09 La Mobilit Sociale

09 La Mobilit Sociale

Toutes les sociétés comportent des groupes sociaux ou des statuts inégalement valorisés et plus ou moins clairement hiérarchisés, constituant des formes diverses, elles-mêmes plus ou moins marquées ou rigides, de « stratification sociale » L’analyse du fonctionnement et de la reproduction des sociétés conduit à s’interroger sur la manière dont sont attribués aux indlvidus des groupes, statuts ou positions sociales, et sur le caractère plus ou moins durable ou fixe de cette distribution.

Deux cas théoriques extrêmes peuvent borner la gamme des possibilités : d’un côté, celui de sociétés assignant aux individus ne position prédéter 09 La Mobilit Sociale Premium gy Rabii-AIIouaddi vapTa II, 2015 IO pages Mobilité sociale Monter, rester stable ou descendre sur 1’« échelle sociale sont des expériences ou des attentes sociales communes, dont l’histoire comme la fiction littéraire fournissent de nombreux exemples qui peuvent structurer l’Imaginaire social et les ambitions.

Ce que les sociologues étudient sous le nom de « mobilité sociale » (terme stabilisé depuis l’ouvrage de Pitirim Sorokin paru en 1927) renvoie, en premier lieu, à des expériences partagées et à des notions de sens commun, comme à des déologies ou à des discours politiques, dont témoigne par exemple le thème récurrent de « la panne de

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l’ascenseur social » Swipe to page Cette étude a aussi d de travaux sociologiq s q or 10 dans la formulation d Sv. V* to nextÇ€ge des enquêtes et de l’ al’ I – Les indicateurs de ement important es techniques tant Ons que dans celle prédéterminée et figée pour la vie et pour la descendance (par exemple les sociétés à castes : l’individu nait, travaille, se marie et meurt dans la même caste) ; à l’autre pôle, des sociétés au sein desquelles l’origine des individus ne prédéterminerait en ien le statut social (et que peut désigner le terme ambigu de « méritocratie D’un côté, on trouve une immobilité sociale maximum (pas de changement de position sociale possible) ou une totale « inégalité des chances » (d’accès aux différentes positions sociales) ; de l’autre une « égalité des chances » complète qui se traduirait par une indépendance statistique des positions sociales en fonction des origines. C’est plus ou moins proches de l’un de ces pôles qu’on peut s’attendre à observer différentes sociétés et leurs évolutions.

Les enquêtes de mobilité sociale prennent systématiquement a profession comme indicateur du statut social, choix qui peut poser des problèmes, notamment pour analyser la mobilité sociale des femmes. En fait, et quelle que soit l’importance du statut professionnel dans une société comme la nôtre, le statut social comporte ou intègre de multiples aspects ou composantes, de sorte que la mobilité sociale peut relever de registres différents. Sorokin en distinguait trois principaux : les domaines économique (pour les cas d’enrichissement ou d’appauvrissement), professionnel (pour les changements de profession) et politique (pour le passage à des statuts politiques ifférenciés, tels que électeurs ou non).

Mais il en évoquait bien d’autres, comme les appartenances religieuse, nationale ou ethnique. On peut ajouter (au moins) le nivea 10 appartenances religieuse, nationale ou ethnique. On peut ajouter (au moins) le niveau culturel, certifié ou non par des diplômes, ainsi que le sexe et l’âge. Certains éléments du statut social impliquent des formes systématiques ou réglées de mobilité (comme ‘âge), tandis que d’autres sont très généralement fixés de maniere définitive (comme le sexe). Cette pluralité des éléments du statut et des domaines où la obilité sociale peut s’observer pose la question de leur synthèse pour les individus qui cumulent ces traits.

Il peut paraitre fréquent, mais ce n’est pas systématique, que les positions relatives dans différents domaines soient de niveaux équivalents. Tous les Noirs, aux États-Unis, ne sont pas pauvres, tous les diplômés ne sont pas riches ni tous les riches cultivés, etc. Se pose donc la question de la plus ou moins grande cohérence des éléments du statut social des individus. Gerhard Lenski parle ainsi de la « congruence » ou de la « cristallisation » (ou non) du statut et de ses effets sociaux. Pierre Bourdieu insiste sur les effets de la « structure » des « capitaux » sociaux (ressources mobilisables dans les domaines économique, culturel ou des relations sociales principalement, qui peuvent être inégalement importantes dans ces différents domaines).

Cette perspective conduit aussi ? analyser certaines formes de mobilité (ou d’immobilité) sociale en termes de reconversion : ainsi, le maintien relatif du statut social des membres de l’aristocratie foncière en France est passé par l’investissement dans la formation scolaire et l’acquisition d’autres types de « capitaux Il – Mesurer la mobilité sociale La formation scolaire et l’acquisition d’autres types de « capitaux D. La question de la mobilité sociale est spontanément appliquée aux individus : peuvent-ils se déplacer dans la structure soclale et le font-ils ? dans quelle mesure ? sous l’effet de quelles causes et avec quels effets sociaux ?

Cependant, comme le soulignait Sorokin, cette problématique est généralisable aux groupes sociaux qui peuvent se déplacer en tant que tels dans l’espace social, comme on peut l’observer à l’occasion de révolutions ou de changements institutionnels importants. Dans le domaine social et professionnel, la position relative des groupes professionnels évolue : un agriculteur peut connaître une forme de mobilité sot parce qu’il change de métier, soit parce que le statut social du groupe auquel il appartient change globalement sous l’effet des évolutions économiques et des politiques agricoles ; un ouvrier peut chercher à améliorer la situation de sa famille soit en changeant de metier, soit en militant pour l’amélioration de la condition ouvrière.

Toujours avec Sorokin, qui parlait alors de « mobilité culturelle on peut aussi appliquer ette thématique aux éléments non directement humains des sociétés, tels que les objets et les pratiques culturelles, que leur diffusion ne cesse de déplacer dans l’espace social. Reposant sur une métaphore spatiale, l’analyse de la mobilité sociale renvoie de ce fait à d’autres distinctions devenues classiques depuis Sorokin : elle peut être horizontale, ascendante ou descendante, qu’il s’agisse d’individus, de groupes, ou même d’objets ou de pratiques cultur 0 descendante, qu’il s’agisse d’individus, de groupes, ou même d’objets ou de pratiques culturelles. L’accent habituellement is sur la mobilité ascendante peut faire négliger l’existence de la mobilité descendante, la première ne pouvant augmenter de manière importante sans la contrepartie de la seconde.

Cette distinction ne doit pas non plus faire oublier que les parcours de mobilité ne sont pas nécessairement organisés selon des trajectoires simples : des parcours de type oscillatoire s’observent, où des trajets de sens contraires se succèdent et s’annulent ; c’est ce que Roger Girod a appelé « contre- mobilité » (à ne pas confondre avec la mobilité descendante), situation qui peut s’observer d’autant plus que les statuts sociaux ont influencés par des conjonctures ou des accidents variables, comme dans les cas de statuts non cristallisés. Cette analyse d’un mouvement (ou non), qui rapporte une position ou une destinée à une origine, conduit aussi à des distinctions selon la nature de l’origine retenue.

On peut rapporter les individus soit à eux-mêmes à un moment antérieur de leur existence, pour observer par exemple s’ils ont changé de situation professionnelle, en étudiant leur carrière personnelle, soit à un membre d’une génération antérieure (souvent le père), pour situer leur évolution éventuelle par rapport à leur origine amiliale. Cette « mobilité intergénérationnelle » est l’objet le plus classique des études sur la mobilité sociale. La mise en œuvre de ces distinctions et questions pour analyser les résultats d’enquêtes pose des problèmes qui conduisent ? d’autres distinctions. L’articulation entre PAGF s 0 des problèmes qui conduisent à d’autres distinctions.

L’articulation entre mobilité collective et mobilité individuelle, ou, plus généralement, le constat d’une évolution rapide et importante des structures sociales des sociétés où l’on étudie la mobilité sociale, rend problématique l’interprétation des ésultats observes, et, en particulier, leur lecture en termes de flux de mobilité ascendante. Si on estime que le statut d’ouvrier est supérieur ou préférable à celui d’agriculteur, on observe des flux ascendants systématiques dans les sociétés où l’emploi agricole diminue au profit de l’emploi industriel ; de même lorsque celui-ci décroit au profit des services et de statuts professionnels jugés supérieurs à ceux des ouvriers. La mobilité indlviduelle paraît ainsi largement dépendante de changements sociaux structurels, de l’évolution d’ensemble de la structure sociale.

D’où la distinction souvent faite entre une mobilité « structurelle », découlant de ces changements macro-sociaux, et une mobilité « nette n, qui s’y ajouterait. Difficile à mettre en œuvre sous cette forme, cette distinction a laissé la place, sous l’influence des travaux de l’école d’Oxford, autour de John Goldthorpe, à la distinction entre « mobilité observée » (ce que livre directement le résultat des tableaux de mobilité, mais qui dépend notamment des différences de distribution d’ensemble des origines et des destinées) et « fluidité sociale » (qui traduit le egré de l’indépendance statistique entre origines et destinées, indépendamment de leurs différences d’ensemble).

Cette distinction peut ainsi conduire à estimer, par exemple, que la fluidité s 6 0 différences d’ensemble). Cette distinction peut ainsi conduire à estimer, par exemple, que la fluidité sociale n’évolue pas sensiblement dans des cas où le volume de la mobilité sociale augmente. Ill – Principes de variation Généralement étudiée de manière globale à l’échelle nationale, la mobilité peut varier selon de nombreux principes de différenciation. La mythologie du self-made man a pu conduire ? opposer l’ouverture de l’espace social aux États-Unis à la rigidité de la vieille Europe. L’étude comparative de Lipset et Bendix dans les années 1950 débouchait cependant sur le constat de différences peu marquées entre pays industriels.

Les travaux comparatifs plus récents relèvent des différences parfois importantes dans le volume et la forme des flux de mobilité, en fonction des transformations sociales qui affectent les pays, mais peu repérables ou faibles dans le degré d’association entre origines et destinées. De manière comparable, la différence entre le groupe professionnel du père et celui de l’individu est plus marquée chez les femmes que chez les hommes, du fait des différences de structure importantes entre emplois féminins et masculins. Mais SI l’on cherche à redresser ce « blais » d’observation, la destinée professionnelle ne paraît pas moins dépendante de l’origine sociale pour l’un ou l’autre sexe. Parmi les caractéristiques de la famille d’origine statistiquement liées aux destinées sociales, on peut relever aussi une relation négative de la mobilité sociale avec le nombre de frères et sœurs.

Variant avec les conjonctures socioéconomiques associees à des transformations des structures professionnel 7 0 conjonctures socioéconomiques associées à des transformations des structures professionnelles, la mobilité sociale diffère géographiquement dans un même pays (elle est plus importante en Ile-de-France par exemple) et historiquement. Le mouvement d’accroissement des flux de mobilité qui a pu s’observer au fi des enquêtes des années 1950 aux années 1990 marque le pas depuis lors. L’étude de la mobilité en fonction des années de naissance fait apparaître non une diminution de son volume lobal mais une augmentation de la part de mobilité descendante à partir des générations nées dans les années 1950 et 1960. Une question récurrente est de savoir si les progrès de la scolarisation et l’importance croissante des résultats scolaires pour les destinées professionnelles débouchent sur un affaiblissement de la relation entre origine et destinée.

En dépit de l’élévation générale des durées de scolarisation et des niveaux de diplômes, l’association entre origine sociale et réussite scolaire reste très marquée d’une part, et l’origine sociale différencie aussi es destinées sociales même à diplôme constant, d’autre part. IV – Effets sociaux Quelles qu’en soient les formes, la signification, les modulations ou les causes, la mobilité sociale a elle-même des effets. Des effets sur les indivldus qui en font l’expérience, d’abord, qui vivent de manière plus ou moins heureuse des décalages entre le milieu où ils ont été socialisés enfants et celui de leur vie d’adulte et adoptent plus ou moins les comportements caractéristiques des groupes sociaux auxquels ils accèdent. Des effets sur la composition des groupes sociaux ensuite, dont 0