« Les noms des choses qui ont la propriete de nous affecter, c’est-a-dire de celles qui nous procurent du plaisir ou du deplaisir, ont, dans la conversation courante des hommes, une signification changeante parce que tous les hommes ne sont pas affectes par la meme chose, ni le meme homme a des moments differents. Etant donne en effet que tous les noms sont donnes pour signifier nos representations et que toutes nos affections ne sont rien d’autre que des representations, lorsque nous avons des representations differentes des memes choses, nous ne pouvons pas facilement eviter de leur donner des noms differents.
Car meme si la nature de ce que nous nous representons est la meme, il reste que la diversite des facons que nous avons de la recueillir, diversite qui est fonction de la difference de constitution de nos corps et des preventions de notre pensee, donne a chaque chose une teinture de nos differentes passions. C’est pourquoi, lorsqu’ils raisonnent, les hommes doivent prendre garde aux mots, lesquels ont aussi, au-dela de la signification de ce que nous imaginons leur etre propre, une signification renvoyant a la nature, a la disposition et a l’interet de celui qui parle; tels sont es noms
Les reflexions de Hobbes, relatives au langage, portent sur la significations des mots. En remettant en question l’idee commune selon laquelle les mots auraient une signification commune et stable, grace a laquelle nous pourrions mettre en commun nos pensees et nos sentiments, Thomas Hobbes souleve le probleme de la fiabilite du langage dans l’elaboration d’une philosophie morale. Sa these est que, les mots ayant une signification changeante en raison de leur maniere individuelle de percevoir les choses, il est difficile d’elaborer une morale a portee universelle en s’appuyant sur leur usage.