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Extrait : La théorie des jeux Le Sahara, enjeux géostratégiques et liens sociaux Mohamed Cherkaoui (2007) Une présentation commode mais formalisée de la course aux armements se trouve dans l’ouvrage de Anatol Rapoport (1960). A partir d’un modèle théorique simple de deux équations différentielles qui prennent en considération les taux de croissance des dépenses d’armement de deux pays, les griefs et les facteurs restrictifs que sont les charges excessives dues Swipe to page à la croissance des d propositions sur les org du système des relati s to nextggge URSS), la course aux

Il applique son modè poport déduit des ble et instable (Etats-Unis et ent mutuel etc. l’Europe à la veille de la première guerre mondiale, et en eprouve la pertinence, le teste empiriquement en comparant les prévisions que le modèle autorise aux données de Richardson. Dans cette note, nous rappelons très brièvement les propriétés fondamentales de la structure du jeu du dilemme du prisonnier et celle du jeu de la poule mouillée. Nous rappelons aussi quelques données historiques et politiques relatives aux relations entre le Maroc et l’Algérie qui nous inclinent à les subsumer ypothétiquement sous tel ou tel jeu.

L’expression « Prisoner’s dilemma que l’on traduit par « dilemme du

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prisonnier », est attribuée à A. W. Tucker qui a a imaginé Hexemple suivant pour rendre plus vivante la structure du jeu. Deux prisonniers sont soupçonnés d’avoir commis un crime. Le juge leur propose le marché suivant : 5 ans de prison s’ils confessent tous deux leur crime ; une peine plus basse ? chacun s’ils n’avouent pas ; l’acquittement à celui qui aurait avoué le crime si l’autre n’avoue pas et 10 ans pour celui qui n’avoue pas. Supposons que deux acteurs, et J, aient chacun le choix entre eux stratégies : A coopérer ou B ne pas coopérer.

La structure générale du dilemme du prisonnier peut être traduite par la matrice suivante. Les nombres sont bien entendu fictifs. Ils correspondent aux pertes et aux gains éventuels des deux joueurs. Le premier nombre de chaque paire représente le gain (nombre positif) ou la perte (nombre négatif) du premier joueur ; le deuxième nombre renvoie à ceux du deuxième joueur. La combinaison des deux stratégies donne quatre résultats possibles, AA, AB, BA et BB. L’ordre des préférences de l’individu est : BA) AA, AA BB et RB) AB.

Il est plus bénéfique pour lui de ne pas coopérer si J coopère (BA ‘AA) que de coopérer. Dans ce cas, I aura un gain égal à 10 et J une perte équivalente. Si ne coopère pas et J coopère, son gain (IO) sera supérieur au gain qu’il aura s’il coopérait (5). Mais il préfère coopérer si J coopère que la situation où les deux acteurs ne coopèrent pas (AA BB). En coopérant, I et J auront chacun un gain égal 5, alors que s’ils ne coopèrent pas, tous deux essuieront une pert et J auront chacun un gain égal 5, alors que s’ils ne coopèrent pas, tous deux essuieront une perte égale à 5.

Enfin, choisira de ne pas coopérer si J ne coopère pas plutôt que de coopérer seul (BB AB). I préfère une perte de 5 pour lui comme pour J plutôt que de perdre 10 et que J gagne autant. Liordre des préférences de J sont : AB AA, AA > BB et BB BA. Les deux acteurs ne sont d’accord que sur les deux situations intermédiaires qui placent AA et BB en position 2 et 3, mais ils sont en parfait désaccord sur la première et la quatrième. La stratégie dominante est donc la non coopération même si elle est plus coûteuse que la coopération pour les deux parties.

Ce jeu présente deux particularités : / la stratégie B est dominante pour les deux joueurs : pour chaque choix possible de l’un des acteurs, elle procure à l’autre un gain supérieur à celui que lui procure A. 2/ la résultante du choix de ces stratégies dominantes, (3E), est pourtant sous-optimale, puisqu’elle rapporte moins aux deux joueurs que l’issue (AA). Ces deux particularités sont à l’origine du « dilemme » : le fait que A et B aient chacun une stratégie dominante les conduit à opter pour elle, surtout que chacun sait que l’autre a une stratégie dominante, et qu’il sait que l’autre sait qu’il en a une, tc.

Mais le choix, d’une certaine façon inéluctable, de la stratégie dominante par les deux joueurs, aboutit à une issue sous- optimale (les « prisonniers » se dénoncent mutuellement alors qu’ils auraien aboutit à une issue sous-optimale (les « prisonniers » se dénoncent mutuellement alors qu’ils auraient tous deux intérêt à ne pas avouer le crime). Le « dilemme » tient ici au fait que le modèle n’a qu’un seul équilibre de Nash qui est sous-optimal.

Le tragique du jeu est que chacun des deux joueurs ne peut se permettre de coopérer dans la mesure où chacun risque es pertes considérables si Fun coopère alors que l’autre ne le fait pas. Toute coopération sera exploitée par l’adversaire. La coopération n’émerge pas nécessairement spontanément même si le jeu est répété et si chaque joueur estime que l’autre ne peut tolérer la non coopération dans l’avenir, en supposant qu’ils soient tous deux rationnels et capables de calculer l’effet que le choix de l’un aura sur le choix de l’autre.

Le jeu de la poule mouillée s’inspire du défi que deux jeunes se lancent pour s’éprouver mutuellement. Sur une route nationale, hacun se met au volant d’une voiture à une bonne grande distance avant d’aller à la rencontre de l’autre. Les deux voitures sont condamnées à un choc frontal si l’un des deux joueurs (ou les deux simultanément) ne dévie pas sa voiture pour éviter le choc. Celui qui la dévie sera qualifié de poule mouillée. La non coopération est fatale aux deux joueurs. La structure du jeu de la poule mouillée est représentée par la matrice suivante.

Les nombres représentant les gains et pertes ont été changés pour qu’apparaisse la netteté du jeu. On remarquera qu’il y a une différence de tail our qu’apparaisse la netteté du jeu. On remarquera qu’il y a une différence de taille entre les deux matrices. Comme dans le cas du dilemme du prisonnier, La combinaison des deux stratégies donne quatre résultats possibles, AA, AB, BA et BB. L’ordre des préférences de l’individu I est : BA ‘AA, AA) AB et AB BA. L’ordre des préférences de J sont : AB AA, AA BA et BA Bd.

Il est plus bénéfique pour de ne pas coopérer si J coopère que la situation au les deux acteurs coopèrent (BA > AA) : dans la première configuration, gagne 10 et J perd 10 ; dans a deuxième, il n’y a pas de perte mais guère de gain. préfère la sltuation où les deux joueurs coopèrent que celle où il coopère et où J ne coopère pas. Enfin, choisira de coopérer même si J ne coopère pas plutôt que la situation où les deux ne coopèrent pas (AB 83). La stratégie dominante est donc la coopération. Dans le jeu de la poule mouillée, il y a deux équilibres (AB) et (BA).

La théorie ne permet pas de prédire le comportement des joueurs. Tout dépend de la représentation que le joueur A a du joueur B et réciproquement. Si les deux joueurs estiment que ‘autre est une poule mouillée, ils choisiront la stratégie B avec pour conséquence le choc frontal. Tout incline à penser que depuis [‘indépendance de l’Algérie en 1962 et fintronisation du roi Hassan Il en 1962, le Maroc comme l’Algérie s’estimaient tous deux être dans une structure du jeu de la poule mouillée. Les deux pays défendaient ce qu’ils considéraient com une structure du jeu de la poule mouillée.

Les deux pays défendaient ce qu’ils considéraient comme leur intégrité territoriale. L’Algérie commence par concéder des avantages ?conomques et s’engage à aider le Maroc à récupérer le Sahara Occidental tout en amenant le Maroc à reconnaître progressivement le statu quo des frontières héritées de la colonisation française. Dès que l’Algérie devient capable d’imposer son point de vue au Maroc, elle durcit sa position et devient intransigeante. Mieux, elle conclut une alliance avec la gauche marocaine qu’elle aide directement ou indirectement dans la tentative de complot de 1963 contre le roi Hassan Il.

La guerre des sables de 1963 est une consequence du jeu du poulet où tout le monde a essuyé des pertes inutiles. C’est ainsi en tout cas que Ben Bella l’avait compris puisqu’il envoie un an après à Rabat un emissaire pour proposer au roi des compensations économiques aux prétentions territoriales formulées par le Maroc. Mieux, lors d’un entretien avec le roi du Maroc, le président algérien accepte d’examiner le contentieux frontalier en 1965 et offre une fois encore des compensations économiques.

La situation change avec le coup d’État en Algérie et la prise de pouvoir par le colonel Boumediene. On entre dans une structure de jeu du dilemme du prisonnier. L’Algérie s’arme massivement uprès de l’ex-lJnion soviétique, nationalise les mines qui étaient pourtant promises à une exploitation commune des deux pays puisque situées à la frontière non encore pourtant promises à une exploration commune des deux pays puisque situées à la frontière non encore délimitée, aide ouvertement l’opposition marocaine.

Les demandes formulées par le Maroc et la Tunisie auprès de l’ONU d’un contrôle onusien de l’armement au Maghreb sont restées lettre morte. On aboutit de part et d’autre à une course aux armements qui s’avère plus supportable par l’Algérie, en raison de ses avoirs pétroliers, ue par le Maroc, qui suit mais dont les dépenses militaires obèrent ses finances et retentissent directement sur ses projets économiques et sociaux.

Mais en 1969, le Maroc abandonne ses prétentions territoriales en faisant accepter à Boumediene son aide pour recouvrer le Sahara Occidental sous domination espagnole. A partir de cette date, l’Algérie considère que le Maroc est un État faible et incapable de la contrer militairement. Elle juge le pouvoir marocain d’autant plus incertain que les tentatives de putsch en juillet 1971 et août 1972 dirigées contre le roi du Maroc qui evaient réussir et amener au pouvoir des officiers supérieurs que PAIgérie soutenait selon certaines sources.

On revient donc à une structure de jeu de la poule mouillée dans lequel le Maroc est condamné à coopérer sans que la coopération de son adversaire sot acquise, tant s’en faut. En fait, l’Algérie joue systématiquement la stratégie de la non coopération, notamment en s’armant et en soutenant délibérément depuis son indépendance tous les opposants à la monarchie marocaine, qu’il s’agiss délibérément depuis son indépendance tous les opposants à la onarchie marocaine, qu’il s’agisse de factieux ou du Polisario.

Pendant donc une décennie, Hassan Il donnait au pouvoir algérien l’impression que le Maroc était animé de bonnes intentions et d’un esprit de réconciliation, en proposant de régler les problèmes frontaliers par la négociation et en acceptant des concessions territoriales de taille qui ne pouvaient que renforcer les croyances des militaires algériens.

Le pouvoir militaire algérien interprétait en effet le mouvement diplomatique du Roi du Maroc comme une preuve de faiblesse du régime marocain qui, appelons-le, était soumis à une constante contestation de la part des révolutionnaires de gauche qui ne croyaient absolument pas aux vertus de la démocratie et de certains officiers supérieurs qui passaient le plus clair de leur temps à préparer des coups d’État et éventuellement à les exécuter sans résultat positif pour eux.

Aux yeux de l’état-major algérien, en jouant systématiquement pendant un temps la stratégie de coopération et de la conciliation, le Maroc a donné l’impression qu’il se trouvait dans une structure de jeu de la poule mouillée et préfère être agressé our ne pas subir les effets de la catastrophe qui résulterait d’une guerre. Les relations entre le Maroc et l’Algérie illustrent parfaitement la combinaison de deux structures de jeu. A partir de 1975, les deux protagonistes se retrouvent dans une structure du dilemme du prisonnier.

Nous inclinons à penser protagonistes se retrouvent dans une structure du dilemme du prisonnier. Nous inclinons à penser que l’histoire des relations complexes entre l’Algérie et le Maroc, à peine esquissée à grands traits ici, est un bon contre exemple de l’une des propositions avancées ar certains théoriciens des jeux selon laquelle un jeu répété conduit à une coopération parce qu’elle est la seule solution rationnelle. C’est ce qu’affirme en tout cas Rapoport (1 965), Axelrod (1984).

En fait la proposition est peut être vraie, elle ne l’est certainement pas inconditionnellement. un jeu itératif ne conduit pas nécessairement à la coopération dans la mesure où les risques encourus par la non coopération de l’adversaire sont SI considérables que les décideurs polltiques des deux pays sont condamnés à le jouer indéfiniment. C’était du reste la situation es deux grandes superpuissances jusqu’à l’écroulement de l’empire soviétique.

Pour s’en sortir, il faut trouver un élément extérieur qui puisse briser les chaînes du cercle vicieux dans lequel se débattent les frères ennemis. On peut parier que si cette solution n’apparaît pas, la victoire appartiendra au joueur le plus endurant et le plus résolu. Mais là, nous entrons dans l’univers de la légitimité des sacrifices et de l’idéologie. En d’autres termes, nous sortons du domaine de la rationalité instrumentale pour entrer dans celui de la rationalité axiologique.