– App Store / Cristiano Betta via Flickr CC License by – L’AUTEUR Farhad Manjoo Farhad Manjoo est le chroniqueur high-tech de Slate. com. Ses articles TOPICS * Amazon * Apple * apple store * applications * e-book * google books * high-tech * ipad * iPhone * iTunes * Jeff Bezos * kindle * livre electronique * CULTURE * internet PARTAGER LISIBILITE ; taille de la police SLATE CONSEILLE Le Kindle peut-il sauver la presse? Ambiance de divorce entre Google et Apple Apple n’est pas plus vertueux que Microsoft Le monde de la technologie semble se diriger depuis quelques mois vers un nirvana du livre electronique.
Les fabricants ne cessent, en effet, d’ameliorer leurs appareils et les prix sont sans cesse plus competitifs (je suis pret a parier a nouveau que le Kindle d’Amazon sera a moins de 100$ [environ 74 euros] d’ici la fin de l’annee). Mais avant tout, nous sommes en train d’assister a une explosion du nombre de fournisseurs de livres numeriques. Il y a deux ans, je regrettais de voir qu’Amazon semblait assure d’avoir le monopole sur le marche du livre electronique, situation cauchemardesque aussi bien pour les ecrivains que les editeurs ou les lecteurs.
Mais depuis, Apple
Pour les possesseurs de ces appareils, mieux vaut donc acheter ses livres aupres de Google ou d’Amazon, puisque, apres tout, ceux-ci sont lisibles non seulement sur les appareils Apple, mais aussi partout ailleurs. L’iBookstore d’Apple est donc d’un interet quasi nul. Mais Apple, qui ne l’entend pas de cette oreille, commence aujourd’hui a contre-attaquer. Selon le New York Times, la marque a la pomme a refuse a Sony le droit de faire figurer son application de lecture de livres electroniques sur l’App Store.
Cette application Sony aurait permis aux gens de lire sur des appareils Apple des livres achetes a l’origine pour un lecteur Sony. Cela n’avait rien d’innovant —Sony souhaitait seulement imiter les applications pour iPhone deja crees par Amazon, Google, Barnes & Noble et Kobo. On imagine donc difficilement que Sony sera le seul a patir. Ce ne serait certes pas la premiere fois qu’Apple ferait preuve d’incoherence dans sa gestion de l’App Store —Apple reprouve de maniere enerale les applications «sexy», mais fait une exception pour les applications maillots de bain de Playboy et Sports Illustrated— mais, cette fois-ci, il semble certain qu’Apple va etendre ces nouvelles restrictions a d’autres fournisseurs de livres numeriques. Il est peu probable qu’Apple interdise sur ses appareils les applications d’Amazon et autres. D’apres un communique emis le 1er fevrier par la societe, il semble qu’Apple va demander aux vendeurs de livres numeriques d’offrir aux clients un moyen d’acheter les livres sur l’iTunes Store.
En d’autres termes, Apple veut non seulement une part sur les livres vendus via l’iBookstore, mais aussi une part de 30% sur les livres vendus par ses concurrents. Une mauvaise nouvelle C’est une mauvaise nouvelle pour Amazon, qui a fait de la compatibilite avec l’iPhone et l’iPad la piece centrale de sa strategie pour le Kindle. C’est aussi une mauvaise nouvelle pour nous tous qui pensions qu’Apple nous laisserait sans probleme nous passer de ses services si nous souhaitions utiliser nos iPhones et nos iPads comme livres electroniques. Naifs que nous sommes !
Sur le long terme, cependant, je me demande si les restrictions imposees par Apple ne finiront pas par aboutir a l’amelioration de nos appareils en revelant —une bonne fois pour toutes— les inconvenients du modele App Store. Tout vendeur de «contenu» pour appareils portables —livres, jeux, films, musiques, articles de magazines, etc. — devrait se mefier des intentions d’Apple, societe qui ne semble jamais tranquille tant qu’elle n’a pas touche sa part sur chaque transaction. Heureusement pour nous, il existe une tres bonne alternative a l’App Store.
Cela s’appelle… le Web. Et il n’appartient pas (du moins, pas encore) a Apple. Les concurrents d’Apple se servent depuis longtemps du Web pour vendre leurs livres aux utilisateurs d’iPhone. Lorsque, par exemple, vous essayez d’acheter un livre depuis l’application Kindle pour iPhone vous etes redirige vers le navigateur Web de votre telephone. Une fois l’achat effectue sur le site pour mobiles d’Amazon (le paiement ayant ete effectue via votre compte Amazon), il suffit de relancer l’application Kindle pour retrouver le livre que vous venez d’acheter.
Ce «circuit» presente un avantage evident pour Amazon: Apple prelevant 30% sur les achats effectues depuis les applications, on contourne cette «taxe iPhone» en poussant les clients a realiser leurs achats hors de l’application. Dans son communique, Apple a particulierement vise cette pratique: «Nous reclamons maintenant aux applications qui offrent la possibilite d’acheter des livres hors application de permettre aussi aux utilisateurs d’effectuer leurs achats depuis l’application elle-meme. »
Apple continuera donc a laisser les libraires numeriques pousser les clients a passer par leurs propres sites a condition qu’ils laissent aussi les clients acheter via Apple. Les partisans de la marque a la pomme feront remarquer que ce n’est la que justice par rapport aux restrictions imposees sur les appareils concurrents. Apres tout, le Kindle d’Amazon ne permet pas d’acheter des livres vendus par Apple ou Google, ni autre contenu copyrighte. Par consequent, le vrai mechant ne serait-il pas plutot Jeff Bezos [le PDG d’Amazon]?
Les consequences de la politique d’Apple Choisir, entre deux plateformes fermees, laquelle est la plus «mechante» est un jeu de dupes. Cela fait longtemps que j’estime qu’Amazon devrait ouvrir le Kindle aux livres de la concurrence. Toutefois, je suis plus preoccupe par la maniere dont Apple gere son App Store, non seulement parce que cela affecte beaucoup plus de gens (il y a bien plus d’utilisateurs d’iPhone, d’iPad et d’iPod Touch que de Kindle), mais aussi parce que les politiques d’Apple ont des implications beaucoup plus vastes.
Maintenant qu’Apple a change les termes de ses arrangements commerciaux en matiere de livres electroniques, on peut penser qu’il aimerait en faire de meme pour les applications video comme Netflix ou Hulu Plus, les applications musicales comme Pandora, voire les applications commerciales plus generales, comme le Windowshop d’Amazon. Si Apple veut aujourd’hui 30% sur tous les livres que j’achete a Amazon, je suppose qu’il voudra egalement ses 30% lorsque j’essaierai d’acheter un Kindle demain. C’est pourquoi j’espere qu’Amazon repondra aux restrictions d’Apple en otant volontairement son application Kindle de l’App Store.
Pour la remplacer, Amazon devrait creer un programme de lecture Kindle pour le Web mobile —une application pleinement fonctionnelle dont Apple ne pourrait se meler. Cette application accessible via le navigateur Internet offrirait toutes les fonctionnalites de l’application Kindle pour iPhone et iPad —il serait possible d’acheter des livres, de les lire, de les annoter, etc. — et de synchroniser ces donnees avec tous les autres appareils compatibles. Une telle application ne devrait pas etre trop difficile a creer, Amazon ayant deja mis au point un lecteur Kindle pour navigateurs Web classiques.
En outre, le Web mobile etant assez homogene d’un appareil a l’autre, cette edition du Kindle fonctionnerait non seulement sur iPhone, iPad et iPod Touch, mais aussi sur les telephones Android, Palm, BlackBerry et Windows, ainsi que sur les tablettes numeriques. Un passage aux applications Web ne profiterait pas uniquement a Amazon. Mon conseil serait tout aussi valable pour Netflix, Hulu, Pandora et tout autre entreprise souhaitant vendre du media aux utilisateurs de telephones portables. Apple a fait clairement savoir qu’il ne faciliterait pas la presence de ses concurrents sur l’App Store. Pourquoi accepter de jouer son jeu?