Dans un essai compose en 1933, Antonin Artaud, ecrivain dramaturge inventeur du concept du « theatre de la cruaute » dans « Le Theatre et son double », condamne par une phrase provocante «cette idolatrie des chef-d’oeuvre fixes qui est un des aspects du conformisme bourgeois ». Dans cet essai, il denonce le fait que les chef-d’’ uvres consideres comme demodes represente un force retrograde au developpement et a la modernisation de l’art.
Il denonce le conformisme bourgeois issu de l’academisme et pose la question de la definition ambigue du terme de chef d’’ uvre qui designe par definition une ‘ uvre accomplie et representative en son genre mais egalement la meilleure ‘ uvre d’un auteur. On peut alors se demander la definition d’un chef d’’ uvre que se concoit le dramaturge. On analysera tout d’abord sa critique provocante contre l’academisme puis les raisons de sa volonte de la modernisation de l’art en illustrant son point de vue par des exemples litteraires theatraux, notamment la piece de theatre Phedre de Jean Racine parmi d’autres.
Dans cet essai polemique, le theoricien critique l’etablissement de regles issues de l’academisme agissant comme une autorite superieure definissant le fait qu’une ‘ uvre puisse etre consideree comme un chef-d’’ uvre et pas une
Sa condamnation du conformisme bourgeois se base sur l’idee que les chefs d’’ uvres reconnus comme tel appartiennent a une litterature d’elite et donc aboutit a la domination culturelle de la bourgeoisie sur le plan artistique et litteraire, ne laissant pas de subjectivite sur l’ambiguite de la definition d’un chef d’’ uvre, designant une ‘ uvre accomplie en son genre. Par cette vision trop traditionnelle de la litterature, Antonin Artaud considere les chefs d’’ uvres du passe comme demodes et freinent et empechent la modernisation de l’art et la recherche de nouvelles formes plus appropriees a une epoque.
Les mouvements litteraires resultant indirectement de cet academisme constituent une limite au developpement de la litterature, offrant une vision pas assez ouverte d’une ‘ uvre reussie. L’ecrivain introduit une vision moderne de la litterature par son essai provocant. On peut comprendre son obstination pour une modernisation litteraire par le fait qu’un chef d’’ uvre se devrait de pouvoir rester tel peu importe l’epoque et donc ne pas se demoder.
Cependant, les textes des chefs-d’’ uvre du passe constituent une barriere du langage resultant en une perte de l’interet de lecteurs, notamment a cause de l’incomprehension. Le dialogue entre les personnages constitue le centre et l’element essentiel de l’intrigue d’une piece et du theatre en lui-meme. Or, les textes de pieces « demodes » appartenant a un registre de langue propre a une certaine epoque cause l’incomprehension ou une mauvaise interpretation de l’intrigue de la part de certains lecteurs perdant le fil de l’action.
Les emotions du personnage que se doit de susciter l’acteur par le discours et le gestuel ne sont pas assimilees par certains spectateurs du fait de la barriere du temps et du langage. Dans l’exemple de l’’ uvre theatrale Phedre de Jean Racine ou Le Cid de Pierre Corneille, de nombreuses tirades des personnages ayant pour but de susciter des emotions fortes aupres des spectateurs tel que la pitie et la crainte constituent des elements essentiels a la comprehension de l’histoire meme.
On peut egalement prendre l’exemple de l’’ uvre comique et de Moliere « Le Bourgeois Gentilhomme » constituant egalement une critique de la societe peut perdre de son sens aupres de certains spectateurs ou lecteurs n’etant pas familiers avec le type d’humour et la situation politique et sociale de l’epoque. L’interet du theatre residant dans le lien existant entre le public et l’acteur, ou entre le lecteur et l’auteur n’existe point dans le cas de l’incomprehension de la piece.
Le spectateur ne se reconnait pas dans les personnages et la situation et peut donc considerer un chef-d’’ uvre du passe comme ennuyeux et ininteressant. Le lecteur ne percoit donc pas le potentiel complet de la piece. Cette vision d’une litterature modernisee de la part d’Antonin Artaud se retrouve aujourd’hui dans les readaptation de certaines ‘ uvres litteraires et notamment theatrales en modernisant le texte et les discours des personnages ou en readaptant la situation a la societe moderne.
La base de l’histoire meme d’une piece etant comprehensible par toutes les generations, la facon de faire comprendre l’histoire par le spectateur et donc le texte et les dialogues constitue le seul obstacle a la comprehension du public d’aujourd’hui, et eventuellement a un public futur. Antonin Artaud notamment pronait lui-meme un theatre sans texte, inspiree par le theatre oriental, ce qui permettrait a l’’ uvre de transcender les variations historiques du gout. Cela illustre bien la citation de l’auteur Ernest Hemingway « Un chef-d » uvre est un livre dont tout le monde parle et que personne ne lit. ».
Il part du principe que la notion de chef d’’ uvre doit etre associee a la notion d’universalite. Un chef d’’ uvre devrait etre une ‘ uvre universelle, pouvant etre comprise peu importe les generations et n’exigeant pas de connaissances particulierement profonde sur une situation historique precise. Des metteurs en scene de nos jours tentent donc de renouveler notre vision des ‘ uvres du passe, soit en modifiant le texte ou bien en changeant le lieu et l’epoque durant laquelle se deroule l’histoire. Certains auteurs comme Nathalie Sarraute ou Olivier Py proposent de nouvelles formes d’ecriture theatrales.
On peut donc dire que les chefs d’’ uvre du passe demeure des chefs d’’ uvre dans le fond mais pas dans la forme. Par consequent, on peut dire que l’ecrivain apporte une vision perfectionnee de la notion de chef d’’ uvre. Il condamne et rejette l’academisme qui en etablissant des regles compose une force retrograde et empecherait le developpement de l’art. L’auteur pense qu’un chef d’’ uvre est une ‘ uvre qui transcender la barriere du temps en gardant le meme impact au yeux du public peu importe l’epoque.