienne. Il decouvrit ainsi «_la lampisterie_» ou Maheu lui expliqua les choses. La descente dans le puits l’impressionna grandement. Puis ils marcherent longuement dans le dedale des galeries pour acceder a «_la taille de Maheu_» ou etait attaquee la veine de charbon. S’y trouvait deja Chaval qui se montra mecontent de voir Etienne : ils «_echangerent un regard, allume d’une de ces haines d’instinct qui flambent subitement_» (page 39). C’est a ce moment-la qu’Etienne decouvrit en Catherie une fille.
Chapitre IV : Les quatre «_haveurs_» abattaient le charbon que «_les herscheurs_» deblayaient et qui etait transporte dans des berlines poussees par des «_galibots_». Arriva le moment du dejeuner ou Catherine partagea son «_briquet_» avec Etienne auquel elle donnait des conseils, tandis qu’il se disait qu’elle ne lui plaisait pas. Il lui raconta son histoire, lui expliquant qu’il avait ete renvoye de sa compagnie de chemin de fer : «_J’avais gifle mon chef [… ] j’avais bu [… ] cela me rend fou [… il avait une haine de l’eau-de-vie, la haine du dernier enfant d’une race d’ivrognes, qui souffrait dans sa chair de toute cette ascendance trempee et detraquee d’alcool_. » (page 47). Il trouva alors a la jeune fille «_un charme singulier_» (page 48), la desira mais ne savait pas «_comment on devait s’y prendre avec une ouvriere encore dans sa famille_. » (page 49). Alors qu’il s’etait decide a la baiser «_sur ses grosses levres roses_», Chaval, qui avait remarque qu’ils s’entendaient bien, ce qui le rendait jaloux, s’approcha soudain et donna a Catherine un baiser qui etait «_une prise de possession_» (page 50).
Puis le travail reprit. Chapitre V : Zacharie, qui aurait du s’employer au boisage de la taille, le negligea. Les membres de l’equipe se plaignaient de ce que ce travail ne soit pas compte lors du «_marchandage_». Survinrent justement le porion Dansaert et l’ingenieur Negrel qui infligerent une amende pour «_defaut de boisage_». Chez Etienne monta «_une revolte lente_» (page 55). Au retour, marchant avec Catherine, il regretta le bonheur qu’il aurait pu avoir avec elle. Dans la salle de l’acrochage, il decouvrit le palefrenier et les chevaux, Bataille et Trompette.
On fit part de «_la menace de l’ingenieur, la berline baissee de prix, le boisage paye a part_» et «_une rebellion germait_» (page 62). Chapitre VI : De retour a la surface, Etienne hesitait a retourner au fond, d’autant plus qu’au cafe-concert “le Volcan”, il fut encore en butte a la haine de Chaval. Mais il fut invite a rester par Maheu et, acceptant, il vit la joie de Catherine. Traversant «_le criblage_», les deux hommes assisterent a une bataille des «_cribleuses_». Ils se retrouverent au cabaret de “l’Avantage”, tenu par Rasseneur, «_un ancien haveur que la Compagnie avait ongedie depuis trois ans a la suite d’une greve_» (page 68) et qui «_eclata_» (page 69) a la nouvelle du boisage paye a part. Il fit allusion a Pluchart, responsable departemental de l’Internationale, qu’Etienne avait connu a Lille. Aussi prit-il chez lui une chambre d’ou il contempla le Voreux a qui il trouva «_l’air mauvais_». Mais, partage entre «_les yeux clairs de Catherine_» et «_ce dieu repu et accroupi, auquel dix mille affames donnaient leur chair, sans le connaitre_», «_il voulait redescendre dans la mine pour souffrir et se battre_» (page 71).
Deuxieme partie Chapitre I : Dans leur domaine de la Piolaine, les Gregoire, bourgeois «_dormant beaucoup avec passion_» (page 73) vivaient le bonheur des proprietaires. «_La fortune des Gregoire, quarante mille francs de rentes environ, etait tout entiere dans une action des mines de Montsou_» (page 76), l’arriere-grand-pere de Leon, Honore Gregoire, regisseur de la Piolaine, ayant place cinquante mille francs d’economie dans la Compagnie. Il «_s’etait mis bourgeois_» (page 77) et un million s’etait forme petit a petit.
Deneulin, un cousin, agissait differemment : il investissait beaucoup et modernisait les installations de sa mine de Vandame. Mais ce choix le privait de revenus, et il vint emprunter aupres des Gregoire qui refuserent, lui conseillant plutot de vendre sa mine a la Compagnie, et de ne plus se soucier de rien. Les Gregoire, pleins de sollicitude pour leur fille, Cecile, envisageaient de la marier a Negrel. Chapitre II : La Maheude, ne reussissant plus a nourrir «_tout son monde_», n’ayant plus de credit chez l’epicier Maigrat qui se faisait payer par des faveurs sexuelles, decida d’aller quemander chez les Gregoire.
Les rentiers, charitables mais inconscients, lui offrirent des vetements, lui donnerent des conseils, mais, par principe, refuserent de donner de l’argent. Elle retourna alors chez l’epicier et le supplia. Il accepta de lui ceder de la nourriture, mais a condition que Catherine vienne desormais chercher les provisions. Chapitre III : La misere de la Maheude n’empechait pas sa rivalite avec sa voisine, la Levaque, et avec la Pierronne qui vivait avec son mari et un logeur qui etait son amant : «_C’etait la commune histoire des promiscuites du coron_. (page 100). Les commerages allaient bon train, les liaisons etant des sujets de discussion tres prises. Mme Hennebeau, la femme du directeur de la fosse du Voreux, fit visiter le coron a des amis parisiens qui montrerent une admiration hypocrite. Survint M. Hennebeau qui «_inspirait une crainte hierarchique a ses dix mille ouvriers_» (page 107). Chapitre IV : Au retour de Maheu chez lui, eut lieu le lavage, tandis qu’on entendait le tapage chez les Levaque. Lorsqu’il mangea, les enfants, affames, montrerent leur envie.
Quand les parents furent seuls, la Maheude fit le recit de sa visite chez Maigrat. Puis ce fut «_l’heure des betises ou l’on plantait plus d’enfants qu’on n’en voulait_» (page 114). Tandis que la Maheude s’en alla a Montsou acheter un ruban, Maheu travailla dans son jardin. Les galopins etaient alles «_gourgandiner_» (page 116). Chapitre V : Etienne, parti se promener apres avoir mange chez Rasseneur, vit des enfants s’amuser, des couples se former dont celui de Chaval et de Catherine dont on apprend qu’a l’age de seize ans elle n’avait pas encore atteint sa puberte.
Il les suivit et la vit subir «_le male avant l’age, avec cette soumission hereditaire qui, des l’enfance, culbutait en plein vent les filles de sa race_» (page 128). A son depit amoureux se joignit une volonte de vengeance : «_Cela le rendait fou, il serrait les poings, il aurait mange cet homme dans un de ces besoins de tuer ou il voyait rouge_. » (page 129). Troisieme partie Chapitre I : Tandis que, du fait de «_la maudite question des bois [… ] un sourd mecontentement fermentait dans la fosse_» (page 133), le travail etait devenu routinier pour Etienne.
Mais il ne cessait de s’opposer a Chaval d’autant plus que le printemps suscitait encore plus de couples. Chez Rasseneur, il fit la connaissance de Souvarine, un anarchiste russe qui s’etait «_enfui a la suite d’un attentat manque contre la vie de l’Empereur_» (page 136), etait devenu « machineur » au Voreux et qui, «_ni femme, ni ami, ne voulait aucun lien, etait libre de son sang et du sang des autres_» (page 137). Tous trois eurent de longues discussions politiques sur l’avenir des ouvriers. Tandis que Souvarine pensait qu’«_il faut detruire ou la faim repoussera_ [… la terre doit etre lavee par le sang, purifiee par l’incendie ! », Etienne etait en faveur de «_l’Association internationale des travailleurs_» (page 138). Dans la perspective d’une greve, il eut l’idee d’«_une caisse de prevoyance_» (page 139) et voyait la necessite d’«_une autre revolution_» (page 140). Rasseneur, lui, «_demandait seulement le possible aux patrons sans exiger, comme tant d’autres, des choses trop dures a obtenir. _» (page 70). Chapitre II : «_Le dernier dimanche de juillet est le jour de la ducasse de Montsou_» (page 143).
Le coron etait «_allume par la fete_» (page 144). Mais, a “_l’Avantage_”, Etienne en profita pour tenter d’endoctriner Maheu. Puis ils firent la tournee des differents estaminets. Tandis qu’il etait poursuivi par la Mouquette, Etienne decouvrit a la ducasse differents divertissements dont les combats de coqs et les concours de pinsons. Puis eut lieu le bal ou il tenta d’endoctriner Pierron alors que se dechainait une frenesie sensuelle : «_Un souffle ardent sortait des bles murs, il dut se faire beaucoup d’enfants, cette nuit-la_. » (page 157).
Mais Etienne proclamait : «_Il n’y a qu’une chose qui me chauffe le c’ ur, c’est l’idee que nous allons balayer les bourgeois_. » (page 157). Chapitre III : L’aine des Maheu, Zacharie, se mariant, Etienne s’installa chez eux, eprouvant «_une gene en face de Catherine_» (page 157), gardant pour elle «_un sentiment fait d’amitie et de rancune_» (page 158). Le trouble etait mutuel, le desir reciproque, mais rien ne se passait. Etienne, poursuivant son reve social, son espoir en la revolution, etait anime aussi par la soif de s’instruire.
Il commenca a exercer une influence sur les Maheu et surtout sur Catherine. La «_caisse de prevoyance_» fut creee et il fut considere comme un chef. Chapitre IV : La Compagnie, «_saisie de panique devant la crise industrielle qui s’aggravait_» (page 168) suspendit l’extraction. Avec le mecontentement cause par les boisages, «_un conflit paraissait fatal_» (page 169). Or Pluchart avait ecrit a Etienne une lettre ou il invitait les ouvriers de Montsou a adherer a l’Internationale. A la fois Rasseneur et Souvarine y etaient opposes.
Or, le jour de la paie, la Compagnie annonca qu’«_elle paierait le boisage a part_» (page 174) : c’etait une «_baisse de salaire deguisee_» (page 175) et la paie etait tres faible. «_Du coron entier, monta bientot le meme cri de misere_. » (page 177) et cette plainte generale fit que «_le soir, a l’Avantage, la greve fut decidee_». (page 179). Chapitre V : Cependant, le travail continua. Mais, un jour, survint un eboulement ou fut englouti Jeanlin. Il fut retrouve «_evanoui, les deux jambes brisees_» (page 184). C’etait a cause des «_maudits boisages_» (page 186).
Le cortege des sauveteurs etait attendu par les femmes, «_toutes etranglees de la meme terreur_» (page 187). Jeanlin «_resterait boiteux_. » (page 188). Jaloux du rapprochement entre Etienne et Catherine, Chaval «_lui faisait des scenes si abominables, qu’elle s’etait decidee a se mettre avec lui_», et «_il avait quitte brusquement le Voreux_» pour la fosse Jean-Bart a Vandame (page 189). Quatrieme partie Chapitre I : Alors que «_les Hennebeau avaient a dejeuner les Gregoire et leur fille Cecile_», «_la greve venait d’eclater_» (page 191). Mais Mme Hennebeau tenait a cette «_partie_», et M.
Hennebeau etait plus preoccupe par le desir qu’elle lui inspirait sans qu’il osat la toucher, le mepris qu’elle ressentait pour «_ce mari qui gagnait durement des appointements mediocres_» etant «_aggrave par un de ces singuliers malentendus de la chair qui glacent les plus ardents_» (page 193). Elle a fait de Paul Negrel, le neveu de son mari, son amant, et elle voulait le marier a Cecile. Les Gregoire arrives, survint Deneulin, qui «_avec son verbe haut et son geste cassant_» (page 197), manifesta la crainte de voir s’etendre la greve a sa mine et expliqua que la crise industrielle provoquait un abaissement du prix de revient.
La-dessus, le maitre porion annonca une delegation d’ouvriers. Deneulin etait inquiet ; Hennebeau craignait sa disgrace ; sa femme s’etonna : «_Est-ce qu’ils n’etaient pas tres heureux? _» (page 201) ; Negrel mit en garde les Gregoire : «_Vous etes l’infame capital_» (page 202). «_M. Gregoire se disait liberal ; et il regrettait Louis-Philippe. Quant a Deneulin, il etait pour un gouvernement fort, il declarait que l’empereur glissait sur la pente des concessions dangereuses_. » (page 203). Hennebeau pensait profiter de la greve pour s’emparer de la mine de Deneulin. Mais se presenterent les delegues.
Chapitre II : La veille, chez Rasseneur, Maheu avait accepte d’etre delegue en depit du mecontentement de sa femme. La delegation fut recue avec condescendance : «_Vous vous revoltez, a ce qu’il parait… _» (page 208) ironisa Hennebeau. Maheu, prenant la parole, proclama : «_Nous voulons seulement la justice_ [… ] du pain tous les jours. » (page 209). Il se plaignit du nouveau systeme de paiement, fit part de la volonte de tous les mineurs : le retour a la mine ne s’effectuera que si les choses redevenaient comme avant, avec une hausse des salaires en prime : «_Crever pour crever, nous preferons crever a ne rien faire_. (page 210). Le directeur promit de faire part de leurs reclamations a ses superieurs, mais reprocha l’adhesion a l’Internationale, ce qui fit intervenir Etienne qui precisa qu’elle n’avait pas encore eu lieu. Hennebeau presenta la Compagnie comme une providence, invoqua «_les risques enormes que les capitaux courent dans l’industrie_» (page 212), enfin se retrancha derriere sa condition de salarie, «_de simple instrument d’autorite_» (page 213). Chapitre III : «_L’obstination de la Regie a ne pas ceder exasperaient les mineurs_» et «_peu a peu, la greve devenait generale_» (page 215).
Au Voreux, c’etait la «_mort des batiments, ensevelis dans leur drap de poussiere noire_» (page 216). La caisse de prevoyance etant deja vide, les mineurs manquaient de tout. Mais «_ces hallucines de la misere_» conservaient «_une confiance absolue, une foi religieuse_» en «_la cite ideale de leur reve_» (page 217). Meme la Maheude «_etait pour la greve, raisonnablement_» (page 220). «_Etienne etait le chef inconteste_» ; «_sa popularite croissante le surexcitait chaque jour davantage_» par «_un continuel gonflement de vanite_. » (page 218) et il caressait «_l’idee d’exploiter la greve, de gagner a l’Internationale les mineurs_» (page 219).
Quand Catherine vint voir sa mere pour lui apporter des vivres car, a la fosse Jean-Bart, on continuait a travailler, il fut repris par sa tendresse pour elle. Comme Chaval vint la poursuivre, il fut pret a se battre. «_Pris d’une tristesse noire_», il etait rejete «_a la souffrance de tous, aux abominations de la misere_» (page 224) et, dans «_cette guerre du travail contre l’argent_», «_repris d’une fureur de bataille_» (page 225), il decida de faire venir Pluchart pour faire adherer les charbonniers de Montsou a l’Internationale.
Chapitre IV : Etienne organisa une reunion d’une centaine de mineurs pour decider de la marche a suivre. Il comptait sur la presence de Pluchart, car il envisageait de demander de l’aide a l’Internationale. Mais survinrent Rasseneur et Souvarine. «_Le possibiliste_» qu’etait le premier voulait seulement que «_le mineur soit mieux traite_» (page 228). Etienne lui opposa «_l’idee de Karl Marx_», le «_collectivisme_» (page 230). Souvarine etait un nihiliste, un anarchiste qui avait besoin de sang. Arriva enfin Pluchart devant lequel Rasseneur reprit son discours amolissant, provoquant la colere des deux tiers des assistants.
Pluchart put montrer «_l’Internationale comme une providence pour les grevistes_», evoquer «_la grande armee des travailleurs_» (page 239). Alors qu’on allait distribuer les cartes, on annonca l’arrivee des gendarmes et ce fut par «_un vote par accclamation_» que «_les dix mille charbonniers de Montsou devinrent membres de l’Internationale_. » (page 241). Chapitre V : Une quinzaine plus tard au coeur de l’hiver, «_la misere avait empire encore, les corons agonisaient d’heure en heure, sous la disette croissante_. » (page 242).
Etienne, qui ceda a la supplication d’amour de la Mouquette et etait «_un peu honteux de cette bonne fortune_» (page 245), fut desespere que «_la caisse de prevoyance n’avait pas eu le temps de s’emplir_» (page 243), mais constata que «_tandis que le travail crevait de faim, le capital se detruisait_» (page 245). Les delegues, pour accelerer les choses, deciderent de rencontrer M Hennebeau, mais il les recut avec une «_raideur autoritaire_» (page 246). Les femmes tenterent d’obtenir de l’epicier Maigrat «_une nouvelle semaine de credit_» (page 247), mais echouerent elles aussi. «_Chez les Maheu, la soiree fut affreuse_. (page 248) : ils etaient en proie a la faim, aux maladies. Etienne pensa a recourir a la Mouquette qui s’etait faite blanchisseuse. La Maheude alla chercher un pain chez la Levaque qui en manquait aussi, puis chez la Pierronne, qui semblait dans l’aisance, mais ne lui donna rien. Elle vit le cure qui faisait sa promenade, mais il ne consentit meme pas a s’arreter. Etienne avait rapporte «_une douzaine de pommes de terre, cuites et refroidies_» (page 254) et avait des nouvelles : la Compagnie rendrait «_leurs livrets aux mineurs compromis_» (page 254), les renverrait : une grande assemblee fut decidee.
Chapitre VI : Jeanlin, Lydie et Bebert (fils de Levaque) erraient sur les routes et commettaient differents mefaits (principalement pour se nourrir). Etienne se rendant a Requillart, un ancien puits, pour y retrouver la Mouquette et rompre avec elle, vit Jeanlin y descendre. Il le suivit, decouvrit qu’il s’etait cree «_une demeure confortable_» (page 261) et conversa avec «_cette crapule d’enfant_» (page 262) qui s’y empiffrait. Puis, alors qu’il etait avec la Mouquette, il fut vu par Catherine.
Le lendemain, Zacharie et Mouquet se livrerent a «_une grande partie de crosse_», pousserent «_la cholette, le petit oeuf de buis_» sur trois kilometres (page 265) et arriverent ainsi, en meme temps que Jeanlin, Lydie et Bebert, a la foret de Vandame vers laquelle ils virent aller «_une foule en marche_» (page 268). Chapitre VI : L’assemblee clandestine avait lieu au Plan-des-Dames. Etienne y parla d’abord avec «_le ton froid d’un simple mandataitre du peuple qui rend ses comptes_» (page 271) puis s’exalta pour proposer le ollectivisme. «_Une acclamation roula jusqu’a lui_», la foule etant animee par «_la fievre d’espoir des premiers chretiens de l’Eglise_» (page 274). «_Il fallait agir revolutionnairement, en sauvages, puisqu’on les traquait comme des loups_» (page 270). Rasseneur reprit son «_discours d’apaisement_», montra «_l’impossibilte de changer le monde a coups de lois, la necessite de laisser a l’evolution sociale le temps de s’accomplir_», declara «_preferer la participation aux benefices_» (page 275).
Intervint le pere Bonnemort, «_ce vieillard, d’une paleur de spectre sous la lune_» (page 276), «_crachant de la houille, les jambes enflees par l’eau des tailles_» (page 277), pour qui «_ca n’avait jamais bien marche, et ca ne marcherait jamais bien_» (page 276). Cela excita la violence d’Etienne, d’autant plus qu’il avait vu Chaval dans la foule : il evoqua «_une armee qui poussait des profondeurs des fosses, une moisson de citoyens dont la semence germait et ferait eclater la terre_» (page 277). «_La clameur de la foule fut si haute que les bourgeois de Montsou l’entendirent_» (page 278).
Il s’en prit a Chaval qui continuait le travail a Jean-Bart ; aussi celui-ci annonca-t-il qu’il allait le faire cesser. Et un rendez-vous fut pris pour le lendemain. Cinquieme partie Chapitre I : Deneulin apprit que les ouvriers de sa fosse se mettaient en greve, Chaval les ayant debauches. Ses filles, Lucie et Jeanne, lui montrerent leur sollicitude. Mais il savait que sa fortune etait compromise, que la Compagnie avalerait sa mine. Il s’adressa aux mineurs sur un ton paternel, tentant de les convaincre de descendre, faisant part de ses difficultes : «_Il faut que je vive, moi d’abord, pour que vous viviez_. (page 286). Chaval s’interposa pour empecher la conciliation, mais Deneulin le prit par la flatterie, eut l’ingenieuse idee de le corrompre en lui proposant un poste de chef si la greve etait evitee. Aussi le travail reprit-il. Mme Hennebeau, ayant organise «_une partie_», vint, avec Cecile et Negrel, prendre Lucie et Jeanne pour une promenade vers la foret. Chapitre II : A Jean-Bart, Catherine avait repris le travail, mais, dans la chaleur accablante, elle fut victime d’un etourdissement du au grisou. Chaval la porta pour la sauver et ils connurent un moment d’attendrissement.
Mais on cria : «_Ceux de Montsou coupent les cables ! Que tout le monde sorte ! _» (page 298) et ce fut «_une debandade enragee, une course de fous_» (page 299) vers les echelles de secours. Mais la montee etait difficile, des altercations eurent lieu ; il y avait cent deux echelles et, a la trente-deuxieme, elle «_sentit ses jambes et ses _bras se raidir» ; puis, «_ivre de tenebres_», elle eut «_un vertige_», «_la nausee_» (page 301), tomba, mais «_se trouva dans un eblouissement de soleil, au milieu d’une foule hurlante qui la huait_» (page 303).
Chapitre III : Les mineurs de Montsou avaient d’abord eu peur de soldats, mais ils ne faisaient qu’«_une simple promenade militaire_» (page 304). Puis ils etaient partis vers Jean-Bart, conduits par Etienne qui «_but coup sur coup trois petits verres, histoire simplement de combattre le froid ; meme il en emporta une gourde pleine_» (page 305). «_Devant ce flot grossissant_» qui proclamait qu’«_il faut que le travail cesse partout_» (page 306), Deneulin dut constater son impuissance mais fit front.
La fosse n’en fut pas moins envahie, les cables coupes, le feu mis, les chaudieres ouvertes, les rescapes du fond accueillis par des injures. Etienne, excite a la vue de Chaval, exaspere a celle de Catherine, les fit prisonniers. Et la foule, quittant Jean-Bart, «_coula de nouveau sur la route en un torrent deborde_» (page 312). Et Deneulin, ruine, «_sentait la complicite de tous, une faute generale, seculaires. Des brutes sans doute, mais des brutes qui ne savaient pas lire et qui crevaient de faim_. (page 313). Chapitre IV : La foule, dont Etienne avait pris la tete en avalant des gorgees de genievre, traversa la plaine en criant «_Du pain ! du pain ! du pain ! _» (page 314), allant de fosse en fosse. Cependant, a Mirou, ils furent arretes par le pere Quandieu. Etienne voulut liberer Catherine, mais elle prefera rester avec son homme. A d’autres fosses, Madeleine, Crevecoeur, la Victoire, ils arriverent trop tard : les porions avaient fait sortir les mineurs. A Gaston-Marie, on massacra la pompe.
Etienne, ivre, voulut satisfaire «_son envie de manger un homme_» (page 323) en se battant au couteau contre Chaval. Mais Catherine prit sa defense et Etienne retrouva la raison. Chapitre V : A Montsou, M. Hennebeau, qui pensait, en les desapprouvant aux amours de Dansaert et qui meditait une reaction energique contre les grevistes, decouvrit que sa femme avait couche dans la chambre de Negrel et se rememora son «_long passe de souffrance_», regretta «_leur malentendu immediat de coeur et de chair_» (page 328), sa colere le faisant traiter sa femme de «_salope_» (page 329).
Mais on lui fit part de «_la marche des grevistes a travers les fosses_» (page 330) et qui envahissaient Montsou. C’est ainsi que Mme Hennebeau, Cecile, Lucie, Jeanne et Negrel, se promenant dans la campagne, assisterent, caches dans une etable et se sentant en danger, au «_defile de la bande_» (page 331), eurent «_la vision rouge de la revolution qui les emporterait tous, fatalement, par une soiree sanglante de cette fin de siecle_» (page 334). Le defile empecha de passer la voiture des Gregoire qui le regarderent, toujours inconscients. M.
Hennebeau le vit de son bureau.. Il etait en proie a un pessimisme integral qui lui etait inspire surtout par son malheur personnel qui lui faisait envier le bonheur simple des mineurs, tandis que dominait «_le cri du ventre_» : «_Du pain ! du pain ! du pain ! _» (page 339). Chapitre VI : Etienne, «_degrise par les gifles de Catherine_», entendit «_une voix de raison_» et voulut «_proteger les Chantiers de la Compagnie_» (page 339), tandis que Rasseneur se moqua : «_Maintenant, vous pouvez reclamer du pain, c’est du plomb qu’on vous donnera. _» (page 340).
La foule, echappant a Etienne, s’en prit aux Gregoire : «_A mort les bourgeois ! vive la sociale ! _» (page 341). Ils parvinrent chez Hennebeau, mais furent inquiets de l’absence de Cecile. Maigrat y vint «_reclamer aide et protection_» (page 343). Quand se presenta la voiture des promeneurs, la colere des femmes se dechaina contre Cecile qui fut saisie par Bonnemort «_sorti brusquement de sa resignation d’un demi-siecle_» (page 346). Elle fut sauvee par Deneulin qui se servit de son cheval «_avec une adresse et une force extraordinaires_» (page 347).
Il annonca sa ruine et l’annexion de sa mine a celle de Montsou. Etienne, ayant detourne la foule, «_enfoncait a coups de hache le magasin de Maigrat_» (page 349) qui se refugia sur la toiture du hangar d’ou il tomba, son cadavre etant emascule par les femmes et «_l’abominable trophee_» (page 352) etant promene. «_C’etait comme un assouvissement qui les apaisait tous_» (page 353). Catherine prevint Maheu et Etienne : «_Voila les gendarmes. _ [… ] C’est Chaval qui est alle les chercher. » «_Ce fut une debacle, un sauve-qui-peut_» (page 353), «_la facile victoire des sabres_» (page 354).
Sixieme partie Chapitre I : Alors que l’hiver durait, la troupe occupa Montsou, mais «_le travail n’avait repris nulle part_» (page 355) et «_on rendait les livrets en masse_» (page 356). Le nouveau cure, l’abbe Ranvier, prenait la defense des grevistes. Etienne avait ete denonce par Chaval et avait disparu. Il se cachait dans «_le terrier de Jeanlin_» (page 357), ressentant des remords mais aussi «_une sensation de superiorite_» (page 359), partage entre l’espoir, la volonte de continuer la lutte, et le desespoir, le penchant vers le nihilisme.
Sortant la nuit, il apprit que la greve de Montsou avait entraine la ruine des autres industries et d’abord celle de Deneulin. Esperant une defection des troupes, il aborda un soldat qui lui parla de sa Bretagne natale, tandis que lui-meme evoqua «_la Provence qu’il avait quittee tout petit_» (page 366). Mais il le trouva voue a l’obeissance et eut alors «_la certitude de la defaite_ [… ] sous la botte militaire» (page 366). Chapitre II : Sous la neige, «_le coron des Deux-Cent-Quarante gisait, comme disparu_. » (page 367), reveille toutefois par les querelles entre femmes. On observait la Pierronne qui recevait Dansaert.
Cela entraina une bagarre entre Pierron et Maheu chez qui «_c’etait, maintenant, l’agonie derniere_» (page 372) : pas de nourriture, pas de chauffage ; Alzire se portait mal. L’abbe Ranvier vint les voir : «_il exploitait la greve_», «_disait que l’Eglise etait avec les pauvres_», que «_les riches avaient pris la place de Dieu, en etaient arrives a gouverner sans Dieu_», qu’«_ils devaient s’en remettre tout de suite aux mains des pretres_» (page 375). Mais la Maheude «_s’etait toujours mefiee des soutanes_» (page 375) et Maheu retorqua au pretre : «_Vous auriez mieux fait de commencer par nous apporter du pain_» (page 374).
Etienne venait aussi leur rendre visite, leur apprenant que «_le petit Negrel etait parti en Belgique chercher des Borains_» (page 375), ce qui provoqua la colere de Maheu qui avait ete renvoye. Etienne voulait se rendre, mais la Maheude se recria, se montra prete aux plus extremes situations. Survint le medecin, juste a temps pour constater le deces d’Alzire, qui etait morte de faim. Chapitre III : A “_l’Avantage_”, conversaient Rasseneur, Souvarine et Etienne. Pour Rasseneur, qui continuait a trouver la greve absurde et inutile, la reprise du travail au Voreux repondait au declin de l’Internationale.
Etienne lui repliqua avec orgueil : «_Nos carcasses d’affames serviront plus la cause du peuple que toute ta politique d’homme sage_» (page 382). Souvarine poursuivait sa «_reverie mystique_» (page 382) ; il avait eu «_l’espoir de voir se fonder enfin cette societe nouvelle du travail en commun_» (page 383) mais il etait demeure un etranger pour les ouvriers francais, se mefiait de leur «_besoin enrage d’etre des bourgeois a leur place_» (page 384) et annoncait : «_Vous serez tous fauches, culbutes, jetes a la pourriture_. » (page 384).
Tout a coup, entrerent Catherine et Chaval qui se vanta : «_Je descends demain au Voreux avec douze Belges, qu’on m’a donnes a conduire, parce qu’on m’estime_» (page 385). Et, comme il voulait obliger Catherine a boire, Etienne l’affronta pour un combat a finir ou, Chaval ayant ete abattu, Catherine, jusque-la partagee, indiqua a Etienne qu’il avait un couteau qu’il brandit en traitre. Etienne sentit en lui «_une brusque folie du meurtre, un besoin de gouter au sang_», mais «_finit par se vaincre_» (page 389) et lui laissa la vie sauve.
Chapitre IV : Etienne se retrouva avec Catherine a qui il proposa de s’installer avec lui. Mais elle refusa et ils se separerent. Il vit alors, sur «_le terri_», un soldat en sentinelle assailli par Jeanlin qui lui enfonca son couteau dans la gorge parce que, lui dit-il, il en avait «_envie_» (page 395). Etienne reconnut le Breton auquel il avait parle. Jeanlin etait pret a «_casser les os des Belges_» (page 396), mais il lui fit descendre avec lui le cadavre dans le Requillart.
S’interrogeant sur son incapacite a tuer et sur la facilite qu’avait eue Jeanlin a le faire, il en conclut : «_Puisqu’il n’osait tuer, c’etait a lui de mourir_» (page 398). Mais le reprit vite «_l’espoir d’une victoire encore possible_. » (page 399). Pendant ce temps, Catherine, chassee par Chaval, errant sur les routes, vit Lydie et Bebert, delaisses par Jeanlin, s’embrasser, tandis qu’«_une bande d’hommes et de femmes descendaient du coron, avec de grands gestes de colere_. » (page 401).
Septieme partie Chapitre I : «_Les coups de feu de Montsou avaient retenti jusqu’a Paris en un formidable echo. _ [… ] Tous les jounaux de l’opposition s’indignaient. [… ] L’empire etait atteint en pleine chair… » (page 417). Vinrent a Montsou trois des regisseurs de la Compagnie qui, cherchant l’apaisement, congedierent les Borains, firent cesser l’occupation militaire, deciderent de reouvrir les fosses, inciterent les mineurs a reprendre le travail en leur promettant des ameliorations. La Maheude resta «_noire et muette dans l’accablement de son deuil_» (page 419).
Catherine, se disant prete a retourner au Voreux, sa mere menaca : «_Le premier de vous autres qui travaille, je l’etrangle_. » (page 421). Etienne, qui subissait «_le sourd reproche_» (page 420), essaya de la rassurer, mais elle lui assena : «_Si j’etais a ta place, moi, je serais deja morte de chagrin, d’avoir fait tant de mal aux camarades_. » (page 423). Il etait aussi la cible des insultes des travailleurs qui l’accusaient de tous leurs malheurs, et, de son cote, il les meprisait. Attaque par Chaval, il fut sauve par Rasseneur qui repeta son message.
Il en vint a craindre «_cette masse enorme, aveugle et irresistible du peuple, passant comme une force de la nature, balayant tout, en dehors des regles et des theories_. » (page 427). Le meme jour, on feta les fiancailles de Negrel et de Cecile, et «_le diner tournait a la celebration officielle d’une victoire_. » (page 428). Etait la Deneulin qui avait vendu «_sa concession de Vandame a la Compagnie de Montsou_» mais y etait garde «_a titre d’ingenieur divisionnaire, resigne a surveiller ainsi, en simple salarie, cette fosse ou il avait englouti sa fortune_. (page 428). Chapitre II : Au cours d’une promenade, Etienne rencontra Souvarine. Ils parlerent du succes de Pluchart a Paris, des theories de Darwin sur lesquelles ils s’opposaient, du socialisme. Souvarine raconta comment sa femme, Annouchka, a la suite d’un attentat, avait ete arretee et pendue. Ils parlerent ensuite de la possibilite de redescendre qu’offrait la Compagnie, Etienne jurant de ne pas le faire. Il voulait savoir s’il etait vrai que le cuvelage etait dangereux. Mais Souvarine resta silencieux puis annonca son depart. Et ils se separerent.
Mais l’anarchiste se rendit dans la fosse, et, «_avec l’adresse et le sang-froid d’un bon ouvrier qui a longtemps medite sur sa besogne_» (page 434), «_une besogne d’une temerite folle_», accomplie avec «_un tranquille mepris de la mort_» (page 435), se livra a un sabotage en sciant un des panneaux empechant l’eau de se repandre dans le puits, anime de fureur contre «_cette bete mauvaise du Voreux, a la gueule toujours ouverte, qui avait englouti tant de chair humaine ! _» (page 436). A la meme heure, Etienne, qui ne dormait pas, entendit Catherine se lever pour retourner travailler a la fosse.
Lasse de voir sa famille dans le besoin, elle ne craignait pas les reproches. Ils eurent «_une etreinte desesperee_ [… ] sans autre desir, avec le passe de leurs amours malheureuses» (page 437). Et il decida d’y aller avec elle. Souvarine, qui regardait les mineurs qui retournaient au travail, lui intima : «_Rentre chez toi, je le veux, entends-tu ! _» (page 439). Mais, le voyant accompagne de Catherine, il le laissa passer : «_Quand il y avait une femme dans le coeur d’un homme, l’homme etait fini, il pouvait mourir_. » (page 440). Chapitre III : Etienne et Catherine virent Chaval.
Dans la descente de la cage, il y eut «_un frottement terrible_» et elle se continua «_sous une pluie d’orage_» (page 441). En bas, ils furent «_sous une veritable trombe d’eau_». «_Chaval completa l’equipe dont Catherine et Etienne faisaient partie_» (page 442) et «_les deux galants de la herscheuse furent sur le point de s’allonger des gifles_. » (page 443). «_L’equipe se trouvait comme aux avant-postes, perdue a une extremite de la mine, sans communication desormais avec les autres chantiers_». Quand Catherine leur dit : «_Tous ont fichu le camp_», «_les dix hommes jeterent leurs outils pour galoper_. (page 443). Mais «_un torrent leur barra la route_», «_un deluge tombait du puits_» (page 444). «_De chaque galerie, des files d’ouvriers arrivaient au galop, se ruaient a l’assaut des cages_» (page 445). Le maitre porion Dansaert declara : «_la fosse est perdue_» (page 446). Mais Negrel, montrant «_une bravoure tranquille_» (page 447), descendit, mesura «_l’horreur du desastre_» (page 448), mais decida de «_tenter le sauvetage des hommes en peril_» : «_Sans doute, devant la crue rapide, les miserables venaient de fuir dans les galeries, si le flot ne leur avait pas deja empli la bouche_».
Il se rendit compte qu’avait ete effectue «_tout un travail abominable de destruction_», qu’«_on avait voulu cette catastrophe_», et «_l’idee de l’homme qui avait fait ca dressait ses cheveux, le glacait de la peur religieuse du mal, comme si, mele aux tenebres, l’homme eut encore ete la, enorme, pour son forfait demesure_. » (page 449). Il remonta rapidement, la voie n’etant plus libre. Hennebeau donna «_l’ordre d’evacuer la fosse tout de suite_» (page 450). Ce fut la consternation dans la foule qui s’etait deja reunie : «_L’air s’emplissait d’un gemissement de peuple egorge_», «_le puits allait manger la fosse_» (page 451). _Alors, l’attente commenca_. » (page 452) tandis qu’on percevait les signes de l’effondrement jusqu’a «_une supreme convulsion du sol_» et qu’on assistait a la disparition des batiments : «_D’abord, une sorte de tourbillon emporta les debris du criblage et la salle des recettes. Le batiment des chaudieres creva ensuite, disparut_. [… ] Et l’on vit alors une effrayante chose, on vit la machine, disloquee sur son massif, les membres ecartelees, lutter contre la mort : elle marcha, elle detendit sa bielle, son genou de geante, comme pour se lever ; mais elle expirait, broyee, engloutie. [… ] Et rien ne depassait. [… Le Voreux venait de couler a l’abime. » (page 454). Enfin, le canal se deversa dans la fosse. Alors Souvarine «_s’eloigna sans un regard en arriere_» (page 455), allant «_a l’extermination, partout ou il y aurait de la dynamite, pour faire sauter les villes et les hommes_» (page 456). Chapitre IV : «_La Compagnie chancelait sous le coup terrible_» (page 456). On pretendit a «_une rupture naturelle du cuvelage_». On «_refoula le canal dans son lit_» (page 457). On s’employa au «_sauvetage des mineurs engloutis_» (page 457) car, «_dans ces catastrophes des mines, la regle est de toujours supposer vivants les hommes mures au fond_» (page 458).
Negrel, «_pris d’une fievre de devouement_» (page 459), se passionna pour la recherche, tandis que la Maheude etait entierement vouee a l’attente. Apres trois jours, on etait sur le point d’abandonner quand Zacharie dit avoir entendu des battements, «_la cadence connue du rappel des mineurs_» (page 460). Il tint a etre «_parmi les ouvriers d’elite mis a l’abattage_» (page 461) et fit ce travail avec beaucoup d’ardeur. «_Ce qui soutenait les courages, c’etait la supplication des miserables_. » (page 462). _Pour les prisonniers, c’etait la douzieme journee qui commencait, douze fois vingt-quatre heures sans pain, sans feu, dans ces tenebres glaciales ! _» (page 462). La-dessus, Zacharie ayant commis «_l’imprudence d’ouvrir sa lampe_» (page 463), eclata un coup de grisou ou il mourut. «_Les bourgeois organisaient des excursions_» a la mine devastee (page 464). Touches par les malheurs de la Maheude, ils vinrent chez elle ou ne se trouvait que Bonnemort «_avec son effrayant visage, d’une froideur et d’une durete de pierre_», crachant «_une boue de charbon, tout le charbon de la mine qu’il se tirait de la gorge_» (page 468).
Un moment, Cecile demeura seule avec lui, «_elle florissante, grasse et fraiche des longues paresses et du bien-etre repu de sa race, lui gonfle d’eau, d’une laideur lamentable de bete fourbue, detruit de pere en fils par cent annees de travail et de faim_», et, au retour des Gregoire, «_par terre, leur fille gisait, la face bleue, etranglee_» (page 469). On conclut «_a un coup de brusque demence, a une tentation inexplicable de meurtre devant ce cou blanc de fille_». Pour les Gregoire, «_c’etait l’effondrement meme de leur vie, a quoi bon vivre, maintenant qu’ils vivraient sans elle? » (page 470). Chapitre V : «_En bas du puits, les miserables abandonnes_» avaient «_de l’eau jusqu’au ventre_». Constatant le «_galop furieux_» (page 471) de Bataille, hantes par la peur des «_mauvais esprits de la mine_» (page 472), ils fuirent alors que le flot montait. Etienne et Catherine furent separes des autres par l’effondrement d’un bloc enorme. Ils assisterent a l’agonie de Bataille. Catherine begayait les meme mots sans relache : «_Je ne veux pas mourir… Je ne veux pas mourir_. » (page 475), tandis que «_le flot noir et mouvant_ [… ] s’enflait sans cesse pour les atteindre. (page 476). Soudain, ils se retrouverent avec Chaval, «_tous trois mures_» «_et l’affreuse vie commenca_» (page 478). Chaval avait de quoi manger, tandis les deux autres etaient en proie a la faim. «_Etienne serait mort d’inanition plutot que de mendier a Chaval une bouchee de pain_», mais celui-ci, «_repris d’une de ses anciennes fureurs de desir_», en donnait a Catherine qui craignait «_de jeter ces deux hommes l’un sur l’autre, dans cette cave etroite ou ils agonisaient_» (page 479). Etienne etait «_enrage de ce reste de vie qu’on l’obligeait a vivre la, colle au rival qu’il execrait_. «_La revoltante promiscuite s’aggravait, avec l’empoisonnement des haleines, l’ordure des besoins satisfaits en commun_» (page 480). Ils etaient condamnes a une mort lente, mais Etienne «_devint fou_» et, pris par «_le besoin de tuer_», «_sous la poussee de la lesion hereditaire_», arracha une feuille de schiste et «_l’abattit sur le crane de Chaval_» (page 481). «_Et penche, l » il elargi, Etienne le regardait. C’etait donc fait, il avait tue. Confusement, toutes ses luttes lui revenaient a la memoire, cet inutile combat contre le poison qui dormait dans ces muscles, l’alcool lentement accumule de sa race.
Pourtant, il n’etait ivre que de faim, l’ivresse lointaine des parents avait suffi_. » (page 481). Etienne et Catherine eurent alors a lutter contre l’eau qui montait, n’ayant plus «_que la sensation de cette mer, enflant, du fond des galeries, sa maree muette_. » (page 483). Mais ils entendirent des coups, furent soumis aussi a des hallucinations auditives. Ils mangerent du bois vermoulu, du cuir, de la toile. Le cadavre de Chaval vint les degouter de boire de l’eau. Regrettant l’amour qu’ils n’avaient pas vecu, ils eurent enfin «_leur nuit de noces, au fond de cette tombe, sur ce lit de boue, le besoin e ne pas mourir avant d’avoir eu le bonheur, l’obstine besoin de vivre, de faire de la vie une derniere fois. Ils s’aimerent dans le desespoir de tout, dans la mort_. » (page 489). Mais Catherine en mourut. Quelques jours plus tard, Etienne fut trouve par Negrel «_et ces deux hommes qui se meprisaient, l’ouvrier revolte, le chef sceptique, se jeterent au cou l’un de l’autre_. » (page 490). Seul survivant, il apparut a la surface «_decharne, les cheveux tout blancs_», un «_vieillard_» (page 491). Chapitre VI Etienne quitta Montsou, appele a Paris par Pluchart.
Il vint «_dire adieu aux camarades_» (page 491) qui, vaincus, avaient repris le travail en ayant «_du accepter le tarif de boisage_», «_les dents serrees de colere, le coeur gonfle de haine, l’unique resignation a la necessite du ventre_» (page 492). Et le Voreux etait toujours «_le monstre avalant sa ration de chair humaine_». Mais Etienne «r_ecommencait le reve de les changer en heros, de diriger le peuple, cette force de la nature qui se devorait elle-meme_» (page 493), avait «_l’espoir fievreux de la revanche_» (page 494).
Il apercut la Maheude qui, «_lamentable dans ses vetements d’homme_» (page 495), descendait dans la mine et qui, «_revenue a son calme de femme raisonnable_», «_dans sa resignation seculaire_», reconnaissait : «_Ce n’est la faute de personne… Non, non, ce n’est pas ta faute, c’est la faute de tout le monde_» (page 497). Mais, «_dans cette poignee de main derniere_», il sentit qu’elle «_lui donnait rendez-vous pour le jour ou l’on recommencerait_» (page 498).
Et, «_le soleil paraissant a l’horizon glorieux_», dans «_cette gaiete de la nouvelle saison_», «_il se sentait fort, muri par sa dure experience au fond de la mine_» (page 499), entrevoyait la victoire du peuple sur la bourgeoisie, grace a l’Internationale, a la greve generale, a «_l’entente entre tous les travailleurs_» (page 501), a un combat organise, sentant que «_la campagne etait grosse. Des hommes poussaient, une armee noire, vengeresse, qui germait lentement dans les sillons, grandissant pour les recoltes du siecle futur, et dont la germination allait faire bientot faire eclater la terre_. Analyse (la pagination est celle du Livre de poche) Alors que Balzac n’avait vu l’argent que circulant d’individu a individu, n’avait pas vu l’argent remuant les collectivites, n’avait guere parle du peuple et surtout pas du proletariat qui n’existait pas encore vraiment ; alors qu’Hugo, dans “_Les miserables_”, pensait que la question sociale allait se regler par la charite, Zola eut une vision d’economiste et de sociologue, comprit l’existence de la lutte des classes, fut le premier des grands romanciers a faire d’une greve le centre d’un vaste roman, devint meme socialiste en l’ecrivant.
C’est l’etape qu’il franchit dans “_Germinal_”, roman ecrit entre le 2 avril 1884 et le 23 janvier 1885, qui raconte une greve des mineurs dans la France du Second Empire, une greve qui echoue mais qui pourtant laisse presager le succes d’une revolution future, comme le suggere le titre meme.
Ce roman naturaliste, s’il est un document sur le travail dans les mines et sur la situation sociale a l’epoque, s’il donne au personnage principal une evolution significative, est d’ailleurs traverse d’un souffle epique. Interet de l’action Genre : Ce roman, qui fait une peinture sans concession de la condition des mineurs et qui est l’histoire d’un groupe lie a un lieu, a un milieu, a des circonstances, est un roman social, un roman de l’ouvrier et de la greve. Il est meme le modele du genre.
Le livre est rattache assez artificiellement a l’ensemble des “_Rougon-Macquart_” par le personnage d’Etienne Lantier, fils de Gervaise Macquart, (dans “_L’assommoir_”), frere de Claude (“_L » uvre_”), de Jacques (“_La bete humaine_”) et de Nana (“_Nana_”), qui decouvre la mine, anime le conflit entre la compagnie capitaliste, representee par quelques bourgeois, et le monde anonyme des travailleurs, representes surtout par la famille Maheu et un petit groupe d’ouvriers unis ou separes par les lois du c’ ur ou de l’interet. Le roman vaut donc d’abord par son action.
Originalite: Le theme de la revolte des opprimes et des conquetes sociales du mouvement ouvrier etait courant a l’epoque. Les mineurs, ou «_gueules noires_», etaient les fantassins et les heros de la premiere revolution industrielle, celle du charbon et de l’acier. Ils avaient deja ete evoques et celebres, en 1878, dans le tres populaire “_Sans famille_” d’Hector Malot. Zola a pu s’inspirer aussi d’une des nouvelles reunies par Paul Heuzy sous le titre “_Un coin de la vie de misere_” (1878) ; l’ouvrage lui etait dedie, ainsi qu’a Flaubert, aux Goncourt et a Daudet.
La nouvelle intitulee “_La vie d’Antoine Mathieu_” mettait en scene un jeune revolte, une Catherine qu’il aimait, et une inondation de galeries. Mais, quand Zola fit paraitre son roman en feuilleton dans “_Le Gil Blas_” a la fin de 1884, il etait original car il ne se contentait pas d’etre realiste, naturaliste. Il ne s’interdit pas une composition vraiment artistique par la dramatisation du deroulement, par la dualite de l’action, par le souci du rythme, par l’emploi des procedes du roman populaire, surtout, par le souffle epique qui l’anime.
On peut distinguer nettement : une exposition (premiere et deuxieme parties), un n’ ud (troisieme partie), un developpement (quatrieme, cinquieme et sixieme parties), un denouement (septieme partie). Le chapitre final est symetrique du chapitre initial : le livre s’ouvre et se ferme sur le meme paysage, l’un de nuit apre et glaciale, l’autre de jour tout penetre de la douceur du printemps, le soleil apparaissant enfin ; il s’ouvre sur la descente des mineurs et se ferme sur celle de la Maheude a la fin. Mais, entre-temps, un changement radical s’est produit chez Etienne.
L’action, lente au depart, s’accelere pratiquement jusqu’a la fin, avec un point culminant dans la cinquieme partie. Cette dramatisation est encore accrue par le fait que la plupart des chapitres et des parties se terminent sur un temps fort. Le chapitre IV de la premiere partie se termine sur : «_Eux, au fond de leur trou de taupe, sous le poids de la terre, n’ayant plus de souffle dans leurs poitrines embrasees, tapaient toujours_. » (page 52) : cet adverbe insistant sur l’eternel recommencement de ce travail de Sisyphe.
Le chapitre de la ducasse se termine sur «_nous allons balayer les bourgeois_» (page 157). L’accident de Jeanlin clot la troisieme partie. Les derniers mots de la quatrieme partie, consacree au Plan-des-Dames, sont : «_une violence dont le vent allait enfievrer les corons aux quatre coins du pays_» (page 242). La cinquieme partie se ferme, apres le pillage, sur la vision comique du «_patissier de Marchiennes_» et de ses «_vol-au-vent_» (page 354). C’est la fusillade qui termine la sixieme partie. Cette structure donne a l’ensemble beaucoup de dynamisme.
L’action repose sur l’opposition irreductible de deux blocs : les mineurs et les bourgeois, Zola ayant voulu que les oppositions soient «_poussees au summum de l’intensite possible_». En fait, il y a deux actions : le conflit social et les conflits interpersonnels s’enchevetrent, le malheur prive se deroule en contrepoint du malheur collectif, Zola ayant voulu «_une double intrigue d’amour et de mort qui doit s’enlacer au drame social_». Mais il y a aussi de nombreux conflits chez les ouvriers. Les femmes, la Pierronne, la Levaque, qui ont excitatrices, se livrent a de cruelles rivalites : «_une explication entre deux commeres finissait par une tuerie entre les deux hommes_» (page 368). Un conflit oppose Rasseneur et Etienne : «_le froid de leur rivalite_ [… ] jetant l’un a une exageration revolutionnaire, poussant l’autre a une affectation de prudence, les emportant [… ] dans ces fatalites des roles qu’on ne choisit pas soi-meme» (page 231) – «_La querelle venait de Rasseneur_ [… ] qui se flattait de reconquerir son autorite ancienne» (page 270).
Le principal affrontement, celui qui influe fortement sur l’action, est celui qui oppose Etienne et Chaval qui sont animes d’une haine immediate, «_une de ces haines d’instinct qui flambent subitement_» (page 39), d’une competition pour la conquete de Catherine, Zola ayant voulu «_mettre au-dessus de l’eternelle injustice des classes l’eternelle douleur des passions_», entrelacer une histoire d’amour a l’histoire sociale, ajouter le malheur prive au malheur collectif, Etienne n’ayant d’abord ete concu que pour soutenir l’intrigue sentimentale.
Ce conflit prive conduit a la separation des mineurs en deux groupes, les uns faisant la greve, les autres s’y refusant : «_il venait de reconnaitre Chaval_ [… ] L’idee que Catherine devait etre la l’avait souleve d’une nouvelle flamme, d’un besoin de se faire acclamer devant elle» (page 277) – «_Mais il voyait toujours Chaval qui affectait de ricaner en haussant les epaules, devore de jalousie, pret a se vendre our un peu de cette popularite_» (page 278) ; il l’attaqua parce qu’il continuait a travailler a Vandame ; sa fureur eclata a la sortie de Chaval de la mine : «_bougre de mufle ! _ [… ] maquereau ! » (page 311) ; «_la vue de Catherine_» acheva de l’«_exasperer_» (page 312) ; puis ce furent les voies de fait : «_Etienne venait de l’empoigner par un bras, en menacant de lui casser les reins, s’il meditait quelque traitrise_» (page 316) : il le contraignit a courir, libera Catherine qui voulut rester avec son homme (page 317).
Quand Etienne «_a disparu depuis le soir de la bagarre, Chaval, dans sa haine, l’avait denonce_» (page 356). En consequence, «_l’un des deux doit manger l’autre_ [… ] Il y en a de trop, c’est au plus fort de vivre [… ] sacre marlou, j’aurai ton nez ! [… ] miroir a putains, que j’en fasse de la bouillie pour les cochons» (386), et ce fut le premier combat (page 387) : «_Il tenait Chaval renverse sous son genou_ [… ] une brusque folie du meurtre, un besoin de gouter au sang [… Il finit par se vaincre. » (page 389). Plus tard, quand le meneur fut meprise par les mineurs qui l’accusaient de tous les maux, il fut assaill par «_Chaval qui se rua sur Etienne, a coups de pierres_ [… ] pour l’eventrer, comme ils avaient voulu eventrer les soldats. » (page 425). Alors qu’ils etaient dans la meme equipe, de nouveau ils furent «_sur le point de s’allonger des gifles_» (page 443). Enfin, lors de l’affreuse vie a trois dans la mine engloutie, il fut «_enrage de e reste de vie qu’on l’obligeait a vivre la, colle au rival qu’il execrait_» (480) et «_l’ancienne bataille recommenca_» : Etienne, «_pris du besoin de tuer_», «_abattit sur le crane de Chaval_» une feuille de schiste (page 481) et le tua. Les deux actions, la collective et l’interpersonnelle, se developpent parallelement selon une structure dramatique classique, un enchainement de faits ineluctables, du a une veritable fatalite, l’action progressant de violence en violence, de catastrophe en catastrophe, faisant des victimes innocentes (Cecile, le petit soldat, Bebert et Lydie, Alzire).
Mais la progression tragique est rendue vraisemblable par tout un tissu de details authentiques. Romancier populaire, Zola ne craint pas d’utiliser les procedes du feuilleton, du melodrame, pour tenir son lecteur en haleine. Il a le souci des preparations : La «_disette qui tuerait beaucoup d’hommes_» qu’Etienne percoit au debut (page 11) semble annonciatrice de la grande famine qui, bientot, suivra. Etienne «_voulait redescendre dans la mine pour souffrir et se battre_» (page 72).
Une progression est menagee dans les indications au sujet des boisages : d’abord, la mention d’une affiche (page 169) ; puis une allusion enigmatique : «_ils ont fait la salete_» (page 173) dont ne nous ne saurons que plus loin ce dont il s’agit : desormais, la Compagnie «_paierait le boisage a part_» (page 174) ; enfin, la secheresse de la decision apres le melodrame : «_si elle voulait decidement la greve, la Compagnie aurait la greve_» (page 179).
Dans le cadre du dejeuner chez les Hennebeau est surprenante la nouvelle : «_brusquement, ce lundi meme, a quatre heures du matin, la greve venait d’eclater_» (page 191), apres laquelle se place un retour en arriere. L’action de Souvarine, veritable «deus ex machina», est annoncee des la page 137 («_Ni femme, ni ami, il ne voulait aucun lien, il etait libre de son sang et du sang des autres_»). Le premier assaut de Bonnemort sur Cecile («_des mains froides venaient de la prendre au cou.
C’etait le vieux Bonnemort_ [… ] _ivre de faim, hebete par sa longue misere, sorti brusquement de sa longue resignation d’un _demi-siecle, sans qu’il fut possible de savoir sous quelle poussee de rancune [… ] il cedait a des choses qu’il n’aurait pu dire, a un besoin de faire ca, a la fascination de ce cou blanc de jeune fille», page 346) annonce le meurtre. De la part des bourgeois, «_c’etait l’imprevoyance fatale a l’heure du danger, la betise naturelle des catastrophes_» (page 304).
La «_ferocite croissante_» (page 318) est ensuite confirmee. Il a su menager des moments comiques, vaudevillesques, comme lorsqu’il evoqua les querelles dans le coron qui sont dues au «_continuel bavardage des femmes_» : «_une explication entre deux commeres finissait par une tuerie entre les deux hommes_», en particulier entre Levaque et Maheu au sujet de Bouteloup, le logeur du premier qui aurait «_donne vingt sous a ma emme pour coucher avec_» (page 368), sans qu’on comprennne bien pourquoi le second est pris a partie, la Maheude rencherissant en accusant la Levaque : «_tu couchais avec tes deux hommes, l’un dessous et l’autre dessus_. » qui elle-meme contre-attaqua en evoquant «_une salete prise par Etienne au Volcan_» et qui avait pourri toute la famille (page 369).
Zola, qui disait avoir voulu «_un crescendo d’effets terribles_», est habile a menager, a mesure que gagnent colere et violence, une montee graduelle vers des situations pressenties dont beaucoup sont pathetiques ou cruelles : l’amour difficile entre Etienne et Catherine et l’affrontement entre Etienne et Chaval qui va jusqu’au meurtre ; l’accumulation des epreuves sur la «_tragique famille des Maheu_» (page 466) qui est dispersee, decimee, ecrasee, ses membres etant «_les malheureux_» par excellence, au point qu’on peut se demander si le mot «malheur» ne serait pas a l’origine de leur nom (bien qu’il ait pu aussi avoir ete inspire a Zola par le nom du personnage de la nouvelle de Paul Heuzy, “_La vie d’Antoine Mathieu_”) : les pleurs de toute la famille (pages 177, 188, 189) ; le saisisement de la Maheude quand son mari s’ecroula sous les balles : «_Stupide, la Maheude se baissa. – Eh ! mon vieux, releve-toi. Ce n’est rien, dis? _» (page 414) ; ce bilan, alors que redescend dans la mine la Maheude : «_cette pauvre femme qui venait de perdre son fils, apres avoir perdu son mari et dont la fille n’etait peut-etre plus qu’un cadavre, sous la terre, sans compter qu’on parlait encore d’un grand-pere infirme, d’un enfant boiteux a la suite d’un eboulement, d’une petite fille morte de faim, pendant la greve_» (page 466) ; l’insistance sur les extremites ou pousse la faim («_ils vecurent de ce bois vermoulu, ils le devorerent tout entier_ [… ] Une ceinture de cuir qui le serrait a la taille les soulagea un peu[… ils se remirent a la toile, la sucant pendant des heures» (page 485) ; la reconciliation des adversaires : Etienne, au sortir du gouffre, et Negrel eclatent en sanglots et tombent dans les bras l’un de l’autre, un instant reunis dans la fraternite du malheur ; la violence, le gout du sang dans la fureur de la revolte : Zola ne dissimula pas la «_sauvageie abominable_» de ce que font ses personnages etaient dechaines, de veritables betes fauves. Les scenes de violence de ‘’_Germinal_’’, qui est travaille par les souvenirs de la Commune, des attentats anarchistes et des greves de 1882-1883, renvoient aux codes de representation de la violence ouvriere dans un certain discours d’epoque. Cela culmine dans des scenes d’horreur : l’emasculation de Maigrat qui a ete egorge, dechiquete (dans ses notes preparatoires, Zola notait : «_Comme intensite, il faudrait que la bande se livrat a une veritable sauvagerie_ [… ] Mais je voudrais qu’il se tuat lui-meme et que les violences n’eussent lieu que sur son cadavre») ; le meurtre du petit soldat, sentinelle innocente, ar ce monstre hideux qu’est Jeanlin ; le meurtre de Cecile par Bonnemort qui est cependant escamote : au retour des Gregoire, «_par terre, leur fille gisait, la face bleue, etranglee_» (page 469) ; le massacre des grevistes par les soldats ; le meurtre de Chaval par Etienne et le cadavre revenant sans cesse («_il le voyait, gonfle, verdi, avec ses moustaches rouges dans sa face broyee_», page 487). Le lecteur est saoul de malheurs et de compassion. Cependant, quand, au terme de son dantesque voyage au bout de la nuit, Etienne quitte la mine, le soleil parait a l’horizon glorieux, le bleu du ciel est limpide, la terre frissonne de jeunesse, une alouette chante haut dans le ciel.
Mais Zola apporte aussi quelques touches de comique : les faceties trop peu renouvelees de la Mouquette page 409, le ridicule des gendarmes et des soldats tournant a la recherche des grevistes, le vaudeville de Dansaert et de la Pierronne («_La Pierronne, laissant a sa mere Pierron et Lydie, etait partie de grand matin pour passer la journee chez une cousine a Marchiennes ; et l’on plaisantait, car on la connaissait, la cousine ; elle avait des moustaches, elle etait maitre porion au Voreux_» (page 144) – «_Qu’elle se fit bourrer jusqu’a la gorge, les jupes en l’air, c’etait drole_ [… ] On l’apercut toute rouge, le corsage encore ouvert, la jupe encore remontee [… ] Dansaert se reculottait eperdument», page 370). On a pu dire de Zola, qui etait un passionne de la photographie, qu’il avait deja la technique d’un cineaste : superposition sans heurts des intrigues multiples et diverses ; sens des sequences ; montage alterne ; gros plans ; panoramiques ; ellipses. Il a su organiser un ensemble ou les intrigues multiples et diverses se superposent sans heurts.
Il avait le sens des sequences : Jacques Duquesne a pu ecrire que les premieres pages sont «construites comme un reportage televise : plan d’ensemble de la fosse du Voreux d’abord ; dialogue de deux personnages, ensuite, qui fournissent les informations essentielles pour situer le lieu et l’action ; sequence d’interieur sur une famille de mineurs qui se prepare a partir au travail ; retour a la fosse, plan rapproche des installations de surface, effet de zoom sur la machine a vapeur». Le chapitre 1 de la partie 4 est un montage alterne entre le luxe des bourgeois et la misere des mineurs (pages 208, 210, 213). Le romancier isola des gros plans (le crachat de Bonnemort, la hache, le trou noir des bouches chantant “_la Marseillaise_”).
Il deploya des panoramiques (la fin de la troisieme partie, 130). Il recourut aux ellipses, dont celle qui escamote le meurtre de Cecile par Bonnemort : de «_Attires, tous deux restaient l’un devant l’autre, elle, florissante, grasse et fraiche des longues paresses du bien-etre repu de sa race, lui, gonfle d’eau, d’une laideur lamentable de bete fourbue, detruit de pere en fils par cent annees de travail et de faim_», on passe a «_un cri terrible. Par terre, leur fille gisait, la face bleue, etranglee. A son cou, les doigts avaient laisse l’empreinte rouge d’une poigne de geant_», le romancier ajoutant ce detail horrible : «_la boue des crachats noirs avait eclabousse la piece_». (page 469).
Ce roman naturaliste est aussi une epopee, est traverse par un souffle epique, comme on le constate avec : l’architecture du recit et son dynamisme ; le sujet qui n’est pas l’histoire d’individus, mais celle d’un groupe d’humains, le texte abondant en descriptions de foules : «_le long fremissement qui s’enflait, le peuple en marche dont ils auraient entendu le galop, s’ils avaient colle l’oreille contre la terre_» (page 289) ; «_la panique, le galop furieux_» (page 298) ; «_une debandade enragee, une course folle_» (page 299) ; «_cette colonne geante_», «_ce long serpent d’hommes_» dont «_la tete deboucherait au jour, lorsque la queue trainerait encore sur le bougnou_. » (page 300) ; le superbe tableau aux pages 332-334 de la foule des mineurs qui parcourt le pays, suscite l’effroi des bourgeois et du lecteur, leur deferlement etant identifie a un cataclysme naturel : «_un vent de tempete semblait souffler, pareil a ces rafales brusques qui precedent les grands orages_ [… ] le roulement de tonnerre, la terre ebranlee [… l’ouragan des gestes et des cris» (page 333) ; «_cette masse enorme, aveugle et irresistible du peuple, passant comme une force de la nature, balayant tout, en dehors des regles et des theories_» (page 427). Quant a «_l’ogre sans cesse affame du capital_» (page 428), il devore les mineurs mais mange aussi «_les petites entreprises personnelles_». Quand les femmes des mineurs emplissent de terre la bouche de Maigrat, «_cette terre, tassee dans sa bouche, c’etait le pain qu’il avait refuse_. » (page 351). l’affrontement qui n’est pas seulement contre la Compagnie mais contre la mine, contre les forces naturelles hostiles qui sont des symboles puissants : les mineurs doivent «_se battre contre la terre, comme s’Ils avaient une revanche a prendre_» (page