Methodologie des epreuves en Droit administratif
1 Preambule On attend de vous de la maitrise, de la precision, de la correction.
– Ayez confiance en vous ;
– Lisez tranquillement le sujet ;
– Presentez au mieux la copie :
* soignez la presentation visuelle de la copie (aerez, preferez l’encre noire, evitez l’emploi de couleurs) ;
* mettez le ton ;
* abusez des mots de liaison ;
* interdisez vous d’utiliser les verbes avoir, etre, faire, trouver… et cherchez des verbes plus qualifiants ;
* veillez imperativement a votre syntaxe et votre orthographe2.
SOMMAIRE :
1. La dissertation juridique (pp. 2-7)
2. Le commentaire d’arret (pp. 8-11) 3. Le cas pratique (pp. 12-13) 1 2 Cette methodologie n’est destinee qu’a aiguiller les etudiants. Rien n’interdit a ceux-ci de suivre leur propre methodologie tout en prenant garde de respecter les usages en la matiere rappeles ici. Sachez que meme si les fautes d’orthographe ne font pas « officiellement » partie de la note, elles se repercutent immanquablement sur votre notation… c. q. f. d.
2 La dissertation juridique I- REMARQUES LIMINAIRES
La dissertation juridique presente certaines particularites par rapport aux exercices que l’etudiant a appris a maitriser dans l’enseignement secondaire. Elle fait appel a de nombreuses qualites qu’il faut cultiver : capacite d’analyser le
Le travail de reflexion portera sur la mobilisation, l’organisation et la presentation des connaissances. Mais il ne faut pas oublier que l’art de la communication consiste a se faire comprendre. La qualite essentielle d’une dissertation est la clarte. Celle-ci s’obtient par une articulation logique des idees sur le sujet. Le style doit etre souple, depourvu d’emphase, de considerations moralisantes ou abruptes. S’exprimer a l’ecrit, c’est d’abord respecter l’orthographe et la syntaxe, en evitant les approximations de langage, l’argot, le langage parle, les abreviations et le style telegraphique.
Enfin, n’oubliez pas que le correcteur a beaucoup de copies a corriger […], aidez-le en ecrivant lisiblement et en utilisant une encre qui facilite la lecture (noire). Maitriser le temps imparti a l’exercice est essentiel. A titre indicatif, on peut suggerer les delais suivants :
– lecture attentive et choix du sujet : un quart d’heure maximum ;
– mobilisation (au brouillon) des connaissances relatives au sujet, classement, puis recherche du plan : au moins 45 minutes ;
– redaction de la copie (directement au propre) : environ 1 h 45 ;
– relecture de la copie et correction des « coquilles »: 10 a 15 minutes.
Methodologie 3 II- LA MARCHE A SUIVRE (commentaire et dissertation) Les conseils qui suivent paraitront parfois au lecteur d’une grande banalite, mais ils sont le fruit de l’experience de nombreuses corrections de copies et du constat des erreurs commises par les candidats. Il s’agit d’abord de comprendre le sujet que l’on a choisi de traiter (A), puis de respecter les regles du travail demande : la dissertation juridique (B).
A- La comprehension du sujet Le travail de reflexion commence donc des que le sujet est rendu public. Il convient de respecter plusieurs etapes :
1. Lire tres attentivement le sujet.
La comprehension du sujet va determiner la qualite de votre travail. Vous avez souvent le choix entre plusieurs sujets. Dans ce cas, vous devez lire tres attentivement les libelles avant de choisir le sujet a traiter. Comprendre le sujet (De quoi s’agit-il ) suppose de se poser des questions sur le contenu et les « limites » du sujet. Ces limites sont souvent liees a une definition precise des termes juridiques du sujet qui doit conduire a une reflexion sur celui-ci.
2. Mobiliser les connaissances. Soyez spontane et n’hesitez pas a exploiter vos idees (idees voisines, schema binaire).
Faire au brouillon une liste des questions a traiter, eliminer tous les points qui vous paraissent, apres reflexion, en dehors du sujet ou accessoires. Il est en effet indispensable de ne traiter que le sujet pose, mais tout le sujet.
3. Rechercher un plan Pour cela, il faut essayer de regrouper logiquement les questions qui subsistent sur votre liste et degager les idees essentielles.
4 Le tout n’est pas d’avoir des idees. L’essentiel est de les organiser de facon logique au sein du plan (avec les materiaux dont je dispose, de quelle maniere vais-je repondre au sujet).
Il faut chercher une phrase clef3 qui donnera la charpente de votre plan. Cette phrase cle ou problematique doit mettre en relief l’interet particulier du sujet. Cet interet particulier est le votre, par rapport a vos connaissances… juridiques (! ). De cette problematique, il ressortira plusieurs sources d’explications… Ce sont ces sources d’explications au probleme pose qui constitueront votre developpement. Ce developpement devra imperativement etre organise en deux parties que vous prendrez soin d’annoncer a la suite de votre problematique. (cf. ntroduction) Donnez un intitule a chaque partie, a chaque paragraphe. Chaque titre doit resumer l’idee de chaque partie ou de chaque paragraphe. Le plan ainsi construit doit etre logique et rigoureux. Le plan en deux parties est generalement conseille. Pour nous, en droit administratif, il devient une exigence. On evitera donc la fantaisie et on utilisera un plan en deux parties, chacune comportant deux sous parties.
4. Rediger Rediger soigneusement l’introduction, puis directement sur la copie le corps du devoir en prenant soin aux imperatifs de forme rappeles cidessus.
3 Cette phrase clef est souvent la base de votre problematique. D’autant qu’une problematique ne doit pas etre mise a la forme interrogative ! Methodologie 5 B- Les regles de la dissertation juridique La dissertation juridique comprend necessairement une introduction substantielle, suivie de deux parties.
1. L’introduction Elle permet de montrer que le candidat a compris le sujet, qu’il a saisi les questions essentielles et compris comment y repondre. Elle comprend : L’entame ou accroche. C’est la premiere phrase de l’introduction. Elle doit, dans la mesure du possible etre percutante.
Sinon attaquez directement le sujet. Evitez les phrase generale dans le style « cafe du commerce » (ex : La societe d’aujourd’hui…). La definition du sujet. Montrez que vous avez repere les notions essentielles qu’il convient de traiter. Il s’agit donc de selectionner (en les soulignant au brouillon) les termes juridiques du sujet et de les definir rigoureusement. Les considerations d’ordre general ou historique qui doivent permettre de situer le sujet dans son contexte. La position du probleme : la problematique. L’annonce4 du plan. Un bon plan est une reponse a votre problematique.
2. Les parties 4
On preferera une annonce « diffuse » du plan. Evitez, si possible, les annonces de ‘plan bateau’ souvent redhibitoires telles que « Dans une premiere partie nous verrons que… Dans une seconde… » ou « Tout d’abord… ensuite ». Preferez, par exemple : « Il est constant que la notion de …. cependant celle-ci tend a… » ou « Force est de constater que la notion de service public est en crise (II) meme si celle-ci demeure une notion phare en droit administratif francais (I) ». Vous voyez apparaitre, grace a l’utilisation de connecteurs logiques ou d’une formulation syntaxique, une opposition, du moins, un decoupage.
Dans l’hypothese ou vous feriez une annonce de plan diffuse inversee (tel que l’exemple 2), n’hesitez pas a signaler a votre correcteur votre point de depart en faisant figurer une numerotation entre parentheses (I) et (II) ou (II) puis (I). Cette technique d’annonce de plan est valable pour vos chapeaux introductifs. 6 Elles mobilisent les connaissances du candidat au service d’une argumentation, d’une demonstration logique et bien charpentee, repondant a la problematique exposee en introduction. Chaque partie comprend :
L’intitule de la partie « en toutes lettres » ; L’introduction de la partie ou » chapeau » ; Les sous parties ; Les differents points contenus dans chaque sous partie sont presentes en paragraphes par un simple retour a la ligne. Pas de tiret, ni de point. La premiere partie comprend la transition avec la deuxieme partie. La seconde partie comprend, dans sa deuxieme sous partie (B), une conclusion a votre dissertation. Cette conclusion est davantage une ouverture qu’une reelle conclusion. L’ouverture doit etre le point d’aboutissement de votre travail.
Elle ne doit pas etre un resume ou une redite de l’argumentation developpee precedemment. Elle se termine par une vraie ouverture vers d’autres questions ou vers une reflexion plus generale en incluant, par exemple, des elements de droit compare ou de prospective. QUELQUES FONDAMENTAUX 5: 5 Pour memoire et uniquement a titre indicatif. Methodologie 7 – Une entite (institution, organisation) :
I : Ses structures (comment est elle organisee, qui la compose et pourquoi ). II : Ses fonctions, ses pouvoirs (quel est son role, comment le remplit-elle (est-elle independante, est-elle efficace…) . – Une notion I : Son principe (sur quoi repose-t-elle ) II : Ses limites (dans quelles hypotheses est-elle inadaptee, inutilisable )
– Une theorie
I : Son enonce (par qui, pourquoi, quand a-t-elle ete enoncee )
II : Sa portee (dans quelles hypotheses s’applique-t-elle, a-t-elle remplace une autre theorie )
– Un regime juridique
I : Son champ d’application (a l’egard de qui, de quoi s’applique-t-il )
II : Son contenu (que prevoit-il, est-ce suffisant ) En cas de « panne seche », il y a toujours le plan de la derniere chance, le plan « SVP ».
S. pour « Sens », V. pour « Valeur », et P. pour « Portee ». Ces trois questions, a se poser a la lecture du sujet, permettent de trouver un plan de secours. Mais cette technique est davantage utilisee pour l’elaboration d’un commentaire d’arret. Le commentaire d’arret ou de jurisprudence 6 6 Une partie de cette methodologie est disponible sur le site de l’Universite Numerique Juridique Francaise. www. unjf. fr 8 Remarque : les elements portant sur la marche a suivre abordes en pages 4 et 5 sont applicables au commentaire.
Le commentaire de jurisprudence est un exercice de mise en perspective et d’eclairage, qui doit mettre en lumiere le sens, l’interet (valeur) et la portee d’une decision juridictionnelle. Trois directions doivent donc etre explorees pour preparer le commentaire : Ici, on retient le raisonnement SVP (Sens, Valeur, Portee) 1. Le sens de l’arret : la place de la decision dans la jurisprudence. A cet egard, vous vous demanderez si la decision est conforme aux jurisprudences anterieures : applique-t-elle les regles et solutions ‘classiques’ ou s’en ecarte-t-elle
En d’autres termes, s’agit-il d’une decision-application ou d’une decision novatrice Si la solution retenue par la decision n’est pas conforme aux jurisprudences classiques, demandez-vous si la decision :
– tranche ou non un point sur lequel il n’y avait pas encore de jurisprudence
– prend ou non parti sur un point controverse (non fixe en jurisprudence et discute en doctrine)
– constitue-t-elle ou non un veritable revirement de jurisprudence Si oui, quelles seront les incidences de ce revirement
2. La valeur de l’arret : La decision merite-t-elle d’etre approuvee ou ritiquee et pour quelle raison
– le raisonnement des juges est-il logique ou recele-t-il une contradiction ou une deduction fausse ou hasardeuse – la solution est-elle coherente avec les autres regles qui gouvernent la matiere
– sur quel principe est-elle fondee Ce principe a-t-il une valeur absolue ou doit-il s’equilibrer avec d’autres imperatifs
– la solution est-elle juste, equitable, utile, pratique, opportune Quels interets fait-elle prevaloir ou protege-t-elle
Methodologie 9 3. La portee de l’arret : Quelles sont les incidences juridiques et extra juridiques de la decision
Quel est son role dans l’evolution ulterieure de la jurisprudence S’il s’agit d’un arret de principe ou un revirement de jurisprudence, demandez-vous si la solution nouvelle : – est appelee a s’appliquer souvent, a regir un grand nombre de cas
– entraine des consequences juridiques importantes – a ete etendue a des situations voisines ou si elle peut l’etre – a ou peut avoir des incidences extra-juridiques (economiques, sociales, sociologiques…) – est toujours en vigueur s’est maintenue longtemps – a ete consacree par le legislateur ou devrait l’etre
ECUEILS A EVITER Un double ecueil doit etre evite :
• Paraphraser la decision soumise, c’est-a-dire de simplement reformuler les informations y figurant, d’en reprendre les passages les plus significatifs, sans aucunement les replacer dans leur contexte juridique. Le commentaire n’est pas un simple compte-rendu de lecture ! Le commentaire n’a d’interet que s’il comporte par rapport a cette derniere une valeur ajoutee. Le second ecueil dont l’etudiant doit se garder est l’expose theorique deconnecte des donnees de l’espece. Le commentaire, n’est pas, une dissertation !
• ETAPES A SUIVRE : Premiere etape : La lecture de la decision 10 Il faut ici prendre connaissance le plus completement possible de la decision. Toute decision se presente comme une demonstration articulee (syllogisme) en trois parties :
• Les visas : Textes (decret, loi, code, traite, constitution) voire les principes generaux du droit auxquels le juge de refere et dont il fait application a l’espece. Ils sont introduits par « vu ».
• La motivation : elle rassemble les raisons de fait et surtout de droit sur lesquelles la juridiction s’appui, c’est-a-dire son argumentaire.
C’est la partie centrale de la decision a commenter. Elle doit retenir toute l’attention de l’etudiant. Elle revet la forme de « considerant que… ; que…. ; que….. ». • Le dispositif : sens dans lequel le differend est tranche. Il contient simplement l’enonce de la solution retenue, en l’espece, par le juge. Donc, la solution decoule logiquement de la confrontation de la mineure et de la majeure : dans telle situation (mineure), le juge applique tel type de regles (majeure) et en deduit tel resultat (dispositif).
Pour rappel : La majeure : Elle est constituee par les regles juridiques generales applicables a une espece determinee (cadre juridique) La mineure : Elle consiste dans l’analyse, dans l’interpretation et dans la qualification juridique des faits de l’espece par le juge. Notons que le raisonnement du juge est « decelable » dans l’analyse tres attentive accordee a la construction des phrases (syntaxe) composant la decision. Il fait notamment reperer : Les liens de cause a effet (« donc, ainsi, en effet, par consequent, de ce fait » Les enumerations (« d’une part, d’autre part, enfin ; en premier lieu, en second lieu, en troisieme lieu »)
Methodologie 11 – Les balancements (« non seulement… mais encore, d’une part… d’autre part… »)
Deuxieme etape : la synthese des informations contenues dans la decision
– – L’etudiant doit reconstituer avec soin la succession des faits conditionnant la solution du juge. Cela conditionne la comprehension exacte de la qualification juridique qu’a retenue la juridiction (et ce qui conditionne ensuite le raisonnement du juge). Exposer la procedure. Troisieme etape : la mise en perspective et la critique de la decision
— Il faut presenter les points de droit essentiels abordes dans la decision et les remettre en perspective par rapport a l’etat du droit (vos connaissances !!! ) L’etudiant doit confronter avec soins cet acquis theorique avec la facon dont le juge l’aborde, au cas d’espece. Cette confrontation doit lui permettre de constater si le juge fait : une application classique des regles juridiques ; une application partielle des regles juridiques ; refuse de les appliquer.
L’etudiant doit ensuite s’efforcer d’expliciter le raisonnement du juge et de degager les raisons pour lesquelles il a adopte telle interpretation plutot que telle autre. Il pourra ainsi, en s’appuyant sur des arguments juridiques, historiques, politiques ou sociaux, expliquer pourquoi il estime que ces raisons sont pertinentes ou au contraire, lui apparaissent critiquables. Le cas pratique 12 Le but de l’exercice est d’apporter une solution juridique solidement argumentee a un probleme de fait.
Pour atteindre ce but, il faudra traduire les faits en termes juridiques pour pouvoir les qualifier, puis deceler le probleme de droit, determiner la regle de droit et verifier son applicabilite ou non a la question posee. Ce travail intellectuel necessite un mouvement de va et vient du fait au droit, autrement dit un raisonnement du concret a l’abstrait et vice versa.
1. Lecture Faire une lecture rapide de l’enonce sans stylo pour simplement comprendre et s’impregner de « l’histoire » ; Faire une autre lecture plus attentive avec stylo pour distinguer les faits susceptibles d’avoir une incidence juridique. .
Reflexion a. Ordonner par ecrit les faits de facon differente suivant le sujet, notamment par ordre chronologique, en fonction de la configuration des lieux ou du comportement des personnes, ou encore en faisant apparaitre les rapports entre les parties…
b. Traduire chaque fait en termes juridiques.
c. Poser le ou les problemes juridiques : qualification du ou des problemes de droit.
d. Choisir parmi les faits ceux qui ont un interet juridique relatif au probleme de droit pose.
3. Resolution du ou des problemes de droit Il s’agit d’etablir l’adequation d’une regle de droit au probleme souleve.
L’etudiant doit rapprocher les faits qu’il a qualifies de la regle de droit qu’il pense applicable.
Il s’agit d’un raisonnement syllogistique :
• mineure (les faits),
• majeure (la regle de droit),
• solution. (application aux faits de la regle de droit).
Methodologie 13 Si le sujet permet d’envisager plusieurs hypotheses, chacune devra etre examinee de facon successive. Il est souvent judicieux de mettre en exergue l’hypothese qui a le plus de chances d’aboutir au regard de la question posee.
4. Redaction
a. Ecrire une phrase d’introduction.
b. Resumer succinctement les faits et les qualifier.
c. Poser le ou les problemes de droit.
d. Traitez les problemes de droit les uns a la suite des autres, en respectant toujours un ordre logique. Si les questions vous sont directement posez, suivez l’ordre d’enonciation. Redigez d’une facon rigoureuse et claire les solutions envisagees en III.
e. Construire en fonction des problemes poses ; aucun formalisme particulier n’est exige pour ce type d’exercice. En revanche, une grande rigueur juridique est indispensable. Toutes les solutions juridiques doivent etre justifiees par des references textuelles ou jurisprudentielles, afin d’etayer le raisonnement presente.