Candide, une ? uvre des lumieres Plan Introduction I/- Candide, un exemple d’une litterature de savoirs A) Un conte philosophique B) Les procedes de l’ironie C) Un recit de voyage II/- Portee critique du texte A) La critique de la theorie de Leibniz B) Denonciation des maux de la societe 1) L’aristocratie 2) L’eglise 3) La guerre 4) l’esclavage Conclusion Introduction En histoire comme en litterature, on identifie le siecle des lumieres au XVIIIeme siecle. L’age des Lumieres c’est l’age du triomphe de l’esprit philosophique et des conquetes de la raison dans tous les domaines, politique, religieux, sociale, scientifique, litteraire.
C’est une periode pendant laquelle de nombreux philosophes, tels que Voltaire, Rousseau ou Diderot, cherchaient a diffuser les connaissances. Ces philosophes des Lumieres vont faire de la liberte le mot d’ordre et le principe de leur reflexion et de leur action, ils combattront contre l’intolerance, l’arbitraire, la torture, les discriminations, l’esclavage. Ils diffuseront leurs idees dans les cafes, les salons, les academies, les bibliotheques, les clubs. Grace a l’imprimerie et une meilleure alphabetisation, l’encyclopedie de Diderot permettra une diffusion facilitee des savoirs des lumieres.
Enfin, les voyages, reels et imaginaires, constituent une dimension essentielle de ce siecle et des idees des lumieres. Certains
Dans ce dossier nous allons demontrer dans quelle mesure Candide s’impose comme un exemple d’une litterature de savoirs telle que se concoit la litterature des lumieres et quelles sont les visions communes de ce conte et du combat ideologique mene au siecle des lumieres. I/ Candide, un exemple d’une litterature de savoirs A) un conte philosophique Candide est un conte philosophique, c’est un recit imaginaire dont le but est de porter des idees et des concepts philosophiques.
En effet, avec Candide on voit un recit souvent proche, dans sa structure, du conte traditionnel : un heros, une quete, des obstacles, des elements merveilleux ou exotiques. Ainsi dans le chapitre 1 L’histoire commence comme un conte par « il y avait », La narration est menee sur un ton plaisant, dans un univers intemporel et imaginaire dans un chateau, et concerne la famille d’un baron. Les personnages sont simplifies, ils incarnent une vertu ou un vice – Candide m? urs douces, jugement droit, jeune garcon, est un personnage eponyme – Cunegonde remplace la princesse de ce conte apparemment merveilleux le nom du baron qui fait une alliteration en t Thunder-Ten-Tronckh evoque le tonnerre ou la puissance d’un Dieu. – les deux autres personnages de la famille, le fils et la mere, completent l’image de la famille parfaite mais n’a aucune individualite propre – un personnage traditionnel de conte, l’oracle ou le magicien : Pangloss, celui qui voit l’invisible ne fait pas partie de la famille. Son nom qui signifie « toutes langues surprend, avec des consonances grecques, il est au centre de la maniere de penser de Candide. La narration est elle aussi celle d’un conte, ainsi au chapitre 6, le texte suit un schema narratif traditionnel.
Le premier paragraphe, presente la situation, le deuxieme paragraphe relate les peripeties, le troisieme paragraphe constitue la situation finale. Voltaire a choisit le conte et a recours aux charmes du merveilleux, du recit mouvemente et de l’intrigue sentimentale pour captiver les nombreux lecteurs qui auraient ete rebutes par l’aridite des essais ou des traites. Mais ce conte est egalement philosophique, car il cherche au final a eveiller la reflexion critique du lecteur sur des questions d’actualite : critique de la religion, du pouvoir absolu, de la politique, de la morale traditionnelle, promotion de la science et de la raison…
Ainsi, le sous-titre du conte Candide ou l’optimisme eclaire le lecteur sur le theme traite. Les epreuves que Candide ou l’optimisme va devoir affronter vont profondement remettre en question l’optimisme initial qui caracterise le heros. B) les procedes de l’ironie Voltaire s’attaque donc a un certain nombre d’ennemis dans Candide, mais il les attaque rarement directement. Le texte de Candide comprend peu d’accusations directement et nettement formulees comme telles. En fait, comme tres souvent Voltaire utilise une des armes favorites du Siecle des Lumieres, et qu’il maniait mieux que quiconque : l’esprit, et plus particulierement l’ironie.
On remarque, en particulier dans Candide, trois procedes utilises pour creer cette derniere. – Le premier procede est la parodie des genres. En effet, Candide se presente comme un conte, et reproduit certaines caracteristiques de ce genre, mais alors que dans le monde du conte, tout est parfait, celui que parcourt Candide vire rapidement au cauchemar, il decouvre la guerre dans le chapitre 3, l’autodafe dans le chapitre 6, l’esclavage dans le chapitre 19… – Le deuxieme procede est le double point de vue. Presque tout ce qui est raconte est vu selon une double focalisation.
Le plus souvent on trouve : — un point de vue interne, celui de Candide, qui voit le monde a travers le filtre de l’optimisme de Pangloss. — un point de vue omniscient qui correspond a un narrateur lucide. Les rapports de ces deux points de vue sont regles de manieres diverses; parfois on devine l’un a travers l’autre (dans le chapitre I par exemple on oppose les pretentions des aristocrates, dit par Thunder-Ten-Tronckh (sa meute, son grand aumonier et son piqueur) a la realite qui n’est qu’en fait que des chiens de bassecour, un vicaire et un palefrenier. , parfois l’un succede a l’autre (exemple dans le chapitre 3 ou dans le premier paragraphe la guerre est presentee de maniere positive, cette vision est bien sur celle de Candide, c’est une vision naive de la guerre ou l’aspect esthetique de la guerre se met en avant alors que le deuxieme paragraphe cree une rupture par rapport au premier, le vocabulaire y est maintenant tres realiste et tres negatif, les champs lexicaux de la violence sont omnipresents) et souvent ils sont meles (ch.
III avec l’utilisation d’antithese ex une harmonie, enfer creant un decalage permettant au lecteur de voir une realite differente derriere celle decrite par Candide ou d’oxymore ex boucherie heroique ou on ressent un double regard qui distingue le point de vue naif de Candide et celui plus realiste de Voltaire.. ) Il se cree une distanciation, dans laquelle est contenu l’essentiel du message que Voltaire veut faire passer. – Le troisieme procede qu’utilise Voltaire c’est les causalites aberrantes. Il s’agit de faire eclater l’absurde.
On retrouve par exemple dans le chapitre 6 l’inversion de la cause et de l’effet : Les inquisiteurs cherchent des heretiques pour avoir un bel autodafe (en fait la justice fonctionne dans le sens inverse) ou encore l’absurdite des fautes commises ex :Les Portugais brules pour avoir arrache le lard dont etait barde le poulet ou Pangloss accuse d’avoir parle et Candide d’avoir ecoute ou encore dans l’absurdite des explications donnees comme dans le chapitre 1 “Un des plus puissants seigneurs de la Westphalie car son chateau avait une porte et des fenetres. C) Un recit de voyage Candide est aussi un recit de voyage sur le mode du periple. Ce voyage, qui demarre d’emblee apres l’expulsion de Thunder Ten Tronckh, a un but initiatique pour le personnage central. Ce conte fonctionne comme un roman d’education pour un jeune homme naif, en proie a l’erreur ideologique : l’optimisme.
Il s’agit de faire decouvrir au protagoniste et au lecteur le mal dans les diverses parties du monde et d’en souligner l’universalite, sous des aspects differents (physique, moral, politique et social) sur plusieurs continents. A l’issue du periple, le personnage aura change en profondeur, completement transforme, deniaise, et desormais autonome ainsi que le prouve cette derniere phrase « Cela est bien mais il faut cultiver notre jardin » Les etapes du voyage qui suit un itineraire geographique reel recensent diverses formes du mal.
Chaque arret permet ainsi de decouvrir un malheur, d’apprehender un probleme specifique pour l’humanite : l’arrogance de la noblesse en Westphalie au chapitre 1, la guerre chez les Bulgares /Abares au chapitre 3, l’intolerance aux Pays Bas chapitre 3, le mal physique et le fanatisme avec l’Inquisition au Portugal chapitre 6, le passage dans le Nouveau Monde amene la decouverte de l’oppression des Indiens par les Jesuites au Paraguay chapitre 14, celle de l’esclavage au Surinam chapitre 16, le retour en Europe amene aussi un regard ritique et satirique sur la Grande-Bretagne et la France chapitre 21,22, 23, montre l’ennui existentiel a Venise chapitre 23 … Nulle echappatoire donc dans ce monde-ci, en dehors de l’Eldorado chapitre 17,18. Ainsi Candide, conte philosophique et recit de voyage, est une ? uvre des lumieres ayant pour but de diffuser la connaissance mais aussi de combattre pour les idees cheres aux lumieres. II/Portee critique du texte A) La critique de la theorie de Leibniz Dans ce livre, Voltaire va denoncer l’optimisme de Leibniz qui est un philosophe et mathematicien allemand.
Il a publie en 1710 ses essaies de theodicee ou il s’interroge sur Dieu, le mal et l’harmonie du monde. Pour Leibniz, Dieu est parfait, juste et bon, et le monde qu’il a cree ne peut etre imparfait et mauvais. Leibniz ne nie pas l’existence du mal. Il dit que le mal, les malheurs de chacun et de l’humanite entiere s’annulent dans un grand dessein qui depasse la courte vue de l’homme. La creation est une sorte d’equilibre, d’harmonie savante ou le mal s’integre dans le projet du bien : c’est ce qu’affirme Pangloss dans le conte. Tout est bien dans le meilleur des mondes » Voltaire n’est pas d’accord avec ce systeme. Pour lui cette rage de soutenir que tout est bien quand on est mal est une aberration. Car la theorie de l’optimisme est sans cesse contredite par les desastres contemporains : le tremblement de terre a Lisbonne de 1755 qui a tue pres de 30000 innocents, la guerre de sept Ans, les crimes des fanatiques et l’intolerance montrent l’absence de sens et d’harmonie de la creation.
Aussi par le voyage initiatique de Candide, le personnage decouvre tout au long du voyage qu’il va accomplir diverses formes de mal qui fera triompher l’esprit critique et fera admettre au protagoniste et au lecteur que le monde parfait n’existe pas mais qu’il faut le construire. B) Denonciation des maux de la societe Au cours du conte Voltaire va denoncer aussi les idees propres aux lumieres a savoir l’obscurantisme, l’intolerance, la torture, l’arbitraire et l’esclavage. 1) l’aristocratie Voltaire critique l’aristocratie.
C’est principalement dans le premier chapitre et par l’image du jeune baron que Voltaire brosse le portrait d’une noblesse decadente, orgueilleuse et a mille lieues du reel. Le chateau du baron ressemble a une propriete banale et le mode de vie est loin de l’opulence. Le discours de Pangloss precise que les chatelains mangent du porc toute l’annee, viande la moins chere. Cela n’empeche pas de voir la famille du baron enfermee dans son illusion de puissance, prete a tout pour sauver les apparences. Si Candide n’est pas reconnu comme neveu du baron, c’est parce que son pere n’etait pas assez noble, bien qu’honnete gentilhomme u voisinage. Ainsi, la noblesse prefere refuser un homme vertueux et considerer son fils comme un batard s’il n’a pas les titres requis. Il en resulte des personnalites involutives, comme le fils du baron qui s’oppose jusqu’au bout a l’union de Candide et de Cunegonde. 2) L’eglise L’Institution la plus attaquee du conte est l’Eglise qui subit au moins trois types de critiques. Tout d’abord, elle n’est pas opposee a la guerre puisqu’au moment du massacre des armees Bulgare et Abare dans le chapitre 3, les rois font chanter des Te Deum dans leurs camps.
De plus, l’Eglise s’appuie sur la credulite des gens simples, qui etablissent des liens entre des elements qui n’ont rien a voir entre eux, comme le rapprochement du tremblement de terre et de l’autodafe, pour amener a un raisonnement faussement scientifique qui releve de la croyance magique. Tout en denoncant la religion comme une superstition ridicule, il denonce egalement l’intolerance puisque l’autodafe va permettre de lutter contre l’heresie. L’Eglise se sert de puissantes organisations comme l’Inquisition (chapitre 6) pour garder un pouvoir entretenu par la superstition.
Intolerante, elle tache d’eliminer les tenants d’autres religions ou de pensees jugees heretiques. A ce titre, elle n’hesite pas a faire appel a la delation, au meurtre, a la torture et au mensonge. De plus manipulant les foules ignorantes, elle se dissimule derriere l’image de la vertu renvoyee au peuple, mais ses membres n’hesitent pas a se laisser aller a leurs desirs : le grand Inquisiteur partage en secret Cunegonde avec un banquier juif dans le chapitre 9, quant a la vieille, elle est la fille du pape fictif Urbain X.
Cette precision traduit la desobeissance de ce pape par rapport au v? u d’abstinence que tout religieux consacre prononce. Qu’un pape transgresse ce v? u de la plus naturelle des manieres parait d’autant plus scandaleux. Enfin, l’ordre jesuite est toujours proche des puissants, qu’ils soient aristocrates ou commercants, comme en temoigne la presence du jeune baron chez les jesuites du Paraguay ou la secrete entente entre les esclavagistes et les «fetiches» hollandais qui ont converti le negre de Surinam (XIX).
D’ailleurs, en depit de sa faible instruction, cet esclave n’a pas de peine a pointer du doigt la contradiction entre le discours affirmant que chaque homme descend d’Eve et d’Adam et la pratique de l’esclavage, signe du mepris de la personne humaine. 3) La guerre La guerre est elle aussi denonce par Voltaire, principalement montree dans l’horreur extreme, au celebre chapitre 3 , avec les accumulations horribles d’expressions tres explicites, milliers de coups, egorges, eventres, a demi brules, la gradation de l’age de plus en plus grave, loin du tableau harmonieux qu’il decrit dans le premier paragraphe avec le point de vu naif de Candide.
La critique de Voltaire va meme contre ceux qui organisent les guerres. Les deux rois en effet tous deux manipulent les peuples leur faisant croire qu’ils sont les vainqueurs. 4) l’esclavage Enfin Au chapitre 19, l’esclavage est condamne par la figure du malheureux negre de Surinam, atrocement mutile par la stricte application du « code noir ». L’accent est mis sur une situation horrible et sans espoir qui enleve a l’esclave tout ce qui fait une identite, il n’a pas de nom, plus de parents, plus de liberte, plus d’autonomie. Conclusion Candide de Voltaire est une ? uvre qui s’inscrit parfaitement dans le paysage des lumieres. C’est une ? vre qui diffuse les connaissances, les idees des lumieres grace a des procedes propres a la litterature des lumieres. L’esprit philosophique y est constamment present : les traditions sont remises en cause, le pouvoir est conteste, les injustices et les abus sont denonces. En utilisant les caracteres des contes, mais en les detournant par divers procedes de decalage comme l’ironie, Voltaire combat en faveur des idees nouvelles. Cette ? uvre eveille l’esprit critique chez le lecteur et l’amenera a user d’un esprit perspicace chaque fois qu’il sera confronte a un phenomene socioculturel donne et faire de lui un citoyen autonome.