Dissertation de philosophie Sujet : « C’est plus fort que moi… » Que signifie cette formule ? Qui n’a jamais dit « je n’ai pas fait expres, c’etait plus fort que moi ! » ? L’expression retentit comme une formule recurrente, une excuse. Peut-etre voulons nous nous cacher derriere une sorte de d’excuse pour braver la honte du geste. Mais peut-etre est-ce seulement « plus fort que moi ». En effet, « plus fort » signifie deja une sorte de limite indepassable, une puissance trop immense pour etre surpassee et controlee. Notre desirs prennent-ils le dessus ?
Et notre « moi », notre ame, l’ensemble de notre etre interieur semble inactif devant cette decision prise par notre inconscient, notre corps, ou tout autre instance independante de notre volonte. Ainsi, comment pouvons nous expliquer cette expression, « c’est plus fort que moi » ? Pour tenter de definir cette subtile excuse, nous pouvons d’abord nous interesser a ce que nous appelons couramment l’inconscient. Est-ce lui qui nous domine alors ? Puis vient notre corps, existe-t-il finalement une puissance physique incontrolable et independante du determinisme psychique ?
Enfin, nous pourrions dire que cette expression n’est qu’une excuse, prete a eclater lorsque notre conscience refuse nos desirs. Toute conduite est motivee par un element. Qu’il s’agisse de combler un manque ou repondre a un besoin,
Ces desirs se rattachent evidemment a notre inconscient. Lorsque je dis « je n’ai pas pu m’empecher de lire sa lettre, c’etait plus fort que moi », je rend compte a mon recepteur que la lecture de cette lettre etait motivee par un reel desir de curiosite. Bien que l’on sache pertinemment que l’objet de l’acte est intime, les pulsions enfouies nous poussent a effectuer ce geste. Ce qu nous force a dire, a agir est donc refoule par notre conscience. Bien sur que je sais que fouiller dans l’intimite de quelqu’un est mal, cependant mon inconscient me souffle que je desire quand meme connaitre le contenu de cette lettre.
Nos motivations ne sont pas alors reconnues par notre conscience meme mais ressurgissent avec etonnement pour finir par nous controler et masquer notre vraie volonte. Les desirs non avouables que contient notre inconscient sont alors les moteurs de ces actes defendus. Ainsi nous pouvons rapprocher la theorie sur l’inconscient de Freud et ses trois grandes instances : le moi, le ca et le surmoi. Le moi est l’etre lui-meme, essayant d’equilibrer le surmoi – la conscience reflechie – et le ca – les pulsions, le reservoir de la libido.
L’equilibre plus ou moins etabli a des consequences sur ce que nous pourrons appeler « le monde exterieur ». Si l’on met en lien l’expression « c’est plus fort que moi » avec l’analyse freudienne, il en ressort un desequilibre entre le surmoi et le ca lorsque l’acte est incontrolable. Le ca surpasse le surmoi, et notre moi se voit influence et guide par la force des pulsions. Les actes que nous effectuons alors, comme dans un etat second provoque par l’inhibition du surmoi par le ca, sont gouvernes par ces pulsions et ses desirs que l’inconscient gardait enfouis.
Les lapsus sont des exemples frappants de ces actions « plus fortes que moi ». En effet, comment controler ce que l’on dit lorsque nous n’avons pas conscience de ce que nous disons ? Sans nous en rendre compte vraiment, nous repondons a nos desirs. Si l’on reve d’evenements derangeants, le psychanalyste Freud dirait que ce sont des messages de l’inconscient. Il n’y a pas de meilleur exemple que les reves pour definir une pensee a laquelle je suis soumise « plus fort que moi ». Au final, nous pourrions nous demander si cela ne remet pas en question notre liberte que d’agir contre notre volonte consciente.
Lorsque nous disons « c’est plus fort que moi », nous admettons qu’une partie de nos actes n’est pas vraiment decidee par nous guidee par l’inconscient. Si nous reconnaissons l’existence des pulsions de notre esprit, qu’en advient-il de celle de notre corps ? Il est clair qu’il existe des pensees et desirs refoules dans notre esprit, mais si le corps est soumis a des frustrations, ne peut il par reagir par nous faire agir de maniere forcee ? Spinoza decrit l’inconscient comme une sorte « d’intelligence » du corps. Le corps serait le reflet des pulsions de l’ame.
En effet, les hommes sont tantot sous l’influence du corps, tantot sous celle de l’ame. Donc ce que l’ame ressent, le corps l’interprete et se charge de donner une reponse a ces desirs. Comment pouvons nous etre soumis a cette puissance physique ? Cela remet donc en cause le principe de determinisme psychique de Freud. Meme si l’on est decide, si nos pulsions prennent le dessus, notre corps effectue l’acte sans passer par la conscience. Seulement si la conscience sait comment le corps agit, peut-on parler de ca freudien ? Cela voudrait dire que meme si a conscience connait les pulsions refoulees et qu’elle tente de les controler, notre corps, au service de nos desirs, livrerait sa propre bataille pour assouvir les demandes de l’inconscient. Cependant, si la conscience refuse de reconnaitre les pulsions, le corps agit vraiment comme le ca, et nous effectuons les actes ou paroles de maniere incontrolee car « c’est plus fort que nous ». Le corps peut-il exercer uniquement seul sans etre determiner par l’ame ? Spinoza prend l’exemple d’un somnambule. Celui-ci peut, dans son sommeil, effectuer beaucoup de choses qu’ils ne feraient pas pendant la journee.
Cela montre bien la capacite du corps a fonctionner sans lien avec l’esprit conscient. Le corps, objet du desir sexuel, est soumis a des pulsions que la conscience ne peut pas toujours controler. Une manifestation du desir sexuel est toujours physique et il est difficile pour la conscience de raisonner le ca et tous les desirs afin de ne pas agir de maniere incontrolee. La formule « c’est plus fort que moi » doit frequemment revenir lors des manifestation de ce desir humain. Par ailleurs, ces desirs physique remettraient-ils en cause la liberte d’agir de chaque personne ?
Si je pousse quelqu’un dans la rue parce que je suis de mauvaise humeur, les pulsions de l’ame, inconsciemment, me guide a effectuer ce geste alors que ma conscience me prouve le contraire. Il semble alors clair que ce pouvoir du corps, cette « intelligence » comme l’evoque Spinoza, inhibe ma liberte de choisir mes actes. Car la liberte induit toujours un choix delibere de la personne consciente. Si notre corps est oriente dans ses actions, il devient alors evident que notre liberte d’agir est remise en question.
Finalement, si mon ame laisse libre le corps, celui devient apte a agir comme il lui semble, soumis aux pulsions et aux desirs. Mais si nous sommes conscients de nos mouvements physiques declenches par le desir, cela voudrait-il dire que la formule « c’est plus fort que moi » n’est qu’une excuse pour effacer les actes de ce corps ? Le concept d’inconscient parait clair et approprie pour expliquer le phenomene du « c’est plus fort que moi ». Cependant, d’autres hypotheses viennent soulever l’explication : si nous sommes conscient des actes de notre corps, peut-ont vraiment parler de determinisme ?
Dans ce cas la, l’expression n’apparait-elle pas un peu comme une excuse ? Si notre conscience connait les pulsions refoulees mais que le corps agit quand meme, il semble evident qu’elle se ment a elle meme et refuse de controler ses desirs. Nous sommes alors des etre hypocrites qui n’essayent pas d’assumer leurs actes refoules consciemment en disant « c’est plus fort que moi ». Ce serait precisement ce que Sartre appelle la mauvaise foi. Selon lui, nous sommes de mauvaise foi lorsque l’on tente de se persuader que nous sommes soumis a un determinisme incontrolable, qu’il soit physique ou psychique.
En effet, un evenement de ma conscience ne peut pas etre cause par quelque chose d’exterieur a elle. Si l’on parle donc d’inconscient, comme Freud, cela signifie donc tout simplement que la conscience se masque a elle meme la verite. La conscience prend la liberte de refouler les pulsions et pour ce faire, elle doit les choisir et donc se les representer. Elle est donc consciente de ce qu’elle dissimule. Par consequent il n’y a pas d’inconscient puisque je peux controler ce que j’ai inhibe. C’est donc pour cela que la formule « c’est plus fort que moi » peut sonner comme une excuse.
L’homme, parce qu’il a honte de ses actions ou de ses desirs, veut se donner bonne conscience et donc tente de masquer ses pulsions. Selon Sartre, dire que nous sommes soumis a un determinisme psychique est purement de la mauvaise foi car c’est le surmoi – la conscience reflechie selon Freud – qui censure les pulsions et les desirs. Notre conscience sait donc tous nos desirs enfouis mais se refuse de les faire connaitre et de les assouvir ! Le sujet, de mauvaise foi, se cache son desir mais finit bien sur par lui donner lieu puisqu’il agit, a priori, influence par une force.
Finalement, a quoi ou a qui sont dues les actions dites inconscientes que le sujet ignore ou pretend ignorer ? Si l’on prend en compte le concept de conscient et d’inconscient, les deux instances s’opposent sans cesse, induisant une bataille sans fin pour l’etre entre ses desirs et ce qui les censure. Il semble donc complexe de determiner une explication concise de la formule « c’est plus fort que moi ». En effet, l’Ame et le Corps se livrent sans interruption bataille pour faire surpasser desirs ou volonte reelle. Les pulsions, qu’elles soient physiques ou refoulees, cherchent toujours a prendre le dessus.
Cependant la conscience, en effectuant son travail de censure, doit de se representer les desirs. Qu’advient-il alors de la veridicite de l’expression « c’est plus fort que moi » ? Mauvaise foi ou reelle force dominatrice ? Dans ce contexte nous pouvons alors soulever une autre problematique. La conscience, ou le surmoi freudien, peuvent etre inhibe par nos desirs, le ca. Par consequent, peut-on faire quelque chose sans en avoir vraiment conscience ou est-ce exagerer que de reposer certains de nos actes sur un phenomene d’inconscient ?