Exemple de texte argumentatif APPLIQUER OU NON LA PEINE DE MORT ? (Mise en scene) La peine de mort est abolie depuis plusieurs annees au Canada. Pourtant, les sondages qui ont lieu regulierement sur le sujet revelent qu’une majorite de la population canadienne continue d’en souhaiter la remise en vigueur. L’application de la peine capitale varie beaucoup d’un pays a l’autre, quand ce n’est pas d’une region a l’autre a l’interieur d’un meme pays : ainsi, chez notre voisin americain, de nombreux Etats pratiquent encore la peine de mort, alors que d’autres l’interdisent.
En 1989, la Cour Supreme americaine a meme statue qu’il n’etait pas inconstitutionnel d’executer des mineurs de 16 et 17 ans ou des arrieres mentaux, et des executions recentes de jeunes en Floride ont provoque beaucoup de remous. La question de la peine capitale fait constamment l’objet de discussions, meme dans les pays ou elle a ete abolie. (Question) Il est donc pertinent de se demander si l’application de la peine de mort peut-etre justifiable au plan moral ? (Division) Les arguments qui reviennent le plus frequemment dans la polemique soulevee par la question de la peine capitale portent sur son caractere dissuasif, sur les isques de recidive et d’erreurs judiciaires, et
De plus, pour qu’une action soit justifiable au plan moral, elle doit etre conforme a une valeur fondamentale, de portee universelle, et entrainer les meilleures consequences possibles pour toutes les personnes en cause. La valeur morale qui selon moi correspond le mieux a ce critere est le respect de la personne humaine, de sa vie, de sa liberte et de son integrite meme si, parfois, cela peut representer des inconvenients pour la collectivite. (Enonce de la position) Or, je crois qu’on ne peut soutenir raisonnablement la necessite d’appliquer la peine de mort dans les conditions actuelles de notre societe. Explication de la position) Cela ne signifie pas que la societe ne doive pas se proteger contre ses membres criminels mais en contexte democratique, je crois que les inconvenients de la peine capitale sont plus grands que ses avantages. Ma position n’est toutefois pas absolue, dans la mesure ou le recours a la peine capitale pourrait se justifier, dans certaines circonstances extremes, faute d’autres moyens de proteger la societe. Justification (Premier argument)Bien des gens croient que la peine de mort a pour effet de diminuer la criminalite.
Or, le contraire a ete demontre notamment aux Etats-Unis ou des comparaisons sont possibles entre des Etats relativement semblables avec des lois differentes sur la question. Ainsi, une recherche revele qu’en 1970, la moyenne des meurtres dans les Etats ayant aboli la peine de mort etait de 4,65 par 100,000 habitants, alors qu’elle etait de 7,65 dans ceux qui l’appliquaient. Une autre etude nous apprend que dans un Etat (le Delaware) qui a aboli la peine de mort en 1958 et l’a remise en vigueur en 1961, le taux d’homicides a ete superieur dans les annees qui ont suivi au taux en vigueur durant la periode d’abolition.
La presence de la peine de mort ne fait pas baisser le taux de criminalite : elle n’a donc pas d’effet dissuasif. (Deuxieme argument)Mais garder en vie des criminels endurcis ne favorise-t-il pas les recidives ? En effet, rien ne garantit qu’un criminel qui a purge sa peine, si longue soit-elle, ne commette pas un autre meurtre une fois en liberte. Par contre, l’application de la peine capitale comporte a son tour un risque grave : la possibilite d’erreur judiciaire, comme il s’en produit regulierement, qui pourrait entrainer la mort d’innocents.
Il y a quelques annees, en Nouvelle-Ecosse, un Amerindien (Donald Marshall) a ete relache de prison apres plus de dix ans de detention : il avait ete condamne a perpetuite pour un meurtre qu’il n’avait pas commis, suite a l’echafaudage d’une fausse preuve par des policiers racistes. Un Ontarien (Guy-Paul Morin) et un citoyen de l’Ouest (David Millgard) ont ete recemment liberes apres plusieurs annees en prison, car des tests d’ADN ont demontre qu’ils ne pouvaient etre responsables des viol et meurtres pour lesquels ils avaient ete juges coupables.
Que serait-il advenu si la peine capitale avait ete en vigueur au moment de la condamnation de ces innocents ?… (Premiere objection et reponse)Certains partisans font valoir que la peine de mort nous ferait economiser des montants considerables lies aux frais d’emprisonnement des criminels. Or, plusieurs etudes ont demontre que les procedures d’appel, qui durent en moyenne 10 ans aux Etats-Unis, et qui sont necessaires afin d’eviter la condamnation d’innocents, coutent environ 2 millions de dollars, ce qui depasse largement la moyenne des couts d’une sentence a vie. Deuxieme objection et reponse)Enfin, d’autres affirment qu’il est injuste de laisser vivre un etre humain qui a enleve la vie d’un autre. «Oeil pour oeil, dent pour dent», entend-on. Mais fait-on vraiment justice a une victime en executant son assassin ? Non, la seule justice concevable serait de lui redonner la vie, ce qui n’est pas possible. Cette conception releve beaucoup plus d’un esprit de vengeance que d’un souci de justice. De plus, une societe eprise de justice ne devrait-elle pas donner l’exemple en respectant elle-meme ce qu’elle veut que tous ses membres considerent comme sacre, la vie ? Synthese Resume) Ainsi, a la question : l’application de la peine de mort est-elle justifiable au plan moral ? , j’ai repondu par la negative. Les arguments en faveur de la peine capitale ne resistent pas, selon moi, a une analyse rationnelle : son application n’a pas d’effets dissuasifs, les procedures judiciaires qui entourent l’execution d’un condamne coutent plus cher que son emprisonnement a vie, les risques de recidives sont contrebalances par le risque d’execution d’innocents et enfin, l’argument de la «justice» fait passer le desir de vengeance avant une valeur fondamentale de notre societe, le respect de la vie humaine. Elargissement) Toutefois, je suis bien conscient que cette courte argumentation n’a pas epuise le sujet. Par exemple, il pourrait etre justifiable que dans certaines situations exceptionnelles (guerre, catastrophe naturelle de grande envergure), la protection de la communaute l’emporte sur le droit a la vie des criminels qu’on ne pourrait neutraliser autrement.
Il faut d’ailleurs se demander si le criminel, qui a prive un autre etre humain de la vie, n’a pas renonce de ce fait a son propre droit a la vie : la societe aurait donc un droit de mort – mais pas une obligation – a son egard. C’est pour ces raisons – qui demanderaient une reflexion plus approfondie, que je me suis limite a ne demander que le respect de la vie du meurtrier, et non de son droit a la vie.